Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 OneShot - BD

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colimasson
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyDim 23 Déc 2012 - 18:59

Gags (2011) de Mix & Remix


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Derrière le pseudonyme de Mix & Remix, aux consonances plurielles, se cache un seul homme. Et pourtant…on l’imaginerait double ! Comme le dit tendrement son frère d’armes Siné, il n’a qu’un « lourd handicap » : celui « d’être né suisse » ! –parce que ce ne serait pas drôle de ne pas trouver au moins un reproche à adresser à ce talentueux (Re)Mix.


Son trait est d’une simplicité aberrante, et pourtant, je défie quiconque de l’imiter ! Sans doute avez-vous déjà croisé ses dessins au détour d’une page de presse… Mix & Remix livre ses gags au magazine suisse L’Hebdo, au Siné Hebdo, au Courrier International, à Lire, à L’Express, aux Clés et au magazine italien L’Internazionale.


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Selon Siné, Mix & Remix est un dessinateur subversif. Comment ? Des gags de quatre cases composés uniquement de petits personnages brouillons pourraient être subversifs ?! Eh bien, tout d’abord, ces « petits personnages brouillons » ne sont pas si insignifiants que ça ! Oui, oui, ils ont tous plus ou moins une trogne semblable mais « c’est pour mieux se fondre à l’opinion mon enfant… » Et même si nous ne vivons plus à l’époque de la censure des siècles derniers, il est encore de bon ton de se parer d’insignifiance et de frivolité pour faire passer des messages qui font mouche et qui répondent aux préoccupations de l’actualité. De toute façon, même si la politique est parfois abordée, de près ou de loin, elle ne constitue pas la préoccupation majeure de Mix & Remix. Ce qui l’intéresse, lui, ce sont surtout les mœurs de ses contemporains. La culture, l’art, l’amour, la littérature, les relations humaines… passent sous les rayons X de son regard amusé et cynique. Même les extra-terrestres et les hommes préhistoriques ont leur mot à dire sur la question, et lorsqu’il met en scène la première cellule terrestre dans une ode à la misanthropie, on comprend d’où surgissent tous les problèmes du monde !


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Mix & Remix a fait encore plus fort que Nietzsche ! Sans le dire, avec ses gags minimalistes de quatre cases, il illustre aussi bien que son divin énonciateur cette sentence : « […] mon orgueil est de dire en dix phrases ce que tout autre dit en un volume, -ce qu’un autre ne dit pas en un volume… ».


D'autres pour le plaisir :

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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyDim 23 Déc 2012 - 20:36

j'aime bien mix et remix et je vais de temps en temps faire un tour sur le blog ou sur le site de l'hebdo !
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyLun 24 Déc 2012 - 22:16

Oui, tu fais bien d'en parler, ils ont un blog justement : ICI

J'ai fait des scans d'autres planches de l'album, parce qu'elles sont vraiment succulentes ! Je vous les montrerai d'ici peu...
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyMar 25 Déc 2012 - 8:45

colimasson a écrit:
Oui, tu fais bien d'en parler, ils ont un blog justement : ICI
ah oui j'adore.. si je me rappelle bien, Animal avait donné déjà une fois le lien, mais en tout cas c'est toujours bien de les visiter..
pour l'instant leurs histoires autour du Cactus Solitaire sont extra

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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyMar 25 Déc 2012 - 19:07

Oui, j'ai découvert ce blog récemment et en effet, c'est une période spéciale "cactus" on dirait...
D'autres extraits de Gags :

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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyVen 28 Déc 2012 - 11:15

Freud (2011) de Corinne Maier & Anne Simon


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On peut décider de découvrir Freud et sa pensée en lisant les multiples essais et articles qu’il a écrits ou en se plongeant dans sa correspondance, forte de quelques 20 000 lettres. On peut aussi trouver qu’un abrégé de son œuvre fera tout aussi bien l’affaire. Le Freud en bande dessinée, réalisé par Corinne Meier et Anne Simon, pourrait être un de ces ouvrages… La psychanalyse parle de la psychanalyse et Corinne Mayer s’arroge le droit de savoir en rappelant qu’elle se situe dans la lignée de Freud et qu’elle exerce elle-même la profession de psychanalyste.


