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| "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] | |
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bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Dim 8 Mai 2011 - 17:02 | |
| LES VOIES CELESTES : Ivan CHMELIOV
Darinka est la jeune héroine de ce roman. Elle est très jeune et très belle. Elle vit maritalement à Moscou avec Victor Alexexievitch Weidenhammer, qui l' a sortie du couvent où elle vivait. Darinka est tiraillée par des désirs contraires qui s' excluent l' un l' autre. Celui de la sainteté et la passion amoureuse... En fait, c' est plus compliqué. Darinka a une nature complexe que ne comprennnent pas vraiment les hommes qui sont attirés par elle et par sa beauté. Ou qui l' admettent sans vraiment le comprendre. Et la respectent par admiration pure...
Le roman se passe dans un momentt de crise où tout va se jouer. Victor Alexeievitch a quitté Moscou pour St Petersbourg où il est appelé en tant qu' ingénieur. Et c' est alors qu' un ami du couple tente de séduire Darinka dont il est éperdument amoureux. Dima Vagaev est hussard, il est beau et ses conquetes féminines sont innombrables.
Pendant quelques jours, Dima va entrainer Darinka dans un tourbillon d' évenements. Imaginez l' hiver moscovite. Une tempete de neige et de vent. Dima emmène Darinka au théatre, dans un bal masqué, dans une taverne où des tziganes jouent et dansent. Ils cotoient des personnages douteux, voire crapeuleux... Darinka se sent passivement entrainée, liée à Dima par quelque chose d' enfantin, de fragile. Il y a quelque chose en elle de la Catherine de Wuthering Eights. Comme elle, elle souffre beaucoup, elle prie et perd conscience, mais se ressaisit finalement.
Je me rends compte à me raconter à quel point ce livre est romantique. Et russe et excessif et dramatique. Peut etre serait-il illisible et ridicule sans le style de l' auteur. Un style lyrique, chatoyant qui saisit toutes les nuances psychologiques des personnages et peint magnifiquement la nature. Un style qui m' a fait penser à Ophuls le grand cinéaste des amours impossibles. | |
| | | Sophie Sage de la littérature
Messages : 2230 Inscription le : 17/07/2007 Age : 48 Localisation : Tahiti
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Lun 9 Mai 2011 - 15:51 | |
| LA VIE DES SAINTS DE LA CITE-LIDIA AMEJKO
Bienvenue à la Cité! Non pas la Cité qui craint mais celle où les habitants sont des Saints. Ce sont certes de drôles de Saints mais quand même: alcooliques, solitaires, grandes gueules, rêveurs...mais tous désirent le bien de leur quartier, de leur Cité et de ses habitants, parfois maladroitement mais toujours sincèrement. Le livre est découpé et de nombreux courts chapitres, chacun évoquant un des personnages, donc un des Saints.On rencontre par exemple Saint Dormidor chiffreur de rêves,Saint Haïdegger bienfaiteur des mots sans toit... Cela vous donne une idée des énergumènes. Lidia Amejko, femme de théâtre, est bourrée d'imagination et de poésie. Elle met de la fantaisie dans ses propos, mais ne se gêne pas non plus pour interroger le lecteur sur des questions philosophiques comme la religion, la vie, la mort, l'amour, leurs contradictions et leurs absurdités. Ce fut pour moi un moment de lecture jubilatoire; j'ai même très envie de relire ce petit recueil de saints! | |
| | | traversay Flâneur mélancolique
Messages : 10160 Inscription le : 03/06/2009 Age : 66 Localisation : Sous l'aile d'un ange
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Mar 17 Mai 2011 - 22:18 | |
| Je pars à l'entracte de Nicolas d'Estienne d'OrvesLa collection Les Affranchis demande à ses auteurs d'écrire une lettre, de celles qu'ils n'ont jamais écrite. Sur un peu moins de 100 pages, Nicolas d'Estienne d'Orves a rédigé une lettre à son meilleur ami, suicidé quelques années plus tôt. Un texte, très vivant, si l'on peut l'exprimer ainsi, et sans concession, incisif, qui donne envie de lire autre chose de cet auteur pour moi inconnu. C'est troublant, impudique, et très réussi, je trouve. | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Lun 18 Juil 2011 - 21:51 | |
| Caviardages de Timothée Rey
Un court recueil de 7 nouvelles fantastiques. Un quotidien apparemment banal, qu'un détail fait déraper vers la peur, et l'effroi. Enfin en principe. Je ne dis pas que les idées en elles-mêmes soient mauvaises, mais plutôt que l'exploitation qu'en fait l'auteur est bancale, et ne permet pas vraiment de tirer tout le parti possible des situations. Et l'écriture est un peu laborieuse, elle m'a pratiquement donnée le sentiment que j'aurais pu écrire ces histoires moi-même, comme un devoir scolaire imposé.
