Christophe Honoré

Ah Kathel, tu me rassures un peu
Je me souviens de la recette des endives braisées, mais pas de les avoir vus les manger!

aériale a écrit:

Ah Kathel, tu me rassures un peu
Je me souviens de la recette des endives braisées, mais pas de les avoir vus les manger!

Ben non ils mangent la tartiflette, sont pas ouf !

Non ma fille, tu n'iras pas danser




Inconditionnel de Christophe Honoré j'étais et inconditionnel de Christophe Honoré je reste plus que jamais. J'ai trouvé ce film splendide et je ne comprends pas les réserves entrevues au-dessus.

Je commence par ce que ce film n'est pas. On pourrait penser qu'Honoré lorgne du côté de ces films sur la mythologie familiale chers à Desplechin avec cette mobilité de la caméra se mettant au centre de cette ronde des regards d'une génération sur une autre, ses barrières, ses névroses. Mais là où Desplechin m'agace souvent, malgré son grand talent, par une ambition proche de la prétention et surtout par une approche psychanalytique trop ostentatoire, Honoré a une grâce, une mélancolie, une force visuelle parfois à la lisière de l'onirisme qui me touchent beaucoup. Son regard a quelque chose de romantique finalement.

L'image est magnifique. Les plans de cette campagne bretonne, de cette maison, de ces espaces minéraux, végétaux ou aquatiques donnent une atmosphère presque archaïque, mythologique. Que ce soit ce fameux conte breton qui pourrait être une imagerie d'Epinal esthétisante et qui se révèle sombre et beau, presque comme un tableau de Courbet (je suis beaucoup dans l'enterrement à Ornans ces derniers temps mais on y songe) en donnant un arrière-plan légendaire à l'histoire et surtout à la psychologie du personnage interprété par Chiara Mastroianni (ce conte étant finalement la vision que son fils porte sur elle, jeune femme qui se détruit et détruit autour d'elle dans sa soif d'absolu et de vérité). Que ce soit cette forêt où les petites filles se perdent entre les rochers comme dans Picnic at Hanging Rock de Peter Weir. Ou encore les plans ou Chiara semble se fondre dans la nature comme si elle s'enterrait vivante à l'image de la chute de la jeune femme du conte. Peut-être aussi se lover dans un ventre maternel plus apaisant.

Ensuite il y a cette complexité des relations familiales où finalement les 3 femmes ne font que répéter les mêmes schémas de révolte et de soumission, d'insatisfaction et d'ambivalence permanentes, de frustrations. Je trouve formidable la façon dont l'amour peut émerger par instants malgré l'incommunicabilité, l'hystérie et les désillusions de chacune. Chiara est la plus hypersensible, la plus vulnérable et elle ne fait que chercher l'authenticité, la liberté derrière tous ces doubles liens destructeurs sans y parvenir. On ne fait que la convaincre de son instabilité, de son incapacité à gérer sa vie et à s'occuper de ses enfants. Et elle semble toujours au bord de l'effondrement dépressif mais elle se redresse. Elle est intègre et elle devient franchement bouleversante quand elle se rend compte qu'elle est en train elle-même de reproduire les mêmes schémas destructeurs, qu'elle blesse, rejette quand elle voudrait retenir. Elle est une incroyable actrice, fascinante à chaque plan.

Il y a la musique d'Alex Beaupin qui a une tonalité vaguement folklorique (je croyais au départ que c'était Yann Tiersen) avec de très beaux arrangements symphoniques qui renforcent le côté élégiaque du film. Et cette chanson finale d'Antony Hegarthy: "Another World" qui m'a laissé les larmes aux yeux. Car Chiara cherche constamment cet ailleurs, cet autrement qu'elle ne trouve pas.

Marina Fois et Marie-Christine Barrault sont géniales et fabuleusement bien dirigées. J'ai moins accroché avec le frère d'Honoré, Julien, qui reprend la figure que Christophe aime tant de l'éternel adolescent immature, désinvolte, charmeur et désarmant mais surtout très agaçant. Pourquoi pas mais son jeu ne m'a pas convaincu.

A l'arrivée un film audacieux, profond et inattendu. Un ton nouveau chez Honoré. Plus grave peut-être. Je ne sais pas quelle est la part de contribution de l'écrivaine Geneviève Brissac. En tout cas ils ont fait un beau boulot.