On découvre donc Sigmund Freud dans les débuts de sa vie. Aîné d’une famille de huit enfants, il est promis à une grande carrière qui défoule dès sa jeunesse son ambition. Il étudie la médecine pour obtenir l’assurance d’un gagne-pain, mais rêve en réalité d’être un savant… La découverte de l’hypnose par Charcot le lancera peu à peu sur la voie qui deviendra la sienne : celle de la psychanalyse. Et de découverte en découverte, le lecteur pourra revenir sur les avancées les plus marquantes du docteur viennois…


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Freud se distingue des autres bandes dessinées à tendance biographique par une plongée dans la subjectivité même du personnage. Aucun narrateur extérieur ne prend en main la narration : le tout est laissé au jugement de Freud, qui s’exprime en sa propre personne. Un peu de changement ne fait pas de mal… hélas, l’artificialité du processus est flagrante et rend immédiatement compte de la volonté trop didactique (au point d’en être réductrice) de Corinne Maier. Vous avez envie d’en savoir un peu sur Freud, mais pas trop quand même ? Bonne pioche ! Voici dans cette bande dessinée le minimum légal à connaître sur le personnage pour comprendre les références qui peuvent lui être faites dans la vie quotidienne ou pour épater un bon ami dont notre pulsion de vie –à travers Eros- se serait entiché et aurait envie d’impressionner... Parmi les petites histoires les plus connues, on retrouvera le cas d’Anna M., l’homme au rat, le petit Hans et sa terreur des chevaux et le mythe d’Œdipe. Des petits détails de la vie de Freud nous seront dévoilés, qu’il s’agisse de sa vie privée, de sa vie familiale, de ses ambitions intellectuelles ou de sa fin de vie.


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Le travail au dessin d’Anne Simon est presque plus remarquable que le scénario de Corinne Maier et cherche à intégrer une once d’originalité par le biais de couleurs qui n’appartiennent pas à la gamme de la réalité. On vire plus souvent aux ambiances oniriques –presque psychédéliques, quoique se cantonnant quand même à la douceur des tons. Beaucoup de symboles sont utilisés pour représenter des évènements abstraits de la vie de Freud (sa conceptualisation de l’inconscient, du moi, du surmoi…) et tentent de pallier tant bien que mal aux raccourcis faciles qu’emprunte le déroulement de la biographie. Toutefois, l’usage à outrance des symboles rend parfois le remplissage des cases bien laborieux et pousse à s’interroger sur la nécessité de recourir au dessin…et donc à la bande dessinée… mais Corinne Maier aurait alors dû étoffer davantage ses textes.



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En dernière page, Corinne Maier se permet de ressusciter Freud et de le placer devant un écran de télévision afin que celui-ci constate, avec horreur bien sûr, ce que la parole des média a fait de son édifice culturel. « Quatsh ! Que de bêtises débitées en mon nom ! », vocifère-t-il en brandissant les poings, l’air visiblement indigné de se faire le spectateur de la récupération erronée de son œuvre. Dommage que Corinne Maier n’ait pas placé notre bon vieux psychanalyste devant sa propre réalisation… on aurait bien aimé savoir ce qu’il en aurait pensé !


Citation :
Je ne fais que tâtonner… J’envie les mathématiques et leur science exacte. Moi, je plane dans les airs. Faute d’y voir clair, je tente de voir les obscurités. Je ne suis jamais content. Et le temps m’est à présent compté…


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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyLun 31 Déc 2012 - 15:25

Bonne nuit Punpun - Tome 1 (2012) d’Inio Asano


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Si Punpun a la tête d’un petit canari tout jaune, ce n’est pas qu’il soit victime des dernières radiations en date survenues au Japon… Ce n’est pas non plus qu’il se nourrisse de graines et de vermisseaux car, comme tous les petits garçons de son âge, il préfère manger des tartes au chocolat, des currys doux à la pomme râpée et des fondues savoyardes ( !). Ce n’est pas non plus qu’il se passionne pour les oiseaux, car il préfère passer son temps libre à étudier les étoiles dans l’espoir de découvrir une nouvelle planète sur laquelle il pourrait se réfugier avec Aïko, sa romance secrète… A moins qu’il ne se contente d’un prix Nobel de physique, ce qui ne serait pas mal non plus à défaut d’autre chose.


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En fait, si Punpun a l’apparence d’un canari, c’est peut-être simplement parce que son créateur, Inio Asano, a voulu le distinguer du reste des personnages. Après tout, il est vrai que Punpun est un peu différent des enfants de son âge… et quel meilleur endroit que l’école pour laisser aux différences la possibilité de s’exprimer et de se comparer ? Lorsque ses camarades sont bruyants, extravertis et polissons, Punpun se place en retrait, plus observateur qu’acteur, reste calme et discret et fait preuve d’une naïveté qui n’est plus de son âge. Même les adultes sont plus délurés que lui, et l’extravagance des comportements, que l’on retrouve typiquement dans le manga japonais, s’exprime ici dans toute son exubérance. Le maître de la classe de Punpun s’emporte dans des jeux de rôles dramatiques, les directeurs de son école s’amusent comme des petits fous dans leurs bureaux, et les petits vieux des maisons alentours refusent de laisser le temps agir sur leur énergie et leur entrain… Même Dieu est plus décontracté que Punpun, qui lui reproche d’être trop sérieux et de se poser trop de questions ! Quant à ses parents, ils sont extrêmes eux aussi, même s’ils penchent plutôt du côté négatif de l’exubérance en déchaînant, du côté de la mère, des craintes et des inquiétudes pathologiques et, du côté du père, une violence qui l’entraînera en prison.