C'est sans doute un peu sévère, mais je me suis ennuyée dans ces petites histoires, le problème de ce genre de textes c'est que cela repose sur une idée, donc il faut qu'elle soit originale et que l'auteur en tire le meilleur parti, et son écriture provoque le frisson et l'inquiétude, dans une machinerie implacable. Là j'ai plutôt eu la sensation d'être en face de la production de quelqu'un qui faisait ses armes et qui ne maîtrisait pas complètement ses récits. Peut être que cela viendra avec le temps... | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Dim 21 Aoû 2011 - 21:01 | |
| CHRONIQUES I : Bob Dylan
Bob Dylan est un immense chanteur, compositeur, interprète. Une personnalité hors du commun. Ce Dylan tout le monde le connait depuis longtemps. Mais en 2 004 est paru un livre de Chroniques signé Bob Dylan et on s' est apperçu que Dylan était aussi un écrivain. Dylan nous parle de lui, bien entendu, mais pas d' une manière linéaire et chronologique comme on pourrait l' attendre d' un livre autobiographique. En tout cas, tout ce qu' écrit est concret, précis. Parfois inattendu. Souvent elliptique. Il est sur qu' il ne cherche pas entretenir le mythe qui s' est construit autour de sa personne. Bien au contraire, il raconte comment la gloire lui est tombée dessus et comment elle s' est révélée etre une catastrophe intime pour lui et les siens. Et puis dire qu' il aimait la tranquilité et sa vie de famille à ceux qui voulaient à tout prix en faire un gouru, une sorte de messie charimatique, le porte parole de sa génération, était voué à l' échec.. Certes, il a du batailler pour se faire une place dans l' univers musical des années 60, mais son talent l' avait placé assez vite au dessus des autres. Il a ainsi déçu toute une génération de jeunes hommes en colère. Aux Etats Unis et ailleurs. Il faut dire aussi que ses gouts musicaux l' ont porté à admirer des personnages immenses comme le chanteur Woody Guthrie qui l' inspira à ses débuts tout autant que le bluesman Robert Johnson et Joan Baez. Qui eux, portaient en eux, d' une façon ou d' une autre, la révolte sociale. Quand il parle d' eux, Dylan le fait avec une force et un entousiasme étonnants. Dans la vie qu' il décrit et dont ce livre de chronique n' est que le premeir volume, on est sidéré par le nombre de gens qu' il a fréquentés, cotoyés. Par la curiosité qui le poussait à glaner tout ce qu' il pouvait,au jour le jour. Il il est arrivé à tailler sa route, en écartant ce qui ne lui convenait pas et en s' enrichissant de tout ce qui passait à sa portée.
Je n' ai fait que chanter des chansons nettes et sans détour, exprimant avec force des réalités nouvelles.
Cette génération, je partageais fort peu de choses avec elle et je la connaissais encore moins. Depuis 10 ans que j' étais parti de chez moi, je ne vociférais les opinions de personne... La vraie question était d' etre fidèle à moi-meme. J' étais plus un conducteur de troupeaux qu' un petit joueur de flute. On croit que la célébrité et la richesse donnent le pouvoir, qu' elles apportent la gloire, l' honneur et le bonheur. Peut etre, mais pas toujours. Je me suis retrouvé coincé avec une famille à protéger. Si vous lisiez la presse, c' est un tout autre portrait qu' on faisait de moi. Il semble que le monde a toujours eu besoin de boucs émissaires -de quelqu' un pour mener la charge contre l' Empire romain. Seulement, l' Amérique n' était pas l' Empire romain, et il faudrait trouver quelqu' un d'a utre pour siortir du rang et se porter volontaire. Je n' ai jamaiis été plus que ça : un musicien de folk qui scrutait la buée derrière un écran de larmes, dont les chansons flottaient dans une brume lumineuse. Voilà qu' elle me crevait à la figure, qu' elle était suspendue au-dessus de de ma tete. Je n' étais pas un precheur, je ne faisais pas de miracles. A ma place, nimporte qui serait devenu fou.
Chroniques I, PP, 127-128
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| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Lun 22 Aoû 2011 - 10:41 | |
| Toutes ces vies qu'on abandonne de Virginie OLLAGNIER
Claire, novice de 18 ans, travaille comme infirmière auprès des aliénés. L'histoire se passe en décembre 1918, au moment de la démobilisation, quand les gueules cassées rentrent à la maison, quand certains reviennent entiers mais morts à l'intérieur. D'ailleurs un soldat arrive, position du foetus, membres tétanisés, il a à peine le réflexe de déglutition pour être nourri, il est inatteignable. Claire va s'occuper de lui, en utilisant une nouvelle méthode : elle le masse et lui parle. De temps en temps, le lecteur plonge dans la tête du soldat et découvre des pans de sa vie. Claire arrivera-t-elle à faire revenir chez les vivants ce soldat presque mort ?
