| Parfum de livres… parfum d’ailleurs Littérature, forum littéraire : passion, imaginaire, partage et liberté. Ce forum livre l’émotion littéraire. Parlez d’écrivains, du plaisir livres, de littérature : romans, poèmes…ou d’arts… |
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| Marc Edouard Nabe | |
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+4Marcelin Hogier Babelle coline Charles 8 participants | |
Auteur | Message |
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Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Marc Edouard Nabe Jeu 26 Fév 2009 - 1:48 | |
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1. Présentation Alain Zannini - plus connu sous son nom de plume Marc Edouard Nabe - est un écrivain français conçu à New-York et né le 27 décembre 1958 à Marseille. Il est l’auteur de 26 livres - sortis principalement chez Le Dilettante et dans la collection blanche de Gallimard - et se consacre désormais à leurs rééditions mais aussi à la rédaction de tracts. Il débute sa carrière dans la presse avec Hara-Kiri puis l’Idiot International et s’illustre également comme peintre et guitariste.
2. ŒuvresESSAIS Nuage Rideau Zigzags Oui & Non La Marseillaise L’âge du Christ J'enfonce le clou Chacun mes goûts Une lueur d'espoir Au régal des vermines Coups d'épée dans l'eau L’âme de Billie Holiday Petits riens sur presque tout JOURNAUX INTIMES Nabe's Dream Tohu Bohu Inch'Allah Kamikaze ROMANS Lucette Le Bonheur Je suis mort Alain Zannini Printemps de feu Visage de Turc en pleurs AUTRES PRESSE L'Eternité La Vérité POESIE Loin des fleurs NOUVELLES KO et autres contes PREFACES « Gen Paul » de Carlo A. Marca « Dostoïevski » de John Cowper Powys Henri Bernstein (recueil publié au Rocher) « Ma vie avec Gertrude Stein » d'Alice Toklas (?) « Petits rien et presque tout » de Francois Boisrond Les extraits etc seront proposés au long du fil | |
| | | Charles Envolée postale
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| | | | Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 26 Fév 2009 - 9:06 | |
| Stéphane Zagdanski attaque sévérement Nabe dans son livre " Pauvre de Gaulle ! " paru en Mars 2000 alors qu'il se posait en ami de ce dernier lors de la rédaction de l'ouvrage. Nabe donc de lui répondre dans l'Infini du mois de Juin avec cet article croustillant.
« Mon meilleur ami »
Je viens de perdre mon meilleur ami. C'est un grand garçon goguenard aux grandes oreilles et débordant de jovialité. Il parle fort et rit violemment. Il porte des lentilles de contact, des chaussettes Burlington et des chemises roses. Très intelligent, il est plus malin encore. Mon meilleur ami croit que je suis son meilleur ami, mais c'est lui qui est le mien. Mon meilleur ami est si grotesque, si immature, prétentieux, parano, fébrile et myope qu'on pourrait croire que je parle de moi quand je parle de lui, et lui-même ne manque pas de voir de la projection dans tout ce qu'on peut dire de lui et qui l'indiffère, d'après ce qu'il prétend. Pourtant, hélas, il y a si peu de vrai dans ce que mon meilleur ami pense des autres et de lui-même, qu'il est de mon devoir de parler. Si je me charge de sauver l'âme de mon meilleur ami en révélant toute la richesse de sa nature, c'est que j'ai beaucoup d'affection pour lui. Je ne peux pas laisser ce soin à un autre, pour la simple raison que mon meilleur ami n'a qu'un seul problème : moi.