Lorsque l'instituteur devient fou...
shot - OneShot - BD - Page 11 Punpun10

Punpun doit donc gérer beaucoup de choses. Sa petite tête de canari, inexpressive, ne permet jamais de savoir ce qu’il pense des situations qu’il vit, mais il s’exprime d’une autre manière, dans un monde imaginaire qu’Asano personnalise par des procédés graphiques judicieux. Pupun tempère un peu la folie des personnages qui l’entourent et offre des trêves relatives qui permettent au lecteur de souffler un peu, là où la fatigue aurait rapidement pu apparaître.


Punpun et Dieu...
shot - OneShot - BD - Page 11 Punpun11

Finalement, si l’on met de côté cette audace graphique qui a coûté à Punpun son apparence humaine, Bonne nuit Punpun ne se distingue pas spécialement des autres mangas décrivant le chemin de maturité d’un jeune personnage. La lecture est agréable et se ponctue de nombreux évènements pas forcément prévisibles, mais n’apporte rien de neuf au panorama déjà bien encombré du manga.


Citation :
Quel est le sport dans lequel une boule pend, où il faut passer une tige dans un trou et où le mouvement des hanches est important ? Tu as une idée ? Je te vois venir…petit polisson. Il s’agit du bilboquet.


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Faudrait savoir... :
Citation :

Il faut que vous ayez de grands rêves dans la vie !! Rêvez, ça ne coûte rien ! Bien sûr, il est important de tenir compte de votre personnalité et de la situation financière de votre famille !! Sinon, l’avenir risque d’être assombri par de grandes déceptions !!
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyJeu 17 Jan 2013 - 19:23

Personne ne me fera de mal (2012) de Giacomo Monti


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Les extra-terrestres ne mènent pas une vie facile… Sitôt on les évoque et hop ! une silhouette verte filiforme se dessine, sur laquelle se dresse une tête hydrocéphale dotée de deux yeux de mouche… Symbolique ultime, imagination nullissime. Mais au moins, on sait à quoi s’attendre.

Ainsi, lorsque l’on ouvre Personne ne me fera de mal, dont la couverture représente un de ces extravagants énergumènes spatial, on s’étonne tout d’abord de ne voir figurer que de piètres et banals êtres humains, ceci d’autant plus que l’humanité, telle que la conçoit Giacomo Monti, est bien triste. Moche au dessin, moche dans la conversation, moche dans les ambitions, et même moche dans son incapacité à se rendre compte de sa laideur, toute persuadée qu’il y a là une sorte de grâce à se nourrir de fange et à se maculer de sperme avarié.


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Giacomo Monti s’amuse à représenter des existences désastreuses avec la haine puérile et impulsive d’un adolescent qu’on entend déjà dire : « Vous êtes tous des nazes, y a que moi qui suis bien ! » Lorsque de vieux célibataires se lamentent sur leur vie solitaire et égoïste, c’est à cause des bonnes femmes qui, tout le monde le sait bien, ne sont que des salopes dont la valeur est proportionnelle à la taille du bonnet. C’est bête et méchant. On sent que Giacomo Monti ne cherche rien d’autre qu’à susciter un semblant d’indignation chez son lecteur mais ses tentatives échouent à chaque fois et tombent complètement à côté de la plaque. Il suffirait que ses personnages retournent entre les bras de leur mère se prendre une bonne tétée de lait chaud pour qu’ils fondent à nouveau comme des guimauves, et que leur haine factice se transforme en amour halluciné à la Bisounours. D’ailleurs, on soupçonne Giacomo Monti de bien connaître l’univers de Winnie l’Ourson et consorts… Ses histoires sont aussi pathétiques et lorsque près de dix pages viennent nous raconter le désastre quasi-apocalyptique qu’a provoqué la découverte d’un petit chat mort sur un parking, on repense à nos propres émois d’enfants, quand, alors que nous n’avions que cinq ans, cet évènement nous semblait être le plus déchirant qui puisse nous arriver.



