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Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Alan Clarke Dim 6 Nov 2011 - 21:51
Alan Clarke
Citation :
Alan Clarke est un réalisateur et scénariste né le 28 octobre 1935, à Liverpool en Angleterre et mort d'un cancer le 24 juillet 1990.
Principalement considéré comme un cinéaste de télévision, entendons par là travaillant sur commande pour la BBC en l'occurrence, ce qu'il était factuellement. Alan Clarke ne fut pas moins considéré par ses pairs comme un cinéaste à part entière, voire un cinéaste à part. Au delà d'un style narratif et esthétique unanimement reconnu comme fort, ses compositions visuelles se caractérisèrent toutes par une composante commune : une inconditionnelle tendresse, fût-elle ressentie douteuse ou justifiée, pour ces personnages qu'il qualifiait paternellement de « merdeux ». Ceux-là même que sa libérale société contemporaine « vomissait », ces empêcheurs de consommer en rond en somme. Le point d'orgue de ce qui pouvait à l'époque apparaître lubie de réalisateur, avant d'être distinguée comme une puissante signature, fut atteint en la personne de Trevor (Made in Britain, 1982), ce jeune skinhead inexorablement paumé et iconoclaste, incarné avec une véracité déconcertante par un jeune Tim Roth alors encore méconnu.
Filmographie:
* 1967-1968 : Half Hour History (TV) * 1969 : The gold Robbers (TV) * 1969-1970 : The wednesday play (TV) * 1970 : I can't see my little Willie (TV) * 1972 : The Edwardians (TV) * 1972 : Thirty minute Theatre (TV) * 1972 : To encourage the others (TV) * 1975 : BBC2 Playhouse (TV) * 1977 : Scum (TV) * 1978 : Play of the month (TV) * 1979 : Scum * 1970-1981 : Play for Today (TV) * 1982 : Baal (TV) * 1982 : Made in Britain (TV) * 1985 : Billy the Kid and the Green Baize Vampire (TV) * 1985 : Contact (TV) * 1986 : Rita, Sue and Bob Too * 1987 : Road * 1987 : Christine * 1988 : The Firm * 1989 : Elephant
Je profite de la sortie d'un coffret de 4 des principaux films d'Alan Clarke pour évoquer ce cinéaste dont le moyen métrage Elephant a fortement inspiré le film de Gus Van Sant qui porte le même titre.
En 38 minutes Alan Clarke filme 18 plans séquences qui sont autant de scènes de meurtres dans divers espaces plus ou moins labyrinthiques et déserts de la ville de Belfast qui n'est identifiable qu'au début (un nom de rue et l'hôtel de ville en perspective). On ne sait jamais vraiment qui sera victime ou assassin. Un des meurtriers se faisant d'ailleurs tuer à la fin. Pas de musique, quasiment aucun dialogue (sauf au cours d'une partie de football à 3). La caméra accompagne chaque déambulation comme dans le film de Gus Van Sant, le plus souvent de dos, par des mouvements fluides de la steadycam. On pense aussi à certains jeux vidéos.
Dispositif expérimental et minimaliste qui fascine par sa radicalité et la frontalité des meurtres qui semblent être commis dans une indifférence totale. On comprend que le film évoque de façon abstraite la guerre civile qui ravage l'Irlande depuis la fin des années 60. Conflit politique, religieux, culturel dont on a le sentiment que les enjeux sont devenus à la fois flous et de nature à brouiller la frontière entre les meurtriers et les victimes qui dans le film finissent par se confondre jusqu'à l'absurde.
Les suppléments permettent de comprendre le titre. L'Elephant étant considéré comme cette présence invisible et menaçante de la guerre civile au sein de chaque foyer irlandais. Le film rend bien cette sensation de surgissement inattendu de la violence dans les lieux les plus ordinaires (station service, usine, pavillon de banlieue, piscine...). A découvrir!
Ici en intégralité:
darkanny Zen littéraire
Messages : 7078 Inscription le : 02/09/2009 Localisation : Besançon
Sujet: Re: Alan Clarke Dim 6 Nov 2011 - 22:44
ça m'intrigue, et on m'en avait déjà parlé en bien.
Queenie ...
Messages : 22891 Inscription le : 02/02/2007 Age : 44 Localisation : Un peu plus loin.
Sujet: Re: Alan Clarke Dim 6 Nov 2011 - 22:48
Et je ne connaissais pas, mais tu sais attirer l’œil Marko.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Alan Clarke Dim 6 Nov 2011 - 23:07
Queenie a écrit:
Et je ne connaissais pas, mais tu sais attirer l’œil Marko.