J'ai longtemps voulu ignorer cette obsession, afin qu'elle ne gâche pas les bons moments passés ensemble, et lorsque mon meilleur ami a écrit enfin ce qu'il pensait de moi et de mon travail, il a bien fallu me rendre à l'évidence. Je suis son enfer. Qu'est-ce qu'il devait être mal à l'aise à feindre l'amitié et l'admiration pour celui qu'il considérait comme son meilleur ami ! Quelle culpabilité retournée comme un gant par l'arrogance ! Quelle gymnastique yoga-zen pour me haïr de si près ! Que tout cela semble démodé... mais que tout cela est passionnant ! Car si « l'affaire meilleur ami » peut m'aider à aller plus profond dans mes recherches psychologiques, tant mieux. Elle tombe au moment où je m'interroge le plus sur l'importance de l'affectif. Toute la société contemporaine aimerait ne parler que de ça, car c'est la seule chose qui ravage encore secrètement les esprits. Je suis très optimiste sur la tournure des événements affectifs. Bientôt, les individus oseront dire que leur vie n'est envahie que par ce lierre : le sentiment. Les vrais triomphateurs du XX siècle seront ceux qui n'auront pas honte d'exprimer leurs sentiments, leurs ressentiments, et qui en tireront un enseignement. On est loin de mon meilleur ami et pourtant si proche dans sa moiteur de martyr hilare, dans sa douleur d'auto-hypocrite malfaisant, dans sa très intéressante terreur. Quand j'ai connu mon meilleur ami, il avait des crises de nerfs dorsales. Il tressaillait comme sous des coups de poignard dans le dos qui le terrassaient et lui faisaient faire d'atroces grimaces comiques teintées de haine. C'est là que nous aurions tous dû comprendre qui était mon meilleur ami. Quelqu'un qui sent son propre moi impuissant et envieux lui donner rageusement de petits coups de couteau par-derrière, pour le punir d'être incapable de jouir. Faire semblant, simuler, tromper, leurrer, induire en erreur pour mieux ricaner ensuite comme un canard qui ne s'apercevrait pas qu'on lui a coupé la tête, telles sont les compensations orgasmiques de mon meilleur ami.
Je n'imaginais pas que mon meilleur ami souffrait à ce point de mon affectueuse présence. C'est ma faute. J'aurais dû faire attention à ne pas être aussi sincère et confiant : il prenait ça pour des leçons de morale et pour de l'envie de ma part !... Mon meilleur ami me reprochait d'être trop généreux avec tout le monde. Je l'étais aussi avec lui, ça ne semblait pas le gêner que par indulgence je l'aie laissé croire qu'il était écrivain comme moi. Sacré meilleur ami ! Je n'ai pas eu le cœur de lui dire qu'il est « un gentil garçon », comme dit de lui le meilleur écrivain français vivant. Sympathique, trop sympathique. Un cultivé rigolard et doué qui aime lire et vivre dans les livres des autres, bref un homme de lettres, comme la France qu'il aime tant en compte depuis des siècles. La vanité de mon meilleur ami est d'autant plus forte qu'il la cache dans son ventre. Il la protège et l'étouffe comme un enfant qu'il porterait toute la journée, et qu'il délivrerait en rentrant chez lui. Il est perpétuellement engrossé par sa prétention et, le soir, il en accouche dans le sang et la merde, ça doit être horrible. Et, le lendemain, ça recommence. Pauvre meilleur ami ! Comme tout est faux chez lui, il passe son temps à faire passer sa vanité pour de l'orgueil, comme une femme se croit enceinte, alors qu'elle fait une grossesse nerveuse, mais l'orgueil ce n'est pas ça, meilleur ami, ce n'est pas ça.
Souffrir n'est pas un péché : c'est ce que la Bible n'a pas appris à mon meilleur ami. Lui préfère faire semblant de ne pas souffrir, car il se croit libre de tricher avec lui-même. Quand il se vante de n'avoir connu qu'une souffrance, celle d'avoir été obligé de rester toute une nuit assis, plutôt que couché, dans un train, il fait semblant d'en rire, mais l'impuissance à souffrir, inconsciemment et consciencieusement, fait son chemin. Ah ! L’inconscient de mon meilleur ami ! Il ne pense jamais qu'à celui des autres. Le sien, il nous fait croire qu'il s'en moque avec pudeur, mais non : il ne le maîtrise pas, tout simplement. Amoureux de son cerveau - dix auto-coups de foudre par jour ne suffisent pas à épuiser la redécouverte toujours plus éberluée des fulgurances de son organe crânien - il ne sait pas à quel point les autres, intelligents ou idiots, voient clair dans son inconscient jaillissant comme par les trous d'une passoire, par tous les pores de sa peau rosée d'autosatisfaction feinte.Pour mon meilleur ami, toute personne qui n'est pas de son avis est un antisémite, un homosexuel, ou un Français. Mon meilleur ami ne comprend rien à en vrac : la musique, la nature, la mer, la pénétration, les nuages, les animaux et bien sûr la littérature qu'il croit dominer par sa culture livresque. Mon meilleur ami a fait croire qu'il était né écrivain mais il n'a commencé à avoir l'idée de le devenir que lorsqu'il s'est abonné à L'Infini.