Le résumé donne envie, d'autant plus qu'il s'agit d'un récit sur les débuts de la psychanalyse... Le livre est rigoureusement bien écrit, les personnages sont touchants et vrais, pleins de bons sentiments, d'espoirs et de volonté mais à force de trop bons sentiments, on s'ennuie passablement dans ce livre trop lisse, un brin gnangnan, un chouia cucul. Une lecture qui manque de nerfs, d'hystérie et de vêtements arrachés, même si certaines scènes sont extrêmement touchantes, même si Ollagnier a voulu épicer son propos à l'aide d'un humour piquant, je pense que ce livre ne laissera aucunes traces. | |
| | | topocl Abeille bibliophile
Messages : 11706 Inscription le : 12/02/2011
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Sam 27 Aoû 2011 - 10:54 | |
| Un enfant d'Ukraine de Albrecht GOES L'encyclopédie Larousse parle en ces termes de Albrecht GOES: Écrivain allemand (Langenbeutingen, Wurtemberg, 1908 – Stuttgart 2000). Restant à l'écart des écoles littéraires, ce pasteur protestant, ancien aumônier militaire pendant la Seconde Guerre mondiale, n'en avait pas moins une audience remarquable. Dans ses poésies ( le Berger, 1934), ses pièces, ses essais (le Poète et son poème, 1966) et surtout ses récits, il s'engage pour les valeurs du christianisme et de l'humanisme, plus nécessaires que jamais dans un temps de violence et de persécution. Les souvenirs de la guerre et la tragédie des Juifs en Allemagne sont au centre d'œuvres comme Jusqu'à l'aube (1950) ou la Flamme du sacrifice (1954). Un enfant d'Ukraine est publié aux éditions Autrement dans la collection Littératures. Il s'agit de deux courts récits : La cuiller d'argent, et La flamme du sacrifice, parus dans les années 50. Les deux récits montrent des Allemands communs, confrontés à la connaissance de la solution finale et à leur incapacité à lutter contre elle, mais aussi la nécessité d’y repenser des années plus tard. Un groupe de médecins militaires ainsi qu'un aumônier dans un hôpital militaire en Ukraine, une femme bouchère qui reçoit l'ordre de vendre sa viande aux Juifs les vendredis de quinze à dix sept heures. Leur rébellion impuissante, mais qui a le mérite d'exister | |
| | | domreader Zen littéraire
Messages : 3409 Inscription le : 19/06/2007 Localisation : Ile de France
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Mar 30 Aoû 2011 - 17:38 | |
| Et les Hommes sont venus Little Bee Chris Cleave
Voici un livre que j’ai lu cet été, un peu par hasard d’ailleurs, sans vraiment l’avoir cherché. En voici le sujet en deux mots : Le chemin de deux femmes se croise au Nigéria, l’espace d’une journée ultra-violente. Ensuite, leur vie est transformée à jamais. Deux ans plus tard, elles se retrouveront à Londres, Petite Abeille est parvenue à fuir le Nigeria et à retrouver Sarah à Londres. Une nouvelle aventure commence alors, celle de l’immigration et du deuil. Un joli livre, qui se lit avec un certain plaisir mais qui n’est pas vraiment convaincant, peut-être parce que l’un des personnages principaux, Sarah, ne l’est pas vraiment non plus. Sa personnalité est finalement peu crédible et elle est agaçante de stupidité. Par contre l’univers de Little Bee est intéressant, en particulier son récit du passage en centre de rétention plein d’humour et d’humanité. Un roman très inégal donc, dommage on sent que Chris Cleave tenait un vrai bon sujet, mais il ne parvient pas à tenir le récit sur la longueur et à donner crédibilité et épaisseur à tous ses personnages.
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| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Lun 12 Sep 2011 - 20:45 | |
| L'arcane des épées / Tad Williams
Huit tomes dans la traduction française, des milliers de pages, mais aucune envie d'ouvrir un fil d'auteur pour ça. Un enième sauveur du monde adolescent, celui-ci est marmiton au départ, mais évidemment en fin de compte, son lignage va se révéler bien plus glorieux. Entre temps il aura y le temps d'affronter un dragon, quelques monstres, quelques batailles, et le roi de l'orage. Bref, rien de révolutionnaire. L'action est censée être trépidante, mais en fait c'est très répétitif, les personnages se retrouvent prisonniers, et finissent par s'échapper. Quand au dénouement, il est tellement prévisible que s'en est à pleurer.
