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Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Ven 20 Mar 2009 - 21:39
kenavo a écrit:
Arabella a écrit:
Merci de l'information Kenavo, j'ai très envie de faire connaisance avec cet auteur, mais comme c'est aussi le cas pour quelques dizaines d'autres, il faut qu'il attende son jour
il ne va pas se facher s'il doit attendre mais c'est vraiment une œuvre majeure de lui... vaut le détour
Cela m'aurait étonner que tu ne dises pas ça
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Ven 20 Mar 2009 - 21:48
Arabella a écrit:
Cela m'aurait étonner que tu ne dises pas ça
ce n'est que la vérité
Cachemire Sage de la littérature
Messages : 1998 Inscription le : 11/02/2008 Localisation : Francfort
Je n'ai pas été convaicue par ce court roman et ne partage pas du tout l'enthousiasme de la critique. C'est bien écrit mais il n'y a pas de musique propre à cette écriture (contrairement à celle d'Hermann Lenz par exemple) et le sujet du livre est traité avec superficialité, à peine ébauché. On reste sur sa faim. Dommage.
Arabella Sphinge incisive
Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Mar 29 Juin 2010 - 22:04
La leçon d'allemand
Le récit est fait par le personnage principal du roman, Siggi. Il se trouve dans une sorte de maison de correction modèle, sur une île. Lors d'un devoir d'allemand dont le sujet est justement Le devoir, il rend copie blanche et comme punition il est mis à l'isolement sommé de produire le devoir en question. Il le "détourne" en quelque sorte pour en profiter pour raconter sa vie, puisque le devoir justement, son père agent de police, en a fait le maître mot de sa vie. En particulier pendant la deuxième guerre mondiale, où il du notifier au peintre Max Nansen, l'interdiction de peindre et contrôler le respect de cette notification. Nous suivons tous les déroulements de cette affaire, ainsi que d'autres événements ayant eu lieu à l'époque dans la famille. Le récit est entrecoupé par les retours au présent dans la maison de correction.
Incontestablement de la belle ouvrage, les règlements de compte avec une époque, une mentalité, une conception de la vie qui poussa une génération aux pires excès pour lesquels finalement peu de comptes ont été demandés, peu de remises en cause effectuées. Les personnages sont nombreux et intéressants, les questions posées essentielles. Les descriptions de lieux, des ambiances, des climats judicieusement choisies.
Néanmoins j'ai été à moitié convaincue. C'est à mon sens un peu trop démonstratif, un petit peu artificiel, un petit peu forcé. Pour la bonne cause, certes, fait avec un incontestable talent, mais un tel sujet, une telle ambition, une telle ampleur dans le récit auraient du aboutir à un chef d'oeuvre, alors que l'on a affaire à un bon livre, bien fait, mais sans le frémissement, la nécessité fulgurante, l'évidence et la densité. Je vais apparaître encore une fois dure, mais je trouve que l'auteur n'a pas complètement les moyens de son ambition. Un livre un petit peu plus court, plus ramassé, sur quelques épisodes, avec moins de digressions, aurait sans doute était plus convaincant. Mais tel quel, c'est un bon livre, et je comprends très bien qu'il soit apprécié par de nombreux lecteurs.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Mar 3 Jan 2012 - 18:34
La leçon d'allemand
Arabella a écrit:
Incontestablement de la belle ouvrage, les règlements de compte avec une époque, une mentalité, une conception de la vie qui poussa une génération aux pires excès pour lesquels finalement peu de comptes ont été demandés, peu de remises en cause effectuées. Les personnages sont nombreux et intéressants, les questions posées essentielles. Les descriptions de lieux, des ambiances, des climats judicieusement choisies.
