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| J.K. Huysmans | |
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Auteur | Message |
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Marie Zen littéraire
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Mar 9 Déc 2008 - 2:02 | |
| Bienvenue Chinaski! Je viens de parcourir ton blog , qui me plait beaucoup! | |
| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Mar 9 Déc 2008 - 9:16 | |
| Bonjour Chinasaki! Je ne connais pas Huysmans mais ce que tu dis là m'intéresse: - Citation :
- A rebours" se révèle aussi à mon avis comme l'influence principale d'Ellis pour son "American Psycho". Sur le fond d'abord, puisque la névrose de l'homme de la fin du 19e est tout simplement transposée à notre époque, imbue de paraitre, d'argent, de matérialisme. Bateman devient la projection actualisée de Des Esseintes. Puis sur le style, puisque Ellis utilise la même avalanche de détails qui pointe la névrose et nous la fait ressentir dans cette folie des descriptions.
...et du coup ai vu ton blog et tes deux dernières chroniques, dont celle qui débute par cette citation - Citation :
- Après minuit commence la griserie des vérités pernicieuses." E. Cioran
Un monde que tu décris très bien! | |
| | | Chinaski Espoir postal
Messages : 39 Inscription le : 05/12/2008 Age : 43 Localisation : Montpellier
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Mar 9 Déc 2008 - 14:20 | |
| - aériale a écrit:
- Bonjour Chinasaki!
Je ne connais pas Huysmans mais ce que tu dis là m'intéresse: - Citation :
- A rebours" se révèle aussi à mon avis comme l'influence principale d'Ellis pour son "American Psycho". Sur le fond d'abord, puisque la névrose de l'homme de la fin du 19e est tout simplement transposée à notre époque, imbue de paraitre, d'argent, de matérialisme. Bateman devient la projection actualisée de Des Esseintes. Puis sur le style, puisque Ellis utilise la même avalanche de détails qui pointe la névrose et nous la fait ressentir dans cette folie des descriptions.
J'avais lu d'abord "American Psycho" et j'ai vraiment été frappé par les ressemblances en parcourant ensuite "A Rebours", après peut-être que je me trompe mais ça m'a semblé assez limpide sur le coup. Et "A rebours" étant tout de même un classique de la littérature française, Ellis n'était sans doute pas sans le connaître. | |
| | | Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Mar 17 Fév 2009 - 15:44 | |
| UP!
Pour revenir à ce que disais Chinaski - on partage le même pseudo ailleurs - l'analogie entre A Rebours et American Psycho est reconnue. ELLIS et HUYSMANS partagent le même gout de la description. Tous deux mettent minutieusement en place la psychologie de leurs personnages mais HUYSMANS ne s’est pas senti obligé de faire de son antihéros un meurtrier pour lui donner de l’épaisseur ! ELLIS a renoncé à l'antiroman pour quelque chose de plus vendeur. Question d'époque...
Sinon ci-dessous le copier-coller - remis en forme par mes soins - d'un papier sur A Rebours écrit par un certain Ellisandre pour ce e-fanzine
Un noble
Jean des Floressas des Esseintes est issu d’une famille marquée par «la prédominance de la lymphe dans le sang », qui, peu à peu, a efféminé les hommes d’une lignée dont il est maintenant le dernier représentant. C’est un : « grêle jeune homme de trente ans, anémique et nerveux, aux joues caves, aux yeux d’un bleu froid d’acier, au nez éventé et pourtant droit, aux mains sèches et fluettes. »Il porte une barbe très blonde « en pointe » et ressemble en cela à son ancêtre « Mignon» de qui il a également hérité « l’expression ambiguë, tout à la fois lasse et habile. » Manifestement il n’a pas su se rendre intéressant aux yeux de ses parents, qui l’ont très vite confié aux Jésuites.
Eduqué par les jésuites
Des Esseintes n’est, a priori, pas un héros de roman très attachant et le lecteur va devoir s’habituer à ses particularités. Comme l’ont fait ses maîtres. Car s’il fut un élève très intelligent, il fut aussi sélectif et déterminé, excellent dans les domaines qu’il se choisissait et indifférent à d’autres. Ainsi se passionna-t-il très jeune pour la littérature latine dont il devint féru mais il ne prit aucun intérêt à l’étude du grec et ne voulut jamais en retenir le moindre mot.