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Personne ne me fera de mal ? A voir… En tant que lecteur, ce n’est pas l’envie de violenter ce vilain petit ouvrage qui manque… Mais voilà que dans les dernières pages de l’album, les extraterrestres font enfin leur apparition… On ne comprend rien à leurs manifestations, on ne sait même pas s’ils sont vraiment là ou non, à se dandiner comme s’ils en avaient toujours eu l’habitude sur la surface terrestre… Bon, leur arrivée ne change pas grand-chose. La vie des hommes est toujours aussi naze, aussi petite et aussi mesquine. Les extra-terrestres finissent par se casser. Ils ont bien raison. Ce sera peut-être le seul évènement qu’on approuvera dans cet album, parce que le seul auquel on s’identifiera spontanément, avec toute la superbe que provoque le sentiment de l’évidence.


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Citation :
Un chat mort ! C’est moche !


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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptySam 19 Jan 2013 - 18:39

Les Profs – Tome 1 : Interro Surprise (2000) de Pica & Erroc


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S’il y a des Profs qui n’ont plus de secrets pour moi, ce sont bien ceux de Pica et d’Erroc… Je me souviens avoir fait leur connaissance dans le Journal de Mickey, alors que je n’étais qu’une pauvre élève de l’école primaire qui, à ce titre, n’avait pas encore le privilège de pouvoir parler de « professeurs », se contentant d’un seul et unique « instituteur » avec tous les risques que ce monopole de l’instruction comportait. Je découvrais alors les aventures des Profs à raison d’une planche par semaine, et leur univers accessible mais imprévisible me fascinait. Pica et Erroc savent instiller un humour joyeux mais toujours relevé d’une pointe de méchanceté bon enfant, auxquels viennent parfois se mêler les stéréotypes de la culture scolaire de base : Socrate, Napoléon, Jules César…


Chacun des Profs se distingue par son caractère particulier, sans qu’il ne devienne forcément une caricatures de lui-même. Ainsi, même si on trouve des extrêmes tels que le professeur de chimie qui rêve de tout faire péter à base de cocktails Molotov, les autres professeurs ont des personnalités plus nuancées. Aussi banals que vous et moi en situation de vie courante, ils commencent seulement à révéler certaines de leurs caractéristiques lorsque les conditions l’exigent.


En relisant ce premier volume de la série, tous les souvenirs qui y étaient liés me sont réapparus –preuve qu’ils avaient laissé une trace tenace dans cette partie de mon cerveau consacrée aux lectures ! But du jeu : relire les deux premières cases de chaque planche pour laisser réapparaître la suite et la chute de l’histoire, et vérifier ensuite que ma mémoire n’est pas défectueuse. Surtout, redécouvrir de vieilles histoires aimées, même si elles ont aujourd’hui perdu du charme que j’y attachais lorsque j’étais plus jeune. Car évidement, même si maintenant je ne peux m’empêcher de voir certains défauts ou tartufferies dans cet album, reste le plus important : j’aime ces Profs car ils ont été parmi les premiers que j’ai décidé d’intégrer à mon monde imaginaire –et pour cela, ils devaient quand même bien avoir quelques qualités…

Citation :

- A POIL VIEILLE PEAU ! Je rentre dans la classe et qu’est-ce que je vois écris sur le tableau ?
- A poil vieille peau ?
- Parfaitement ! C’est scandaleux ! Cette génération de S.D.F. ne respecte plus rien, ni personne !
- Pourtant comme disait Socrate, c’est dans les vieilles peaux qu’on fait les meilleures soupes !



Blagueur avec les élèves...


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...mais aussi avec les collègues :

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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyLun 21 Jan 2013 - 19:44

Singeries (2012) de Denis Petit & Humphrey Vidal


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Assez des querelles religieuses, politiques ou idéologiques ! Que cherchons-nous à travers tout cela, sinon à donner à l’homme une importance qui n’est pourtant que toute relative ? En tout cas, ce ne sont pas les Singeries de Denis Petit et de Humphrey Vidal qui viendront démentir cette hypothèse, et pour la justifier, comble ultime, on les observe tout d’un coup se lancer dans une énième querelle… biologique cette fois !