Coup de coeur!

Antony: Another World

La bande son du film (voir le thème auquel je fais allusion sur l'extrait 1): Alex Beaupin: Non ma fille, tu n'iras pas danser

Je te rejoins totalement , je connais ses films depuis peu , j'ai l'impression d'avoir découvert un vrai cinéaste , et pourtant au départ les sujets abordés et surtout les milieux sociaux qu'il décrit avaient tout pour m'agacer , c'est carrément l'effet inverse qui se produit , à chaque fois je suis touchée , je n'en demande pas plus au cinéma.

darkanny a écrit:

Je te rejoins totalement , je connais ses films depuis peu , j'ai l'impression d'avoir découvert un vrai cinéaste , et pourtant au départ les sujets abordés et surtout les milieux sociaux qu'il décrit avaient tout pour m'agacer , c'est carrément l'effet inverse qui se produit , à chaque fois je suis touchée , je n'en demande pas plus au cinéma.

Il avait déjà ce "plus" qui fait les grands dans son premier film 17 fois Cécile Cassard avec Béatrice Dalle. Vivement les prochains!

Je vais essayer de les voir tous

Pour info à propos de Geneviève Brissac qui co-écrit le scénario avec Christophe Honoré:

Citation :

Geneviève Brisac, romancière (un recueil de nouvelles et six romans dont le dernier, Les Soeurs Délicata, est paru en 2004), a consacré deux essais à la littérature anglo-saxonne : Loin du paradis, Flannery O’Connor et La Marche du cavalier.

J'ai vu qu'elle s'intéressait beaucoup à Virginia Woolf. Je pense qu'elle a du pas mal contribuer à la psychologie de ces beaux personnages féminins dans le film. Probablement aussi à la dimension de conte du récit compte tenu de ce qui est dit de ce roman...

Citation :

Elles sont sept. Sept petites filles, dans un grand appartement, avec leurs parents et leur grand-mère (une " princesse russe orthodoxe "), pendant la semaine de Noël. Et y a-t-il plus beau moment que cette attente de Noël ?
Mais voici que se produisent des événements étranges et graves : une rencontre dans une église, une visite à la Villa des Pins (la clinique des " malades du chou "), la disparition soudaine de la mère, l'arrivée d'une deuxième grand-mère et la mort de la première, la révélation de la liaison entre la père et la gouvernante, Méta. Sombre Noël…
Empruntant la forme du conte, Geneviève Brisac la détourne - à la manière de Karen Blixen dans Les7 Contes Gothiques - en y projetant les obsessions de ses premiers romans* : la peur de voir le monde s'effondrer, emportant avec lui ceux que l'on aime ; le mystère du bien, qu'il faut faire " sanscesse, sans le dire et sans y penser ". Et la nécessité de s'orienter dans nos vies " perpétuellement stables et instables, arrêtées et mobiles. " Dans ce drame en miniature, Geneviève Brisac réconcilie une écriture très contemporaine avec le goût du merveilleux.

Paroles de la chanson Another World:

Geneviève Brisac suite...

Apparemment son livre qui a reçu le prix Fémina semble très proche du propos du film d'Honoré. Le lien fusionnel mère/fils, l'opposition réel/imaginaire avec une Bretagne de légende, la femme-enfant qui a peur d'affronter la vie adulte. Ce thème de l'immaturité et de l'éternel adolescent est le sujet principal d'Honoré dans pratiquement tous ses films.

Week-end de chasse à la mère

Citation :