Misanthrope
Les études achevées, la majorité atteinte et sa fortune entre les mains, il fallut bien que Des Esseintes se choisisse une vie. Un entourage d’abord. Sa famille ? « il subit, plusieurs fois, dans son hôtel de la rue de la Chaise, d’écrasantes soirées où des parentes, antiques comme le monde, s’entretenaient de quartiers de noblesse, de lunes héraldiques, de cérémoniaux surannés. » Lucide et impitoyable il ressentit vite : « une indicible pitié (…) pour ces momies ensevelies dans leurs hypogées pompadour à boiseries et à rocailles, pour ces maussades lendores qui vivaient, l’œil constamment fixe sur un vague Chanaan, sur une imaginaire Palestine. » Les « jeunes gens de son âge et de son monde » ? Il avait le choix entre les « bellâtres inintelligents et asservis », ces « victorieux cancres qui avaient lassé la patience de leurs professeurs, mais avaient néanmoins satisfait à leur volonté de déposer, dans la société, des êtres obéissants et pieux » et « des noceurs, épris d’opérettes et de courses, jouant le lansquenet et le baccarat, pariant des fortunes sur des chevaux, sur des cartes, sur tous les plaisirs chers aux gens creux. » …
Alors il se tourna vers « les hommes de lettres ». Mais il fut déçu par : « leur conversation aussi banale qu’une porte d’église, par leurs dégoûtantes discussions, jaugeant la valeur d’une œuvre selon le nombre des éditions et le bénéfice de la vente. » C’est ainsi que « son mépris de l’humanité s’accrut » ! Un temps il pensa se réfugier auprès des femmes mais leur « bêtise innée » n’était décidément pas supportable. Et donc « Quoi qu’il tentât, un immense ennui l’opprimait »…
Esthète
D’abord « noceur », Des Esseintes choisit de vivre en ermite car toutes ces épreuves altéraient sa santé et … sa fortune : « en folies, en noces, il avait dévoré la majeure partie de son patrimoine » A titre d’exemple, ce « repas de deuil », ce « dîner de faire-part d’une virilité momentanément morte » où dans une salle décorée de noir, « on avait mangé dans des assiettes bordées de noir, des soupes à la tortue, des pains de seigle russe, des olives mûres de Turquie, du caviar, des poutargues de mulets, des boudins fumés de Francfort, des gibiers aux sauces couleur de jus de réglisse et de cirage, des coulis de truffes (…) » puis « Lassé de ces ostentations puériles et surannées, (…) il songeait simplement à se composer, pour son plaisir personnel et non plus pour l’étonnement des autres, un intérieur confortable et paré néanmoins d’une façon rare, à se façonner une installation curieuse et calme, appropriée aux besoins de sa solitude future. » Une maison à Fontenay ferait l’affaire.
La décoration allait l’occuper un temps. Car pas question de laisser les choses au hasard. Le goût devait demeurer et s’inscrire dans les choix les plus anodins en apparence. « Ce qu’il voulait, c’était des couleurs dont l’expression s’affirmât aux lumières factices des lampes ; peu lui importait même qu’elles fussent, aux lueurs du jour, insipides ou rêches, car il ne vivait guère que la nuit ». Il fallait donc exclure le bleu qui « tire aux flambeaux sur un faux vert » mais aussi les diverses nuances du gris qui « se renfrognent encore et s’alourdissent », renoncer définitivement aux « saumons, aux maïs et aux roses dont les efféminations contrarieraient les pensées de l’isolement ». Seul l’oranger pourrait satisfaire « la nature sensuelle d’un individu vraiment artiste », Des Esseintes se distinguant du « commun des hommes dont les grossières rétines ne perçoivent ni la cadence propre à chacune des couleurs, ni le charme mystérieux de leurs dégradations et de leurs nuances » …
