Le problèmeCette pièce d'1h est apparemment la première pièce de théâtre de François Bégaudeau qu'on connait bien depuis son rôle dans l'adaptation par Laurent Cantet de son roman "Entre les murs". J'ai eu la bonne surprise de retrouver sur scène
Jacques Bonnaffé et
Emmanuelle Devos (elle y était finalement!) entourés de deux jeunes acteurs épatants,
Anaïs Demoustier et
Alexandre Lecroc.
Une seule scène en temps réel. Un salon d'appartement bourgeois. Un cadre autour de ce salon suggérant une sorte d'écran à l'heure de la téléréalité. Une mère vient d'annoncer par lettre à son mari et à ses enfants (la fille n'a pas encore lu cette lettre) qu'elle allait s'en aller pour vivre avec un autre homme. L'intérêt étant qu'elle est alors présente à leurs côtés, pour un dernier repas, afin de recueillir leurs réactions respectives et d'affronter courageusement les conséquences de son choix. Les dialogues s'enchainent avec réalisme et beaucoup de justesse. Fils et père font alliance un premier temps pour la culpabiliser alors que la fille essaie juste de comprendre les motivations de ce choix. C'est l'égocentrisme des mâles blessés dans leur orgueil qui préfèrent se plaindre de leur inconfort plutôt que de vouloir écouter cette femme qui a voulu cherche le bonheur ailleurs, ne se sentant plus heureuse dans un couple dont le désir s'est éteint. Et cette question du bonheur fait d'ailleurs l'objet d'un débat philosophique au milieu de la pièce à travers une conversation téléphonique entre la fille adolescente et une amie de lycée qui doivent rendre une copie sur le thème: "La conscience compromet-elle le bonheur". Débat auquel participent le frère et les parents. Vient le moment de mettre un terme à cette confession et la pièce s'achève par un moment d'émotion lorsque la mère est touchée par "l'humanité" de sa fille qui lui souhaite seulement d'être heureuse. Elle part et les autres préparent le repas...
J'ai aimé ce mélange de simplicité anecdotique façon téléréalité et de réflexion philosophique légère qui met à jour le double-lien des échanges, la difficulté à s'écouter vraiment et à s'intéresser à l'autre plus qu'à soi-même, l'impossibilité d'envisager le bonheur de l'autre s'il compromet le sien propre. Les dialogues font mouche et l'interprétation parfaite. Une bonne soirée même si la pièce ne révolutionnera pas nécessairement le genre.