Néanmoins j'ai été à moitié convaincue. C'est à mon sens un peu trop démonstratif, un petit peu artificiel, un petit peu forcé. Pour la bonne cause, certes, fait avec un incontestable talent, mais un tel sujet, une telle ambition, une telle ampleur dans le récit auraient du aboutir à un chef d'oeuvre, alors que l'on a affaire à un bon livre, bien fait, mais sans le frémissement, la nécessité fulgurante, l'évidence et la densité. Je vais apparaître encore une fois dure, mais je trouve que l'auteur n'a pas complètement les moyens de son ambition. Un livre un petit peu plus court, plus ramassé, sur quelques épisodes, avec moins de digressions, aurait sans doute était plus convaincant. Mais tel quel, c'est un bon livre, et je comprends très bien qu'il soit apprécié par de nombreux lecteurs.
C'est là-bas, dans la presqu'île, que j'ai commencé à avoir peur de lui. Et ce n'était pas sa force qui me faisait peur, ce n'était pas non plus la ruse ni son obstination mais plutôt son inébranlable bonne conscience.
J'ai beaucoup aimé ce livre qui m'a d'abord séduit par son écriture. Non seulement ces paysages maritimes du nord de l'Allemagne sont "judicieusement choisis", comme le dit Arabella, mais surtout ils s'animent d'une vibration intense et ils prennent une importance essentielle dans la mesure où ils sont à la fois l'écho de la peinture de Max Ludwig Nansen (l'alter ego fictif d'Emil Nolde) et le théâtre d'un drame familial qui a la simplicité et la force de certaines tragédies antiques. Les descriptions sont superbes, nuancées, infiniment subtiles et font de Siegfried Lenz un peintre impressionniste de la nature en même temps qu'un expressionniste quand il évoque les déchirements et la folie latente du père et du fils qui s'affrontent. Lorsqu'on s'intéresse à la peinture de Nolde on a le sentiment que Lenz a trouvé un langage idéal pour en exprimer les thèmes et les variations. Il y a d'abord une vraie jouissance à s'immerger dans ces tableaux merveilleusement vivants.
Ensuite il y a ce thème qui parcourt tout le roman et qui illustre en même temps l'absurdité et la monstruosité du "sens du devoir" lorsqu'il s'applique à l'arbitraire d'un système totalitaire ou dictatorial (le régime nazi comme l'organisation d'une maison de redressement), et le courage comme le dépassement de soi lorsqu'il est appliqué à la création artistique et au devoir de mémoire (l'obstination du peintre malgré l'interdit et l'engagement du jeune narrateur pour une cause noble et métaphorique). Lenz n'en fait pas qu'un sujet théorique mais il l'incarne avec beaucoup d'émotion et de conviction à travers des personnages passionnés. Leur psychologie peut sembler sommaire mais c'est avant tout la nature qui en est le reflet (comme dans Une Vie de Maupassant où la force et la beauté de l'oeuvre naissaient de cette interaction entre un personnage et son environnement).
L'intrigue se lit avec beaucoup de facilité et a une approche presque cinématographique dans son découpage et sa progression. Je n'ai pas été gêné par les quelques rares digressions car elles enrichissent la vision de cette petite communauté qu'on accompagne avec intérêt. La seule vraie digression étant d'ailleurs la séquence avec les 2 enfants disparus vers la fin du roman. Tout le reste a sa juste place et s'inspire apparemment en partie d'événements réels (Emil Nolde ayant effectivement continué à peindre en cachette malgré les menaces de plus en plus pressantes).
Le contexte historique est sobrement esquissé et les amateurs comme les détracteurs de Purge de Sofi Oksanen y trouveront le même intérêt théâtral comme les limites d'un récit qui ne cherche pas l'exhaustivité historique. A la différence près que le style de Siegfried Lenz est beaucoup plus travaillé et pictural.
Il y a de superbes séquences comme celle de la pluie d'oiseaux qui tombe sur les adolescents, les descriptions de certains tableaux de Nansen, la collection de Siggi dans le moulin, le vernissage de Nansen à la fin du roman, la défense de son oeuvre par Siggi lorsqu'un jeune artiste prétentieux l'éreinte hâtivement sans chercher à la comprendre...