Mon meilleur ami est un bourgeois de Louveciennes qui aurait fait un excellent bibliothécaire, il aime tellement lire ! Il croit que lire, c'est écrire, alors que c'est savoir lire qui est savoir écrire. Mais savoir écrire n'intéresse pas mon meilleur ami. Il n'a besoin des conseils de personne, mais les demande sans arrêt pour en tirer profit et les retourner dans une volonté manifeste de nuire à tous ceux qui osent lui en donner, sincèrement, dans son intérêt. La sincérité n'est pas le fort de mon meilleur ami. Il est surtout copieur dans l'âme. Il a mélangé le style du meilleur écrivain français vivant et celui de son meilleur ami, et personne ne se décide vraiment à rendre compte de la supercherie car beaucoup, parmi les ennemis du premier et du second, ont intérêt à occulter ou à dénigrer la personnalité de ces deux-là, au profit de la cuistrerie fabriquée de mon meilleur ami. Les femmes lucides appellent mon meilleur ami « le cache-sexe » des esprits pénétrants. Incapable d'écrire sans dictionnaire, il est fier de ses misérables allitérations qu'il va chercher dans celui des synonymes, comme il fouille du bout de la langue les cons des amatrices par défaut de ses cunnilingus. Ainsi mon meilleur ami croit rattraper son infirmité poétique par une prétention au sens et à la pensée, mais sa « pensée », qu'il jette à la figure de qui a le sens du son qui lui fait cruellement défaut est vite comprise : la haine de la France, point. « Je pense, donc je hais la France. Je hais la France, donc je pense. » C'est pas mal, mais un peu court. Surtout quand on sait quelle idée raciste mon meilleur ami se fait du Français : est français tout ce qui n'est pas lui, alors que lui est le plus français de nous tous, dans ce qu'il reproche au Français : lourdeur et insensibilité, arrogance, bêtise psychologique et cécité narcissique. Mon meilleur ami n'a aucun courage, cela va sans dire. Il appelle un chat une souris. Il ne dit jamais ce qu'il pense à personne, et fait croire à tout le monde qu'il n'en pense pas moins. Il ne dit sa vérité que dans ses livres, et cette vérité l'accable. Le masque soudain tombe. L'aigreur bien retenue dans la vie sourd comme du pus de ces ouvrages vulgairement hargneux. Oui, il a la méchanceté vulgaire, mon meilleur ami. C'est comme ça.