Et le raffinement de ses rétines l’amène à pousser loin la quête de la perfection. Insatisfait de l’effet produit par un tapis d’Orient, « il s’était dit : il serait bon de placer sur ce tapis quelque chose qui remuât et dont le ton foncé aiguisât la vivacité de ces teintes ». En regardant une vitrine au Palais-Royal, il « s’était frappé le front : une énorme tortue était là, dans un bassin. Il l’avait achetée » Las ! « Le ton de Sienne crue de cette carapace salissait les reflet du tapis sans les activer » Une seule solution : « faire glacer de l’or sur la cuirasse de sa tortue. ». Mais là encore le résultat ne fut pas à la hauteur de ses espérances. Il fallait, bien sûr, incruster des pierres précieuses. Le choix des pierres lui demanda temps et réflexion. Il voulait éviter le diamant « devenu singulièrement commun depuis que tous les commerçants en portent au petit doigt », l’améthyste « elle aussi, galvaudée aux oreilles sanguines et aux mains tubuleuses des bouchères qui veulent, pour un prix modique, se parer de vrais et pesants bijoux ». Pas plus d’intérêt pour les topazes, les émeraudes et les rubis. Il finit par choisir un savant mélange de pierres moins précieuses mais aussi moins communes, selon lui : chrysobéryls, péridots, olivines, turquoises, cymophanes, saphirines. Entre autres… Et enfin Des Esseintes put se réjouir du spectacle de « la tortue qui rutilait dans la pénombre ». Peu de temps cependant car… elle mourut bientôt : « Sans doute habituée à une existence sédentaire, à une humble vie passée sous sa pauvre carapace, elle n’avait pu supporter le luxe éblouissant qu’on lui imposait, la rutilante chape dont on l’avait vêtue, les pierreries dont on lui avait pavé le dos, comme un ciboire. »
Puisqu’il se retire à Fontenay, hors de question pour Des Esseintes, de supporter la présence de quiconque, pas même celle de ses domestiques, cependant nécessaires. Il ne conserve que « deux vieux domestiques qui avaient soigné sa mère » à qui il « céda le premier étage de la maison, les obligea à porter d’épais chaussons de feutre, fit placer des tambours le long des portes bien huilées et matelasser leur plancher de profonds tapis de manière à ne jamais entendre le bruit de leurs pas ». Donner les ordres de façon très codifiée, établir précisément « le sens de certaines sonneries », « la signification des coups de timbre, selon leur nombre, leur brièveté, leur longueur » n’était pas compliqué. Il restait encore à être le moins possible offusqué par la vue de la femme lorsqu’elle devait sortir. « il voulut que son ombre, lorsqu’elle traversait les carreaux de ses fenêtres, ne fût pas hostile, et il lui fit fabriquer un costume en faille flamande, avec bonnet blanc et large capuchon, baissé, noir, tel qu’en portent encore à Gand, les femmes du béguinage. » Et ainsi « l’ombre de cette coiffe passant devant lui, dans le crépuscule, lui donnait la sensation d’un cloître, lui rappelait ces muets et dévots villages, ces quartiers morts, enfermés et enfouis dans le coin d’une active et vivante ville. »
Erudit
Peinture et littérature nourrissent la vie de Des Esseintes. Il y trouve à la fois l’excitation intellectuelle et émotionnelle. Il connaît parfaitement la littérature latine mais aime aussi certains « modernes ». Pour ce qui est de la peinture, méprisant la vie contemporaine, il ne veut pas avoir à supporter ce qui la représente. « Aussi, avait-il voulu une peinture subtile, exquise, baignant dans un rêve ancien, dans une corruption antique, loin de nos mœurs, loin de nos jours. (…) Entre tous, un artiste existait dont le talent le ravissait en de longs transports, Gustave Moreau. » en qui il voit un « païen mystique », « un illuminé qui pouvait s’abstraire assez du monde pour voir, en plein Paris, resplendir les cruelles visions, les féériques apothéoses des autres âges ». Il voyait aussi en Gustave Moreau un peintre totalement original qui ne « dérivait de personne. Sans ascendant véritable, sans descendants possibles, il demeurait dans l’art contemporain, unique » Enfin « Il y avait dans ses œuvres désespérées et érudites un enchantement singulier, une incantation vous remuant jusqu’au fond des entrailles ». Une peinture qui parle au cœur, aux sens et à l’intellect tout à la fois, qui franchit « les limites de la peinture » Des Esseintes ne pouvait qu’adorer… Pour lui, les tableaux de Gustave Moreau suscitent la même émotion violente que « certains poèmes de Baudelaire ». Même surprise, même ébahissement!
