Felix Van Groeningen

La merditude des choses de Felix van Groeningen

Citation :

Gunther Strobbe a 13 ans et une vie compliquée. Le jeune garçon partage le toit de sa grand-mère avec son père et ses trois oncles. Quotidiennement, il baigne dans un climat de beuveries effrénées, de drague éhontée et de glande constante... Tout porte à croire qu'il subira le même sort, a moins qu'il ne parvienne à se "démerder" de là...

Affreux, sales mais...pas si méchants. Les personnages de La merditude des choses, nouvelle livraison d'un cinéma flamand fécond, sont des marginaux, certes, mais qui échappent à une vision misérabiliste sous la caméra de Felix van Groeningen. La double évocation de ce petit monde, avec l'oeil d'un enfant de 13 ans, puis du même devenu ecrivain, donne un recul salutaire et un traitement sans emphase ni complaisance à cette chronique pittoresque, pas le moins du monde sordide (sauf dans quelques scènes un peu appuyées). Le film n'est pas dépourvu d'humour, loin s'en faut, plutôt viril (?), et ne recule pas devant une certaine crudité. Mais, en fin de compte, il en résulte un mélange détonant de comédie et de drame, bien dosé, noyé dans des hectolitres de bière. Beau portrait de flamands rosses, réaliste et pudique à la fois (si, c'est possible).

PS : quelqu'un connait-il le livre de Dimitri Verhulst, dont le film est l'adaptation ?

Alabama Monroe.

Ou comment je me suis retrouvée à chouiner pendant 1h50.


Ce film est magnifique. Parfait.
Et ça tient beaucoup à la réalisation et au montage. Ce n'est pas juste un mélo traité tout classiquement. Van Groeningen utilise tous les clichés du genre, mais avec une telle intensité et une telle sincérité, que j'ai plongé direct.

L'histoire est tragique (un couple, un enfant avec le cancer). Mais il va au-delà.

Le film est construit en aller-retour passé-présent récurrents. C'est presque mathématique : là où ils en sont - comment ils en sont arrivés là. Une scène lourde de tristesse - Une scène pleine de douceur et de légèreté.

Et le film travaille sur des moments qui sont des explosions de sentiments à l'état pur : pas d'encombrements avec des scènes qui font lien, des scènes qui remplissent le vide. Non. Une scène, des émotions. Plein le cœur.
Et Alabama Monroe ne tombe jamais dans le pathos ou le démonstratif.

D'emblée, j'ai aimé les personnages. Tous. Une présence à te tournevriller les intestins.
Le cow-boy tendre, légèrement bourru, avec son rêve d'Etats-Unis d'Amérique.
La tatouée pétillante, s'engageant dans les choses à fond, dans une douce folie.


D'emblée, je voulais me mettre au coin du feu avec eux, quand ils chantent leurs chansons bluegrass. Les applaudir dans les bars enfumés. Cogner dans les murs à abattre. Porter des santiags. Rouler dans un pick-up. Boire des bières. Gambader dans les près.

Un film aux couleurs chaudes, douces, sensuelles. Aux images toutes proches des gens, toutes collées à leurs visages, à leurs corps. Une musique omniprésente, parfois comme un coup de massue qui ranime, parfois comme une couverture qui enveloppe, ou comme une main qui serre fort la sienne.

Tellement d'humanité et de tendresse dans ce film, avec un regard vrai et intense sur chaque chose, chaque instant.
Tellement juste sur la psychologie humaine.

Un vrai coup de poing de cœur.

Tu en parles si bien que tu me donnes presque envie de le revoir sur-le-champ !
J'ai appris qu'en Belgique,  la bande-originale du film est - à ce jour - la plus vendue de tous les temps devant celle de Titanic.

sentinelle a écrit:

Tu en parles si bien que tu me donnes presque envie de le revoir sur-le-champ !
J'ai appris qu'en Belgique,  la bande-originale du film est - à ce jour - la plus vendue de tous les temps devant celle de Titanic.

En ce moment, les films belges font vraiment mes petits trésors cinématographiques !

