Vita Sackville-West

TOUTE PASSION ABOLIE

De sa prose élégante, poétique et parfois malicieuse, Vita Sackville-West dresse dans ce roman un superbe portrait, celui d’une vieille dame de 88 ans, Lady Slane.

Au début du roman, son mari, Lord Henry Lyulph Holland, premier comte de Slane, ancien vice-roi des Indes et ancien premier ministre de la Couronne, vient de décéder à l'âge de quatre-vingt-quatorze ans : « Il vivait depuis si longtemps, qu'on avait finit par le croire immortel."

Lady Slane a toujours vécu dans l’ombre de son mari, pas vraiment malheureuse, bien qu’elle ait dû, par amour pour lui, renoncer à sa passion de la peinture et la taire, pour vivre à ses côtés, luxueusement, le suivre dans le monde et élever leurs quatre enfants.

Ces quatre enfants, qui ont tous dépassé la soixantaine, sont réunis au salon, soucieux de la gestion de l’héritage et de la prise en charge du sort de leur mère qu’ils trouvent «merveilleuse» en la circonstance.
« Grâce à Dieu, Mère n’est pas une de ces femmes de tête. » dit l’un d’entre eux et tous en conviennent.
Ils ne nous apparaissent pas très sympathiques : hypocrites, intéressés, mesquins…
Après les obsèques, réunis autour de Lady Slane, ils lui font part des décisions qu’ils ont prises à son sujet.
Mais ils sont interloqués car Lady Slane leur dit, fermement mais tranquillement, qu’elle entend désormais décider (enfin !) de la manière dont elle veut vivre ses dernières années.
Ce sera dans une charmante et modeste maison de Hampteasd, qu’elle a repérée trente ans plus tôt et dont elle a toujours rêvé !…Et avec la seule compagnie de sa vieille servante, Genoux !
Finies les apparences, les convenances, les conventions…Le temps lui est compté…On ne lui imposera plus rien… Ce qu’elle veut c’est se retrouver, "pénétrer jusqu'au plus profond du coeur de la jeune fille qu'elle avait été"…

Sans amertume aucune, elle rassemble ses souvenirs…
« Adossée à la mort, elle pouvait enfin contempler sa vie. »
Et malgré son grand âge, l’avenir n’est pas sans surprise…

Je suis tombée sous le charme de cette vieille dame, capable de résignation tout autant que de folie…Un esprit libre, sensible et positif…

Il va remonter en haut de la pile. Enfin en haut d'une des piles plus exactement

Arabella a écrit:

Il va remonter en haut de la pile. Enfin en haut d'une des piles plus exactement

Je viens de relir "Toute passion abolie" et je suis sous le charme. Apprendre le détachement, n'est-ce pas la plus belle manière d'apprendre à vieillir.

Gudule a écrit:

Je viens de relir "Toute passion abolie" et je suis sous le charme. Apprendre le détachement, n'est-ce pas la plus belle manière d'apprendre à vieillir.

Plus que le détachement, j'aime mieux considérer ainsi les choses:

coline a écrit:

Finies les apparences, les convenances, les conventions…Le temps lui est compté…On ne lui imposera plus rien… Ce qu’elle veut c’est se retrouver, "pénétrer jusqu'au plus profond du coeur de la jeune fille qu'elle avait été"…

(ce que j'écrivais après avoir lu ce roman)

Toute passion abolie

Lord Slane, ancien premier ministre, ancien vice-roi des Indes, vient de mourir. Ses enfants, pour la plupart odieux et calculateurs, s’inquiètent de ce qu’ils pourraient faire de leur mère, une femme merveilleuse mais, croient-ils, incapable de se débrouiller seule.
Celle-ci va pourtant les surprendre et leur annoncer qu’elle a décidé de vivre seule, dans une maison qu’elle a repérée 30 ans plus tôt à Hampstead. Ils sont bien évidemment choqués mais finalement soulagés de ne pas l’avoir à leur charge.

Et ça tombe bien, la maison est toujours debout et libre en plus. Et ce qui n’est pas négligeable, le propriétaire est un homme fort aimable qui ne demande qu’à se laisser charmer par la vieille dame. Il lui demande même de fixer le prix du loyer, l’aide à organiser les travaux nécessaires et lui recommande un entrepreneur qui lui aussi fera tout son possible pour plaire à Lady Slane. Comme la vie est bien faite !

Une fois installée avec pour seule compagnie sa vieille servante française, Genoux, et pour seuls visiteurs ses nouveaux amis le propriétaire et l’entrepreneur, Lady Slane pourra revenir sur son passé et sur les choix qu'elle a dû faire.