Dénué de toute psychologie, mon meilleur ami se croit le maître de l'ironie, sa clé préférée. Il devient touchant de naïveté quand il croit que les autres sont aussi enfermés dans l'ironie, alors qu'ils disent exactement ce qu'ils pensent, surtout en ce qui le concerne. En particulier les femmes, qu'il croit séduire par son charme, alors qu'il n'y parvient que par sa gentillesse. Il les méprise trop pour jouir avec elles. En trouvera-t-il une, un jour, assez bonne pour passer l'éponge sur son indifférence fondamentale ? Rien de moins sûr, quand on voit agir en direct son anti sentimentalisme mielleux par lequel il sucre son mépris. Mon meilleur ami n'aime pas les femmes, il aime l'effet négatif que peut faire une femme sur des hommes, autant dire, des Français. Voilà pourquoi il fait semblant, jusqu'à les gruger, de s'éprendre d'Africaines, croyant choquer le Français blanc en les embrassant à pleine bouche devant lui. Mon meilleur ami se comporte avec les femmes étrangères comme avec les auteurs de la Pléiade. C'est par complexe qu'il les triture. Personne ne lui a dit à quel point il était gênant de le voir se tortiller pendant des années, d'une façon trop ostensible pour ne pas être louche, avec une épouvantable Brésilienne dont il valorisait la laideur, dans un mouvement de masochisme sadiquement retourné à son désavantage. C'était à moi de le lui dire. J'ai eu tort de ne pas le faire. Mon meilleur ami veut donner l'impression d'un célibataire handstone, fair-play, toujours de bonne humeur, décoincé, déconnant, et qui, par pudeur, cache son sérieux d'« écrivain » sous une affabilité bon enfant. Hélas, quiconque a un peu d'oreille entend le grincement de doute dans cette voix qui se prétend celle d'un stentor alors qu'elle est la gueulerie mal contrôlée d'un castré de la vie notoire qui hurle pour cacher les gémissements de son manque. Plusieurs fois, nous avons, nous autres ses amis, essayé de lui faire entendre sa voix, mais mon meilleur ami est sourd à lui-même comme aux autres. Et même si on arrivait à le convaincre que sa voix est horrible, il hurlerait encore pour mieux couvrir la subtile musique de la vie. Il a préféré augmenter son volume, plutôt que de mettre en valeur son zozotement adorable par lequel il avait une chance d'émouvoir son entourage. Ce qui m'a le plus intéressé chez mon meilleur ami, c'est son aspect Schpountz. On sait que le personnage inventé par Marcel Pagnol m'a toujours touché par son enthousiasme grandiloquent et sa baraka blindée. Comme le Schpountz, mon meilleur ami croit que ceux qui ne croient pas en son talent sont des méchants, mais non. Souvent j'ai eu tort, par sacrifice amical, de lui dire ce qu'a travers moi beaucoup pensaient, c'est-à-dire qu'il ne touche pas assez sa bille en écriture vivante et vécue pour prétendre à la grande littérature, et que la conscience de ce manque flagrant d'incarnation verbale, personne d'autre que lui n'a à le supporter.
La suite ci-après
Dernière édition par Charles le Jeu 26 Fév 2009 - 18:22, édité 1 fois | |
| | | Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 26 Fév 2009 - 9:07 | |
| Seconde partie
Mon meilleur ami n'a pas la « fibre » : ce n'est pas tragique. J'espère qu'au fond de lui il le sait. Sinon ça le serait. Quand il est tout seul dans sa cuisine, bastion héroïque du penseur debordo-baudelairien qui a tout compris de la bassesse et de la bêtise humaines, et qu’entre deux petites séances récréatives de jeux vidéo - batailles aériennes ou mortels combats de robots - assouvies en cachette sur son ordinateur, il recopie des citations de Saint-Simon ou de Clausewitz pour gonfler sa prose aux hormones du génie comme un poulet déjà mûr, je pense qu'il doit savoir. Seul, il s'effondre. Ce manque d'énergie caché avec tant d'énergie sous les rodomontades d'un paon dont la roue tournerait toujours, par ironie, à l'envers, devrait mettre mon meilleur ami sur la voie de la véritable humilité. Pas celle de la foi en soi, mais celle en ce qu'on fait, parce que ce qu'on fait est juste. Tout ce que fait mon meilleur ami est faux, et plus c'est faux, plus il s'acharne. Prêt à manger dans la main qui le dégoûte si cette main lui est tendue, il est prêt à mordre celle qu'on lui tend s'il n'y a rien à manger dedans. Il pérore que les êtres ne l'intéressent pas. Sa devise, c'est : « Le premier être humain qui me surprendra aura gagné une Pléiade. »
Ah ! Sa Pléiade ! C'est plutôt drôle et sympathique qu'un garçon de son âge se promène avec des tomes de la Pléiade maltraités dans les poches de ses vestes Farnel. Y a-t-il vraiment de quoi se glorifier à ce point de lire névrotiquement en cornant comme des cocottes les pages dont il recopiera soigneusement les extraits dans son ordinateur, autant dire sa banque du sperme, et d'où il sortira en temps voulu les citations pour « pulvériser » un contemporain ? Le hic - car il y a toujours un hic pour tout ce qui concerne mon meilleur ami - c'est qu'il a un rapport auto-infantilisant à la célèbre collection de chez Gallimard. Il est impressionné par le papier bible. Comme un employé à genoux devant ses patrons, il lit les grands auteurs et ose affirmer qu'ils sont ses amis. Proust, Céline, Nabokov, Hemingway - mais pas Dante, Cervantès, Dostoïevski, Lautréamont, Balzac, Vallès, Michaux, Péguy ! De Gaulle ? - sont les meilleurs amis de mon meilleur ami. Il est dans une psychose telle qu'il croit vivre avec eux. Il se déguise en eux et pense qu'ils sont vivants grâce et à travers lui comme Anthony Perkins dans le film de Hitchcock se déguise en sa mère. Tous les génies sont des mères pour mon meilleur ami. Mais il n'est que leur enfant mort-né. Les classiques se moquent de mon meilleur ami. Shakespeare à qui il confie ses ombrageux triomphes bâille sur son nuage. Et Homère dont l'ouïe a été développée par sa cécité se bouche les oreilles quand il entend mon meilleur ami hurler son nom.