J'avais d'autres préoccupation en tête que la lecture cet été, et je me suis donc fait ces 8 tomes comme une mauvaise habitude, qui permet de ne pas être trop à ce que l'on fait. A couper l'envie de fantasy pendant quelques mois. | |
| | | odrey Sage de la littérature
Messages : 1958 Inscription le : 27/01/2009 Age : 46
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Mar 13 Sep 2011 - 21:31 | |
| T'as lu les 8 tomes? t'es courageuse dis-donc. Ça a pas l'air terrible. | |
| | | Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Mar 13 Sep 2011 - 21:42 | |
| J'ai lu les 8. Du masochisme sans doute. Le début était meilleur que la fin. Et ce n'était pas une lecture vraiment absorbante, ce qui me convenait probablement à ce moment là. | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Jeu 20 Oct 2011 - 6:21 | |
| Le jour où ma fille est devenue folle (2010) de Michael Greenberg Dans ce livre présenté sous la forme d’un témoignage, Michael Greenberg raconte au lecteur l’été durant lequel sa fille Sally, alors âgée de 15 ans, a connu sa première crise maniaco-dépressive. Devant un mal qui reste encore mystérieux, malgré les tentatives de médiatisation de plus en plus nombreuses ces dernières années, Michael Greenberg refuse tout d’abord d’accepter la maladie mentale de sa fille, préférant croire qu’elle a absorbé des drogues et que son état incontrôlable disparaîtra une fois que les substances auront cessé de faire leur effet. Mais au fil des jours, il faut bien se faire une raison : Sally est malade, et pire encore, elle souffre d’une maladie que même les meilleurs médecins n’arrivent pas précisément à définir, et pour laquelle aucun traitement radical n’existe vraiment. Commence alors pour Michael Greenberg un cheminement qui se fera parallèlement au traitement de Sally. Ses mots dénotent l’évolution de son état d’esprit. Bien que la maladie puisse faire des ravages dans la vie d’une jeune fille, Greenberg arrive peu à peu à prendre du recul et à dédiaboliser ce que l’on appelle encore parfois la schizophrénie. Remontant dans l’enfance de Sally, il essaie de trouver les raisons qui l’ont conduite à développer ce trouble mental, se demandant même parfois s’il est possible de lui donner une explication rationnelle, et s’il n’est pas meilleur, parfois, d’admettre son ignorance. « Je me pose inlassablement la question évidente, la question inutile. Comment tout cela est-il arrivé ? Et pourquoi ? On a le cancer ou le sida, mais on est schizophrène, on est maniaco-dépressif, comme si c’étaient des attributs intimes de l’être, des éléments constitutifs de l’humain, pas plus susceptibles d’être guéris qu’un tempérament ou une couleur d’yeux. Comment une caractéristique aussi inhérente à une personne pourrait-elle être une maladie susceptible d’être traitée ? Et comment vaincre une maladie pareille sans se vaincre soi-même ? »Les relations de Michael Greenberg avec les autres membres de sa famille évoluent également. Il considère son frère, qui souffre lui aussi de troubles maniaco-dépressifs, sous un autre angle, et il se rapproche de leur mère lorsque celle-ci se confie à lui pour lui expliquer les propres raisons qu’elle s’est données pour expliquer le mal de son fils. Pourquoi, au sein d’une même fratrie, certains enfants réagissent-ils mieux que d’autres à une éducation a priori semblable ? Quelles sont les conditions, innées ou acquises, au développement de troubles mentaux ? Michael Greenberg cherche à comprendre à tout prix, allant même jusqu’à absorber les médicaments que les médecins donnent à sa fille pour ressentir les mêmes sensations qu’elle, et pour comprendre pourquoi sa « guérison » l’oblige forcément à développer une maladresse et une lenteur qu’elle n’avait pas avant. « Incapable d’attendre plus longtemps que Sally échappe à cette boule de feu impitoyable, j’essaie de voir le monde comme elle le perçoit et j’avale une dose complète de ses médicaments. Il est dix heures du matin environ et je suis assis en compagnie de Sally dans la salle de séjour quand l’effet commence à se faire sentir –par vagues. J’ai le vertige et je me sens très loin, comme si j’allais tomber de très haut, mais que mes pieds étaient cloués au bord du précipice, de telle sorte que la chute est indéfiniment différée. L’atmosphère semble humide et épaisse, jusqu’au moment où je suis enfoncé jusqu’au cou dans un marécage que je ne peux traverser qu’au prix des plus grands efforts et en n’avançant que de quelques centimètres à la fois. Je prends le New York Times que j’ai acheté un peu plus tôt dans la matinée : Des scientifiques qui étudiaient une météorite tombée de la planète Mars ont identifié des composants organiques et certains minéraux dont ils ont pu conclure qu’ils