Nouk élève seule son fils Eugenio dans un appartement minuscule, et une tendre complicité les unit. C’est la veille de Noël, et ils s’apprêtent à passer les fêtes tous les deux, en solitaires, au grand dam de l’enfant : Maman, pourquoi tu as divorcé ? Il faut dire qu’il est un peu tyrannique, Eugenio ! Enfant gâté plutôt pense Martha, l’amie d’enfance de Nouk, aux idées bien arrêtées et à la vie sentimentale volcanique, qui l’incite à trouver un nouvel amour. Pleine de fantaisie et d’humour, Nouk adore observer ses semblables et mettre de la féerie dans la vie quotidienne. Elle apprend à son fils à voir et écouter, lui raconte des histoires savoureuses, et le fait vivre dans un monde magique. Ensemble ils affrontent les obstacles de la vie, et marchent ce soir dans les rues de Paris enneigé, rencontrant des clochards, un fleuriste, un chauffeur de taxi…. Mais en Bretagne, où Martha les a invités, se trame un odieux complot, visant à faire leur bonheur malgré eux.Au fil du récit fait par Nouk avec beaucoup de drôlerie, on tombe sous le charme de cette jeune femme sensible, artiste (elle était un peintre connu mais ne peint plus), confrontée à une vie trop difficile pour elle, et vivant avec son enfant un amour fusionnel. Mais Geneviève Brisac sème habilement des indices, comme le Petit Poucet ses cailloux, et on devine peu à peu que Nouk n’est pas dans la norme, trop fragile voire dangereuse aux yeux de certains. Comment laisser une femme-enfant conduire son fils vers l’âge adulte ? L’histoire devient déchirante, et on est ému par le sort qui attend cette mère pas comme les autres et trop aimante. Paru en 1996, ce livre attachant a reçu le prix Femina.

Visionné "Dans Paris"

A mon avis le plus profond des films de Christophe Honoré , le moins cabot , mais je suis frustrée car la moitié des dialogues est carrément inaudible , fin des phrases qui se meurt .....
C'est vraiment dommage , je me le repasserai comme ce que je fais de toutes façons avec tous ses films .

darkanny a écrit:

Visionné "Dans Paris"
[...] mais je suis frustrée car la moitié des dialogues est carrément inaudible , fin des phrases qui se meurt .....[...]

Oh que oui c'est frustrant ! Même plombant.

J'ai vu samedi Non ma fille tu n'iras pas danser...J'essaierai de faire commentaire pour expliquer pourquoi je me range du côté de ceux qui ont beaucoup aimé ce film...

coline a écrit:

J'ai vu samedi Non ma fille tu n'iras pas danser...J'essaierai de faire commentaire pour expliquer pourquoi je me range du côté de ceux qui ont beaucoup aimé ce film...

A suivre donc...

Marko a écrit:

coline a écrit:

J'ai vu samedi Non ma fille tu n'iras pas danser...J'essaierai de faire commentaire pour expliquer pourquoi je me range du côté de ceux qui ont beaucoup aimé ce film...

A suivre donc...

Promis...

NON MA FILLE TU N’IRAS PAS DANSER

Le film qui a divisé ses spectateurs…
Pas de tièdes, seulement des enthousiastes ou des déçus…
Je fais partie des enthousiastes…Et j’en suis d’autant plus surprise que je n’avais apprécié que moyennement les précédents films de Christophe Honoré, trop ancrés dans un univers précis éloigné du mien , empreints d’une distance que j’avais cru y déceler et qui ne tenait peut-être qu’au jeu de son acteur fétiche, Louis Garrel. Beau, c’est vrai, mais à mes yeux peu sensible dans son jeu, et je n’avais pas été vraiment touchée, concernée.

Le sujet ici est plus universel.

M’est avis que le ressenti que l’on peut avoir face à ce film correspond étroitement à celui que l’on a face au personnage de Léna.
Ce beau personnage de femme est interprété merveilleusement, tout en nuances variées et fines, par Chiara Mastroiani, simple, naturelle et sensible.

Je comprends qu’on puisse avoir du mal à supporter et comprendre Léna.
Mais ce personnage m’a bouleversée !
Au sortir d’un divorce (une séparation) elle est à la fois fragilisée et forte, déterminée. Elle sait le genre de vie qu’elle veut mener désormais avec ses enfants. Ses choix sans compromis ne correspondent pas à la
« norme » familiale alors, pour son bien, chacun de ses proches commente, juge, conseille…
Chaque parole qui se veut bienveillante est une flèche qui atteint et affaiblit Léna.
La violence s’enrobe de douceur et blesse encore plus profondément.
Personne ne veut de mal à Léna…mais tout le monde lui fait mal. Aucun n’en a conscience et c’est terrible !
On se demande jusqu’où cela va aller…si cela va enfin s’arrêter…

Pourtant il n’y aucun manichéisme. Presque tous les personnages sont à la fois détestables et touchants. C’est la force de ce film aussi. C’est sa grande réussite. Son humanité.