Esclave volontaire de la grande tradition française qu'il envie jusqu'à se damner, mon meilleur ami ne pense, au fond, qu'en termes de classes sociales. Pour lui, il y a les bourgeois qui ont de l'argent et les génies qui n'en ont pas. Son absence totale de sens politique l'empêche de comprendre que la bourgeoisie n'est pas une question d'argent, un génie peut gagner de l'argent, et il ne suffit pas d'être pauvre pour être génial : c'est plus compliqué que cela. Son rapport à l'argent est d'ailleurs particulier. Je ne l'ai jamais vu manquer un mendiant dans la rue, la charité est la seule chose qui puisse interrompre ses sarcasmes. Il s'approche obséquieux de l'exclu, et lui donne un franc, ou un peu plus. C'est le geste qui compte, c'est un principe. Mon meilleur ami s'excuse presque pour tous les passants qui ne donnent pas, comme lui, systématiquement aux clochards, car il pense que sous chaque barbe de SDF se cache peut-être le visage lumineux du Messie, et mon meilleur ami n'est pas du genre à prendre le risque de louper le Messie. Mon meilleur ami ne peut pas supporter le moindre cadeau et, plus grave, qu'on lui paie un verre, même à charge de revanche. Il croit noble d'insister jusqu'à se battre pour payer sa part. Je l'ai vu, devant mon fils, déchirer nerveusement un billet de cinquante francs, plutôt que de me laisser payer sa consommation... Quand le meilleur écrivain français vivant m'invite à déjeuner, ce n'est pas parce que nous sommes « amis », et pourtant nous vivons ensemble de brefs et denses moments de compréhension. Cette complicité, si douloureusement enviée par mon meilleur ami, n'a pas sa place dans l'entretien fantasmatique d'une double hypocrisie artificiellement animée par un vieux sentiment d'enfance. J'ai eu tort, par sympathie pour sa jubilante immaturité, de laisser mon meilleur ami me piquer mon goûter à la récré. On dirait que tous les hommes aiment se retrouver sous ce préau d'école maternelle qu'ils appellent l'amitié. Moi, ce que j'aime dans une main, ce sont les doigts, pas la poignée.
Mon meilleur ami est amoureux de moi et pour le cacher il fait croire que je suis jaloux de lui. Toute la crédibilité de son imposture tient à cela car il ne peut pas dire sans faire rire que je suis amoureux de lui. Par un effet de regard amer dans son miroir, l'homosexualité glorieusement refoulée de mon meilleur ami apparaît, éclatante, dans les pages qu'il me consacre. En réfléchissant tout à travers la psychanalyse - qu'il confond avec l'art de lire dans les pensées - mon meilleur ami ne voit que lui et ce dans le seul but de ne voir personne. Exempté de tout tourment, il se croit alors capable d'affronter seul les banales névroses d'autrui. Mon meilleur ami n'aime pas assez les gens pour les haïr ou les adorer : il est dans l'ignoble indifférence. Son éthique c'est de mépriser toute opinion le concernant. Il appelle Ça de la confiance en soi mais quand on le voit trembler comme une feuille morte lorsqu'un souffle de vérité l'effleure ça fait peur.
