Nancy Huston

Malorie a écrit:

J'ai terminé Lignes de Faille et la chose que je peux dire c'et que c'est un livre magnifique, plein d'émotion, c'est un roman qui vous transforme.

C'était vraiment un de mes coups de coeur de l'an dernier...Je l'ai offert plusieurs fois à des amis ou dans ma famille...Il a été apprécié...
A recommander je crois...

Un vrai bonheur Malorie de croiser nos émotions à travers les mois. A te lire en cette fin janvier je retrouve nos impressions antérieures.
C'est superbe, quand de nouveaux lecteurs nous font ainsi remonter un titre qui nous a touché

Ma lecture de Lignes de faille date du 3/12/06, je suis surprise de retrouver ce que j'en disais alors...

Allemagne, Canada, Dallas, Israël.
Erra, Sadie, Randall, Sol. Sol, Randall, Sadie, Erra.
Une lecture à rebours d’un 20ème siècle couvert par le discours intérieur de l’enfance.
L’enfance : ses joies ses rites ses attentes ses peurs ses émotions enfouies ses regards collés aux serrures des grands ses traumas -passée la sixième année.
L’année où, d’une ligne à l’autre :
-sous leurs yeux de rescapés (tous les enfants n’en sont-ils pas? -rescapés de nos erreurs d'adultes), deux vieilles femmes s’arrachent la poupée vêtue de velours rouge
- daraba bil-‘ayn ne peut rien contre le mauvais œil de Nouzha depuis Chatila
- Luth revient de Poznan
- Klarysa vomit son angoisse et cherche sa vérité dans le miroir

Alors on revient en arrière. Et si j’avais commencé ma lecture par le dernier portrait, depuis la source ?
-C’est chez Solly, soleil, Solomon, seulaumonde que je reviens, Sol qui s’éveille au matin dans la cage dorée d’où il croit être le nombril de l’univers : « Je suis un flot de lumière ». Comment ne pas le croire? L'enfant n'est-il pas le flot de lumière de chaque mère ici ou ailleurs en 2004?
D'ailleurs, c’est autour de Sol que se réunissent les quatre générations à Munich et c’est par sa voix que le monde nous renvoie sa barbarie larvée à la figure. Son langage ne manque pas de crédibilité. Il est le miroir des mots et des images que lui offrent les adultes à l’écran et hors écran.
Son mal, sa nausée, sont à la mesure de l'amour des parents d'aujourd'hui qui l'étouffent. Mère ogresse, père-amour-humour fabriquant d'armes propres.
Citation:
"Le vomissement c'est le chaos, c'est comme l'univers avant que Dieu ne s'y intéresse. Je suis parcouru de tremblements et de haut-le-coeur et je découvre le sens exact de sueurs froides mais je n'arrive pas à vomir parce que je n'ai rien mangé au petit déjeuner."

Citation:
"Je me laisse glisser dans le sommeil. Un peu partout dans la ville les robots font irruption dans les maisons et kidnappent les enfants, après quoi ils nous ôtent le cerveau pour voir comment ça fonctionne" (Sol, 2004).

Citation:
"Des cauchemars me viennent. Je suis assise sur le pot et une dame qui porte une jupe et des chaussures blanches passe près de moi et me frappe et le pot se renverse, je patauge dans le pipi. Me voyant assise au milieu de la flaque jaune un petit garçon éclate de rire en me montrant du doigt, d'autres enfants tournent en ron en traînant des couvertures, ils sont nus et ils ont le nez qui coule, ils geignent et braillent" (Kristina, 1944).

Certains auteurs cherchent un prétexte à toute écriture. Tantôt c'est un fait historique, tantôt un paysage intérieur, un scénario.
Rien n’est prétexte, dans la force massive de ce texte, à une écriture, ni l’enfance, ni une guerre ni une autre, ni la fontaine-source des horreurs, ni le temps, ni le toc d'automutilation de Sadie quand elle se cogne la tête cent fois dans l'armoire. Le temps s'écoule dans un unique sablier où les questions débordent de leurs frontières pour ne peindre qu'un seul terrain.
Citation:
"Une question intéressante est de savoir qui est la vraie grand-maman : quand elle met ses lunettes, ou quand elle les enlève/Les queues des salamandres repoussent, je ne sais pas jusqu'où on peut les couper sans toucher un organe vital/Les yeux ne repoussent pas mais si on perd un oeil on peut le remplacer avec un oeil en verre ou mettre un cache dessus"

Un enfant n’a pas fini de courir pour faire tourner son moulin à vent qu’un autre se google-ïse d’atrocités en direct.
Les lignes de faille sont d’une seule courbe où les derniers mots viennent se raccrocher aux premiers dans la position foetale.

Citations:
Une myriade d'extases.
Sidère-moi, je dis au monde.
Excite-moi, éblouis-moi, étourdis-moi, que ça ne s'arrête jamais.

Savez-vous si Nancy Huston a écrit de nouveaux romans?

Je l'ai dit plus haut : bien que fan de l'auteur je n'ai pas été vraiment convaincu par Lignes de faille.

Babelle a écrit:

Savez-vous si Nancy Huston a écrit de nouveaux romans?

Ce n'est pas un roman...et je ne l'ai pas lu...mais Nancy Huston a publié il y a peu Passions d'Annie Leclerc.

