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| Eduard von Keyserling [Allemagne] | |
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+9Dreep shanidar Heyoka Marko Queenie Arabella kenavo eXPie bix229 13 participants | |
Auteur | Message |
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bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Jeu 24 Sep 2009 - 19:05 | |
| Peut etre le projet de Keyserling est il davantage de nous immerger dans une atmosphère délétère où sont plongés ses personnages, les amours, les espoirs et les conflits... Ce qui subsiste, c' est la résignation, l' enfermement, le passage du temps. | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Mer 28 Mar 2012 - 16:09 | |
| Eté brûlant - Citation :
- Quatrième de couverture
Cet été-là, le jeune comte Bill, qui venait d'échouer au baccalauréat, devait découvrir, en même temps que les émois et les consolations de la chair, les exigences cruelles de la passion. Et une trop belle cousine allait, par son soudain mariage, précipiter le jeune comte et son père dans la tragédie. Comme si les promesses de l'été n'étaient qu'un piège perfide. Livre qui a été conçu par Actes Sud pour offrir en cadeau lors de l’achat de deux Thesaurus. Mon libraire m’a aimablement fait cadeau sans cet achat. eXPie et Arabella ont déjà parlé de ce livre, je n’ai qu’à ajouter que c’était agréable de retrouver l’auteur avec cette nouvelle. En ces jours de printemps qui ressemble à l’été, quoi de mieux que d’adapter la lecture aux températures et naturellement il n'y a aucun doute que j'adore cette jolie couverture Arthur Hacker, Lost Parasol | |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Ven 9 Nov 2012 - 18:51 | |
| En couverture : Fernand Khnopff, Mémoires, 1889 (détail) Versant Sud ( Am Südhang, 1914). 102 pages. Babel. Traduit de l'allemand par Jacqueline Chambon et Peter Krauss. Il est indiqué "Roman", mais il s'agit plus d'une longue nouvelle, qui commence ainsi : - Citation :
- "En approchant de la propriété de ses parents par un beau soir d'été, Karl Erdmann von West-Walbaum, fraîchement promu lieutenant, se disait que tous ces gens intelligents, lui le premier dans ses moments de cafard, qui disaient du mal de la vie, n'étaient que des ingrats. Car la vie savait vous offrir parfois des moments parfaits. Et avec quels modestes moyens elle savait les réaliser. [...]Pourtant, au risque de paraître ridicule, lui, cette nomination le rendait heureux. Il avait l'impression qu'elle avait opéré en lui une sorte de transformation intérieure qui lui donnait droit, plus qu'à l'ancien Karl Erdmann, à l'amour, à l'admiration et aux bienfaits de ce monde. Cela, ils le comprendraient très bien à la maison. C'est d'ailleurs cette certitude d'être compris qui y rendait la vie si douce et faisait naître le sentiment d'être choyé." (page 7).
Karl Erdmann arrive donc dans la propriété familiale pour deux mois de vacances. - Citation :
- "Il n'aurait rien d'autre à faire qu'à flâner dans le vieux jardin, à se vautrer dans les prés, à se laisser gâter par sa mère et par ses soeurs, à fumer les meilleurs cigares de son père et s'abandonner sans contrainte à cette sentimentalité qui ne prospère que dans les vieux manoirs familiaux. [...]
On restait des heures entières allongé dans l'herbe, en proie à un sentiment doux et fort presque alanguissant. Karl Erdrmann pouvait se montrer, dans le monde, crâne et même cynique, mais à la maison il devenait aussi tendre et délicat qu'un fruit qui a mûri sur le versant sud. Il était toujours amoureux pendant les vacances et toujours de Mme von Barnow. D'ailleurs tous les hommes étaient amoureux de Mme von Barnow et pour s'entretenir avec elle son père lui-même retrouvait les vieilles manières chevaleresques des officiers de la garde." (page 8 ). Dès le début, tout se passe comme prévu : - Citation :
- "Il eut d'abord un entretien avec son père et son frère au sujet du régiment et de la flotte sur un ton d'égalité qui témoignait d'une considération nouvelle pour lui. A ses côtés, sa mère lui tenait le bras, silencieuse. Son petit visage ridé sous la grande coiffe de dentelle était empourpré, blanc et rose comme celui d'un enfant." (page 12).