Des souvenirs, elle en a, des regrets aussi. Contrainte par les conventions sociales de renoncer à son rêve de devenir peintre, elle sera pourtant une épouse parfaite et une mère aimante, évoluant avec grâce dans la haute société qu’elle ne comprend pas toujours, remplissant ses devoirs sans déplaisir mais sans grande joie non plus. Heureuse d’arriver à un moment de sa vie où elle peut enfin être libre, elle compte goûter sans retenue aux joies de la solitude et de la rêverie.
Pourtant, une rencontre avec un homme qu’elle a connu jadis va bouleverser cette tranquillité fraîchement acquise, elle qui pensait que plus rien ne pouvait la surprendre…

Certainement osé pour l’époque (1930), un peu féministe mais pas trop non plus, un petit roman au charme désuet, un peu ennuyeux tout de même, un peu trop facile et évident, il se laisse lire sans déplaisir mais on est content d’arriver au bout. A réserver pour les soirs où on a envie de se pelotonner sous la couette avec une tablette de chocolat ou à la limite, de passer un après-midi dans un jardin fleuri avec un bon thé. Pas plus.

Dark Island

Une couverture qui n'a pas grand chose à voir avec le livre.

Comme souvent Vita Sackville West s'empare d'un sujet qu'elle maîtrise bien, la société victorienne et ses moeurs, elle nous dresse le portait d'un trio malfaisant, Shirin, une femme indépendante divorcée et remariée avec Venn, sorte de seigneur d'une île appelée Storn, et Christina, l'amie de Shirin.

L'histoire prend un tour intéressant à partir du moment où ces 3 personnes sont réunies bon gré mal gré sur l'île, avec son atmosphère de liberté mais en même temps d'enfermement.
Ils sont prisonniers de tout, de leur situation sociale, civile, amoureuse.
Rancoeur, jalousie, volonté de dominer qui côtoie par ailleurs une forte envie de soumission, thèmes qui avaient d'ailleurs choqué à l'époque en 1934.
C'est sombre, il n'y a pas beaucoup de joie et de gaieté de vivre tellement Shirin et Venn sont confrontés à leur personnalité si marquée par leur âme tourmentée et complexe.
Christina sera le détonateur pour le déroulement final hautement dramatique.

Ce récit serait étouffant si ce n'était narré avec tant d'habileté, de clairvoyance et si la construction du roman n'était aussi rigoureuse.

Pas le meilleur de Vita Sackville West que j'aie lu, mais une bonne lecture somme toute.

Toute passion abolie

Je serai bref parce que vous avez déjà tout dit. J'ai beaucoup aimé ce personnage de femme âgée qui choisit la liberté de vivre seule dans une maison discrète à l'écart de sa famille au moment de la mort de son mari. Beaucoup de finesse, d'humour, de délicatesse. Tous les personnages sont bien dessinés. Surtout les 3 vieux messieurs qui la courtisent (dont un amour platonique de jeunesse qui vient témoigner avec beaucoup d'émotion et de nostalgie de son affection toujours vive avant de mourir). C'est une écriture limpide et délectable. J'ai juste regretté que sa retraite soit finalement moins tranquille qu'annoncée. J'imaginais déjà des séquences d'observation de la nature, des réflexions sur la solitude, la fin de vie, quelque chose de plus contemplatif et dépassionné. Elle choisit de montrer les enjeux plus convenus autour de l'héritage mais c'est bien observé et ça permet surtout l'idée d'une transmission à travers cette petite fille qui choisit aussi sa liberté en fuyant les conventions d'une vie programmée. Leur échange est beau dans ce qu'il permet un prolongement à cette femme qui va bientôt partir. Un régal de livre que j'ai offert à ma mère et qui l'a enchantée.

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Vita Sackville-West, née le 9 mars 1892 et morte le 2 juin 1962, est une poétesse, romancière, essayiste, biographe, traductrice et jardinière anglaise. En 1913, elle épouse Harold Nicolson, diplomate. Couple ouvert, elle eut des amours passionnées avec des femmes comme Violet Trefusis et la romancière Virginia Woolf.
Son œuvre littéraire est riche. Au temps du roi Édouard (The Edwardians, 1930) et Toute passion abolie (All Passion Spent, 1931) sont sans doute ses romans les plus connus de nos jours. Son roman de science fiction Grand Canyon (1942) est un conte édifiant (ainsi qu'elle l'appelle) sur l'invasion des États-Unis par les nazis. La chute inattendue en fait davantage qu'un roman d'invasion typique. Elle consacra la fin de sa vie aux jardins.