Ce qu'on sent tout de suite chez mon meilleur ami, c'est sa froideur profonde, réchauffée laborieusement par la joie de vivre factice. Mon meilleur ami est si froid au fond de lui, si frigide, disons-le, qu'on voudrait allumer un feu de bois près de lui. S'il est si fasciné par les congélations d'embryon, ce n'est pas seulement pour imiter k meilleur écrivain français vivant dans une de ses thématiques les plus personnelles, c'est parce qu'il se voit dans une éprouvette. Les paillettes ne sont pas toujours celles du show-biz. Incapable de faire circuler son émotion dans les veines de ses phrases glacées, il n'est pas encore sorti de la glace spermatique. C'est l'écrivain-éprouvette en mal de naissance. Il attend qu'on l'insémine, mais n'est-ce pas trop tard ? On dit que les hommes comme lui ont la nuque raide. « La nuque raide », l'aura-t-on assez entendue cette expression dans sa bouche raide aussi lorsque sa haine froide comme on le dit d'une viande lui remonte du fin fond de son frigo ! Ce n'est pas seulement la nuque qu'il a de raide : son corps entier dont il est si fier et dont il croit que tout le monde est envieux est très intéressant à voir bouger, surtout quand il danse. Mon meilleur ami est la lourdeur incarnée. Il danse comme un bloc de béton qu'une grue balancerait dans un chantier abandonné. Quelle lourdeur pour tant de manque ! Qu'est-ce qui peut bien lui manquer de si lourd ? La question ne reste pas longtemps suspendue, et ce n'est pas moi qui ai trouvé la réponse pour définir mon meilleur ami : L'EUNUQUE RAIDE.
Marc Edouard Nabe - L’infini (Juin 2000)
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| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 26 Fév 2009 - 11:12 | |
| Merci Charles... Ce Marc Edouard Nabe m'intrigue et me dérange...Je voudrais en savoir plus, mais du "tout cuit", je n'ai pas envie de lui consacrer du temps ... | |
| | | Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 26 Fév 2009 - 18:29 | |
| J'ai pas compris si tu voulais plus d'extraits ou plus d'informations ?
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| | | Babelle Zen littéraire
Messages : 5065 Inscription le : 14/02/2007 Localisation : FSB
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 26 Fév 2009 - 19:47 | |
| Tu peux mettre les longs extraits en spoiler Charles et synthétiser? J Je viens de revoir en partie l' Apostrophe de 1985. Suite au générique, Georges-Marc Benamou débarque sur le plateau pour casser la gu... au Nabe adulateur du Céline de Bagatelles pour un massacre. Il le gifle. Cela vaudra à Nabe un boycott par les médias dutant des années. Le même Benamou devenu conseiller pour la culture et la communication de Nicolas Sarkozy : - Citation :
- "Vingt ans après, Benamou travaille pour un président dont l'auteur favori est Céline. Qu'ont-ils en commun ? Benamou assure connaître le président depuis les années 1990 et avoir, comme lui, été élevé dans l'amour de l'Amérique et de Clemenceau. Un amour allié à une fascination pour les grandes figures monarchiques, pour les Mitterrand, de Gaulle qui entretiennent une relation pratiquement barresienne avec la terre, le sang, les racines. «J'aime ça curieusement : la terre, la France, ses silences.»(Le Figaro)
Ce qui frappe dans la redif de Pivot en 1985, c'est de percevoir qu'aujourd'hui, de la même manière, on peut mettre en parallèle l'efficacité de l'accusation d'antisémitisme envers un intellectuel, un journaliste, un auteur, un homme politique. Rien ne peut davantage clouer le bec. Y a qu'à sortir son BHL. En tout cas c'est ce qui semble avoir fait tomber Siné et Pean très récemment. Il faut dire que Siné avait bel et bien dessiné une femme "juive" se faisant enc... par (ce qui revenait chez lui à "se faire épousé par..."), et que Pierre Pean qui voulait faire son audimat ou son beurre avec 300 pages consacrées à un seul mec (!) a sûrement été atteint de sénilité précoce. Siné a 80 ans et se prend encore pour un ado de 68, on lui pardonne. Nabe n'a pas tord de dire qu'une Ode à la Gepeou écrite par Aragon aurait pu dans le même temps être passé sous silence. Mais la lecture de Nabe est très indigeste. Son passage dans les médias (qui l'ont boudé durant des années) l'est aussi un peu non? S'il ne nie pas être avant tout un provocateur, alors je pose la question de savoir pourquoi certains ne se sentent exister (par leur écrit ou leur présence médiatique) uniquement que sur le fil du rasoir, à la frontière de ce qui est à double sens, et toujours à proximité des fosses les plus nauséabondes de l'histoire. | |
