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| Ivan Tourgueniev [Russie] | |
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+8Yougopéléla mimi54 Orientale Hank Epi bix229 kenavo Harelde 12 participants | |
Auteur | Message |
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shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
| Sujet: Re: Ivan Tourgueniev [Russie] Mer 11 Sep 2013 - 22:15 | |
| Premier amour
Classique, très classique ! La langue est superbe, l'histoire terriblement russe et romantique ne laisse pas beaucoup de place à la surprise. Tourgueniev raconte l'histoire d'un tout jeune garçon de 16 ans tombant amoureux d'une jeune femme de 20 ans, avec un peu plus d'expérience, princesse pauvre, sans doute pleine de rêves qu'elle ne peut assouvir, gracieuse, capricieuse et terriblement russe...
L'histoire se lit simplement, la fin est à tiroirs, légèrement longuette, les affres du jeune homme sont bien décrits, il manque peut-être un peu du désespoir de Léonid Andreïev pour rendre la lecture délicieuse.
Je compte tenter d'autres nourritures pour me faire une idée réelle du 'talent' de Tourgueniev dont je ne doute pas, mais qui est ici sans doute étouffé par le désir de légèreté adolescente. Une lecture agréable sans être particulièrement attachante... | |
| | | Sullien Sage de la littérature
Messages : 1591 Inscription le : 23/10/2012
| Sujet: Re: Ivan Tourgueniev [Russie] Jeu 12 Sep 2013 - 14:24 | |
| Ah, il vient d'arriver dans ma boîte aux lettres ! Pour le coup, ton message m'a un peu refroidi, shanidar. Tant pis, en selle et pas de quartier ! | |
| | | Heyoka Zen littéraire
Messages : 5026 Inscription le : 16/02/2013 Age : 36 Localisation : Suède
| Sujet: Re: Ivan Tourgueniev [Russie] Sam 5 Oct 2013 - 0:57 | |
| « Tout était fini. Toutes mes fleurs avaient été arrachées d'un seul coup et gisaient autour de moi, dispersées et foulées aux pieds. » Encore une fois merci les Parfumés. Je n'étais pas loin de penser comme Mimi et Shanidar : un peu trop classique, pas de réel transport pendant la lecture. Mais il y a quelque chose qui s'imprègne et qui saccade le souffle... « Ô jeunesse ! jeunesse ! tu n'as cure de rien, tu sembles posséder tous les trésors de l'univers, même la tristesse t'amuse, même le chagrin te va bien, tu es sûre de toi et téméraire, tu dis : moi seule je vis, regardez ! mais tes jours fuient et disparaissent sans qu'on s'en aperçoive et sans laisser de traces, et tout en toi disparaît comme la cire au soleil, comme la neige... Et peut-être que tout le secret de ton charme réside non dans la possibilité de tout faire, mais dans la possibilité de penser que tu feras tout, peut-être qu'il réside justement dans le fait que tu disperses au vent les forces que tu n'aurais pas su employer à quelque chose d'autre, dans le fait que chacun de nous se considère sérieusement comme un dilapidateur, pense sérieusement qu'il est en droit de dire : "Oh ! qu'aurais-je fait si je n'avais pas gaspillé mon temps !" » | |
| | | colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
| Sujet: Re: Ivan Tourgueniev [Russie] Jeu 31 Oct 2013 - 14:16 | |
| Journal d'un homme de trop (1850) suivi de Trois Rencontres (1852) En trop par rapport à rien, en trop par rapport au reste, qui n’est rien, l’homme de trop de la nouvelle d’Ivan Tourgueniev décrit sa situation par une brillante et courte analogie : « Je me souviens que je pris un jour la diligence pour aller à Moscou. La route était bonne, et pourtant le postillon attela un cheval de volée de front avec les quatre autres. Misérable et parfaitement inutile, attaché n’importe comment à l’avant-train par une corde épaisse et courte qui lui coupait sans pitié la cuisse, lui frottait la queue, le forçait à courir de la façon la plus grotesque, et donnait à tout son être l’aspect d’une virgule, ce misérable cheval excitait toujours