Elephant d'Alan Clarke
Elephant de Gus Van Sant
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Alan Clarke Lun 7 Nov 2011 - 7:04
Très très bon Made in Britain, vu sur Arte quand Arte avait un peu plus de personnalité, revu une fois en vhs... rage, impasse. c'est précis.
on avait du en parler avec le compère Ezechielle ? et la bande son arrache : UK 82 avec des bouts du film
Il me semble qu'il y a un autre film à la thématique proche, toujours avec Tim Roth et toujours écrit par David Leland ? mais je n'arrive pas à retrouver... deux frères : un qui penche communiste et l'autre skinhead qui va faire de la peinture chez sa belle soeur pour se payer une paire de DM ?
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Alan Clarke Lun 7 Nov 2011 - 10:00
Américan History X avec Norton et Furlong? Je ne crois pas qu'il y avait Tim Roth.
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Alan Clarke Lun 7 Nov 2011 - 13:22
Marko a écrit:
Américan History X avec Norton et Furlong? Je ne crois pas qu'il y avait Tim Roth.
Meuh non, un film anglais, un autre. j'ai cherché rapidement mais pas retrouvé malheureusement.
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Alan Clarke Lun 7 Nov 2011 - 13:39
retrouvé : Meantime : clic
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Alan Clarke Lun 7 Nov 2011 - 13:56
animal a écrit:
retrouvé : Meantime
Un Mike Leigh que je ne connaissais pas. Chouette!
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Alan Clarke Jeu 8 Déc 2011 - 0:06
Scum (1977/1979)
C'est intéressant de voir Scum juste après le récent Les révoltés de l'île du diable parce qu'on y retrouve toutes les situations devenues archétypales de ce genre de huis clos carcéral adolescent. Dog Pound est aussi une sorte de remake en moins réussi. Mais le traitement des révoltés est plus poétique et littéraire alors que Scum est bien plus brut et proche d'un réalisme social à la Ken Loach (on peut aussi penser un peu à Vol au dessus d'un nid de coucou).
Le DVD permet de voir 2 versions différentes du film. Une première version faite pour la BBC dont la violence frontale et surtout le traitement des personnages adultes, comme acteurs de cette violence tant physique que morale, a fait interdire sa diffusion qui n'a eu lieu qu'après la mort du réalisateur sur une chaine concurrente. Une seconde version ultérieure pour le cinéma qui reprend exactement la même trame mais comporte certains acteurs différents et des séquences ajoutées ou retirées. La violence y est plus spectaculaire, moins allusive. Les deux sont impressionnantes malgré une tendance à caricaturer le sadisme des encadrants. C'est que le propos est de proposer un réquisitoire implacable contre ces maisons de redressement qui ont d'ailleurs été interdites 3 ans après la sortie du film.
Arbitraire et absurdité d'un système répressif ayant pour objectif de faire intégrer la Loi en conditionnant ces jeunes mais qui en réalité leur ôte tout espoir ou perspective. C'est l'école de la perversité et de la loi du plus fort. Les plus fragiles y laissent leur vie dans une absence totale de remise en cause de la hiérarchie pénitentiaire.
On trouve également une longue scène passionnante qui rappelle celle du film Hunger avec la confrontation en face à face autour d'une table entre un des jeunes détenus particulièrement intelligent et lucide et un responsable auquel il renvoie toute l'absurdité de son système de pensée. il lui montre que c'est sa propre frustration et son échec personnel qui sont également à l'origine de cette monstruosité dont chacun paie le prix. Le dégoût de soi favorisant la haine de l'autre.
Le final est glaçant. Après une émeute inévitable, le retour à un ordre répressif ne se fait pas attendre. Il n'y a aucun horizon possible.
Tout cela est illustré de façon à la fois simple et immédiate, sans fioritures, par des espaces fermés, des obstacles dans le cadre, des perspectives sans issues, des couleurs ternes et sinistres.
Sur le plan dramaturgique c'est forcément très émouvant avec une souffrance palpable de chacun de ces jeunes qui ont tous une personnalité et une existence bien définies.
Un film important qui montre aussi le début de l'esthétique de Clarke avec quelques longs travellings, l'ébauche d'une caméra qui accompagne les personnages de dos... Je suis heureux de découvrir ce cinéaste. Je vais continuer le coffret.
Dernière édition par Marko le Jeu 8 Déc 2011 - 10:45, édité 1 fois
Queenie ...
Messages : 22891 Inscription le : 02/02/2007 Age : 44 Localisation : Un peu plus loin.
Sujet: Re: Alan Clarke Jeu 8 Déc 2011 - 7:42
Marko a écrit:
Je vais continuer le coffret.
Et tu le prêterais ? Parce que ça donne envie, mais, évidemment, à ma biblio c'est indisponible - et y'a aucune date de retour de spécifier.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Alan Clarke Jeu 8 Déc 2011 - 9:42
Queenie a écrit:
Marko a écrit:
Je vais continuer le coffret.
