Jean Giono

GrandGousierGuerin a écrit:

Un mutisme assourdissant !

Aie !
"Le silence assourdissant" me rend fou, autant que "la catastrophe annoncée".  

Pour revenir à Giono j'ai le plaisir ces derniers jours de le faire découvrir à ma femme (qui ne connaissait même pas son nom. Curieux qu'il n'ait pas été plus connu en Russie). Elle lit Les âmes fortes et n'arrive plus à le lâcher.

Elle est "dans la dépendance"

Sekotyn, t'es sûr que ta femme a lu Les âmes mortes? Parce qu'à te lire, c'est difficile de le déterminer... :)

jack-hubert bukowski a écrit:

Sekotyn, t'es sûr que ta femme a lu Les âmes mortes? Parce qu'à te lire, c'est difficile de le déterminer... :)

Désolé mais je ne comprends pas bien.
Elle a bien sûr été nourrie du lait de Gogol qu'elle aime beaucoup (moi aussi).

Sekotyn a écrit:

GrandGousierGuerin a écrit:

Un mutisme assourdissant !

Aie !
"Le silence assourdissant" me rend fou, autant que "la catastrophe annoncée".  

 

Juste une référence à une Lecture Commune en cours ...

Albert Camus, La Chute (1956) a écrit:

Son mutisme est assourdissant.

Spoiler:

Sekotyn a écrit:

jack-hubert bukowski a écrit:

Sekotyn, t'es sûr que ta femme a lu Les âmes mortes? Parce qu'à te lire, c'est difficile de le déterminer... :)

Désolé mais je ne comprends pas bie.
Elle a bien sûr été nourrie du lait de Gogol qu'elle aime beaucoup (moi aussi).

Je crois qu'il y a eu confusion sur le titre de Giono et celui de Gogol. Autant j'ai lu le second autant Giono je n'ai pu continuer après Un roi sans divertissement

Jimmy a écrit:

Je crois qu'il y a eu confusion sur le titre de Giono et celui de Gogol. Autant j'ai lu le second autant Giono je n'ai pu continuer après Un roi sans divertissement

Pour un Russe la Provence âpre de Giono est absolument exotique. C'est un milieu tellement opposé à la forêt froide et humide.

Un de Baumugnes



Amédée est le narrateur. C’est un journalier qui se loue de ferme en ferme pour les travaux agricoles et autres petites tâches qui permettent à l’homme de se remplir le ventre. Il nous conte l’histoire d’Albin de trente ans son cadet qu’il a rencontré un soir dans un bar de Manosque. Albin lui confie son secret. Il est tombé éperdument amoureux d’une fille du cru, Angèle qui vit avec ses parents à la Douloire, une ferme sur les bords de la Durance. Mais il n’a pas osé l’aborder au contraire de Louis, un personnage sans scrupule qui a emballé la belle, l’a convaincue de partir de chez elle et l’a entrainée à Marseille où il l’a obligée à se prostituer pendant que lui avait choisi l’oisiveté.

Le truc bien glauque que le soleil de Provence ne suffit pas à nuancer.

Mais Amédée a bon cœur. Il décide de retrouver la jeune fille et pour cela se fait embaucher à la Douloire pour débuter son enquête.

Un roman sombre, dont l’atmosphère lourde est renforcée par l’écriture brute, sèche de Jean Giono. Une écriture truffée de termes et d’expressions tirés du provençal qui confère une couleur locale au texte. Une grande poésie se dégage du roman : comme dans Coline, on sent la chaleur du soleil, l’odeur du thym. Et les orages d’été qui éclatent violemment au point culminant de la canicule.

Une fort belle balade dans une région qui m’est chère et qui fleure bon les vacances entre Manosque, Forqualquier, Mane, La Brillanne, Peyrius, les Mées et Valensole. Et au milieu, coule une rivière : la Durance qui descend du Briançonnais pour rejoindre le Rhône en Avignon.

Voilà un livre que j'ai, comme toi Harelde, beaucoup aimé!
Tiens, il faudrait que je le relise car après presque 30 ans mes souvenirs se sont estompés, je ne me souviens plus que de ma délicieuse impression d'ensemble : je vais le sortir de la bibliothèque et le mettre dans la PAL!   

Cachemire a écrit:

Tiens, il faudrait que je le relise car après presque 30 ans

Même estompés, je suis admirative que tu te souviennes d'une lecture datant d'il y a 30 ans.

Regain


Aubignane se meurt. Petit village perché, au bord d’un plateau inculte. Nature âpre, vie ingrate. Difficile. Les habitants sont tous morts ou partis pour la plaine. Presque tous : il ne reste que Mamèche, le Père Gaubert et Panturle.

On ne se bouscule pas dans les rues, on ne fait pas la queue à la boulangerie (le boulanger a plié ses gaules depuis belle lurette), le facteur ne passe plus depuis longtemps et plus rien ne monte jusque-là qu’on ne soit d’abord descendu chercher soi-même. Quand Gaubert, le forgeron octogénaire, part à son tour, la Mamèche en prend un coup au moral. Le trio gagnant n’est plus qu’un duo et il devient urgent de trouver une idée si l’on souhaite enrayer l’hémorragie.