Toute passion abolie
Vita Sackville-West
Traduction de Micha Venaille
Editions Salvy
230 pages
ISBN : 9782905899286


4ème de couverture

« En un éclair lady Slane sentit que le puzzle éclaté de ses souvenirs venait de se reconstituer [...]. Elle se retrouva sur la terrasse de la villa indienne désertée [...]. Elle appuyait ses bras sur le parapet brûlant, faisant pivoter lentement son ombrelle. En fait, elle se tenait ainsi pour dissimuler son trouble car elle venait de se retrouver à l’écart de tous avec ce jeune homme à ses côtés.» Le jour même de la mort de son mari Henry Holland, comte de Slane, lady Slane décide de vivre enfin sa vie. Elle a quatre-vingt-huit ans. Lady Slane surprend alors son entourage en se retirant à Hampstead. Dans sa nouvelle demeure, toute passion abolie par l’âge et le choix du détachement, lady Slane se sent libre enfin de se souvenir, de rêver…de "pénétrer jusqu'au plus profond du cœur de la jeune fille qu'elle avait été".

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Au décès de son mari « C’est probablement parce qu’Henry Lyulph Holland, premier comte de Slane, vivait depuis si longtemps, qu’on avait fini par le croire immortel. », Lady Slane décide d’habiter une maison à Hampstead seule avec sa chère Genoux (vous noterez que, pour une gouvernante, on ne met pas Mademoiselle devant !!) où elle se lie d’amitié avec son propriétaire et l’artisan chargé des menus travaux. A 88 ans, elle désire, à l’âge où toutes les passions sont abolies, La vie coule paisiblement, entre promenades, thé. Elle se remémore sa vie de femme mariée et prend le temps de regarder, de s’abandonner à ses rêveries, surtout loin de ses enfants.

Elle se souvient de la demande en mariage de Holland, de sa réponse distraite, mais ferme devant ses velléités de peintre…. Pourtant elle l’a aimé, l’a soutenu, l’a suivi et décoré de sa présence.

La vie lui réserve encore quelques surprises, entre autre, sous la forme de Mr. FitzGeorge, collectionneur atypique, un ancien amoureux platonique de la belle vice-reine. Lui-aussi devient un habitué de la maison et les conversations au coin de feu ou les promenades à petits pas font leur bonheur à tous.
Lady Slane me fait penser aux paysages peints par John Constable, qu’elle apprécie tant. Ce n’est pas une vieille dame indigne, mais une femme digne qui au soir de sa vie veut vivre comme elle le désire, entourée par son petit aréopage de son choix, sans souci des convenances.
La plume alerte de Vita Sackville-West fait que l’on ne s’ennuie pas un instant. Passant de l’ironie à la poésie, de la douceur aux sarcasmes, elle nous dépeint la fin d’une époque : celle de Lady Slane, ainsi que ce 19ème siècle bourgeois et guindé où ses enfants évoluent obsédés qu’ils sont par l’argent, le rang….. Par petites touches, sans avoir l’air d’y toucher, elle met le doigt dans les fissures de cette société anglaise. Autant l’atmosphère est légère lorsque Vita Sackville-West raconte Lady Slane, autant lorsque ses enfants arrivent, on a une brusque envie de se tenir bien droit sur sa chaise.

La lecture de ce très beau portrait de femme m’a ravie et j’ai noté cet auteur que je ne connaissais pas. Merci Letitbe, ta chronique m’avait alléchée. Je relirai cette amie de Virginia Wolf.

Je vais me faire une spécialité de la correction des titres il manque le a de Sackville! merci les modos!

Et en plus, elle a déjà un fil. Il faudrait en fait fusionner avec le fil existant : https://parfumdelivres.niceboard.com/litterature-de-culture-anglaise-et-ou-gaelique-par-auteur-ou-fils-specifiques-f5/vita-sackville-west-t4009.htm.

Arabella a écrit:

Et en plus, elle a déjà un fil. Il faudrait en fait fusionner avec le fil existant : https://parfumdelivres.niceboard.com/litterature-de-culture-anglaise-et-ou-gaelique-par-auteur-ou-fils-specifiques-f5/vita-sackville-west-t4009.htm.

Je ne l'ai pas trouvé, cela m'étonnait un peu. En tapant le nom dans recherche..... rien

zazy a écrit:

Arabella a écrit:

Et en plus, elle a déjà un fil. Il faudrait en fait fusionner avec le fil existant : https://parfumdelivres.niceboard.com/litterature-de-culture-anglaise-et-ou-gaelique-par-auteur-ou-fils-specifiques-f5/vita-sackville-west-t4009.htm.

Je ne l'ai pas trouvé, cela m'étonnait un peu. En tapant le nom dans recherche..... rien

C'est pas rare que la touche recherche ait des loupés. Il faut aller voir dans la liste par ordre alphabétique qui est sur la page d'accueil et que nous devons, je crois, au travail minutieux d'Arabella. Et là on trouve!

mais, je suis si fénéante !!!!