Baudelaire qui « était descendu jusqu’au fond de l’inépuisable mine, s’était engagé à travers des galeries abandonnées ou inconnues, avait abouti à ces districts de l’âme où se ramifient les végétations monstrueuses de la pensée », Baudelaire, qui sans doute avait conforté Des Esseintes dans son pessimisme, sa névrose. En effet « A une époque où la littérature attribuait presque exclusivement la douleur de vivre aux malchances d’un amour méconnu ou aux jalousies de l’adultère, il avait négligé ces maladies infantiles et sondé ces plaies incurables , plus vivaces, plus profondes, qui sont creusées par la satiété, la désillusion, le mépris, dans les âmes en ruine que le présent torture, que le passé répugne, que l’avenir effraye et désespère. »
LA SUITE CI-APRES
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| | | Charles Envolée postale
Messages : 118 Inscription le : 15/02/2009
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Mar 17 Fév 2009 - 15:44 | |
| Sensuel aussi
« Il avait toujours raffolé des fleurs ». Bien sûr, on pouvait s’y attendre : « Depuis longtemps déjà, il méprisait la vulgaire plante qui s’épanouit sur les inventaires des marchés parisiens » et « En même temps que ses goûts littéraires, que ses préoccupations d’art, s’étaient affinés, ne s’attachant plus qu’aux œuvres triées à l’étamine, distillées par des cerveaux tourmentés et subtils ; en même temps aussi que sa lassitude des idées répandues s’était affirmée, son affection pour les fleurs s’était dégagée de tout résidu, de toute lie. » D’abord fasciné par l’ouvrage d’artiste qui imitait les fleurs naturelles, il résolut à l’inverse de trouver des « fleurs naturelles imitant des fleurs fausses ». Il se fait alors livrer « une collection de Caladiums » et d’autres plantes rares et fascinantes dont « l’Antharium, une aroïdée récemment importée de Colombie en France ; elle faisait partie d’un lot de cette famille à laquelle appartenait aussi un Amorphophallus, une plante de Cochinchine, aux feuilles taillées en truelles à poissons, aux longues tiges noires couturées de balafres, pareilles à des membres endommagés de nègre ». Ainsi « Des Esseintes exultait »! Pourtant il finit par être « un peu las et il étouffait dans cette atmosphère de plantes enfermées ». Sa santé commença même à s’altérer.
Un peu « pervers »
D’abord peut-être par ce goût pour l’utilisation profane des objets liturgiques qui ornent divers endroits de sa demeure. Sa chambre, par exemple, qu’il voulut semblable à une cellule monastique. Mais une cellule confortable et décorée avec goût... pour « tout en lui conservant son caractère de laideur, imprimer à l’ensemble de la pièce, ainsi traitée, une sorte d’élégance et de distinction ; renverser l’optique du théâtre dont les vils oripeaux jouent les tissus luxueux et chers ; obtenir l’effet absolument opposé, en se servant d’étoffes magnifiques pour donner l’impression d’une guenille ; disposer, en un mot, une loge de chartreux qui eût l’air d’être vraie et qui ne le fût, bien entendu, pas. » C’est ainsi qu’il « procéda de cette manière : pour imiter le badigeon de l’ocre, le jaune administratif et clérical, il fit tendre ses murs de soie safran ; (…) quant au froid dallage de la cellule, il réussit assez bien à le copier, grâce à un tapis dont le dessin représentait des carreaux rouges, avec des places blanchâtres dans la laine, pour feindre l’usure des sandales et le frottement des bottes » ... Rien n’est laissé au hasard, évidemment, le raffinement s’impose…
Pervers aussi dans ses relations aux autres. Du moins avoue-t-il des épisodes équivoques de sa vie passée. Ce jeune garçon dont il tenta de faire un assassin… « Un galopin d’environ seize ans, un enfant palôt et futé, tentant de même qu’une fille. Il suçait péniblement une cigarette dont le papier crevait, percé par les bûches pointues du caporal » Alors qu’il s’approche de Des Esseintes pour lui demander du feu, celui-ci « lui offrit d’aromatiques cigarettes de Dubèque, puis il entama la conversation et incita l’enfant à lui conter son histoire » Il prit l’envie à Des Esseintes de faire goûter au jeune garçon ce qui lui aurait été inconnu : vin, nourriture raffinée et pour finir… les femmes d’un lupanar des plus fameux. Il résolut d’offrir ce plaisir au jeune garçon pour une durée de trois mois, au terme desquels il cesserait de payer. Alors sans doute celui-ci en arriverait-il à voler, à tuer même, pour ne pas avoir à renoncer à de telles jouissances ! Quel intérêt pour Des Esseintes ? « Alors mon but sera atteint, j’aurai contribué, dans la mesure de mes ressources, à créer un gredin, un ennemi de plus pour cette hideuse société qui nous rançonne » Mais il fut déçu et lui en voulut : « Le petit Judas ! murmurait maintenant Des Esseintes en tisonnant ses braises ; - dire que je n’ai jamais vu son nom figurer parmi les faits divers ! »