Cette belle propriété est comme une bulle qui protège du monde extérieur. Il fait chaud, les cigales s'en donnent à coeur joie, les hommes tournent autour de Mme von Barnow, même le fiancé de la soeur de notre héros. On s'occupe : on se promène, on fait de la barque, on organise une partie de chasse aux canards. Et puis, il a la sieste de l'après-midi, la torpeur. On attend le repas suivant, on regarde les domestiques s'activer. Et les hommes recherchent la compagnie de Mme von Barnow. Tout a donc l'air de se passer pour le mieux. Mais il y a quelques nuages dans le ciel bleu: - Citation :
- "Il y avait bien ce duel dans quelques semaines mais il ne fallait pas en faire un drame. Un simple duel. Il suffisait de le considérer comme une négociation inévitable dont il convenait de se débarrasser, rien de plus." (page 10).
Une menace plane donc. Et avec la nature exubérante dans la chaleur de l'été, on a du mal à dormir, d'autant plus que Mme von Barnow est dans tous les esprits masculins, au désespoir des esprits féminins. Dorn, le précepteur, dit à un moment : - Citation :
- "C'est beau, certes, mais ce genre de vie ne devrait pas exister. [...]" (page 33)
Karl Erdmann répond qu'il existe bien assez de laideur en ce monde : pourquoi alors n'existerait-il pas un havre de paix ? Dorn s'explique : - Citation :
- "En mai, je crois, a été célébré l'anniversaire de Mlle Oda. On a envoyé chercher des poires en ville pour le dîner. Les poires les plus grosses, mais aussi les plus juteuses et les plus savoureuses que j'aie jamais mangées. Et pourtant, vues de près, ces poires magnifiques sont aussi des poires malades. Peut-être que de telles poires ne devraient pas exister." (page 33)
Bien sûr, l'histoire est classique, mais c'est remarquablement bien écrit : la nature avec ses couleurs, ses odeurs, ses bruits... et cette petite société, pétrie de vieilles traditions, tellement mûre qu'elle en est pourrissante. Très bien.
Dernière édition par eXPie le Ven 9 Nov 2012 - 22:51, édité 3 fois | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Ven 9 Nov 2012 - 18:57 | |
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| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Ven 9 Nov 2012 - 19:04 | |
| Les oeuvres de Keyserling commençaient à être difficiles à trouver en poches (heureusement, il y a les bibliothèques), mais là, vient de sortir le Thesaurus : On y trouve : Beate et Mareile / Été brûlant / Harmonie / Son expérience de l’amour / Dumala / Cœurs bigarrés / Versant sud / Le murmure des vagues / Maisons du soir / Nicky / Altesses / Dans un coin tranquille / Les enfants des beaux jours. (en couverture, on a un détail de la peinture indiquée par Kenavo... mais à l'envers !) Pour le moment, j'aime bien ses longues nouvelles ; j'espère que j'aimerai autant ses romans. | |
| | | Heyoka Zen littéraire
Messages : 5026 Inscription le : 16/02/2013 Age : 36 Localisation : Suède
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Sam 7 Sep 2013 - 22:36 | |
| - eXPie a écrit:
- Un très joli texte d'apprentissage, de passage à l'âge adulte, nostalgique et, in fine, assez triste.
Bien résumé même si, comme Arabella, je regrette un peu le manque de subtilité. | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Sam 25 Juin 2016 - 6:55 | |
| Am Südhang / Versant Sud - eXPie a écrit:
- Bien sûr, l'histoire est classique, mais c'est remarquablement bien écrit : la nature avec ses couleurs, ses odeurs, ses bruits... et cette petite société, pétrie de vieilles traditions, tellement mûre qu'elle en est pourrissante.