A l'arrivée je trouve que c'est un livre important. Il a la sobriété de l'intrigue, la richesse descriptive des paysages et des personnages, la portée simple mais importante d'un message fort qui montre l'importance de l'art face au chaos et ce qui est à l'origine de la soumission rigide aux règles les plus absurdes. Soumission qui peut séparer deux amis d'enfance en faisant d'un simple officier de police un émissaire des autorités nazies convaincu du sens de son devoir.
Portrait aussi d'un enfant qui est un peu l'équivalent des générations de l'après nazisme qui ont remis en question la violence de leurs pères. Artistes de la prise de conscience. Qu'il le fasse sous la forme d'une fable simple où l'art est au centre du drame est une belle approche littéraire.
tina Sage de la littérature
Messages : 2058 Inscription le : 12/11/2011 Localisation : Au milieu du volcan
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Mer 4 Jan 2012 - 12:46
C'est un livre important et bouleversant et qui reste assez méconnu. Pourtant, ses sujets sont universels puisqu'ils touchent le coeur de la conscience et des affects en période de guerre et d'idéologie meurtrière. Tu as trouvé le mot juste "écriture picturale". Un immense bonheur de lecture.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Ven 6 Jan 2012 - 22:42
tina a écrit:
Un immense bonheur de lecture.
Dont j'ai cherché une transposition cinématographique... Et il y a effectivement un coffret d'adaptations télévisées de 3 romans de Lenz que j'ai commandé sur amazon.de (en espérant qu'il y ait des sous-titres anglais ce qui n'est pas gagné). A suivre!
Deutschstunde:
Ce n'est pas du tout l'atmosphère que suggère le roman et à des années lumières de ce que j'imaginais mais ça m'intéresse de voir comment il a été traité.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Ven 6 Jan 2012 - 22:46
Et un portrait de Siegfried Lenz en 4 parties (mais en Allemand sans sous-titres):
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Sam 7 Jan 2012 - 9:44
Marko a écrit:
(en espérant qu'il y ait des sous-titres anglais ce qui n'est pas gagné). A suivre!
J'ai bien peur que ce ne sera pas le cas.. en effet, je réalise qu'ils mettent pratiquement jamais des sous-titres, ce qui est dommage parce que cela empêche à tout le monde en dehors du monde germanophone de regarder des bons films (s'il n'y a pas de version synchronisé, ce qui est aussi souvent le cas)
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Sam 7 Jan 2012 - 11:03
kenavo a écrit:
Marko a écrit:
(en espérant qu'il y ait des sous-titres anglais ce qui n'est pas gagné). A suivre!
J'ai bien peur que ce ne sera pas le cas.. en effet, je réalise qu'ils mettent pratiquement jamais des sous-titres, ce qui est dommage parce que cela empêche à tout le monde en dehors du monde germanophone de regarder des bons films (s'il n'y a pas de version synchronisé, ce qui est aussi souvent le cas)
J'ai appris l'allemand au Collège/Lycée mais contrairement à l'anglais j'ai pratiquement tout oublié. Je ferai avec les quelques restes. Et je cerclerai le coffret pour nos amis germanophones qui en profiteront davantage si ça les intéresse.
tina Sage de la littérature
Messages : 2058 Inscription le : 12/11/2011 Localisation : Au milieu du volcan
Sujet: Re: Siegfried Lenz [Allemagne] Sam 7 Jan 2012 - 14:23
Dommage ! Je n'ai fait que 3 ans d'allemand, je ne comprends rien de rien.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
En ce moment sur Arte. Documentaire sur Siegfried Lenz.
ah merci, c'était bien agréable, grâce au service Arte +7, j'ai pu le revoir et j'invite d'autres à le faire, ce documentaire va rester encore quelques jours en ligne...