Avec l’appui de Guillaume Lecointre, professeur au muséum national d’Histoire naturelle, le dessinateur et le scénariste décident de mettre en scène l’affrontement idéologique qui oppose les partisans de l’Intelligent Design et ceux du darwinisme. D’un côté, de solides mastodontes bestiaux, cachant leurs penchants primaires derrière des panoplies costards/attaché-case, gros cigares et limousines –des commerciaux acharnés convertis au catholicisme par la force du capitalisme. De l’autre, des scientifiques convaincus que l’homme se situe dans la droite lignée du singe, acharnés à mettre la main sur des preuves concrètes de cette descendance. Et entre les deux, un pauvre érudit déçu par l’humanité qui, pour en finir avec la vie, décide de se suicider par une overdose de mots… Surprise ! le suicide échoue… la métamorphose opère… Le vorace ès lettres devient Franky Stein ! Suivront d’autres références littéraires de pacotille dont notre érudit, transformé en homme-singe, semblera se repaître d’autant plus qu’il se rapproche du primate, comme s’il jouissait davantage du schisme provoqué par cet assemblage de bestialité et de culture, que des mots en eux-mêmes, instrumentalisés et faits objets de démonstration au profit d’une histoire dont on aura du mal à cerner l’intérêt…


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Que cherchent à nous dire ces Singeries ? Outre le fait que les théories concernant l’origine de l’homme doivent être approchées avec un esprit critique, visant à ne jamais faire perdre de vue que des intérêts économiques et le pouvoir motivent avant tout l’Eglise, l’Etat et la Science, le personnage de Franky Stein vient introduire une autre problématique : qu’est-ce qui distingue l’homme du singe ? Si l’homme aime se gargariser de grands mots, peut-on toutefois se contenter de cette particularité pour affirmer sa supériorité ? Les questions sont légitimes, bien qu’elles décèlent un fond de tartufferie… Dommage en revanche que leur représentation soit aussi grossière… comme si, pour convaincre le lecteur de la place relative de l’homme sur l’échelle de l’évolution, il était nécessaire de lui donner un grand coup de coude dans les côtes et de le faire choir tout en bas de l’échelle, aux côtés des vers et des amides.


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Franky Stein, citant des vers de Rimbaud et s’inspirant de la prose de Rabelais –pour ne pas faire trop original- promène son corps d’homme-singe érudit au milieu d’un monde rempli d’hommes avides bien incapables de balbutier le moindre début d’alexandrin. Le voici épanoui, rebondissant comme sur des ressorts et traçant sa voie entre méchants humains, gentils humains, et humains menteurs, alors que son passé d’érudit cultivé n’avait été qu’un triste chemin… Alors qu’on croyait avoir affaire à un album « raisonnable », dans le sens où il commence par exacerber la vanité des prétendants à la vérité intellectuelle, on finit par se retrouver avec un remake du mythe du « bon sauvage » -ou plutôt devrait-on dire du « bon ancêtre ». Citons, pour couronner le tout, cette question que se pose Guillaume Lecointre dans la préface : « Qui est prêt à accepter cette idée que nous sommes des singes ? », et nous comprendrons alors que les Singeries, en voulant se donner les atours du scepticisme intellectuel, ne cherchait en réalité qu’à véhiculer une thèse réduite en une image simpliste. Voici ce qui distingue l’homme du singe : l’art de jouer la bête lorsqu’il n’arrive pas à être autre chose qu’un homme.


Citation :
- Alors mettez-moi un Gargantua, s’il vous plaît, sans couverture.
- A gauche, troisième rangée.
- Et un Rimbaud, « Une saison en enfer », en pur fil.
- … Et avec ça ?
- Un café, l’addition !
- On dirait que t’as faim d’apprendre ! A l’occase, viens partager un tome ou deux, c’est moi qui régale !
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyJeu 24 Jan 2013 - 19:37

La Gröcha (2012) de Peggy Adam


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La Gröcha est un récit qui nécessite des prérequis. Ceux-ci, vous ne les trouverez ni en préface, ni en quatrième de couverture, ni même ailleurs dans l’album. Il sera de votre devoir d’aller les chercher en arpentant les magazines et les chroniques web. Sans cela, vous pourrez éventuellement tenter de comprendre par la propre force de votre esprit le ressort de l’intrigue de la Gröcha, mais lectures sur lectures ne changeront pas cette unique certitude : celle de n’être sûr de rien.


shot - OneShot - BD - Page 11 Grocha10

Ce défaut de causerie peut être considéré comme une qualité : prenons le cas du lecteur qui aime qu’on le laisse se dépatouiller avec une histoire… D’accord, mais pour ma part, celle-ci m’a quand même finalement semblée très typique et convenue… Qu’on fasse des efforts pour s’irriguer jusqu’à la moelle d’un prodige d’invention de l’auteur, je veux bien, mais alors, que le dépaysement soit conséquent… Pourquoi prendre un ton prophétique et se parer d’emphases allégoriques pour se contenter de raconter une histoire dont le déroulement semble déjà tout tracé dès la première page ? Serait-ce justement pour tenter de dissimuler cette faiblesse ?