Une orientation sexuelle peut-être incertaine, aussi, comme la donne à penser le récit de son étreinte avec Miss Urania. Celle-ci, acrobate dans un cirque, l’attire pour son ambiguïté : « à mesure qu’il admirait sa souplesse et sa force, il voyait un artificiel changement de sexe se produire en elle ; ses singeries gracieuses, ses mièvreries de femelles s’effaçaient de plus en plus, tandis que se développaient, à leur place, les charmes agiles et puissants d’un mâle » Il imagina que, par une attraction pour le contraire de soi, cette femme serait attirée par « une créature faible, ployée », Des Esseintes lui-même, du moins tel qu’il se décrit. Pourtant il fut déçu « tous les sentiments enfantins de la femme subsistait en elle ; elle possédait le caquet et la coquetterie des filles entichées de balivernes ; la transmutation des idées masculines dans son corps de femme n’existait pas. » Alors il jeta son dévolu sur une ventriloque et, comble de l’excitation, lui fit interpréter « l’admirable dialogue de la Chimère et du Sphynx (…) récité par des voix gutturales et profondes, rauques puis aiguës, comme surhumaines » … Pourtant elle se lassa de lui, lui préférant « un gaillard dont les exigences étaient moins compliquées et les reins plus sûrs » Plus tard il éprouva pour un très jeune homme « une défiante amitié qui se prolongea durant des mois ; des Esseintes n’y pensait plus sans frémir ; jamais il n’avait supporté un plus attirant et un plus impérieux fermage ; jamais il n’avait connu de pareils périls, jamais aussi il ne s’était senti plus douloureusement satisfait. »Et l’auteur de rappeler une « hérédité datant du règne de Henri III » …
Très névrosé
Difficile pour une personnalité aussi complexe de résister à la solitude et au retrait à Fontenay : il tombe malade. « Une fois de plus, cette solitude si ardemment enviée et enfin acquise, avait abouti à une détresse affreuse ; et le silence qui lui était autrefois apparu comme une compensation des sottises écoutées pendant des ans, lui pesait maintenant d’un poids insoutenable » Les cauchemars d’abord, puis les hallucinations olfactives (une odeur de frangipane qui le poursuit…), l’appétit qui s’en va et le médecin qui recommande le retour à Paris comme seule remède à une mort certaine.
Obligé de s’en retourner au « monde »
L’isolement n’aura rien réglé pour cette âme raffinée et torturée, Des Esseintes et « sa fièvre d’inconnu, son idéal inassouvi, son besoin d’échapper à l’horrible réalité de l’existence » Il allait donc retourner à ce monde honni, une noblesse en décomposition qui « avait versé dans l’imbécillité ou l’ordure », un clergé que « le négoce avait envahi », quand « en guise d’antiphonaire, les grands livres de commerce posaient sur des lutrins » et que l’on trouvait « aux quatrièmes pages des journaux, les annonces de cors aux pieds guéris par un prêtre. », la médiocrité d’une bourgeoisie vulgaire et exclusivement soucieuse de s’enrichir, pendant que la « plèbe avait été, par mesure d’hygiène, saignée à blanc » « Eh ! Croule donc, société ! Meurs donc, vieux monde ! s’écria Des Esseintes, indigné par l’ignominie du spectacle qu’il évoquait » Il ne reste plus à Des Esseintes qu’à demander à Dieu de « prendre pitié du chrétien qui doute, de l’incrédule qui voudrait croire, du forçat de la vie qui s’embarque seul, dans la nuit, sous un firmament que n’éclairent plus les consolants fanaux du vieil espoir ! » Et Huysmans termine ainsi son roman, nous laissant dans le doute et presque inquiets pour son déconcertant héros. | |
| | | rivela Zen littéraire
Messages : 3875 Inscription le : 06/01/2009 Localisation : Entre lacs et montagnes
| | | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Jeu 2 Juil 2009 - 19:23 | |
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| | | rivela Zen littéraire
Messages : 3875 Inscription le : 06/01/2009 Localisation : Entre lacs et montagnes
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Jeu 2 Juil 2009 - 19:26 | |
| comme une tornade ce livre, j'ai été aspiré. Après chacun ses goûts. | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Jeu 2 Juil 2009 - 19:29 | |
| - rivela a écrit:
- comme une tornade ce livre, j'ai été aspiré. Après chacun ses goûts.
je suis toujours contente de voir un tel enthousiasme.. je ne connais pas cet auteur - donc, pourquoi pas tenter l'expérience | |
| | | Madame B. Zen littéraire
Messages : 5352 Inscription le : 17/07/2008 Age : 51
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Jeu 2 Juil 2009 - 21:24 | |
| A rebours est un livre à lire. Un style précieux et orné, un désenchantement délicieux, de l'humour désespéré. Je ne m'en suis jamais lassée. | |
| | | Sydney Envolée postale
Messages : 166 Inscription le : 14/10/2008
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Ven 3 Juil 2009 - 8:57 | |
| J'ai été complètement emballé par la première moitié - le style remarquable, des Esseintes enivrant et passionnant - puis je suis resté totalement de marbre face à la seconde moitié où le style et le lyrisme s'appauvrissent, et ou l'apogée de décadence annoncée de des Esseintes laisse place à une longue et ennuyeuse critique artistique...