Queenie a écrit:

sentinelle a écrit:

Tu en parles si bien que tu me donnes presque envie de le revoir sur-le-champ !
J'ai appris qu'en Belgique,  la bande-originale du film est - à ce jour - la plus vendue de tous les temps devant celle de Titanic.

En ce moment, les films belges font vraiment mes petits trésors cinématographiques !

Dans les films belges aimés cette année, je compte aussi le film  Offline, pas mal du tout et plein d'émotions également.

Je reposte mon commentaire ici :

Un couple fusionnel face à la très grave maladie de leur petite fille. Le sujet d'Alabama Monroe évoque instantanément celui de La guerre est déclarée. Mais le traitement n'est pas le même. Felix van Groeningen, 4 ans après La merditude des choses, réalise un véritable mélodrame, poignant, avec une force et une délicatesse extrêmes. La déconstruction chronologique est loin d'être artificielle, elle permet au film de varier les émotions, de donner gaieté, humour dans une inéluctable descente vers les ténèbres. L'alchimie entre deux êtres peut-elle suffire quand le malheur s'abat, quand "la vie n'est pas généreuse" ? L'interprétation remarquable de Veerle Baetens et de Johan Heldenbergh est pour beaucoup dans l'intensité d'un film qui fait la part belle à la musique. Du bluegrass qui s'accorde parfaitement au tempo d'Alabama Monroe. Les diatribes anti-religion sont elles souvent maladroites. Elles ne suffisent à détruire l'impression générale : c'est un beau film, triste et inexpugnable comme peut l'être le destin.

J'adore ce que vous en dites !

Je devrais le voir ce week-end si tout va bien.

Je vais y aller c'est sur !

Alabama Monroe


Attention mélodrame puissance 3! Une histoire qui peut plomber l'ambiance mais qui a cette intensité et cette force dans la direction d'acteurs qui fait avaler tous les artifices pourtant pas loin d'être lourdingues mis en oeuvre. On pourra toujours dire que la vie c'est parfois ainsi... Certes! J'en ai accepté le principe. La construction temporellement éclatée permettant un achoppement d'émotions contradictoires par son alternance entre présent et passé comme dans Blue Valentine de Derek Cianfrance qui est un peu dans le même registre.

Un film qui en plus a le mérite de m'émouvoir avec une musique que je croyais à jamais associée au Buffalo Grill. Il y a une volonté de rendre hommage à ce genre musical, le "bluegrass" (l'âme de la country en quelque sorte), et à Bill Monroe son instigateur. D'où le titre et ce nouveau nom que se donne l'héroïne au tournant de sa vie. C'est donc la merditude de la vie que chantent ces hommes et cette femme face aux tragédies de l'existence. Cela donne droit à des scènes magnifiques au mariage comme à l'enterrement et aussi dans un final gonflé qui pourtant fonctionne et bouleverse.

Beaucoup de grâce et de justesse qui alternent avec des effets trop appuyés (dans la 2e partie notamment) qui cassent un peu malheureusement ce que le film pouvait avoir d'authentique et de subtil. Je pense à toutes ces distorsions visuelles dans l'ambulance notamment. ça n'était pas indispensable.

Reste une belle intimité dans ce couple et une vision très forte du processus de deuil. L'affrontement entre la rationalité et le besoin de croire en quelque chose d'irrationnel étant plus maladroit comme le dit Traversay mais qu'on peut facilement attribuer à ces personnages. Le pétage de plomb du mari en plein concert est quand même un moment qui remue.

Un des mélodrames les plus habités de ces dernières années malgré ses maladresses. A voir! Mais préparez les mouchoirs.

Film unanimement massacré au Masque et la plume.

J'y suis allée en me laissant guider par vos avis et je vous remercie.

L'affiche attire l’œil par son esthétisme mais je serais certainement passé à côté sans vos commentaires. Vu le week-end dernier, je me rallie à vos avis : un mélodrame qui souffre de petites maladresses mais où l'atmosphère est tout simplement parfaite. J'ai instantanément ressenti une immense sympathie à l'égard des personnages, la sincérité des acteurs est poignante. La B.O a achevé de m'emporter. Et ce combat si juste entre rationalité et irrationalité...