Maline Zen littéraire
Messages : 5239 Inscription le : 01/10/2009 Localisation : Entre la Spree et la Romandie
Pour ceux qui voudrait regarder le documentaire sur Siegfried Lenz en différé, c'est ici. J'ignore pendant combien de temps il reste accessible sur arte.
eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
- Les Vagues du Balaton suivi de Le Grand Wildenberg. Traduit par Carole Missmahl-Losfeld. Terrain vague. 61 pages. L'introduction parle des Kurzgeschichte de l'après-guerre, les histoires courtes de Böll, Lenz, Bender, Schnurre: "la sobriété et la concision - certaines de ces histoires ne font que deux pages - permettent de renverser les priorités traditionnelles de la littérature en proclamant celle de la vérité sur la beauté, de la réalité sur la transposition des faits et enfin de l'engagement politique sur le seul plaisir esthétique de l'art pour l'art. Il faut ajouter à cela l'absence de héros exemplaire, de ton moralisateur et surtout une plongée au coeur de la crise sans préambule ni explication et qui ne s'attarde pas davantage sur la manière dont la crise se dénoue. Cette « fin sans fin » doit être entendue comme une question posée au lecteur : chaque mot revêt donc une importance particulière, chaque geste, chaque parole - en apparence anodins - sert à l'interprétation de l'énigme et prend une valeur symbolique." (pages 5-6)
1/ Les Vagues du Balaton (Die Wellen des Balaton, 1975). 41 pages. Le Balaton ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Lac_Balaton ) est un lac de Hongrie. Un couple, Berti et Judith, y attend un deuxième couple, Reimund et Trudi, qui doit arriver dans la journée. Ils se baignent, regardent des photos qu'ils ont emportées avec eux.
Citation :
"- Regarde donc, Judith, c'est Trudi et moi sur ce qu'on appelle un cyclorameur, elle devait avoir à peu près sept ans sur la photo ; tu as vu comme elle a un regard sérieux et raisonnable pour son âge ? Je suis sûr qu'à quarante ans, elle est toujours la même." (pages 12-13).
Trudi est la soeur de Berti. Ils ne se sont pas vus depuis des années. En effet, Trudi et son mari Reimund vivent en Allemagne de l'Est, alors que Berti et Judith sont partis en Allemagne de l'Ouest. Le frère et la soeur s'écrivent.
Citation :
"- Au bout de treize ans, il s'en est passé des choses et on n'aura pas trop de temps pour tout se raconter." (page 19).
Sans doute... Mais il est parfois difficile de concilier les points de vue. Déjà, il vaut mieux éviter de parler politique. Voici Reimund qui s'adresse à son beau-frère Berti :
Citation :
"- Tu te trompes : aujourd'hui, il n'existe pas un seul pays au monde où l'on puisse vivre en totale liberté ; ce qui fait la différence, c'est seulement une bureaucratie plus ou moins souple. C'est elle, en effet, qui décide quelles pièces de rechange tu vas recevoir, quelles chances de promotion tu auras, dans combien d'organisations tu as le droit d'être actif pour garder leur confiance. Crois-moi : une meilleure bureaucratie, et je suis sûr que le socialisme se propagerait un peu partout dans le monde. Et je te le dis tout de suite : même après que cinq générations auront appris à vivre sous le régime socialiste, les gens n'auront toujours pas renoncé à réclamer ce dont on cherche à les priver, ces petites libertés si essentielles à chacun." (page 42-43)
Une bonne nouvelle.
2/ Le Grand Wildenberg (Der grosse Wildenberg, 1958). 9 pages. La deuxième nouvelle du recueil commence ainsi :
Citation :
"La lettre me redonna confiance. Elle était brève, sans en-tête ni formule de politesse, et visiblement dictée avec cette indifférence polie, ce manque total d'intérêt qui excluait toute intention, même involontaire, de me laisser comprendre que j'étais en droit d'espérer." (page 53).
Il n'empêche que le narrateur se rend à l'usine. Peut-être aura-t-il un emploi ? Il lui faut rencontrer M. Wildenberg, le grand homme, si occupé, si plein de responsabilités... Y parviendra-t-il ? C'est une bonne petite nouvelle. La quatrième de couverture parle de fable satirique. C'est bien ça.
Dernière édition par eXPie le Mer 30 Avr 2014 - 22:13, édité 1 fois