Venir après eXPie pour parler du même livre, c'est chose superflue Il en a fait un si bon commentaire, il ne me reste seulement à dire : je plussoie ! Une lecture tout parfait pour un jour d'été... Fernand Khnopff, Memories | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Lun 5 Sep 2016 - 9:55 | |
| Altesses
Voilà un auteur vers lequel je ne me serais jamais tourné si Dreep ne l'avait pas proposé au portail. En effet, l'aristocratie et ses petites princesses en attentent de couronne sont assez éloignées des univers que j'aime parcourir en littérature et pourtant, je suis très heureuse d'avoir lu Altesses (initialement publié sous le titre Princesses par Jacqueline Chambon)et de m'être laissée prendre par la prose élégante et colorée de Keyserling.
Deux éléments ont particulièrement retenu mon attention et éveillé ma curiosité : le rapport au corps et la description de l'atomisation d'une société. Parce que, ce qu'il y a de bien avec Keyserling, c'est qu'il connait parfaitement la noblesse qu'il décrit, qu'il fait partie intégrante de cette société déliquescente, apeurée par la démocratie et s'autodétruisant lentement par respect pour des valeurs séculaires.
Mais revenons au corps. Le corps des femmes est ici, en particulier, parfaitement mis en scène par Keyserling et quand je parle du corps des femmes, je devrais dire l'absence, la confiscation, la néantisation de ce corps. Car le carcan social impose une restriction, une retenue, une distance qui donne l'illusion de la force, de la maîtrise, de la captation par le masculin du féminin. Les jeunes femmes sont ainsi étouffées par les tonnes de vêtements qu'elles portent, elles sont consignées au jardin et à l'écoute du chant des oiseaux, elles sont forcément fragiles et pures et n'ont droit à aucune liberté, toujours surveillées par leurs suivantes. Les jeunes épousées convolent avec des inconnus (la plupart du temps volages) qui ne les utilisent que comme des ventres et une fois mère, ses femmes n'ont pas le droit de prendre leurs enfants contre elle, de les caresser, de les embrasser, de leur montrer leur amour. Le corps confisqué de la femme noble est une entité abstraite qui se laisse déshabiller par une servante et ne touche jamais l'autre (ne se touche jamais vraiment non plus), du coup le moindre frôlement, la moindre caresse prend des proportions exceptionnelles dans l'esprit des jeunes oiselles.
Les scènes entre la princesse mère qui est veuve mais encore verte et le comte Streith célibataire, marque le point rouge du désir de cette séduction glacée qui n'a pour simple marque que l'attouchement d'une main sur le velours d'une veste. Je reste sidérée par la puissance de feu de ce désir tu, de ce désir caché, qui éclate comme une bombe dans la nuit.
Il n'en reste pas moins que le roman raconte aussi l'atomisation de ce monde aristocratique, figé dans le formol et dont les coutures craquent. Les jeunes filles se prennent à rêver d'un travail, d'une liberté, d'un accomplissement hors des hommes et ces désirs font peur aux adultes ou leur tournent la tête. Les pères se heurtent à la légèreté de leurs fils (joueurs, endettés, coureurs…) et dans cette atmosphère de fin de règne les nobles ruades des 'anciens' ne parviendront pas à sauver leurs enfants de l'implosion qui les guette.
Et pour revenir sur la méthode Keyserling, j'ai aimé que l'histoire passe d'un personnage à un autre, d'une identité à une autre, permettant ainsi au lecteur de découvrir les points de vue de chacun et de ne jamais s'ennuyer, bien au contraire. Dans sa postface, fort intéressante, Peter Krauss explique que pour lui le personnage principal du livre est le comte Streith, il sera pour d'autres lecteurs : Marie, la princesse mère ou la jeune et fougueuse Britta, Félix ou Hilda, Eleonore ou bien Roxane.