Je le recommande toutefois, la première partie étant suffisamment géniale pour justifier la lecture.
A rebours est le roman qui, avec Peau de chagrin de Balzac, à inspiré Oscar Wilde pour son Portrait de Doria Gray. | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Ven 3 Juil 2009 - 13:09 | |
| - Sydney a écrit:
- A rebours est le roman qui, avec Peau de chagrin de Balzac, à inspiré Oscar Wilde pour son Portrait de Doria Gray.
ce qui en est inspiration - faut pas oublier le portrait du Docteur Pozzi par John Singer Sargent (j'en parle ici) | |
| | | rivela Zen littéraire
Messages : 3875 Inscription le : 06/01/2009 Localisation : Entre lacs et montagnes
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Sam 15 Aoû 2009 - 11:09 | |
| Là-Bas de Huysmans Tout au long du livre nous sommes avec Durtal, historien écrivain qui entreprend une biographie de Gilles de Rais, contemporain de Jeanne d’Arc. Qui après avoir mené bataille se retire dans sont château pour pratiquer le satanisme et assassiner beaucoup d’enfants au nom des rites sataniques. Pendant tout le livre nous voyons Durtal qui avance dans sa biographie, il participe à des soirées entre amis où il y a des débats sur le satanisme, la religion, même une jolie théorie sur les cloches des églises etc.. Ces débats sont intéressant parce que très pointu même quelque fois ça rentre dans des détails qui sont pour des connaisseurs, il y a bien des mots dont je ne connais pas la signification. C’est comme assister aujourd’hui à la télévision à des débats par des spécialistes. Il participe même à une messe satanique qui le dégoûte. La description faite par Huysmans est saisissante. On ne peut pas dire qu’il y ait vraiment une histoire ou une intrigue si ce n’est une histoire d’amour passionnelle entre Durtal et Madame de Chantelouve qui participe à des messes sataniques et qui sous ses aspects de femme respectable le jour devient une furie assoiffée de sexe la nuit. Je trouve que c’est un très bon livre, l’écriture est exigeante et de haut niveau. Il y a quelques pages très modernes et assez crues. Les débats auquel on assistent pourraient sembler monotone ou ennuyeux , et non, pas du tout grâce au talent de Huysmans. Car il en a beaucoup. Si A rebours est un chef d’œuvre. Avec Là-Bas on y approche aussi .
Voici un extrait de la de la messe satanique auquel Durtal assiste.
Alors Durtal se sentit frémir, car un vent de folie secoua la salle. L’aura de la grande hystérie suivit le sacrilège et courba les femmes ; pendant que les enfants de chœur encensaient la nudité du pontife,des femmes se ruèrent sur le Pain Eucharistique et, à plat ventre au pied de l’autel, le griffèrent, arrachèrent des parcelles humides, burent et mangèrent cette divine ordure. Une autre, accroupie sur un crucifix, éclata d’un rire déchirant puis cria : mon prêtre, mon prêtre ! une vieille s’arracha les cheveux, bondit, pivota sur elle-même, se ploya, ne tint plus que sur un pied, s’abattit près d’une jeune fille qui, blottie le long d’un mur, craquait dans des convulsions, bavait de l’eau gazeuse, crachait, en pleurant, d’affreux blasphèmes. Et Durtal, épouvanté, vit, dans la fumée, ainsi qu’au travers d’un brouillard, les cornes rouges de Docre qui, maintenant assis, écumait de rage, mâchait des pains azymes, les recrachait, se torchait avec, en distribuait aux femmes; et elles les enfouissaient en bramant, ou se culbutaient, les unes sur les autres, pour les violer. C’était un cabanon exaspéré d’hospice, une monstrueuse étuve de prostituées et de folles. Alors, tandis que les enfants de chœur s’alliaient aux hommes, que la maîtresse de la maison, montait, retroussée, sur l’autel, empoignait, d’une main, la hampe du Christ et ramenait de l’autre le calice sous ses jambes nues, au fond de la chapelle, dans l’ombre, une enfant, qui n’avait pas encore bougé, se courba tout à coup en avant et hurla à la mort, comme une chienne ! Excédé de dégoût, à moitié asphyxié, Durtal voulut fuir. Il chercha Hyacinthe mais elle n’était plus là. Il finit par l’apercevoir auprès du chanoine ; il enjamba les corps enlacés sur les tapis et s’approcha d’elle. Les narines frémissantes, elle humait les exhalaisons des parfums et des couples. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Sam 6 Fév 2010 - 17:07 | |