| | | Marcelin Hogier Espoir postal
Messages : 41 Inscription le : 30/09/2009
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 1 Oct 2009 - 15:03 | |
| Bonjour ! Si vous cherchez encore des informations sur Nabe, un nouveau site qui vient d'ouvrir ses portes permet de découvrir l'œuvre riche de l'auteur du Régal des Vermines. En voici l'adresse : editéDe nombreux textes sont en lignes, dont des textes encore jamais repris en volume, y compris "Mon meilleur ami", transcrit plus haut dans ce fil ! Bonne découverte (ou redécouverte) Marcelin Hogier | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 1 Oct 2009 - 15:16 | |
| ton message a été édité car avant de proposer des liens vers les sites persos ou amis il faut participer. tu peux te présenter : icisoit le bienvenue malgré cette entrée en matière maladroite | |
| | | Marcelin Hogier Espoir postal
Messages : 41 Inscription le : 30/09/2009
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 1 Oct 2009 - 15:57 | |
| Oups... désolé ! mais je suis passé, sans doute quand vous avez édité le message précédent, par la case présentation, que je n'ai vu que dans un second temps. J'avais depuis quelques temps cette page sur Nabe dans mes favoris, et je me suis dit que signaler son nouveau site sur ce forum pouvait en intéresser certains ! D'autant que lire du Nabe en ce moment, ça veut dire être friqué, et quand on est étudiant comme moi, c'est chaud ! Bref, encore pardon... le lien peut-il être restauré ci-dessus où bien faut-il que je le remette dans un autre message ? Merci pour le double accueil Marcelin Hogier | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Jeu 1 Oct 2009 - 16:07 | |
| tu peux utiliser la rubrique "www" de ton profil. | |
| | | azazello Espoir postal
Messages : 25 Inscription le : 09/01/2010
| Sujet: Marc-Edouard Nabe Dim 7 Mar 2010 - 1:37 | |
| Comment ça se fait que parmis tous ses noms de la littérature française je ne vois pas le seul qui mérite vraiment être cité? Etonnant! Il y a même Alexandre Jardin....cet imposteur... mais pas Nabe. Un auteur qui a écrit 28 livres formidables, qui n'a jamais fait de concessions ni avec soi-même, ni avec l'art.... Alors, je crée le fil qui lui est consacré. L'écrivain "maudit", "sulfureux" et que sais-je encore, peu importe, ce que je sais, c'est que Nabe est un miroir impitoyable dans lequel les gens évitent de regarder préférant les images retouchées, c'est pourquoi ils font tout pour le briser par tous les moyens. Après sa mort ils vont tous pleurer et le porter aux nues, car, je cite: " Les grands artistes ne servent qu'à ça: devenir les alibis moraux des salauds de postérité... D'ailleurs,c'est pour ça au fond qu'elle est faite. La postérité n'est peuplée que des salauds." Des citations comme ça, à encadrer et accrocher au mur, il en pleuve dans son nouveau bouquin, L'homme qui arrêta d'écrire. Là, j'ai terminé ma lecture de ce nouveau roman splendide. L'écrivain qui a arrêté d'écrire car personne ne lit plus ou lit mal, se fait guider par un jeune blogueur dans Paris du début de ce 21ème siècle.Une ville morte, stérile et fade, aux mains des faussaires, traitres et hypocrites, car les gens ont oublié le petit fils de Dieu, l'Art. Comme écrivait Dante: "La philosophie , à qui l'entend enseigne, et dans plus d'un écrit, comment la nature procède de la divine intelligence et de son art; et si tu lis bien ta Physique,(1) tu trouveras, dans les premières pages, que l'art humain, autant qu'il peut, suit la Nature, comme un élève suit son maitre, si bien que l'art est comme un petit fils de Dieu. Des deux, Art et Nature, si tu as en mémoire les premiers vers de la Genèse, il faut que l'homme tire vie,et qu'il avance; et puisque l'usurier suit d'autres voies, il méprise Nature pour elle et pour son art, puisqu'il met son espoir en un autre lieu."