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La Gröcha fait partie de ces ouvrages esthétiques et vaguement poétiques auxquels il est finalement bien difficile de trouver des défauts qui sautent aux yeux. Le travail au dessin est achevé et peaufiné, les atmosphères et les ambiances –en plus d’être romantiques- se veulent chargées d’une émotion qui donnerait de la densité à l’ouvrage… Dans ces conditions, ce serait presque hérétique d’avouer que la lecture n’a procuré aucun intérêt… Et pourtant, c’est bel et bien le cas…


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Avec tristesse, on referme cette Gröcha qui semblait bien prometteuse mais qui finalement laisse de marbre…
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyLun 28 Jan 2013 - 19:16

Conquistador – Tome 1 (2012) de Dufaux & Xavier


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Cette histoire de conquistadores me laisse perplexe et son existence ne me semble absolument pas nécessaire. Peu de choses à dire, un peu plus seulement à montrer… Dans ce cas, il aurait peut-être été plus honnête et valorisant de se contenter d’un album constitué uniquement de dessins.


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Philippe Xavier a voulu travailler de manière traditionnelle et ne pensait certainement pas pouvoir vendre ses dessins s’il ne les accompagnait pas d’un minimum de trame scénaristique. C’est à ce moment-là qu’apparaît Jean Dufaux et son histoire de Conquistador, apte à abrutir n’importe quel lecteur par la force de sa répétitivité. Cette histoire de méchants européens qui viennent squatter les territoires incas pour s’accaparer tout l’or et les trésors des temples, ne me dites pas que vous ne l’avez jamais lue, jamais vue, jamais entendue ! Vous la connaissez déjà par cœur… Et vous appreniez, à l’issue de ces récits dignes des plus grossiers fabliaux, qu’il était mal –très mal- de vouloir dérober les richesses non monnayables des peuples sauvages. Encore une fois, Jean Dufaux nous assène cette morale sans oublier d’incorporer tous les éléments dramatiques qui donneront à l’histoire un semblant de rebondissements. Ici aussi, rien que du classique : des empoisonnements, des adultères, des tromperies, des affrontements… le lectorat est clairement ciblé : bourré de testostérones, on lui sert des personnages à la musculature bien développée (sauf s’il a un cerveau) et des femmes en petites tenues affriolantes (sauf lorsqu’elle jure et qu’elle se bat comme un homme).


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Alors, certes, l’immersion en territoire inca n’est pas désagréable et permet à Philippe Xavier de se perdre en jungles luxuriantes et en temples resplendissants, mais quelle barbe de devoir se taper l’histoire qui va autour… Dans un déclamatoire faussement anticapitaliste clamant qu’il est mal de piller et de détruire les civilisations exemptes de vénalité, Philippe Xavier et Jean Dufaux agissent exactement à l’inverse de la morale qu’ils revendiquent -à considérer que le neuvième art est encore un territoire exempt préservé dont ils seraient les conquistadores affamés.


Citation :
Des empires peuvent disparaître tandis que montent la bassesse et la corruption. Ainsi va notre monde. Mais tant que je suis en vie, je combattrai la vilenie, l’injustice et l’irrespect envers nos Dieux.


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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyLun 11 Fév 2013 - 16:00

Le Troglodyte au supermarché (2003) de Michaël Terraz


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Le troglodyte sort de sa caverne et, pointant le bout de son nez apeuré au grand frais hivernal, que découvre-t-il avant toute autre chose ? Des supermarchés…

Cet album se vend comme une bonne brique de beurre : « 276 grammes » de bande dessinée, dont « 26 grammes d’humour, d’érotisme et de suspense », élaborés par « 6 excellents dessinateurs suisses ». Comme pour toute publicité qui se respecte, on ne doutera pas du caractère intentionnellement mensonger de cette réclame : plutôt que 26 grammes d’humour, d’érotisme et de suspense, les associations de défense des consommateurs relèveraient bien mieux une composition totale de 30% d’humour, 50% de cynisme, 10% de suspense, 9% de foutraque et un seul et unique petit pourcent d’érotisme…


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La cohérence du produit est toutefois parfaitement respectée : vos papilles ne seront jamais désagréablement surprises par un arôme discordant, par une texture dissonante ou par un ingrédient inopportun. Bien qu’issu de six prairies suisses différentes, l’album trouve son unité dans ce thème cher aux nouvelles générations de la contre-culture : la vilipende des centres commerciaux. Le point de vue troglodyte, qu’on imaginerait innocent et dénué de tout préjugé, n’est qu’un leurre destiné à inculquer chez le consommateur le goût et l’habitude des produits estampillés « contestataires », quoique des études menées en aval nous surprendraient certainement en nous révélant les conditions d’élevage industrielles de ces opinions.


