Céline Robinet

Bio, prise sur son site.

"Céline
Robinet est née en 1977 dans le Nord de la France. Le 12 mars 1994, à 17 ans, elle effectue sa première tentative de suicide. Elle ingurgite trois tubes entiers de somnifères et se réveille après une bonne nuit de sommeil, fraîche comme un gardon. Les comprimés étaient au thym. Homéopathiques. Elle en garde une grande affection pour les plantes.

Après des études de traduction en allemand/espagnol à l’Ecole d’Interprètes Internationaux de Mons (Belgique), et une année passée à Grenade (Espagne), elle s’installe en 2000 à Berlin où elle travaille en tant que rédactrice en chef d’une minuscule feuille d’informations mensuelle destinée aux traducteurs et interprètes. Pendant ce temps, elle écrit des histoires absurdes.
Quelque mois plus tard, elle commence le Slam. Et s’inscrit au chômage. En janvier 2005, son premier recueil de nouvelles, "Vous avez le droit d’être de mauvaise humeur, mais prévenez les autres!" est publié aux éditions Au Diable Vauvert. La même année, elle démissionne du chômage et s’installe à son compte.
En 2007, elle récidive avec un deuxième recueil de nouvelles, "Faut-il croire les mimes sur parole?", toujours Au Diable Vauvert. Elle paraît également dans "Blah! Blah! Blah! Anthologie du Slam", coéditée par Florent Massot et Spoke Éditions. Cette anthologie regroupe les textes des 35 principaux slameurs français comme Grand Corps Malade, Souleymane Diamanka, D’ de Kabal, Félix J, Nada, Rouda, Lyor, et KaCoSónia (alias Céline Robinet)."

Pour L'instant, deux recueils de nouvelles :

- vous avez le droit d'être de mauvaise humeur mais prévenez les autres, 2005
- Faut-il croire les mimes sur parole ?, 2007

Son site internet (trop bien)

Chtite video où elle parle du livre d'Alex et des siens (à la fin)

vous avez le droit d'être de mauvaise humeur mais prévenez les autres

Edition : Au Diable Vauvert
Année : 2005

Attention, âmes sensibles s'abstenir : dans ses nouvelles Céline robinet décortique le corps, les mots, les âmes. Elle hésite pas à sortir les tripes, à arracher quelques membres à ses personnages, à leur faire avaler des tonnes de trucs, à les métamorphoser, à les ancrer dans une vie où ils s'emprisonnent, et ils en meurent.
Complètement obsessionnelles, ces nouvelles sont un tourbillon de personnages paumés tentant vainement de tout contrôler autour d'eux.

Les idées sont fracassantes, originales, très contemporaines, et avec une belle pointe d'humour. Des histoires bien critiques, acerbes, cyniques sur notre si merveilleux monde.
ça va de la femme qui ne supporte plus aucune intrusion chez elle, plus aucun bruit et qui décide d'enfermer le vacarme dans des cartons. D'un peintre qui avale ses couleurs pour les vomir sur sa toile. Une femme qui se rencontre "un beau matin" qu'elle est laide et décide de se débarasser de ses difformités (elle s'enlève un oeil à la petite cuillère, s'enlève des boues de joues trop rondes au cutter, se fait gonfler la cervelle à coup de pompe à vélo...). D'une carnivore pur et dur qui finit par dévorer son conjoint végétarien parce qu'il lui a planqué sa viande...

Ce n'est pas tendre, et il faut avoir le ventre bien accroché. Mais, incroyable, c'est extrèmement drôle et divertissant.

Et en plus, c'est bien écrit.
D'abord c'est un style proche de l'oralité, du corps (Céline Robinet sait faire vivre la chair dans ce livre), donc de temps en temps l'écriture râpe et dérape en même temps que les personnages. sans aller trop loin dans la recherche stylistique, ayant même quelques procédés qui reviennent, ça colle parfaitement à l'histoire et transporte la langue.