ma plus profonde compassion. Je fis observer au postillon qu’il me semblait qu’on aurait pu se passer du cinquième cheval… Il secoua la tête, lui donna une dizaine de coups de fouet dans toute la longueur de son dos décharné, de son ventre bouffi, et marmotta avec une sorte d’ironie : « C’est vrai, il est de trop !... » Moi aussi, je suis de trop… »Combien d’entre nous se reconnaîtrons dans ce passage ? Et combien d’entre nous, semblables à cet homme de trop, essayerons malgré tout de se faire une place au creux d’un monde qui se débrouille très bien tout seul ? L’homme de trop commence à écrire son journal alors qu’il sait qu’il va bientôt mourir. Voici enfin une information qui l’inscrit dans la réalité et qui lui donne une contenance. Commençant d’abord par retracer sa généalogie, l’entreprise exaspère l’auteur par son inutilité. Poursuivant par une esquisse de sa personnalité bien vite résumé, le journal finira enfin par décrire un ultime échec sentimental. Cette mésaventure sans satisfaction n’est pas tragique en elle-même : elle l’est en tant qu’impossibilité constante de s’affirmer et d’exister aux yeux des autres. Le dernier recours pour résister à la tragédie est la valorisation de l’échec. L’homme de trop exploite ses catastrophes et les inclut dans son existence comme une caractéristique rare. L’amour de la souffrance se révèle comme palliatif au bonheur inaccessible, réminiscences d’un Knut Hamsun plus mordant que jamais et anticipation de la pensée contradictoire d’un Emil Cioran pratiquant avec cruauté l’autodérision. « Je me sentis tout à coup excessivement méchant, et je me souviens que cette nouvelle sensation me causa une jouissance extrême, et que j’en ressentis même quelque estime pour ma personne. »Les Trois rencontres qui suivent ce Journal font pâle figure. L’histoire amoureuse sert encore une fois de prétexte à l’affirmation douloureuse de vivre. Sur plusieurs années, un homme s’éprend d’une passion de plus en plus forte pour une femme qu’il rencontrera trois fois en des lieux et des époques différents. Destin ou hasard ? Les coïncidences sont trop frappantes pour n’être qu’anodines. Le sens de l’existence de cet homme s’affirme autour de la pensée de celle qu’il croit être sa dulcinée jusqu’à l’ultime rencontre qui lui permettra de confirmer ou non la pertinence de ses croyances. L’enjeu paraît trivial. Pour cet homme, il ne l’est pas : il a investi le sens de son existence dans cette relation fantasmée et ne saurait plus comment vivre sans le moteur de cet espoir. L’histoire d’amour révèle un monde vidé de sens mais encore obsédé par l’apparition de signes divins. Encore une fois, l’ironie et l’autoflagellation seront les remèdes à cette déchéance. Derrière des apparences légères, Ivan Tourgueniev décrit la mélancolie de l’homme moderne. Privé de sens, déraciné, monade angoissée cherchant désespérément des accroches là où elles se présentent, il figure un tableau pessimiste que l’humour parvient parfois à atténuer. Lorsque la lucidité s’échappe discrètement, la simplicité n’en devient que plus puissante. « Pendant qu’il vit, l’homme ne sent guère sa propre existence ; elle ne lui devient perceptible, comme le son, qu’à une certaine distance, après un certain temps écoulé. » - Citation :
- « Je voudrais respirer encore une fois la fraîcheur amère de l’absinthe, la douce odeur du sarrasin coupé sur les champs de ma patrie ; je voudrais encore une fois entendre au loin le modeste tintement de la cloche fêlée de noter paroisse, m’étendre encore une fois à l’ombre du buisson de chêne sur la pente du ravin, suivre encore une fois des yeux les traces fuyantes du vent qui court en vagues sombres sur l’herbe dorée de notre prairie… Bah ! à quoi bon tout cela ? Je ne puis plus écrire aujourd’hui. A demain. »
*peinture d'Emil Nolde | |
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