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Il n’empêche, le résultat est là : Le Troglodyte au supermarché se laisse allègrement déguster. La variété de ses contributeurs, aux styles divers mais cohérents, permet de renouveler sans cesse l’approche et dispense le lecteur de tout ennui. Le troglodyte donnera envie aux aventuriers rodés des centres commerciaux de se parer à leur tour d’un regard casanier et primitif, à la manière d’Andy Warhol, cet autre troglodyte qui deviendra finalement le chantre de toute une génération d’occidentaux, lorsqu’il prétendait, en toute ingénuité : « Je pensais que les grands magasins étaient les nouveaux musées… »
Le Troglodyte au supermarché ne serait alors qu’un amusant catalogue de ces expositions…


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Exposition troglodyte ?
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyMer 13 Fév 2013 - 18:48

J’ai le cerveau sens dessus dessous (2009) de David Heatley


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On ne sait pas trop d’où surgit ce David Heatley mais lorsqu’on ouvre les pages de son album, l’impression de déjà-vu est déstabilisante : pour un peu, on croirait reconnaître la plupart des grands noms de la bande dessinée indé américaine. Plus que le dessin, ce sont les sujets abordés qui fédèrent autour de cet auteur : Chris Ware en tête, mais aussi Harvey Pekar, Robert Crumb ou Dan Clowes. On aura donc deviné quel est le sujet de conversation préféré de David Heatley : sa vie.


J’ai le cerveau sens dessus dessous peut indiquer à la fois l’état causal et consécutif de la production graphique de David Heatley. Peut-être parce qu’il ne comprenait rien à ce qu’il avait vécu jusqu’alors, le dessinateur a décidé de procéder à un rangement biographique méticuleux en cinq parties : le sexe, la race, la mère, le père, la famille. Ces cinq catégories suffisent pour contenir ce qui importe le plus à l’auteur. Mais on imagine bien que le rangement n’a pas dû s’effectuer de manière sereine et détendue. Pour preuve, les productions de David Heatley sont anarchiques et soumises au fluctuant. Si chaque chapitre s’ouvre par une courte série de planches au format classique, bien vite leur succèdent des assemblages de cases de longueur variables, s'étendant aussi bien sur plusieurs pages que sur une ou deux cases.


Des exemples parmi tant d'autres d'illisibilité, qui s'étendent parfois sur plusieurs dizaines de longues pages...

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La vie de David Heatley n’a rien de particulier qui justifie qu’on fournisse l’effort incommensurable de surpasser l’illisibilité de ses planches. Illisibilité à la fois graphique –car certaines planches sont tellement enserrées les unes entre les autres, tassées à la va-vite, qu’on louche pour apercevoir quelque chose du dessin ou du texte-, mais illisibilité également conceptuelle –car David Heatley nous balance tous les évènements de sa vie, sans ordre et de manière décousue. Matière brute à l’état brut : on peut apprécier la spontanéité, mais c’est bien la seule chose qui semble valable dans tout cet amoncellement de parcelles de vie pour lesquelles le dessinateur semble vouer une fascination qui virerait presque à l’onanisme. Et ainsi on découvre les périodes palpitantes de son existence : « moi en train pratiquer ma première sodomie », « moi dans mon premier appartement d’étudiant », « moi au restaurant avec papa », « moi en train de dessiner »… Le tout s’enchaînant de manière saccadée, entraînant une lecture plutôt désagréable.


"Moi en train de couper un vieux jean" : vraiment inintéressant

shot - OneShot - BD - Page 11 Cervea12

"Moi en train de me regarder l'anus" : vraiment drôle

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On l’aura donc compris : lire la vie de David Heatley provoque beaucoup de désagréments cérébraux pour un intérêt moindre –sauf si l’on se passionne pour les déboires insignifiants à la mode « Loft Story ». Dommage que l’auteur nous file son mal de tête et qu’il parvienne à nous transmettre sa sensation d’avoir le cerveau sans dessus dessous. Peut-être que s’il avait accepté d’organiser et de trier ses dessins pour n’en garder que le plus pertinent, plutôt que de tout conserver avec la précaution d’un fétichiste et de nous bourrer le crâne de détails inutiles, l’originalité et la fantaisie de son point de vue sur les évènements se seraient révélés au-delà du sentiment de n’être confronté qu’à un bloc nauséeux de dessins minuscules.
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MessageSujet: Re: OneShot - BD   shot - OneShot - BD - Page 11 EmptyVen 15 Fév 2013 - 15:49