Un petit régal... avarié parfois, mais gouteux.

vous avez le droit d'être de mauvaise humeur mais prévenez les autres

Citation :

Jean-Yves était tombé amoureux d'un homme qui lui avait tourné la tête pour la dévisser et la clouer comme un trophée sur son tableau de chasse. Denis certifiait qu'il ne l'avait jamais vraiment perdue – il avait
toujours eu la tête ailleurs. Il voulait juste savoir où. Vincent disait avoir perdu la boule parce que sa femme l'avait pris pour un cornet de glace (elle devait l'avoir trop sucé, mais il ne l'a pas dit). Odile, joueuse professionnelle de water-polo, avait eu la tête brûlée en sautant du plongeoir alors que le bassin était vide. Quelques jours plus tard, elle avait piqué une tête dans la piscine, mais on l'avait prise en flagrant délit. Elle venait de sortir de prison. Les deux derniers, Isabelle et Martial, avaient perdu la face pendant une partie de jambes en l'air ; lui, une tête de con, elle, une tête à queue, ça devait finir. Mal.

Et puis les autres : ceux qui s'étaient cassé la tête en essayant de résoudre des problèmes familiaux ou professionnels. Ceux qui avaient tout plaqué sur un coup de tête – un coup franc. Ceux qui étaient tombés dessus et l'avaient mise en miettes. Ceux qui s'étaient mis marteau en tête et l'avaient réduite en bouillie. Certains avaient juste perdu la leur en vieillissant. D'autres avaient donné la leur à couper, et s'étaient trompés. Les derniers enfin, surtout des mères, sur la tête desquelles on avait juré.

Tous se traînaient là, hagards. On aurait dit des hallucinés, et ne les voyant, on était bien content d'avoir toute sa tête sur les épaules

Citation :

Ensuite mon copain a commencé à me dire qu'il se faisait du souci, que je lui manquais, qu'il aimerait bien me voir. Bla bla bla. Moi, je n'étais pas dupe. C'était clair qu'il était de mèche avec le bruit – une personne normale n'appelle pas dix fois par jour sans avoir quelque chose derrière la tête ! Ou alors il avait envie de sexe (il ne le disait pas aussi directement mais vous connaissez les hommes). J'ai arrêté de décrocher. Ça a été pire. Chaque fois qu'il appelait, il laissait sonner plus de cinquante fois, comme s'il ne comprenait pas que je n'étais pas là.
Ça confirme bien la thèse de la conspiration.
J'ai détruit cette saleté d'appareil. vermine. des yeux comme des mouches. un gros ver sur la tête et sur le ventre un crabe. Une nuit qu'il sonnait, j'ai arraché la prise. Et mon « copain » a arrêté d'appeler.

Citation :

Car je suis peintre. Et tous les jours, ou presque, je peins. Je peins comme d'autres repeignent les toilettes. Je dépose sur le sol une toile préalablement enduite de colle, j'appuie les mains des deux côtés du cadre et, la tête en bas, je vomis.
J'appelle ça « Art bouffi ». ça a l'air simple, mais ce n'est pas humain. Le soir, j'ai une de ces haleines de phoque ! Et puis je sue comme un porc. Et j'ai une faim de loup. Mais je suis prête à tout. Même à accepter la trachée qui brûle et l'estomac qui s'aigrit.
Le plus important en peinture, c'est d'avoir bon rendu. Ce qu'il y a de bien avec cette méthode, c'est que mes tableaux ont du goût (et entre nous, plus que mes clients). Et puis les restes de vomi dans le fond de la gorge et entre la joue et la gencive, je les crache pour compléter le tableau. vise. atteins un endroit stratégique.

Itv, + Slam de Céline Robinet au salon du livre 2008

Un peu déçue par Faut-il croire les mimes sur parole ?

Moins impertinent, cynique, drôle, percutant, déstabilisant, à chercher à faire de vrais choses avec les mots.

Des histoires qui s'enfilent bien, mais qui restent moins, qui marquent pas autant avec des supers images.

Mais y'a de très bonnes choses dedans tout de même.