Lorrie Moore

aériale a écrit:

Les réflexions mordantes et cet humour ravageur spécifiques des deux premiers tiers du roman font subitement place à une étrange gravité, et c'est là où je m'incline face au talent de Loorie Moore.

Oui si subtilement abordée en donnant l'impression que les saisons collent aux événements , procédé facile peut-être mais parler du froid et de la neige comme ça , et cet étrange ballet auquel elle se livre dans la dernière partie du livre en aidant son père à sarcler
Poésie , hymne à la nature , Tassie ne fait qu'un avec , elle y puise ses forces , à chaque fois elle rebondit par son retour dans son Midwest même si les relations familiales sont complexes.

darkanny a écrit:

je me console comme je peux .

Pauvre biquette !

aériale a écrit:

Les réflexions mordantes et cet humour ravageur spécifiques des deux premiers tiers du roman font subitement place à une étrange gravité, et c'est là où je m'incline face au talent de Loorie Moore.

Ouaip. Je comprends ce que tu dis, mais malgré l'humour du début du roman, j'étais loin de le trouver plus léger. Tout est dans le non-dit. L'humour est juste là pour masquer un malaise qui suinte de partout. Comme quand on sourit nerveusement à un enterrement parce qu'on ne peut pas s'enfuir.
Le début du roman est terrifiant, parce que tout le monde est dans le jeu. On mime le bonheur, l'accomplissement, les sentiments aussi.

Spoiler:

Bon, après, c'est une question de sensibilité.

Hé, je n'ai pas dit qu'il était léger Maryvonne, l'humour cache beaucoup de choses c'est certain, on sent que quelque chose d'indicible et de pas clair colle à la vie de ces gens mais quoi? Bien sûr que les facades sont placardées là pour nous masquer la forêt, il n'empêche que lorsque la brêche s'entrouve on peut rester glacé (mon cas) De même que l'on peut sourire nerveusement à un enterrement, l'image choc reste quand même le cercueil qui disparait sous terre en quelque sorte.

Je trouve en tout cas que l'auteure nous amène bien à ce lâcher prise par ses pirouettes à double tranchant et pour ma part j'étais juste "à point" pour l'assaut final!

Spoiler:

-La Passerelle-

Fini hier ce livre et avec les yeux humides. Un livre qui m'a fait passer par plusieurs états, le style vif et très percutant m'a rapidement embarquée, puis un malaise s'est peu à peu immiscé, suivi de l' impatience d'en venir au fait. Qui sont-ils en fait tous ?

Citation :

Chaque personne dans cette maisonnée, moi y compris, semblait issue d'un horrible conte de fées Mais de contes différents. Nous étions tous grotesques et égocentriques, chacun dans sa propre histoire, si bien que nos échanges étaient incompréhensibles et dépourvus de sens, comme les personnages dans une pièce de Tennessee Williams qui déclament une tirade futile mais envoûtante de folie.

Et puis là vers les cents dernières pages tout s'emballe. On rentre au coeur de l'histoire et la patine trop brillante laisse place à la torpeur d'une vie qui s'abat sans crier gare.

Citation :

J 'étais réduite à peu de choses. J'étais à peine présente. Je savais maintenant que lorsque le malheur s'abattait, il vous mitraillait et vous laissait aussi léger qu'une chemise de nuit, aussi transparente qu'un jupon. La lumière semblait traverser mes mains, mon sang n'était plus rouge : ma peau flottait dans l'air, telle une méduse sur les vagues. Je glissais vers une transe qui réveillait quelques souvenirs enfouis, mais à vrai dire le temps m'effleurait. La vie etait insaisissable, si bien que je ne pouvais la prendre à pleines mains. Elle virevoltait et tourbillonnait. On aurait dit un tas d'ordures et je passais les jours comme un fantôme invité à une plage par une journée étincelante.

Je suis sans doute bon public, je n'ai pas trouvé de trop plein, simplement je crois parce que tout l'art du conteur est dans cette approche, toute en subtilité, jamais pesante ni larmoyante.
Lorsqu'à la fin Tassie ouvre incidemment ce mail, on est derrière elle, submergé par l'émotion.
Les non dits, les ratés, la solitude et l'incompréhension, le désarroi et les remords, tout cela en vrac nous assaille. Ces petits condensés de vie que l'on connaîtra tous un jour ou l'autre, des sentiments diffus et cruels très délicats à exprimer mais dont Loorie Moore a le secret. Malgré tout la dernière note n'est pas si sombre, la vie pousse en avant et on grandit malgré soi.

Citation :

Parce qu'Il fallait bien vivre, ne serait-ce que par politesse

.

Bref, une très belle lecture que je dois aussi à Darkanny, j'espère vraiment qu'elle vous captera autant, je crois qu'elle en vaut le coup. Une auteure que j'ai envie de suivre très vite c'est certain!

C'est drôle , j'ai ressenti presque mot pour mot tout ce que tu viens d'énoncer
Emue , oui terriblement même , comme toi , au point que j'ai encore du mal à en parler , surtout après ton message qui me renvoie en pleine face tout ce qui m'a touchée dans ce livre.

Alors, étrangement, depuis que vous le commenter en détail, j'ai de moins en moins envie. Le côté larme à l'oeil, frissons, ce n'est pas trop mon style. Donc j'ai peur de ne pas trop accrocher.

Mais bon, si je le trouve en septembre en biblio, peut être que je me laisserais tenter.

Arabella a écrit:

Alors, étrangement, depuis que vous le commenter en détail, j'ai de moins en moins envie. Le côté larme à l'oeil, frissons, ce n'est pas trop mon style. Donc j'ai peur de ne pas trop accrocher.