Un film que je conseille vivement mais comme le disait si bien Queenie, il faut être prêt à chouiner pendant 1h50. C'est ce que j'ai fait. Histoire de bien situer le truc, le titre original est : The Broken Circle Breakdown. Coup de crosse émotionnel.

sentinelle a écrit:

J'ai appris qu'en Belgique,  la bande-originale du film est - à ce jour - la plus vendue de tous les temps devant celle de Titanic.

J'en suis ravie, elle est envoûtante cette B.O.

traversay a écrit:

L'alchimie entre deux êtres peut-elle suffire quand le malheur s'abat, quand "la vie n'est pas généreuse" ?

Belle formulation de la problématique du film.

Marko a écrit:

Un film qui en plus a le mérite de m'émouvoir avec une musique que je croyais à jamais associée au Buffalo Grill.

 

Marko a écrit:

Beaucoup de grâce et de justesse qui alternent avec des effets trop appuyés (dans la 2e partie notamment) qui cassent un peu malheureusement ce que le film pouvait avoir d'authentique et de subtil. Je pense à toutes ces distorsions visuelles dans l'ambulance notamment. ça n'était pas indispensable.

Je pense tout de suite à un effet que j'ai trouvé très beau, l'image surexposée en rouge de deux chevaux paisibles avec la petite Maybelle (interprétée par une petite fille aussi douée que le duo d'acteurs du film) qui gambade derrière eux.

Marko a écrit:

Film unanimement massacré au Masque et la plume.

Je m'en doutais... Il y a un indicateur très simple pour ça. Souvent, quand je trouve un film d'auteur accessible, il se fait joyeusement démonter par la critique. Quoi que celui-ci bénéficie tout de même d'une certaine aura.

C'est fou comme ce film joue sur des cordes usées, abusives et des effets exagérés à coups de gros traits bien barbouillés, et pourtant ça passe à merveille !

Je retrouve donc, évidemment, exactement ce que j'ai ressenti en voyant ce film en lisant vos commentaires, Marko et Heyoka.



Pas un seul sur Le Masque qui a été touché ??!

Queenie a écrit:

Pas un seul sur Le Masque qui a été touché ??!

Non. Même Sophie Avon qui est souvent très nuancée et qui l'a trouvé "obscène". Je comprends leurs arguments mais j'ai fonctionné. On sent surtout la volonté de raconter ce mélodrame à travers la musique et les chansons. C'est d'ailleurs dommage que les chansons ne soient pas sous-titrées.

A propos de Sophie Avon, Jérôme Garcin a évoqué son blog qui n'est pas inintéressant...Blog Sophie Avon

-Alabama Monroe-

Vu ce film sans en avoir lu aucune critique (juste le pitch sur Allo ciné qui ne dit rien, d'ailleurs) en sachant que vous l'aviez aimé et en me réservant la surprise (je ne lis vos avis qu'après, le plus souvent) Moi qui m'attendais à une petite balade au pays du folk song et des accords de banjo vu le titre, autant dire que j'en ai eu de ma surprise.

Alors oui, d'accord avec vous, c'est un beau film, mais l'horreur du sujet m'a tout de même empêchée d'être aussi enthousiaste. Ces images très dures bien qu'entrecoupées de scènes tout en fraîcheur et émotion, certes, m'ont durablement marquée. C'est aussi parce qu'elles sont sans fards et sans trop de rajouts, suffisamment  vraies et justes pour qu'il soit impossible de ne pas être touché. Mais ce n'est simplement pas ce que j'avais envie de voir en ce moment (des amis très proches ont exactement connu cette tragédie. Le final à l'hosto en moins) Dommage pour moi, cela n'enlève en rien la qualité de ce film, bien sûr, c'est juste un ressenti propre, un constant rappel de ce que la vie peut faire comme cadeau qui m'a fait écran et m'a surtout laissée entre découragement et abattement.

Sur ce même thème La guerre est déclarée m'avait bien plus emballée. Au moins pour sa mesure dans le sinistre et la belle leçon de vie qu'il impliquait. Très bonne musique ceci dit, et un beau duo d'acteurs, sans oublier la petite fille qui est à croquer.