| A rebours de J. K. Huysmans Après s'être désintéressé de l'existence contemporaine, il avait résolu de ne pas introduire dans sa cellule des larves de répugnances ou de regrets, aussi, avait-il voulu une peinture subtile, exquise, baignant dans un rêve ancien, dans une corruption antique, loin de nos moeurs, loin de nos jours. Il avait voulu, pour la délectation de son esprit et la joie de ses yeux, quelques oeuvres suggestives le jetant dans un monde inconnu, lui dévoilant les traces de nouvelles conjectures, lui ébranlant le système nerveux par d'érudites hystéries, par des cauchemars compliqués, par des visions nonchalantes et atroces."A rebours" est un anti-roman qui anticipe les voyages introspectifs d'un Marcel Proust et l'exploration du flux de conscience de Virginia Woolf ou Joyce. Le personnage central, Des Esseintes, a inspiré à Oscar Wilde son Dorian Gray. J'ai appris que ce roman était aussi l'oeuvre de chevet de Gainsbourg qui l'admirait et qui s'en est inspiré pour son propre roman "Evguénie Sokolov". Et je comprends pourquoi maintenant. Le récit est celui d'un aristocrate excentrique issu d'une famille noble mais de sang appauvri (« marqué par la prédominance de la lymphe dans le sang ») dont il serait l'héritier décadent. Après avoir mené une vie de débauche et d'excentricité, il décide d'enterrer cette existence de "virilité momentanément morte" en organisant un extravagant "repas de deuil". Il laisse entendre que son enfance a été douloureuse et tout son comportement résulte d'une perception dépressive et névrotique du monde. Dans la salle à manger tendue de noir, ouverte sur le jardin de sa maison subitement transformé, montrant ses allées poudrées de charbon, son petit bassin maintenant bordé d'une margelle de basalte et rempli d'encre et ses massifs tout disposés de cyprès et de pins, le dîner avait été apporté sur une nappe noire, garnie de corbeilles de violettes et de scabieuses, éclairée par des candélabres où brûlaient des flammes vertes et par des chandeliers où flambaient des cierges. Tandis qu'un orchestre dissimulé jouait des marches funèbres, les convives avaient été servis par des négresses nues, avec des mules et des bas en toile d'argent, semée de larmes. On avait mangé dans des assiettes bordées de noir, des soupes à la tortue, des pains de seigle russe, des olives mûres de Turquie, du caviar, des poutargues de mulets, des boudins fumés de Francfort, des gibiers aux sauces couleur jus de réglisse et de cirage, des coulis de truffes, des crèmes ambrées au chocolat, des poudings, des brugnons, des raisinés, des mûres et des guignes; bu dans des verres sombres, les vins de la Limagne et du Roussillon, des Tenedos, des Val de Penas et des Porto; savouré, après le café et le brou de noix, des kwas, des porter et des stout. Il décide alors de s'installer dans une maison coupée de toute vie mondaine et dont il organise la décoration et l'agencement dans leurs moindres détails. Il cherche tout ce qu'il estime relever du plus parfait raffinement artistique en s'entourant d'objets d'arts, de peintures, de livres... tous soigneusement choisis jusqu'à l'absurde et l'enfermement. Il cultive d’étranges plantes hybrides, compose de la musique, dans une sorte de quête d’ascétisme artistique très relatif car loin de l’épure recherchée. Il vise à la modestie et ne fait que transformer sa maison en sorte d’œuvre d’art idéale où se réfléchit son narcissisme et son pédantisme. On a le sentiment qu'il construit son propre mausolée (d'où l'importance symbolique de ce repas de deuil inaugural), et après avoir décrit tout ce luxe qui l'entoure, il semble progressivement envahi de façon presque hallucinatoire par des visions directement inspirées des tableaux qu’il a préalablement décrits de Gustave Moreau à Odilon Redon ou Goya (les Caprices). Il est entre rêve et réalité, l'alcool aidant. La folie n'est pas loin, le suicide non plus. Il se réfugiera dans la spiritualité (comme Huysmans dans la réalité d'ailleurs). Les différents chapitres explorent l'univers artistique qu'il affectionne. Les romanciers, philosophes et poètes qu'il admire (Edgar Poe, Baudelaire, Mallarmé… et sa dette envers Flaubert), les peintres ou les musiciens qu'il préfère. Ses goûts expriment cette transition qui mène du romantisme et du naturalisme au symbolisme. Quand on aime énormément comme moi cette époque, ses commentaires sont savoureux, parfois avec un certain humour. J'ai vu au musée des Beaux-Arts de Lille un ouvrage de ses articles