(1) il s'agit de la Physique d'Aristote. Mais L'Homme qui arrêta d'écrire n'est pas un livre noir, loin de là, car à la fin le héros retrouve la lumière, l'espoir, la renaissance....Je ne peux dire plus, pour ne pas gâcher la lecture à ceux qui voudront bien plonger dans cette aventure.... C'est un livre qu'il faut lire et relire car plein de trésors cachés nous échappent à la première lecture qui reste tout de même passionnante: le portrait de notre époque peint " à l'ancienne", sans retouches artificielles, avec des personnages réels qui sont nos contemporains: les journalistes, les écrivains, les animateurs télé, les acteurs, les "artistes", les putes, les gens connus et moins, les jeunes, les vieux,etc...tout le monde y prend pour son grade.... C'est de la vraie littérature en tout cas, c'est drôle, vrai, frais, poignant, cruel, beau.... Nabe....je ne crois pas qu'un autre écrivain de notre époque puisse l'égaler.... Il y a vraiment des livres qui ne vous lâchent pas après que vous ayez refermé la dernière page.... Comme des gosses excités qui crient "encore , encore" à sa grande-mère qui a terminé son conte,j'ai envie de dire: Nabe, surtout, ne t'arrêtes pas d'écrire, ce serait un crime, tu irais bruler en enfer! A propos, vous ne trouverez plus ses livres dans des librairies, Nabe a décidé de boycotter les éditeurs et les libraires, le nouveau livre est sorti par ses soins, mais ce n'est pas de l'auto-édition, c'est l'anti-édition. Il estime qu'il faut en finir avec le système d'édition qui suce le sang des artistes depuis des décennies. pour plus d'informations à ce sujet, faut visiter le site de ses lecteurs, il y a des interviews, articles , vidéos etc.... www.alainzannini.com Le livre se trouve sur le site de ventes http://www.marcedouardnabe.com/ | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Dim 7 Mar 2010 - 8:11 | |
| j'ai fusionné ton message avec le fil existant - azazello a écrit:
- Comment ça se fait que parmis tous ses noms de la littérature française je ne vois pas le seul qui mérite vraiment être cité?
il fallait seulement regarder de plus près: avec la fonction recherche, en tappant 'nabe' tu aurais trouvé ce fil, et sinon il y a le super index tout au début de la section littéraire avec nos auteurs a-z - azazello a écrit:
- Il y a même Alexandre Jardin....cet imposteur..
tu aurais pu aller voir sur son fil avant de juger et voir qu'il y a des avis assez mitigés le concernant et même si cela ne serait pas le cas - on se tient à 'les goûts et les couleurs....' , le plus souvent les différents envies de lectures ne se discutent pas non plus | |
| | | azazello Espoir postal
Messages : 25 Inscription le : 09/01/2010
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Dim 7 Mar 2010 - 13:54 | |
| j'ai pourtant bien regardé, pas vu ce fil... enfin, longuement regardé plutôt, toutes mes excuses alors. merci pour le "fusionnage" quant à A.Jardin, quand je dis que c'est un imposteur, c'est pas une question de gout,bien que personnellement je le trouve au-dessous de la littérature pour ados attardés, c'est parce qu'il écrit pas lui même ses livres. C'est Françoise Verny qui s'y met.... bref, c'est pas sur Jardin le fil, mais sur Nabe, alors, ne polluons pas ... | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe Dim 7 Mar 2010 - 13:57 | |
| il fait de l'anti-édition mais de la vraie pub ? (voir l'intro du site) | |
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| Sujet: Re: Marc Edouard Nabe | |
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| | | | Marc Edouard Nabe | |
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