Toi aussi, t'as un coeur de pierre? Je l'ai, je devrais commencé à le lire dans les jours qui viennent. Si tu veux je te le prêterais (en septembre puisque tu es interdite d'emprunt de livres d'ici là).

Arabella il ne faut pas toujours craindre ses émotions et il n'est en rien larmoyant! Relis ce que j'ai posté

Citation :

Je n'ai pas trouvé de trop plein, simplement je crois parce que tout l'art du conteur est dans cette approche, toute en subtilité, jamais pesante ni larmoyante.

Il est très rare que j'aie la larme à l'oeil (la dernière fois c'était pour Lignes de faille je crois bien... il y a 4 ans) et souvent les émotions les plus violentes sont celles provoquées par des mots simples, juste vecteurs d'impressions vécues, sans rajout ni emphase.

C'est ce style que tu risques de trouver ici, rien de trop, tout en finesse. Du travail d'orfèvre comme dis Darkanny. Je crois que tu pourrais supporter. Mais bon comme je le notais plus haut aussi, il faut parfois un peu lâcher prise!

(D'ailleurs je vais suppirmer mon dernier post, cela vous donne une image trop niaise, complètement contraire à l'esprit du roman)

Pareil , je ne suis pas une nunuche qui verse dans la sensiblerie et qui se gave de BC ou de Danielle Steel.
Donc Arabella et ce sera mon dernier mot sur ce livre (je ne voudrais pas paraître redondante), l'émotion est présente ( à moins de passer totalement à côté des préoccupations de Tassie ) mais pas cette pleurnicherie que tu sembles redouter.

odrey a écrit:

Arabella a écrit:

Alors, étrangement, depuis que vous le commenter en détail, j'ai de moins en moins envie. Le côté larme à l'oeil, frissons, ce n'est pas trop mon style. Donc j'ai peur de ne pas trop accrocher.

Toi aussi, t'as un coeur de pierre? Je l'ai, je devrais commencé à le lire dans les jours qui viennent. Si tu veux je te le prêterais (en septembre puisque tu es interdite d'emprunt de livres d'ici là).

Un coeur de pierre, c'est tout à fait moi

C'est très gentil de me proposer de me le prêter, mais en principe il est dans plein de bibliothèque, il semble avoir été acheté massivement. Et donc je devrais pouvoir l'avoir très facilement. Mais si j'ai un soucis, je me rappellerais ta proposition.

Darkanny, vu la pression que vous mettez en l'adorant comme ça, je préfère ne pas trop en attendre, comme ça ne serais pas trop déçue. Mais un livre qui met autant de Parfumés en extase, je veux voir de quoi il retourne.

Arabella a écrit:

Darkanny, vu la pression que vous mettez en l'adorant comme ça, je préfère ne pas trop en attendre, comme ça ne serais pas trop déçue. Mais un livre qui met autant de Parfumés en extase, je veux voir de quoi il retourne.

C'est drôle, je n'ai pas l'impression d'avoir mis une pression spéciale, ça peut m'arriver mais sur celui-ci non. Je suis passée par des étapes et au final je me dis que cette fille c'est pas rien.

C'est dommage qu'on vous laisse cette sensation de trop, ce n'est pas ce que l'on cherchait, mais il est évident qu'en le lisant plus ou moins à la suite et en y mettant nos sensations "à chaud" cela peut résulter au même. En fait c'est un peu le principe des LC et j'aime bien cet échange plus spontané. C'est embêtant si vous y voyez du surplus...

PS: J'ai oublié...Eu les yeux humides aussi sur D'autres vies que la mienne, cela fait 2 ans: chuis pas une pleureuse non plus!

Bah, je ne dirais pas que vous nous mettez la pression. mais on sent que ce bouquin vous a tellement emballé, surtout Darkanny et Kenavo (on parle quand même du bouquin qui l'a guérit de sa panne de lecture!), qu'on a envie d'aimer ce livre nous aussi et de vous faire plaisir.

Ceci dit, de mon côté, c'est pas gagné. J'en suis au premier tiers du roman et pour l'instant je m'ennui un peu.

C'est dur de trouver le juste milieu...
Dire trop de bien d'un livre, d'un auteur et l'on peut agacer ou rendre méfiant...
Ne pas dire assez et l'on ne retient pas l'attention...
Ce qui se ressent à travers vos échanges c'est que ce roman vous a profondément touchées et vos émotions ne me font pas peur...
Je vous remercie de le défendre avec autant de fougue.
J'ai noté le nom de Lorie Moore dans mon carnet, tout en n'étant pas encore certaine que cet auteur soit pour moi... Je suis attentive à ce que vous écrivez et je patiente...

odrey a écrit:

Ceci dit, de mon côté, c'est pas gagné. J'en suis au premier tiers du roman et pour l'instant je m'ennui un peu.

elle se donne en effet beaucoup de temps d'aller de A à B.. il y a le risque de ne pas accrocher à ce style..
et je comprends aussi quand tu dis que tu voudrais aimer ce roman.. mais parfois cela ne se fait pas, et je ne pense pas que ce soit grave.. le moment qu'on a adoré un livre autant, c'est seulement qu'on veuille que d'autres ont le même plaisir à le lire.. mais hélas...

coline a écrit:

J'ai noté le nom de Lorie Moore dans mon carnet, tout en n'étant pas encore certaine que cet auteur soit pour moi... Je suis attentive à ce que vous écrivez et je patiente...

c'est toujours difficile de prédire juste.. et surtout que je me suis déjà assez souvent trompée, je résiste à dire oui ou non, bien que j'ai tendance à dire plutôt que non

Moi finalement je vais attendre deux ou trois livres avant de m'y mettre, je le lirai quand j'aurais un peu oublié vos commentaires, histoire de ne pas être influencée pendant ma lecture