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| Kenneth White | |
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+4animal Marie Chatperlipopette Margot 8 participants | |
Auteur | Message |
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jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Kenneth White Lun 14 Oct 2013 - 2:28 | |
| Animal : Je ne sais pas si Kenneth White peut être qualifié comme pratiquant en partie le récit de voyage? Si c'est le cas, nous pouvons expliquer le «je». C'est une convention du genre dans la mesure où celui qui fait le voyage exprime les choses à partir de sa perspective et ce «je» pourrait faire penser au «je» de l'essayiste, mais il y a quelques distinctions d'ordre pratique à ce «je». | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Kenneth White Lun 14 Oct 2013 - 5:54 | |
| plus que le "je" de la narration c'est sa résistance au fracassement que l'on attend devant l'immensité brute. ou alors j'ai lu de travers une redécouverte du "je".
dans la forme ça m'a souvent fait penser à de la poésie américaine (pour le peu que j'en connais, comme Paul Blackburn), dans une sorte de prose mise en forme. | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Kenneth White Dim 20 Oct 2013 - 21:27 | |
| Un extrait : - Citation :
- Quel choc !
Dès la préface, l'auteur, Michel Serres, parlait mon langage. Même ses mots étaient les miens. Bon Dieu, j'y retrouvais presque mon portrait : "Le Zénon nouveau, de Paris et de Londres, appelait randonnée sa méthode, pour ce qu'un vieux mot de chasse : random, avait donné naissance à deux parents proches, et pourtant divergents : le français randonnée, promenade, et l'anglais random, le hasard, la chance, et pour ce qu'il voulait réunir les deux sens, à travers la Manche, ou le Saint-Laurent..." Bon dieu ! Depuis des années je parlais de randonnées extravagantes, j'avais traversé cette Manche, brûlant mes bateaux, j'avais rôdé dans Paris, et je me retrouvais là, sans amarres, sur la côte Nord du Saint-Laurent. J'ai continué ma lecture : "Espace blanc privé d'enjeux et sans bataille. [...] Une connexion difficile [...] une traversée du désert [...] un nouvel archipel [...] le passage est rare et resserré [...] penseurs de la synthèse [...] la complexité fait signe du côté du réel, alors que le dualisme appelle à la bataille, où meurt la pensée neuve [...] il faut donc qu'il invente, s'il veut survivre, et qu'il invente aussi un espace tout neuf, sans rapport aucun avec le vieil espace imbécilement partagé..." Incroyable ! J'avais envie de souligner chaque phrase. Chez moi, ces concepts avaient nom : pensée pélagienne, activité archipélagique, nomadisme intellectuel, monde blanc... Partis tous deux de bases et de prémisses différentes, nous nous retrouvions dans le même espace. Un nouveau Weltgeist s'était-il mis à souffler ? J'étais si excité que je ne pouvais pas rester plus longtemps assis dans le café. Il fallait que je sorte dans le vent et que je marche. J'ai traversé Sept-Iles de bout en bout, à grandes enjambées, entre les sorbiers qui agitaient leurs branches rouges, et je me suis retrouvé sur la jetée du Vieux Quai. L'image fugitive de la vieille jetée d'un certain village de la côte Ouest de l'Écosse m'a traversé l'esprit. Et j'ai repensé à ces citoyens de New York, décrits par Melville, qui, pour échapper à leur vie trop confinée, descendaient à la jetée, le dimanche, respirer quelques bouffées du large. La jetée, un de ces lieux privilégiés, où la vie se concentre et se dilate, prend d'autres dimensions. Jetées, promontoires, caps. Je suis resté au bout de la jetée à regarder les mouettes. Cette danse blanche ! "Qu'est-ce que le chaoticisme, Monsieur White ?" Un besoin de mots qui transmettent énergie et espace. Le bond dans une autre logique. Éroto-cosmologie. J'étais ivre de vent. Ivre de la grande rumeur blanche du Saint-Laurent. Ivre d'idées. Idées-poissons, idées-oiseaux. Pensée qui nage et qui vole. Philosophie océanique. Pourquoi écrire ? Pour ne pas devenir complètement fou de cette ivresse-là. De cette ivresse blanche qui est la source de toute véritable écriture. Ça ne fait pas de mal de relire plus lentement en recopiant. Ça ne veut pas dire que tout va mieux, l'idée peut-être que j'ai un rapport à l'espace qui vient de l'intérieur des terres ce qui doit me rendre des marges différentes. Maybe. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Kenneth White Lun 21 Oct 2013 - 9:24 | |
| Je viens de faire une randonnée la semaine qui vient de passer tout près des rapides de Lachine. Nous avons évolué dans cette conception de l'archipel en nous mettant en contact avec cette réalité naturelle, cette végétation préservée de façon précaire devant la prédation du sur-développement urbain. Sur le bord de l'eau, de la végétation subsiste mais c'est à peine. Nous avons marché dans un sentier de boue - il avait plu la veille. Je n'ai pas tellement apprécié le début, sauf quand nous sommes arrivés à l'embouchure qui permet d'envisager les environs de l'île aux hérons et éventuellement les rapides de Lachine. Je vous en rendrai compte prochainement dans un texte qui reprend un peu l'essence de ce que Kenneth White cherche à poursuivre.
Pour revenir à l'extrait proposé de Kenneth White, il nous faut réenvisager notre rapport à l'écriture en fonction de notre lecture des paysages traversés. | |
| | | jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
| Sujet: Re: Kenneth White Mer 23 Oct 2013 - 11:41 | |
| Tu posais la question sur le «je» de Kenneth White l'autre jour, Animal. Je viens de lire ceci dans le livre de Mariusz Wilk que je lis, Dans le sillage des oies sauvages : - Mariusz Wilk, Dans le sillage des oies sauvages, 2013, Noir sur blanc, p. 123. a écrit:
- Eh oui! Au fond, chacun de nous est à peine un fantôme de vagabond. Le «je» qui va m'occuper ne sera pas le «je» qui se rapporte strictement à l'histoire de ma personne, mais autre chose (pas plus qu'à l'histoire en général), dit White, citant Mishima. Réfléchissant à la nature de ce «je», je fus amené à conclure que le «je» en question correspondait très précisément à l'espace que j'occupais physiquement...» D'ailleurs, il est significatif que pour développer la dimension spatiale de son «je», Kenneth a dû aller jusque sur le plateau du Labrador. Je pense que ce n'est pas un hasard.
Donc, nous pouvons vraiment parler de littérature et d'une dimension géographique. Bref, la géopoésie continue lentement à gagner son lot d'adeptes. | |
| | | Claudine Biblikerfot Posteur en quête
Messages : 69 Inscription le : 06/07/2014 Age : 77 Localisation : Kerfot (Côtes d'Armor)
| Sujet: Re: Kenneth White Dim 6 Juil 2014 - 13:59 | |
| "Ça ne fait pas de mal de relire plus lentement en recopiant." tu as raison Animal...et lire à voix haute aussi..;nous évoquions Yvon Le Men dans un autre post...Nous avons de la chance dans le Trégor d'avoir ces deux grands de la poésie...et si accessibles... | |
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| Sujet: Re: Kenneth White | |
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| | | | Kenneth White | |
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