Et tu le prêterais ? Parce que ça donne envie, mais, évidemment, à ma biblio c'est indisponible - et y'a aucune date de retour de spécifier.
Pas de problème !
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Alan Clarke Dim 2 Déc 2012 - 21:44
Scum (1979)
Un caïd et quelques autres dans une maison de redressement. Caricatural peut-être, qui n'épargne rien certainement. Tendu, intense, la violence est permanente. Violence de l'institution, indifférence de l'institution, horizons bouchés, violence comme modèle, violence entretenue... racisme aussi. Beaucoup de victimes derrière le constat discret des situations sociales pas simples (illettrisme, jeunes mais avec des familles à eux). Horriblement pessimiste, horrible tout court, oppressant, effrayant. Le rôle et l'utilisation de la violence, le moyen, par les individus et la société avec le sentiment du qui ne va pas, du caché. Le côté effrayant des démissions des adultes.
Sans adoucir les angles, sans forcer la sympathie (il y a beaucoup de salauds parmi les jeunes), sans forcer les belles images mais en leur conservant la cohérence et une certaine grâce.
Aussi dur et aussi noir que le Made in Britain.
Éprouvant !
(n'ai regardé que la "version cinéma").
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Alan Clarke Lun 2 Déc 2013 - 21:38
Made in Britain (1983)
Un film d'Alan Clarke qui fait aussi partie d'une tétralogie Tales Out of School de David Leland qui a écrit le film. Un film qui fait définitivement mal et laisse dans un drôle d'état et ce n'est pas que la musique, le très sauvage UK 82 de The Exploited qui fait cet effet là.
Trevor 16 ans, hargneux comme pas possible, arrogant, violent, sarcastique, une croix gammée au milieu du front et la boule à zéro. Et un système qui tente ou fait semblant de tenter de le ramener dans le droit chemin, qui au mieux s'annoncerait déjà mal.
Trevor il ne lâche pas l'affaire et gueule et grogne et jette des briques dans les fenêtres et vol des voitures. Il a tout du parfait petit salopard pourtant face aux explications qu'on lui donne il n'a pas complètement tort. Et quand il se retrouve face à une famille de mannequins dans son salon devant la tv dans une vitrine où tout est étiqueté avec un prix on est au moins sûrs que son combat est perdu.
Il n'est pas idiot, il est broyé et ne peut rien y faire si ce n'est y aller quand même. Le tableau est d'une noirceur épuisante. Malgré quelques figures d'éducateurs lessivés plus attachantes.
C'est un skinhead mais le film tourne assez bien le problème du racisme et de la violence. C'est un film particulier, brut de décoffrage qui même en le connaissant laisse HS, entre deux eaux. Il n'inflige même pas de discours sur le système avec le chômage et le démantèlement du système éducatif. Il met juste le doigt et la lumière sur le symptôme qui fait mal. Un sentiment d'horrible et dévastateur gâchis, électrique, bouillant d'énergie et de rage.
Un film qui n'aura volé ni sa réputation ni l'attachement qu'on peut avoir pour lui, parce que c'est un cinéma attentif et précis et volontaire.
Premier film de Tim Roth et une performance très fraiche pour ce rôle très spécial.
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Alan Clarke Mar 24 Mai 2016 - 23:24
The Firm (1988)
Et ce n'est pas parce que le déguisement de Gary Oldman est réussi qu'il s'agit de grimper les échelons d'une agence immobilière.
L'appellation désigne en fait un club de supporter d'équipe de foot et quand Bexy (c'est son petit nom) veut unir des clubs pour aller en Allemagne pour la coupe d'Europe il faut d'abord montrer qui c'est qui a la plus grosse le boss.
A la façon Alan Clarke le (télé)film est aride, court (70 min) mais oppressant. Le même genre de traveling arrière face à des types qui marchent en roulant des mécaniques nourrie à la rage mal digérée.
Et des types qui renvoient une drôle d'image. Le mélange de on s'habille proprement et on se bourre la tronche en racontant des conneries et surtout, surtout, on se met régulièrement sur la tronche. Vie de famille, belle voiture pour les mieux lotis, ce qui compte le plus c'est de se fondre dans le modèle et de pouvoir relever un peu la tête dans la violence.
Pas beaucoup d'explications pour tout ça, pas de discours. Juste la spirale et l'escalade de la violence d'un modèle (qui a) dégénéré et pour lequel le sport n'est qu'un point d'ancrage devenu lointain.
Rien de glamour ou de très humoristique, même les traits d'esprits et la gouaille ont quelque chose de malsain, c'est du film brut sur un sujet brutal à plusieurs points de vue. A éviter si c'est pour se remonter le moral !