étaient la preuve d’une vie primitive présente dans les premiers temps de la planète. Je lis la phrase plusieurs fois de suite, tellement dérouté par ce que peuvent bien avoir à faire ensemble les mots « primitive », « météorite » et « Mars » que je recommence au début, bien décidé à y trouver du sens. Peine perdue, je me débats dans ma propre tête, incapable de créer le moindre mouvement de pensée ou de sens. […] Ca dure pendant ce qui paraît être une heure, mais lorsque je regarde la pendule –et il me faut encore trente secondes pour pouvoir la lire- je m’aperçois que deux minutes seulement se sont écoulées. »Evidement, on suit également l’évolution de la maladie de Sally. Elle passera quelques semaines en hôpital psychiatrique, et Michael assistera en témoin à la vie de ces lieux, partagé entre l’admiration qu’il voue à un personnel disponible mais ferme, et le scepticisme qu’il ne peut s’empêcher de développer devant des méthodes de prise en charge qui sont loin d’avoir démontré leur efficacité. Le retour à la maison de Sally est également une étape cruciale. Comment se comporter à présent ? Faut-il se montrer dur, ou faire preuve de tolérance et de plus de laxisme qu’auparavant ? Et d’ailleurs, ne faut-il pas changer radicalement les anciennes habitudes de vie, de peur que les anciennes ne déclenchent une nouvelle crise ? « Vous vous souvenez de la fille dont les parents disaient : « Quand tu reviendras à la maison, tu pourras faire ceci et cela », et ils avaient énuméré toute une sérié d’activités qu’ils avaient prévues pour elle, et elle avait répondu : « Ouais, tous les trucs qui m’ont conduite ici, hein ? » C’était exemplaire. »
Heureusement, Sally, malgré ses 15 ans, fait preuve d’une maturité et d’une précocité remarquables. Tout à fait lucide devant les troubles dont elle souffre, elle s’aide d’une médecin et d’une famille compréhensives pour mieux cerner ses difficultés et pour leur faire face à chaque fois que cela se montre nécessaire. A travers ses yeux, la maladie apparaît sous un nouvel angle : « « C’était une tache sur mon œil et elle est restée là une fraction de seconde, cette petite part de moi-même que je n’avais pas encore brûlée, qui me regardait en train de devenir folle. Je te vois. Je sais ce que tu fais. Je sais qui tu es. Et puis elle a disparu. » Elle claque les doigts. « Elle n’a pas faibli, elle s’est éclipsée, comme la mèche d’une de ces lampes à kérosène que nous avions pour aller camper. C’était comme si je m’étais arrêtée pour jeter un dernier regard sur moi, comme si je me disais adieu. »Cette histoire se déroule sur seulement deux mois, mais elle est dense et créé une fissure nette entre deux modes de vie différents. Il y a désormais un avant et un après la crise de Sally. Michael Greenberg ne s’apitoie jamais sur son propre sort ni sur celui de sa fille, et se contente de livrer à ses lecteurs un témoignage qui lui tient à cœur mais qu’il cherche également à étendre d’une manière plus générale en livrant ses réflexions personnelles sur les causes des maladies mentales, sur leur mode de traitement, leur prise en charge, et les répercussions qu’elles ont sur la famille du malade. Ce livre, révélé par Joyce Carol Oates dans The Times Literary Supplement à la fin de l’année 2008, a été rapproché des textes d’Emily Dickinson ou de Sylvia Plath. On trouvera également des références aux histoires de James Joyce et de sa fille, ou de Robert Lowell. De grands noms donc, qui s’inscrivent dans la continuité d’une histoire à la fois universelle et personnelle de la maladie mentale. Ci-dessous, une interview réalisée par Michel Wagner : - Citation :
- Comment décririez-vous cette « folie » qui s'est emparée de votre fille ? - Elle reste aussi mystérieuse que la conscience elle-même. En dépit des progrès des neurosciences, nous ne savons pas grand-chose. Même les psychiatres que j'ai consultés le reconnaissent. La crise maniaco-dépressive est, en apparence, séduisante. Sally, quand elle y entrait, se sentait forte, charismatique, puissante. Mais c'est une illusion. C'est une maladie diabolique très destructrice.
- Comment votre fille a-t-elle accueilli ce livre ? - Je lui ai donné à lire avant sa publication. J'avais besoin de sa permission. J'étais prêt à renoncer si elle n'avait pas voulu mais elle a tenu à apparaître sous son nom. Elle a pu mieux comprendre ce qui lui est arrivé, et ce qu'elle ignorait, et combien ses proches ont été affectés...
-... au point, comme vous, de culpabiliser... - Les familles des malades mentaux sont immodestes, m'a confié un jour un grand professeur. Elles considèrent que c'est de leur faute. C'est faux. La folie c'est comme une avalanche. Il n'y a pas de raison de se sentir coupable d'une avalanche.