Mot de l'éditeur



Nancy Huston compose par petites touches un portrait de son amie au cœur généreux et à la pensée exigeante. En filigrane se dessine l’histoire d’une complicité exceptionnelle entre deux intellectuelles qui n’ont cessé de s’enrichir mutuellement. Annie Leclerc (1940-2006) apparut tel un météore dans le ciel des lettres françaises en 1974 avec Parole de femme (300 000 ex. vendus), immense hymne à l’expérience féminine du corps et de l’intelligence. Et puis, de livre en livre, sa voix fut moins entendue ; lors de son décès à l’automne 2006, sauf pour les gens de sa génération, son nom était quasiment tombé dans l’oubli. Nancy Huston, lectrice dont la pensée avait été secouée, stimulée et nourrie dans sa jeunesse par celle de Leclerc, reçoit d’elle fin 1999 une lettre enthousiaste au sujet de son petit essai sur l’exil et le bilinguisme, Nord perdu. Commence alors une amitié intense et joyeuse, au cours de laquelle les deux femmes partageront les livres qu’elles ont lus et écrits, ceux qu’elles sont en train de lire et d’écrire, mais aussi les mille facettes de leur vie quotidienne de femme, d’écrivaine et de mère, scandée par des angoisses, des joies, des surprises, des musiques, des difficultés multiples et variées… En trente textes brefs dont chacun porte un titre (“Cigarette”, “Autobus”, “Cavernes”, “Pénélope”, “Nager”, “Regard de l’enfant”, etc.), Nancy Huston réalise par petites touches un portrait de son amie au cœur généreux et à la pensée exigeante, innovatrice, plus que jamais nécessaire pour notre époque. En filigrane se dessine l’histoire d’une relation exceptionnelle entre deux intellectuelles qui, de par leur refus obstiné de sacrifier la chair à l’esprit et vice versa, se ressemblaient et n’ont cessé de mutuellement s’enrichir. Ce petit livre est non seulement une exploration par la romancière de la pensée de la philosophe, mais une mise en acte d’une idée chère aux deux quant à la manière dont nos vies sont tissées les unes aux autres, tissage que nulle mort ne déchire.

Babelle a écrit:

Un vrai bonheur Malorie de croiser nos émotions à travers les mois. A te lire en cette fin janvier je retrouve nos impressions antérieures.
C'est superbe, quand de nouveaux lecteurs nous font ainsi remonter un titre qui nous a touché

Complètement d'accord avec toi Bab'!
Je le redis ici, j'ai vraiment beaucoup aimé ce roman, superbement construit et qui ne donne toute sa valeur qu'une fois la boucle fermée, l'histoire replacée dans le contexte.
Au début du récit, ce qui nous semble être de la froideur de la part de Sol est surtout le reflet du manque de communication inter-générationnel, des manques affectifs additionnés tout au long de ces existences comme le note aussi très bien Babelle, et révèle la place que peut prendre dès lors le fictif ou le virtuel dans la vie de Sol. Il faudrait presque le relire la dernière page tournée, pour mieux en apprécier l'ensemble, ce que peut générer l'histoire de chacun, les cicatrices de la vie que l'on transmet à ses descendants, comme cette tache de naissance de Sadie à a base de son cou (je crois qu'il s'agit de Sadie, il faudrait que je retrouve le passage ...j'ai déjà le livre dans les mains!)
Bref, un très beau moment que l'on aimerait revivre encore et encore...

Oui Monilet, je me souviens bien que Lignes de faille ne t'avait pas tapé dans l'oeil. Mais je crois que tu avais apprécié un autre titre (La Virevolte?)
-Je ne parviens pas à retrouver le commentaire de Bertrand-Môgendre! C'est suite à ses impressions de lecture que j'avais couru acheter ce roman. Mais ça fait plus d'un an : comme le temps passe! Ce souvenir de lecture est pourtant intact. C'est pourquoi je me permettais d'insister : rien en vue, vraiment, côté roman chez N H?

Babelle a écrit:

Oui Monilet, je me souviens bien que Lignes de faille ne t'avait pas tapé dans l'oeil. Mais je crois que tu avais apprécié un autre titre (La Virevolte?)
-

Beaucoup d'autres. celui que j'avais le plus aimé est" L'empreinte de l'ange".

Babelle a écrit:

Ce souvenir de lecture est pourtant intact. C'est pourquoi je me permettais d'insister : rien en vue, vraiment, côté roman chez N H?

Tu as vu ce que je t'ai répondu Babelle à propos du dernier ouvrage de Nancy Huston?

J'ai commencé INstrument des ténèbres chez les médecin; sur une trentaine de pages lue, au moins 5 ont été sautées (les discours sur Dieu ne m'intéressent pas, du moins pas dans ce style) et je ne suis, pour le moment pas emballée du tout...

Je l'avais beaucoup aimé, persiste.

As-tu essayé Dolce agonia Sophie? Parce que j'ai eu du mal aussi avec Instrument des ténèbres, alors qu'à la table de noël, entre chaque protagoniste, il était plus aisé de s'immiscer...
Je vois qu'un nouvel essai a été édité chez Actes sud, intitulé : L'Espèce fabulatrice
En voici le sommaire (copié-collé & en spoiler) :

Spoiler:

Un texte inédit chez Biro accompagne des photographies de l'artiste roumain Mihai Mangiulea : Lisières.
Et pas de roman

Stell_A: je vais persister, on verra bien.

Babelle: j'ai un autre Nancy Huston, La VIrevolte je crois. Je me suis dit aussi que je n'avais peut-êtrepas commencé par son meilleur; je vous dirai ça.

Je suis à l'aise avec l' écriture de Nancy Huston et j'ai vraiment apprécié "Lignes de faille". Toutefois, "L' espèce fabulatrice" m'a laissé un goût d'inachevé. Je pensais lire un essai peut-être plus construit ou documenté mais il s'agit surtout d'impressions personnelles sur différents thèmes. Pas forcément désagréable mais un peu "léger" en tant qu' essai.