Maurice Blanchot

Hésykhios a écrit:

Quelle serait la meilleure porte d'entrée à Blanchot ? "L'espace littéraire" ?

Oui, L' Epace littéraire, Le Livre à venir... Perso, je préfère les essais aux romans de Blanchot.

Et "Apres coup", quel est le sujet ?

bix229 a écrit:

Hésykhios a écrit:

Quelle serait la meilleure porte d'entrée à Blanchot ? "L'espace littéraire" ?

Oui, L' Epace littéraire, Le Livre à venir... Perso, je préfère les essais aux romans de Blanchot.

Si je me fie à ma lecture du Livre à venir et de quelques romans je conseillerai plutôt de lire d'abord deux ou trois romans. Ne pas connaître (avoir lus) les auteurs dont il parle peut-être gênant mais sans doute pas autant que de ne pas savoir comment il écrit lui-même parce qu'il y a de très fortes proximités entre ce qu'il dit des autres (et de lui dans la foulée donc) et sa manière.

anagramme a écrit:

Et "Apres coup", quel est le sujet ?

je l'avais lu avec Le ressassement éternel, c'était page 5

c'est justement sur son écriture, avec l'exemple des deux textes du Ressassement éternel.

Pas évident de définir si les romans sont une porte d'entrée à l'oeuvre analytique ou si les essais donnent une clé aux travaux fictionnels de Blanchot...

Je pense commencer par "L'espace littéraire", puis, on verra bien !

L'attente l'oubli (deuxième lecture)

Une chambre d'hôtel, un homme et une femme qui parlent. Elle lui demande de la faire parler et dire quelque chose dont elle ne peut se souvenir et qu'il ne pourra reconnaître. Il serait l'attente et elle serait l'oubli. C'est un peu résumé.

Ils sont ensemble et cherchent à se rapprocher ou à se voir, sortes d'eux-mêmes débarrassés d'eux-mêmes. Une quête de l'impossible identité entre soi et le soi pour l'autre. Ce qui devient une quête de sens et un épuisement des mots (et du lecteur ?). Termes de mystère et de secret.

On remarque quand même que cette impossibilité envahissante n'a pas toujours ou forcément de sens. Ce qui n'arrange pas l'énigme.

J'ai eu cette fois une lecture plus apaisée ou adaptée du texte. Je m'en suis encore remis à des articulations logiques précises pour ne pas me perdre ou me noyer. Des fois j'ai suivi, d'autres fois non. Peut-on être sûr de suivre ? J'en doute. Il restera néanmoins des phrases qui font mouche et une beauté lancinante de ce mince et miraculeux oubli des solitudes.

N'empêche cette fois encore il me semble bien avoir flanché sur la durée et il est très difficile (plus encore qu'avec les autres) de ne pas se dire que c'est (irrémédiablement) trop.

Un irréel et artifice (<- mauvais mot) extrême de la forme qui ne fait heureusement pas oublier le côté pas moche de l'affaire.

C'est compliqué quand même ce texte sous forme d'entrées chronologiques (pas toujours évident) et/ou thématiques (on finirait par se poser la question) qui dit peut-être aussi autre chose (loin).

Ces extraits ne sont peut-être pas si mal choisis :

Citation :

* S'il t'est arrivé quelque chose, comment puis-je supporter d'attendre de le savoir pour ne pas le supporter ? S'il t'est arrivé quelque chose - même si cela ne t'arrive que bien plus tard, et longtemps après ma disparition - comment n'est-ce pas insupportable dès maintenant ? Et, c'est vrai, je ne le supporte pas tout à fait.

Citation :

* Elle était là, c'est vrai. Il la tenait toute sous son regard, rassemblée en elle-même, distraite d'elle en elle-même. Et il la voyait constamment, sans défaut, et toutefois comme par hasard. Elle n'avait d'autre visage que cette merveilleuse, cette troublante certitude.
Visible, et pourtant non pas vue en raison de cette visibilité.
Non pas visible et non pas invisible, affirmant son droit à être vue de lui par une lumière qui toujours précédait la lumière, et peut-être n'était-ce pas une vraie lumière, mais seulement une clarté qu'ils partageaient en commun, venue du secret d'eux-mêmes et restituée à l'ignorance d'eux-mêmes. Une clarté sans clarté, une lointaine affirmation de l'attrait, un savoir mélancolique et heureux qui venait de ce qu'il ne la regardait pas encore.
Visage, affirmation la plus haute de son droit à être vue de lui, même si elle n'eût pas été visible.

Citation :

* Le visage, cette extrême et cruelle limite où ce qui va la rendre extrêmement visible, se dissipe dans la calme clarté qui vient d'elle.

une lecture qui me parait très complexe pour reconnaître la réalité et l'image de la réalité non ?

bizarrement je ne tournerai pas le problème en réalité et image de la réalité. en plus on reste dans l'espace très Blanchot qui est physique (et/ou une projection physique-géométrique de la pensée) qui est peu directement caractérisé par le texte : espace de la chambre, esquisse du physique (les extraits qui parlent du visage sont dans les plus détaillés si on veut). Rien de plus. Alors que c'est terriblement spatial comme sensation. En tout cas il est difficile d'accoler le mot "réalité" à cette ambiance.

J'ai terminé de lire Blanchot l'obscur ou la déraison littéraire de Henri de Monvallier et Nicolas Rousseau.

Si vous lisez bien le résumé de cet essai, disons qu'il s'agit d'une tentative de mettre en pièces l'apport de Maurice Blanchot aux études littéraires et en matière philosophique. Il faut d'abord que je dise que j'ai lu un autre essai sur une préposition révolutionnaire des écrits blanchotiens étudiée par Yun Sun Limet. Nous pouvons donc dire qu'il s'agit de deux postures totalement opposées qui étudient l'apport de Blanchot. J'ai tendance à noter que Jacques Brault se distancie de Blanchot dans quelques essais.

A priori, il est difficile pour moi d'avoir une idée nette puisque je n'ai pas autant lu Blanchot. Sur le fond, les auteurs de Blanchot l'obscur tentent d'attaquer le bien-fondé des thèses défendues par Blanchot sur la lorgnette politique. Ainsi, en passant de l'extrême droite au communisme lors de la deuxième guerre mondiale, l'expérience-limite de la mort imminente qui attendait Blanchot s'il ne s'amendait pas de sa conduite met en place le dispositif selon lequel l'oeuvre intime de cet auteur considéré comme «phare» par plusieurs, serait en réalité redevable aux encensements de la part des structuralistes, ie. Foucault et Derrida pour en nommer deux.

Ainsi, le postmoderne est un concept fourre-tout. Il semblerait que les thèmes et les idées défendus par Maurice Blanchot soient la résultante d'une posture d'écriture qui soit «teflon» aux critiques qui pourraient ressortir les contradictions contenues dans ses préceptes. Tu es avec ou contre Blanchot bien souvent. Il semblerait que Blanchot manque d'humour et que son voisinage avec les problématiques de la fatigue, des maux de santé et de la mort font en sorte qu'il expérimente ces états-limites. La littérature est familière avec ces postures et c'est pourquoi il nous faut nous mettre en garde contre les tentatives des auteurs à sophistiquer.

Dans l'ensemble, l'essai n'est pas encore concluant à mon sens. Je comprends qu'il aurait pu en convaincre, mais il relance l'idée selon laquelle il est important d'aller aux textes à la source.

en tout cas, comme ça ça a l'air très obscur aussi.