La mort dans l’âme (2011) de Sylvain Ricard & Isaac Wens


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La mort dans l’âme, nous l’avons tous car, comme disait Edward Bellamy : « La vie est une maladie sexuellement transmissible ». Mais il est certaines personnes pour lesquelles cette vérité apparaît de façon plus flagrante que pour d’autres. Ainsi en est-il pour M. Vanadris : atteint d’un cancer généralisé dont la masse totale culmine à 3kg –excusez du peu-, il est interné dans un centre de soins palliatifs. Son fils, qui semble être la seule famille qui lui reste, vient régulièrement lui rendre visite entre deux projets de voyage avec sa femme, bientôt mère de leur enfant. Autour de ce joli contraste de personnages, symboliques de l’opposition entre Thanatos et Eros, nous sera évoquée l’évolution de la maladie de M. Vanadris comme prétexte à un débat sur l’euthanasie et le droit des hommes à disposer librement de leur vie –et donc de choisir le moment de leur mort.

Le parti pris de Sylvain Ricard semble tout d’abord radical et rend d’ailleurs la lecture très désagréable. M. Vanadris se fait le porte-parole des opposants au système médical. Rageur parce qu’il n’espère rien du centre de soins palliatifs qu’il intègre, et parce qu’il est également désarmé face à l’inextricabilité de sa situation, il se monte sous ses pires aspects. Il est bien difficile pour le lecteur de sentir la moindre compassion vis-à-vis de ce personnage qui représente le refus de l’acharnement thérapeutique. Si sa légitimité quant à cette position est entière, puisqu’il est, après tout, le principal concerné, ses arguments sont inconsistants et s’organisent sous la forme d’une révolte PIE : Puérile, Ingrate, Egoïste. Devant l’aide qu’on lui propose et les attentions qu’on lui fournit, son visage reste figé, ronchon, et ses lèvres crispées ne s’ouvrent que pour siffler ce genre d’accusations culpabilisantes : « Un tuyau. J’ai commencé une collection. Il n’est jamais trop tard » ou « J’ai l’impression d’être un pantin que les médecins manipulent à leur gré ». Même si cette attitude de rejet semble parfaitement compréhensible, son illustration est si grossière qu’elle aurait de quoi faire perdre la face aux partisans de la mort noble –celle qui se pratique en pleine souffrance, sans l’aide de la morphine ni des soins palliatifs.


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Le fils de M. Vanadris apparaît d’abord comme une extension au comportement de son père. Le voyant souffrir de sa situation, et se sachant inutile pour l’aider à surmonter cette ultime étape de sa carrière, il élude rapidement ses premières visites au sein du centre de soins palliatifs et déverse sa rage à l’extérieur, l’évacuant sur des êtres humains qui ne sont aucunement responsables du cancer de son père ni de son incapacité à mobiliser suffisamment de courage pour traverser cette épreuve.


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M. Vanadris et son fils vont essayer de comprendre ce qu’il leur arrive –même si le premier ne souhaite pas particulièrement faire évoluer sa façon de penser- en se confrontant à un psychologue, à un curé et à des médecins. Si on aurait préféré que le discours religieux ne nous bassine pas pendant des heures avec un discours pseudo-révolutionnaire en fait très convenu (« Si la vie est un don, alors je peux en disposer comme je le souhaite », et patati, et patata…), les conversations avec les médecins constituent la bonne surprise de cet album. Jusque-là, M. Vanadris et son fils vivaient leur expérience avec l’intensité de personnes déstabilisées par les évènements de la vie et réagissaient en conséquent, avec une violence injustifiée et ridicule ; les médecins viendront modérer le propos et corriger un discours qui restait jusqu’alors vraiment trop simpliste. Enfin, un peu de mesure et de sagesse dans les idées. Certes, ce n’est pas là ce qu’on peut exiger de deux personnes confrontées à la mort mais, après tout, nous lisons une fiction, et si celle-ci est incapable de nous apporter davantage que la réalité –pire, si elle caricature cette réalité !- alors, quel en est l’intérêt ?


Le décalage entre l'expérience de M. Vanadris et ses propos est parfois surprenant. La psychologie peu fouillée des personnages donne l'impression que ceux-ci ne servent qu'à illustrer une thèse :

Citation :
- Dans quelques jours, une semaine ou deux au plus, tu ne vas plus me reconnaître.
- Qu’est-ce que tu racontes ?
- Ce que je veux dire, c’est que je ne ressemblerai plus à ce que tu connais. Je sens mon corps devenir quelque chose qui n’est pas moi, que je ne veux pas être. Et puis avec les doses de morphine qui augmentent, je vais avoir des phases où moi non plus je ne te reconnaîtrai plus. Ils me l’ont dit. Et ce n’est pas l’image que je veux que tu gardes de moi. Je sais que c’est idiot, que c’est presque de la coquetterie, mais j’y tiens.


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