critiques sur la peinture que je lirai prochainement. Ce roman en est le prolongement finalement. C'est une réflexion sur son époque qui complète ma lecture du roman "L'oeuvre" de Zola. Et il y a surtout un style extrêmement ciselé, presque étouffant de richesse. De longues phrases au vocabulaire recherché et volontairement surchargé et décadent, qui nécessitent de nombreux renvois de notes en bas de page. On peut être rebuté par cette complexité ou, comme moi, se laisser envoûter. Je l’ai lu presque intégralement à voix haute pour mieux en profiter. Certains objets provoquent, comme plus tard la madeleine chez Proust, des réminiscences d’un passé que l’on découvre par fragments. Notamment un astrolabe. Il y a aussi le fameux épisode de la tortue qu’il pare de pierres précieuses pour mieux l’assortir à ses tapis et qui mourra . Cet animal devient la métaphore de sa propre destinée dérisoire et grotesque. Il y aurait encore beaucoup de choses à dire tellement c’est un livre riche et singulier. Je le recommande très fortement à tous ceux que ce dandysme et cette sophistication décadente ne rebuteront pas. Là, le palais d'Hérode s'élançait, ainsi qu'un Alhambra, sur de légères colonnes irisées de carreaux moresques, scellés comme par un béton d'argent, comme par un ciment d'or ; des arabesques partaient de losanges en lazuli, filaient tout le long des coupoles où, sur des marqueteries de nacre, rampaient des lueurs d'arc-en-ciel, des feux de prisme.
Le meurtre était accompli ; maintenant le bourreau se tenait impassible, les mains sur le pommeau de sa longue épée, tachée de sang.
Le chef décapité du saint s'était élevé du plat posé sur les dalles et il regardait, livide, la bouche décolorée, ouverte, le cou cramoisi, dégouttant de larmes. Une mosaïque cernait la figure d'où s'échappait une auréole s'irradiant en traits de lumière sous les portiques, éclairant l'Affreuse ascension de la tête, allumant le globe vitreux des prunelles, attachées, en quelque sorte crispées sur la danseuse.
D'un geste d'épouvante, Salomé repousse la terrifiante vision qui la cloue, immobile, sur les pointes ; ses yeux se dilatent, sa main étreint convulsivement sa gorge.
Elle est presque nue ; dans l'ardeur de la danse, les voiles se sont défaits, les brocarts ont croulé ; elle n'est plus vêtue que de matières orfévries et de minéraux lucides ; un gorgerin lui serre de même qu'un corselet la taille, et, ainsi qu'une agrafe superbe, un merveilleux joyau darde des éclairs dans la rainure de ses deux seins ; plus bas, aux hanches, une ceinture l'entoure, cache le haut de ses cuisses que bat une gigantesque pendeloque où coule une rivière d'escarboucle et d'émeraudes ; enfin, sur le corps resté nu, entre le gorgerin et la ceinture, le ventre bombe, creusé d'un nombril dont le trou semble un cachet gravé d'onyx, aux tons laiteux, aux teintes de rosé d'ongle.
Sous les traits ardents échappés de la tête du Précurseur, toutes les facettes des joailleries s'embrasent ; les pierres s'animent, dessinent le corps de la femme en traits incandescents ; la piquent au cou, aux jambes, aux bras, de points de feu, vermeils comme des charbons, violets comme des jets de gaz, bleus comme des flammes d'alcool, blancs comme des rayons d'astre.
L'horrible tête flamboie, saignant toujours, mettant des caillots de pourpre sombre aux pointes de la barbe et des cheveux. Visible pour la Salomé seule, elle n'étreint pas de son morne regard, l'Hérodias qui rêve à ses haines enfin abouties, le Tétrarque, qui, penché un peu en avant, les mains sur les genoux, halète encore, affolé par cette nudité de femme imprégnée de senteurs fauves, roulée dans les baumes, fumée dans les encens et dans les myrrhes.
Tel que le vieux roi, des Esseintes demeurait écrasé, anéanti, pris de vertige, devant cette danseuse, moins majestueuse, moins hautaine, mais plus troublante que la Salomé du tableau à l'huile. | |
| | | krys Sage de la littérature
Messages : 2093 Inscription le : 06/09/2009 Age : 65 Localisation : sud ouest
| Sujet: Re: J.K. Huysmans Sam 6 Fév 2010 - 21:12 | |
| L'épisode de la tortue m'a beaucoup marquée, dans A Rebours. C'es un livre très court mais très riche ! | |
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| Sujet: Re: J.K. Huysmans | |
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| | | | J.K. Huysmans | |
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