De cette lecture qui se déploie comme un éventail aux somptueux coloris et aux nuances impressionnistes émane un souffle à la fois rebelle et nostalgique qui reste longtemps en mémoire.
Je note enfin, et pas seulement sur le ton du divertissement mais plutôt sur celui d'une photographie d'époque, qu'à travers ce livre je découvre ou redécouvre la manière dont les nobles occupaient leurs soirées du temps d'avant les nouvelles techniques de communication. Jeux, discussions, contemplation… tant d'attitudes princières qui donneraient presqu'envie d'attendre, le corps cerclé de taffetas étouffant, ma couronne.
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| | | Dreep Sage de la littérature
Messages : 1435 Inscription le : 14/03/2014 Age : 32
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Lun 5 Sep 2016 - 12:19 | |
| Enchanté Shanidar Pas encore lu Altesses, mais Keyserling, c'est comme un petit shout de sérénité. | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Lun 5 Sep 2016 - 16:02 | |
| J' aurais pu avoir les memes préventions que toi, Shanidar, mais heureusement la curiosité l' a emporté. En fait, les livres de Keyserling sont de véritables traités de décomposition sous des apparences surannées et rigides. Quant à ce que tu écris sur les femmes, je crois que ça m' avait échappé. Je ferai attention à ma prochaine lecture. | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Lun 5 Sep 2016 - 18:34 | |
| oui un titre qui peut faire fuir, là en te lisant Shanidar, c'est ce que tu dis des femmes qui risque de me faire fuir. | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Lun 5 Sep 2016 - 20:38 | |
| - Bédoulène a écrit:
- oui un titre qui peut faire fuir, là en te lisant Shanidar, c'est ce que tu dis des femmes qui risque de me faire fuir.
C' est un aspect qui m' a échappé, mais Keyserling a bien d' autres atouts en tant que romancier. Son art de conter, tout en nuances, ses personnages, plus victimes que coupables, l' art du paysage. Et, bien entendu, le style qui en a fait un auteur très reconnu par les écrivains eux-memes. | |
| | | Dreep Sage de la littérature
Messages : 1435 Inscription le : 14/03/2014 Age : 32
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Lun 5 Sep 2016 - 21:52 | |
| Ce serait vraiment triste de fuir cet auteur pour ça. Est-ce qu'on refuserais de regarder un Renoir pour la même raison ? | |
| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Mar 6 Sep 2016 - 7:46 | |
| très juste Dreep ce serait un peu ridicule j'ai d'autres lectures en tête mais qui sait plus tard ? un autre livre pour commencer ? | |
| | | shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Eduard von Keyserling [Allemagne] Mar 6 Sep 2016 - 9:52 | |
| - Bédoulène a écrit:
- oui un titre qui peut faire fuir, là en te lisant Shanidar, c'est ce que tu dis des femmes qui risque de me faire fuir.
Keyserling pose son regard sur un moment particulier de l'histoire du corps des femmes, ce point de basculement, l'instant où il est peut-être possible de vivre autrement. L'un des personnages féminins, Britta, offre cette totale liberté à son corps, elle n'a pas de carcan, elle sourit de toutes ses dents, elle est (selon les classements colorés du postfacié) la femme en rouge (là où la princesse mère est la femme en blanc). Mais Keyserling est beaucoup plus subtil que ça dans sa construction romanesque et il ne s'agit pas simplement d'une opposition contrastée entre deux modes de vie, car l'une comme l'autre ont leurs velléités et leurs empêchements. J'ajoute (après lecture des autres commentaires) que Altesses n'est pas du tout un livre léger ou anecdotique, il s'agit vraiment de ce que bix nomme très justement : un précis de décomposition, qui ne laisse rien au hasard mais a en plus le charme apaisant de descriptions de la nature absolument sublimes. Et puis une petite partie de halma* en bonne compagnie, ne se refuse pas. (* il s'agit du jeu de dames chinoises) | |
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