- A-t-il été douloureux de mettre sur le papier le désarroi de votre fille, et votre impuissance ? - Écrire est toujours douloureux. Mais je voulais témoigner de cette expérience, en faire un récit juste et nécessaire. C'est une forme de thérapie. L'écriture m'a permis d'extraire cette histoire du chaos de la vie. J'ai été chroniqueur pendant sept ans au « Times » de Londres. J'y racontais la vie à New York. Le rédacteur en chef avait posé deux conditions : que ce soit à la première personne et qu'on sente l'urgence. Chaque chronique devait me coûter une goutte de sang. Ce livre bien plus.
- New York a-t-elle sa part dans ce qui est survenu ? - Si vous voulez dire que New York est une ville maniaco-dépressive, oui. Et même brutale. Mais ce fléau peut se produire n'importe où. Je peux dire maintenant qui est maniaco-dépressif rien qu'en observant sa façon d'être, de se tenir.
- Hospitalisée dans un service psychiatrique, mise sous traitement psychotique, votre fille s'est mariée, puis séparée de son époux. Comment surmonte-t-elle son passé ? - Elle a très peur d'avoir une nouvelle attaque. Si je lui téléphone tous les jours, c'est qu'elle en a besoin. Et j'aime nos petites conversations. Elle est très vigilante. Elle a toujours peur d'aller trop loin. Elle essaie, m'a-t-elle dit, de percevoir le moment où ça va se produire de manière à l'éviter complètement ou du moins à se jeter par terre « comme on le ferait si on était pris dans une fusillade ». Et l’article de Books qui m’a donné envie de lire ce témoignage. Aloïse Corbaz Première page du livre : « Le 5 juillet 1996, ma fille est devenue folle. Elle avait quinze ans et sa fêlure a constitué un tournant dans nos vies à tous les deux. « J’ai l’impression de voyager, de voyager sans pouvoir revenir », a-t-elle dit dans un accès de lucidité, tout en titubant dans une direction que je n’aurais pu imaginer ni même rêver. »
Partagé entre la terreur et la grâce, Michael Greenberg nous livre des extraits de conversation avec sa fille : « « Les gens sont furieux quand ils se sentent pris au piège. Tu te sens pris au piège, Père ? » Sa voix me transperce comme une flèche. Sally a le visage rouge, elle est superbe, profondément désincarnée. « Je suis fière de toi, Père. Il y a tant de raisons de pleurer. Tant et tant. » C’est seulement lorsque je sens le picotement humide sur les écorchures de ma joue que je comprends à quoi elle fait allusion : elle pense que je verse des larmes de joie en entendant ses épiphanies ; que j’ai adopté sa vision ; que moi aussi j’ai été sauvé, grâce à elle. »
« L’art est trop chaud pour toi, Père. Tu devrais laisser tomber. C’est un faux dieu qui ne cause que de la douleur. »
« Helen [la mère de Michael] rattrape Sally au moment où celle-ci entre dans la salle commune. « Dis à ton père que tu ne souffres pas. - La vérité se présente sous le déguisement de la souffrance. Mon père a été détruit par la peur. - Ton père s’inquiète pour toi, ma chérie. C’est tout à fait naturel. - Hum… Tu essaies de le protéger. Comme on pouvait s’y attendre. C’est ton précieux fils, n’est-ce pas, Nanny ? Ou bien tu essaies de me rouler et tu as peur toi aussi ? » Helen a l’air de quelqu’un qui vient d’être giflé. Elle prend ma main et plante ses ongles dans ma peau. »
Et si nous ne devions retenir qu’une interrogation, à l’issue de la lecture de ce témoignage, ce serait peut-être cette question, posée par le proche d’un malade interné dans le même établissement psychiatrique que Sally à Michael : « Ne vous est-il pas venu à l’esprit que Noah était seul sur une mer de béatitude pendant que nous autres étions tout simplement des îles de misère ? »
Franz Pohl | |
| | | Noémie Sage de la littérature
Messages : 1290 Inscription le : 24/11/2010 Localisation : Au pied des Pyrénées...