La solution : du sang neuf ! La solution : la femme. La femme : ses rondeurs, sa matrice, son pouvoir d’enfanter et de redonner son allant à un homme devenu ours. « Je vais aller te la chercher cette femme » dit-elle tout à coup à Panturle. « Une femme ! qu’il répond. Et où comptes-tu en trouver une qui accepte de venir jusqu’ici (et d’y rester) ? »

Dubitatif qu’il est le Panturle. Et s’il ne savait pas que Mamèche n’avait rien d’une grande blagueuse, il s’en serait tapé les cuisses. Un matin, pourtant, la vieille femme n’est plus là. Partie à la pêche à la reproductrice ou partie pour de bon ?

Dans la vallée, Gédémus le rémouleur itinérant entreprend le voyage de Manosque à Banon. L’homme est un peu cossard et il fut bien heureux, deux ans plus tôt, de trouver Arsule qu’il utilise aussitôt comme bête de somme : la femme tire pour lui la lourde carriole sur laquelle voyagent tous les ustensiles de l’artisan.

Alors que le couple passait sous le village moribond, étrangement dérouté et poussé là par une forme noire « qui fait hop », Arsule fait la connaissance de Panturle et choisit de le suivre chez lui.

Avec la femme désormais dans la place, le destin du village vira à 180 degrés…

Troisième volet de la trilogie de pan : le plus intéressant à mon sens. Giono signe un nouveau roman provençal qui nous emporte dans les collines au pied de la Montagne de Lure, entre Manosque, Mane, Banon et Reillanne. Une fort belle région qui sent bon le thym et le romarin.

Une écriture brute de fonderie, des phrases grossièrement équarries à la serpe, une foultitude de mots et d’expressions empruntés à la langue d’Oc, le soleil généreux. Et le mistral entêtant.

Quelle ambiance !

ton commentaire (en particulier pour ce que tu dis du style de Giono) me donne encore plus hâte de commencer la Lecture Commune des Grands Chemins !! et puis je me suis rendue compte qu'au fil du temps j'avais mis de côté beaucoup de livres de Giono, écrivain que j'admire, et que je vais sans doute lire/découvrir petit à petit.

Une trilogie qui me rappelle une région (Reillanne, Banon, Forcalquier...) que je connais bien et qui me manque maintenant que ma famille n'y vit plus. La lecture commune me fera revenir à Giono (à qui j'en veux toujours d'avoir éclipsé Henri Bosco alors que je trouve ce dernier tellement plus passionnant...).

Marko a écrit:

Une trilogie qui me rappelle une région (Reillanne, Banon, Forcalquier...) que je connais bien et qui me manque maintenant que ma famille n'y vit plus. La lecture commune me fera revenir à Giono (à qui j'en veux toujours d'avoir éclipsé Henri Bosco alors que je trouve ce dernier tellement plus passionnant...).

Connaissant également bien le coin (j'y étais encore à la fin février), je peux me faire une idée précise de l'atmosphère de chaque livre, de la campagne et du théâtre des événements. C'est un plus appréciable pour moi.

Les grands chemins

Il a de la gueule, dans tous les sens du terme, le personnage central du roman de Giono. Belle barbe d'hiver et beau verbiage dans lequel le lecteur se vautre avec délice et une certaine complaisance. Qu'il parle de l'automne ou de la neige qui recouvre tout, qu'il fasse allusion au bonheur, au travail, à la liberté ou à l'amitié, le narrateur est un type qui attire et intrigue, interroge et retient. On a envie de le prendre entre quatre zyeux et de lui offrir un petit verre de gnôle, qu'il vienne se chauffer les fesses contre le poêle et qu'il nous dise un peu ce qui lui plait tant chez son ami l'artiste. Car, l'autre, le joueur de cartes n'a vraiment rien pour plaire…
Alors ? Qu'est-ce qui attire tant notre folâtre et filou narrateur dans la personnalité veule, désagréable et même laide de son compagnon ? Le vice ? Le mensonge ? Ou bien cette liberté des actes, cette capacité à dépasser les bornes, à élargir l'horizon, à ne pas se donner de limites ? Oui, c'est peut-être à cause de cette indépendance-là, de cette propension à la dépense totale et de tout (son temps, ses sous, sa prudence) que le narrateur tombe en amour pour l'artiste… pour le plaisir de se perdre et de se faire peur, de s'abandonner et d'aller du côté de l'interdit, du mal et de flirter avec la mort…

Un roman à la langue incroyable et qui retient pour ce qu'il dit de notre humanité, toujours prête à faillir, à tomber, à se laisser glisser du côté de l'interdit, qui excite et meurtrit.
Ce livre assez proche de l'atmosphère (presque policière) de Un roi sans divertissement me donne envie de poursuivre ma découverte de cet auteur que l'on classe trop vite et mal de régionaliste. Il est surtout un grand contemplateur de l'âme.

Et un grand merci à Cachemire pour l'invitation à lire ce beau roman de nature et d'errance.

Très beau commentaire Shanidar, je partage absolument tes réflexions.
Et merci à toi aussi pour le partage dans notre LC!