Le jour de la Fête-Dieu dans le village, Cyprien, 20 ans, chausse un masque de carnaval au passage du Saint Sacrement. Un masque
horrible et sanglant.
Provocation de jeune homme pour effrayer la procession.
Mais le masque lui reste collé au visage.
Cyprien se réfugie alors dans une vieille maison abandonnée. Miraculeusement à l' abri du froid, de la faim et des autres besoins
vitaux, il vit là en évoquant le passé et notamment son enfance. Sans envisager le futur, convaincu que le monde ne saurait accepter
l' apparence monstrueuse qui est devenue la sienne.
Il a perdu la notion du temps au point de ne pas se souvenir depuis combien de temps il vit là. Et d' ailleurs le temps ne compte plus.
Cyprien est hors du temps et du monde.
Est-il encore vivant ou n' est-il qu' une apparence, une pensée désincarnée ? Qui pense à vide et se morfond.
"Eh oui, je crois qu' il n' est qu' un soleil, celui des morts, un soleil dense et noir. Un soleil qui ne se lève ni ne se couche, mais danslequel on marche en aveugle."Un jour pourtant, il sortira pour affronter le monde et sa réalité.
Une bien étrange histoire. Symbolique et intérieure. Un roman écrit de l' intérieur d' un corps psychique. Rien n' a valeur de réalité,
au sens où la "réalité" qui lui est imposée n' en tient pas vraiment lieu.
La maison abandonnée n' existe que dans son imagination -si imagination il y a- elle fait corps avec lui. Comme chaque objet.
Peu à peu Cyprien se rend compte qu' il est interné, prisonnier de lui-même. Mais un jour...
"Cyprien, se dit-il, voilà que tu redeviens un homme. Il y a peut etre des années que tu étais présentable et c' est ta timidité seule qui t' a empeché de vivre.Tu croyais avoir un masque, et tu avais un visage comme tout un chacun. Depuis vingt ans peut etre, tu n' as plus sur toi de traces du peché. Et tu continuais stupidement à souffrir !Idiot symbole de cette idée horrible. Nous inventons seuls notre chatiment."En creusant dans la vie de
Richaud, on en vient à savoir qu' il se détestait, détestait son apparence. Ce n' est pas à lui qu' on parlait,
mais à son masque d' adulte. D' où sa volonté de se confiner à lui-même et meme d' accepter volontairement de de se laisser enfermer
dans un hospice à cinquante ans.
Après avoir connu la gloire littéraire à un peu plus de vingt ans. Après avoir sombré ensuite dans l' alcolisme et le mutisme.
Un jour, de son hospice, il écrira un mince livre intitulé
Je ne suis pas mort.Mais il était trop tard et sa vie était jouée.Ce livre est brulant comme toute confession intime. Et, comme une étoile filante, brillant d' une façon sublime avant de s' éteindreà l' horizon.