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Ven 11 Nov 2011 - 9:52 | |
| - Citation :
Moïra, vingt-huit ans, est au chevet de sa jeune sœur, Amy, qu'une terrible et inexplicable chute a plongée dans le coma depuis cinq ans. Habitée par le remords, Moïra parle à sa cadette. Elle s'excuse de n'avoir pas été la sœur rêvée. D'une extrême sensibilité, c'est une écorchée vive qui ne peut, n'a jamais pu et ignore comment s'abandonner à l'amour des autres, de ses parents, de sa sœur, et plus tard de son époux... Au travers de cette confession, Moïra cherche à la fois à se faire pardonner, et à assumer enfin son statut de femme, en paix avec elle-même. Avec de saisissantes descriptions de la nature et de la mer, qui rehaussent ses talents d'artiste, Susan Fletcher nous conte une histoire émouvante d'amour, de peine et de rédemption. Présentation de l'éditeur. Un très beau livre à mes yeux - mais je l'ai prêté, très enthousiaste et la personne ne l'a pas aimé autant,alors... - une réflexion sur des choix d'une vie, sur la vie elle-même, et sur les rapports humains.... les personnages sont très forts, on ne les oublie pas, on vibre avec eux, on essaye de répondre à leurs interrogations....c'est surtout Moïra qui parle, d'ailleurs.... Et il y a de merveilleuses descriptions de paysages, de nature, d'oiseaux, c'est un autre bonheur du livre. Un vrai beau livre, un de ceux qu'on regarde en regrettant de les avoir déjà lu, une belle découverte ! | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Sam 12 Nov 2011 - 9:20 | |
| Pobby et Dingan (2001) de Ben Rice L’histoire tient du conte merveilleux : Pobby et Dingan, les amis imaginaires de Kellyane -ses seuls amis d’ailleurs-, amateurs de friandises pacifiques, agréables hôtes de tables, disparaissent malencontreusement suite à une expédition. Personne ne s’en rend compte, exceptée Kellyane que cette absence fait dégringoler dans l’abattement le plus total. Pobby et Dingan étaient peut-être fictifs, mais les conséquences de leur disparition sur Kellyane sont bien réelles et bientôt, celle-ci cesse de se nourrir et se glisse au fond de son lit en attendant soit la mort, soit un miracle. Mais les miracles sont rares à Lightning Road, et il y a peu à parier que Kellyane retrouve ses bons vieux potes en restant barricadée dans sa chambre. Ahsmol, son frère, est bien obligé de dépasser ses préjugés et d’admettre l’existence des amis imaginaires de sa sœur s’il tient à lui éviter une mort prochaine. En parallèle à ce récit merveilleux qui tourne autour de deux personnages que l’on ne connaîtra que par les descriptions de Kellyane, Ben Rice nous livre également le récit de la maturation d’Ashmol. Le vilain frère prêt à tout pour détruire le rêve de sa loufoque de sœur deviendra peu à peu un vaillant soldat, protecteur de Pobby et Dingan lorsque les habitants de Lightning Road remettent en cause leur existence, et allié de Kellyane dans l’enquête qu’il mène pour les retrouver. Ashmol le débile, moqueur invétéré, se métamorphose en grand sage qui a su allier le goût pour la rêverie et la bonté naturelle des hommes mus par les vraies valeurs de l’existence. Parcours tristement convenu pour un récit engagé en faveur de l’originalité et des bizarreries de caractère qui font le charme de chacun. Dans la présentation de l’auteur, on nous apprend que Ben Rice, jeune britannique, s’est principalement formé par le biais d’ateliers d’écriture. Ce détail est important et une fois qu’on parcourt son texte, il devient difficile de se débarrasser de ce renseignement. Tout dans le style de Ben Rice semble en effet parcouru par cette volonté artificielle de se glisser dans la peau d’un gamin de douze ans. Les efforts pour créer un langage parlé enfantin ressurgissent à chaque tournure de phrase et plombent un bouquin qui se voulait léger comme une rêverie. Parfois, entre vulgarité et nonchalance enfantine, Ben Rice ne sait plus trop où il en est, et cela donne des passages bancals un peu dérangeants : « Au camping, une grande s’est approchée de moi et m’a dit : « Tu es le frère de Kellyanne Williamson ? Ma mère, elle dit que vous autres les Williamson, vous êtes des imbéciles et que ton père est un pillard alcoolique, alors tu ferais mieux de dégager parce que autrement je te casse la figure comme j’ai cassé la figure à ta sœur à Bore Baths. » Je lui ai fait signer d’aller se faire foutre et je suis remonté en selle vite fait parce qu’elle faisait une tête de plus que moi. »
