Edward Morgan Forster

Monteriano

Une veuve, sous la coupe de sa belle famille depuis la mort de son mari, tente de s'échapper du milieu snob et bien pensant dans lequel on veut l'enfermer. Au cours d'un voyage en Italie, elle épouse un Italien plus jeune qu'elle. Le scandale est immense. Mais ce mariage ne rend pas Lilia heureuse, et elle meurt rapidement en couches. La belle famille de Lilia fait le maximum pour récupérer l'enfant, par sens du devoir.

Le résumé de ce roman est extrêmement difficile, parce qu'à la limite ce n'est pas le plus important. Les évènements qui arrivent sont surtout là pour mettre en évidence la personnalité des différents protagonistes. Nous sommes chez Forster, l'opposition entre la façon de vivre en Grande-Bretagne et l'Italie, et les aspects mortifères de la morale et de la mentalité britannique sont très présents. Même si ce n'est pas une caricature, et que certains personnages sont plus complexes et plus susceptibles de changer qu'il n'y paraît au prime abord.

L'écriture et le talent de conteur de Forster rendent le récit très fluide, très vivant, on se demande comment tout cela va bien évoluer, et jusqu'à la fin l'auteur sait nous ménager des surprises.

Une lecture plaisir, mais qui va bien au-delà par la justesse d'observation et l'étude des personnages.

Arabella : J'adore E.M. Forster et j'ai bien noté Monteriano dans les choses à lire....

Par contre en remontant le fil j'ai retrouvé ce qu'a dit Bix, et je ne connais pas ce roman qui semble encore mettre en scène l'homosexualité. Je suis bien curieuse... Tu connais le titre en anglais Bix ? Retour à Penge ?

bix229 a écrit:

Retour à Penge est un livre classique, mais qui, mine de rien, met en évidence la difficulté extreme
d' etre homosexuel dans la société anglaise du début du siècle dernier.
Y compris dans le milieu intellectuel ou celui de la grande bourgeoisie.

Ce n' est ni un livre qui cherche la polémique ou l' auto justification, mais le personnage de Maurice
est non seulement crédible, mais un beau peronnage de roman.

C' est un livre daté mais qui vaut d' etre lu par le style de l'auteur.

domreader a écrit:

Je suis bien curieuse... Tu connais le titre en anglais Bix ? Retour à Penge ?

Il s'agit de Maurice: information trouvé sur le Net:

Citation :

en 1973, ce roman est paru sous le titre : Le retour à Penge

source

Oui, c'est Maurice, et c'est un roman magnifique. Dom, je peux te l'apporter le 14 mai si j'y vais, ou bien te l'envoyer.

Vous me donnez vraiment envie de ressortir Maurice. Je n'ai lu que ce roman de Forster (j'avais adoré).

Ok ! Quelle drôle d'idée d'avoir traduit Maurice par Retour à Penge. Oui en effet, j'avais lu Maurice, un très beau roman.

The Longest Journey/Le plus long des voyages

Un roman qui contient toutes les thématiques de l'oeuvre de Forster, mais qui peut surprendre par sa violente amertume et ses transitions abruptes. The Longest Journey évoque la difficulté pour l'individu de lier ses aspirations au regard et aux contraintes d'une société, même derrière les apparences de l'équilibre et de la sincérité. Le déni et l'incompréhension remplacent alors l'illusion d'un confort et d'un accomplissement.
La narration se construit sur des ruptures, et l'écriture ne possède pas encore la limpidité et les nuances de ses plus belles oeuvres (que je vais redécouvrir avec plaisir ces prochains jours), mais il s'agit d'une curiosité extrêmement dense.

J'ai pu terminer Avec vue sur l'Arno et Howards End, avec le souvenir des adaptations d'Ivory en tête. Les deux romans sont soutenus par des scènes formant un pivot et un tournant, changeant la perspective d'un personnage sur un univers social et ses propres perspectives d'épanouissement (dans le sens d'un aveuglement, ou au contraire de la perception d'une lucidité).
On peut alors souligner la dimension "visuelle" de ces oeuvres (jusque dans un découpage narratif et l'attention aux lieux), même si l'écriture de Forster est caractérisée par sa finesse dans l'exploration d'une intériorité.
Si Avec vue sur l'Arno peut exprimer une jubilation, à travers une foisonnante galerie de personnages et les contours de l'opposition Italie/Angleterre, Howards End laisse la place à une poignante amertume, portée par une douloureuse exploration d'échanges relationnels.

Route des Indes

Un roman à part dans sa radicalité : il me restait un fort souvenir de la remarquable adaptation de David Lean, et le propos de Forster est encore plus amer. Le malaise et l'incompréhension figent toute tentative de rapprochements entre les protagonistes : l'Anglais ne peut que heurter un vide, et effleurer des sensations et des lieux qu'il ne parvient à saisir.
L'écriture, précise et implacable, dévoile les conditions d'un échec et d'une incapacité à défaire des barrières qu'une société a voulu imposer. Le voyage devient alors une perte au lieu d'un enrichissement, à travers l'expression d'un manque. Route des Indes, sans la moindre raideur théorique, cerne alors la violence sourde d'un colonialisme et les conditions d'un renoncement.

Le plus long des voyages

C’est le deuxième roman de Forster, après Monteriano. Rickie, un jeune anglais, légèrement handicapé, est au centre du livre. Etudes à Cambridge, mariage, tentatives d’écriture, entrée dans l’enseignement, en parallèle avec la découverte d’une histoire familiale compliquée, nous sommes bien dans l’univers de Forster. Entre ordre social et les exigences de ce qui est juste, entre les besoins du corps et de l’esprit et la morale.

L’histoire est peut être pas moments un peu extrême, un peu plus exagérée et simplifiée que dans d’autres romans ultérieurs, néanmoins c’est un livre dans la même lignée que ceux qui suivent. L’observation très fine des individus et d’une société. Dans un style bien à lui, qui prend son temps, mais sait être terriblement précis quand il le faut.

Arctic Summer

Un roman inachevé. Un contraste entre deux personnages, et au-delà deux façons de voire la vie, Martin Whitby et Clesant March. Cela débute par un voyage en Italie, avant de se poursuivre en Grande Bretagne. Le décor est posé, les personnages dessinés, même un drame éclate. C’est une véritable splendeur, et c’est terriblement dommage que Forster ne soit pas allé plus en avant, parce qu’il y  a visiblement du potentiel pour un très grand roman. L’observation des personnages, l’art de capter un instant, n’a jamais été plus magistrale dans aucun de ses livres.

Ce doit être particulièrement frustrant cet inachèvement, si c'est si bien que ça...

Oui, c'est certain. Mais en même temps lire le texte est un tel plaisir que je ne regrette pas. Ce qui est peut être le plus frustrant, c'est qu'il y a quelque chose qui pourrait presque être une fin, mais quand on connaît l'auteur, on se rend bien compte que ce n'est pas possible qu'il n'y ait eu que ça. Si c'est la fin, il manque des étapes, où il devrait y avoir autre chose après. C'est très brutal, de voir le livre s'arrêter comme cela, alors qu'on voudrait continuer à suivre ces personnages.

J'ai beaucoup aimé Monteriano, et avec vue sur l'Arno bien sur, tellement d'images qui surgissent à la lecture...