C’est énervant. Plus on progresse dans le livre et plus Ashmol semble artificiel, prototype de ce que Ben Rice imagine être un enfant. Au final, Pobby et Dingan s’avèrent être les seuls personnages réels de cette histoire puisqu’ils sont les seuls que Ben Rice ne cherche pas à faire parler ou agir. C’est tout dans leur intérêt. Dommage qu’une histoire avec un tel potentiel soit gâchée par les tentatives d’esbroufe de son auteur. L’ambiance un peu mélancolique, partagée entre un passé chargé d’évènements durs à encaisser et un présent qui ne tient pas ses promesses, avait pourtant tout pour plaire. Et lorsqu’il se laisse aller à une bêtise moins convenue que celle qu’il imagine être celle des enfants, Ben Rice est vraiment capable de me faire rire : « Sur ce, le pasteur a pris une mine plus grave et crié que s’il y avait quelqu’un qui voyait une raison de s’opposer à ce que Pobby et Dingan soient enterrés dans le cimetière, qu’il s’avance pour le dire. Il y a eu un long silence et j’ai retenu mon souffle. J’ai regardé autour de moi en essayant de fixer tous ces gens du regard pour qu’ils ne bougent pas. Mais un type qui s’appelait Andy Floom s’est avancé et tout le monde s’est tourné vers lui. Le pasteur a lancé : « Alors, Andy Floom, parle ! » Mais Andy Floom, qui n’était pas loin d’avoir descendu son pack de six, a eu l’air un peu perdu et il a bredouillé : « Quoi ? Oh, pardon, tout le monde, je me suis juste avancé pour écraser une araignée. » Et partout, les gens se sont mis à rire. »Image extraite de l'adaptation du roman Après tout, je suis peut-être aussi désespérante que les personnages terre-à-terre décrits par Ben Rice dans ce conte ? Je n’arrive pas à m’émouvoir devant cette histoire de gamins inventés de toutes pièces par un auteur en quête d’identité, et parce que rien ne me semble naturel dans sa démarche de création, je me prive d’une histoire qui aurait pu me faire rêver, si j’avais su me détacher de toutes ses incohérences et maladresses. « C’était comme ça, Lightning Ridge. Les gens passent leur temps à disjoncter à cause de la chaleur et ils se mettent à construire des châteaux ou des conneries de ce genre. »
(Voici la plus jolie phrase de tout le livre) | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: "One shot": Un auteur/un livre... [INDEX 1ER MESSAGE] Mar 15 Nov 2011 - 21:32 | |
| Eremei AIPINE : L' Etoile de l' Aube. - Editions du Rocher/Terres Etrangères-
Pendant cinq jours, Demiane, chasseur Khanty, entreprend le voyage qui le mène de son territoire clanique jusqu' au village où ses enfants sont en internat. Perché sur son traineau tiré par des rennes, il remonte le fil du temps et de ses souvenirs. Son histoire rejoint celle du peuple kanthy, une poignée d' hommes, de femmes et d' enfants vivant en Sibérie. Une fois de plus, la "civilisation" va rejoindre et frapper ce peuple de plein fouet.
Demiane se souvient de sa culture en désérence, de ses mythes, de ses amis, de ses amours. Et des catastrophes qui mirent fin à tout ce qu' il avait connu. La guerre, la prospection du pétrole, les épidémies, l' alcoolisme et le communismes. De biens grands malheurs pour un aussi petit peuple. A tout cela, les khantys payèrent un lourd tribut, en tant que combattants, "ennemis du peuple" et peuple aculturé et sans défense. Déminane ne peut s' empecher de penser à ses frères de malheur, les Indiens d' Amérique, peut etr, sans doute d'une meme origine et qui connurent un sort semblable après avoir franchi le détroit de Béhring.et s' etre installés sur un continent qui ne s' appelait pas encore Amérique.
Ce livre est un témoignage, poétique et lyrique, celui d' un peuple qui s' éteint. Un livre qui est né du silence assourdissant de toutes les voix qui se sont tues ou qu' on a étouffées. Ces peuples du Nord n' ont pas laissé des vestiges culturels impressionnants comme les Incas, Mayas, Egyptiens ou Grecs. Juste des souvenirs légers, émouvants et qui vont s' estomper comme une fumée. Le souvenir d' un accord profond avec la nature, le respect des animaux et des autres humains et la foi en l' avenir. Et la nécessité de chacun et de tous en tant qu' Etoile de l' Aube.
Demiane sentit qu' il était l' Etoile de l' Aube... Si un seul jour, il ne se levait pas, le matin ne poindrait pas, le soleil ne paraitrait pas, le jour n' apparaitrait pas. Que ferait alors l' humanité ? Peut etre la vie recommencerait-elle alors, peut etre tout recommencerait-il depuis le début ? Et si rien ne recommençait, qu' il n' y avait pas de début ? Ce seraient sans doute la Nuit éternelle, et le froid, l' obscurité, l' aveuglement éternel. Non, cela était inadmissible, pensait-il. Impossible. L' Etoile du Crépuscule passa et survint la nuit. Et l' obscurité se fit plus grande. Mais il était l' Etoile de l' Aube. Il se sentait un maillon de cette chaine, qui unit toutes les choses que l' on appelle la Vie : l' astre solaire, les étoiles, la terre et les hommes, parents proches ou éloignés. L' Univers était inconcevable sans lui. Mais l' Etoile du Crépuscule passa et survint la nuit : l' heure de son départ était venue. Et il se figea, tandis qu' au tout dernier moment brillèrent devant son regard réfléchi tous les jours de son existence terrestre, avec les heurs et les malheurs, leurs félicités et leurs tourments, son premier amour infini... Et le corps souple du lasso contre lui, il franchit le noir de la nuit, certain que viendrait le temps où étoile de l' Aube, il se léverait à l' orient, apportant aux hommes un jour nouveau.
L'Etoile de l' Aube, P. 362
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