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Parfum de livres… parfum d’ailleurs
Littérature, forum littéraire : passion, imaginaire, partage et liberté. Ce forum livre l’émotion littéraire. Parlez d’écrivains, du plaisir livres, de littérature : romans, poèmes…ou d’arts…
Je suis d'accord pour dire que la misère doit être dénoncée. Je trouve ces photos magnifiques. Je me pose la question du droit à l'image, tout de même. Aimerais tu être photographié ainsi? Je pense que chacun (miséreux ou pas) a le droit de refuser ou d'accepter d'être photographié.
Bien sûr que chacun a le droit de refuser ou d'accepter d'être photographié. Quand on voit ses photos, on sent bien qu'il ne s'agit pas de photos volées, non ? Donc, si les sujets sont volontaires, pourquoi moi, irais-je les critiquer ? Tu penses qu'il les a photographiés à leur insu ?
Les sujets sont me semble-t-il volontaires, et conscients d'être photographiés. Par contre, ils ne sont pas "mis en scène" dans la pauvreté (même si "Susan Sontag s'interroge sur « l'inauthenticité du beau » dans l'œuvre de Salgado, cf Wikipedia). Dans "La cité de la joie", le film, de Roland Joffé, on pouvait je crois être légitimement choqué du coût exorbitant de la reconstitution de quartiers pauvres. Mais chez Salgado, y a-t-il une construction artificielle ? Une mise en scène autre qu'une esthétisation peut-être outrancière ? (je suis curieux de voir l'expo à la Maison Européenne de la Photo).
Il n'y a pas de honte à être pauvre ! Ce n'est pas de la faute des pauvres. Et si ça peut pousser ceux qui peuvent faire quelque chose contre cette pauvreté...
La seule chose qui choque ceux qui voient la photo, c'est qu'il en fait des images belles. Mais, malgré ou à cause de cette beauté, on ressent très fortement la douleur qu'il y a, beaucoup plus que dans les photos malheureusement banalisées de conflits : Susan Sontag, notamment, en a très bien parlé, de cette banalisation, du fait qu'il faut toujours plus d'horreur pour que l'on ressente quelque chose. Salgado a pris me semble-t-il le parti contraire en faisant des photos magnifiques... et en obtenant au bout du compte le même résultat. Mais Susan Sontag trouvait apparemment qu'il en faisait une exploitation commerciale.
Je ne sais pas ce qu'il fait de son argent. En tout cas, il a été nommé représentant spécial de l’UNICEF, et il semble faire des trucs intéressants ("Dans le domaine familial qu'il possède au Brésil, avec sa femme Lélia, il a rendu à la nature des terres épuisées par des années d'exploitation, élevant, plantant des milliers d'arbres et créant une opération pilote.", toujours Wikipedia).
jack-hubert bukowski Zen littéraire
Messages : 5257 Inscription le : 24/02/2008 Age : 43
Il y a toujours une question de propriété intellectuelle et de notion d'autoriser ou non la publication des photos... Donc, oui, il y a un dilemme éthique. Par contre, il faut dire que ces photos coupent le souffle. Pour ce qui est de la misère et du dénuement, il nous faut parfois aller au-delà de nos réflexes auto-protecteurs. Il y a une part de vérité qui transparaît.
unmotbleu Sage de la littérature
Messages : 1329 Inscription le : 08/03/2013 Age : 65 Localisation : Normandie Rouen
Je vous remercie pour cette saine discussion qui doit avoir lieu, je pense. Je suis, je l'avoue, fascinée par les photos de Salgado et je me demandais si j'avais raison. Quelle attitude avoir face à ce genre de sujet n'est pas une évidence pour moi. Merci de m'avoir donné votre avis.
shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
Sujet: Re: Sebastião Salgado [photographe] Mar 12 Nov 2013 - 0:28
je pense que la question du confort du spectateur est une question primordiale quand on veut voir les photos de Salgado. Le fait de l'hyper-esthétisation de la misère permet peut-être de regarder l'inenvisageable, elle offre un biais, une confrontation qui n'avilit ni le 'modèle' ni le spectateur, mais au contraire semble l'attirer vers un au-delà possible, sans doute salutaire. Montrer la misère brute serait de l'ordre du viol, alors que le prisme de l'esthétisation permet un recul, un voile, une distance bien venue en tout cas supportable. C'est ainsi que l'on peut lire les histoires que chaque cliché racontent, je crois...
eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
Note : je recopie le post que j'avais déjà mis sur le fil des expositions, ici.
Salgado à la Maison Européenne de la Photographie, jusqu'au 5 janvier 2014.
Citation :
Genesis est la grande exposition de Sebastião Salgado, un hommage photographique sans précédent à notre planète. Les 245 photographies exposées, au terme de huit ans de travail et d’une trentaine de voyages à travers le monde, sont présentées selon un parcours en cinq chapitres géographiques ("Aux confins du Sud", "Sanctuaires naturels", "Afrique", "Terres du Nord", "Amazonie et Pantanal"), qui sont autant de régions du monde explorées par Sebastião Salgago pour nous révéler la nature de notre planète dans toute sa splendeur.
J'étais passé un samedi vers 15h00 : deux heures de queue. Pas grave (pour moi), j'avais des vacances prévues. Je retente hier, sachant que le MEP ouvre à 11h00 : j'y suis vers 11h15. Même queue qu'un samedi après-midi, une catastrophe. Bref, la bonne heure, comme m'avait dit une habituée de ce musée, c'est en tout début d'après-midi. J'y suis donc re-retourné aujourd'hui, à 13h05. 5 minutes d'attente... mais déjà il commençait à y avoir un peu de queue derrière moi. Quand j'en suis ressorti à 15h00 passées, c'était la queue habituelle : une à deux heures d'attente, je pense.
Bref, après ce préambule quand même important (manger tôt et aller au MEP vers 12h50-13h10, c'est le bon créneau, même en semaine), en route pour les 245 photos ! C'est souvent du grand format. Il n'y avait pas trop de monde dans les salles, et les grands format évitent qu'on se marche dessus.
On n'a pas le droit de photographier, mais bon... là... Salgado ne va rien perdre.
Donc :
On commence avec l'Amazonie, des vues stupéfiantes, des animaux incroyables (ah, cette photo d'alligators - ou de crocodiles ? - dans la nuit tombante... et l'on se rend compte que la multitude de petits points blancs que l'on voit, ce sont tous les yeux qui dépassent de l'eau... gloups...).
Et puis viennent les paysages froids.
"Tiens, un Buren !", dit quelqu'un.
Mais on voit des manchots, en tout petits points...
Et cette photo, incroyable !
On s'approche pour regarder la silhouette du photographe sur l'oeil.
Au centre d'une pièce, le fameux livre de Salgado, aux dimensions impressionnantes. Mais, même ainsi, les photos en "vrai" sont meilleures dans leur définition.
Mais la taille, ça compte :
Photos de "femmes-plateau" :
Ici, désert Algérien. Photo magnifique, les rayures du sable sont d'une finesse...
Mais nous voici en Sibérie, avec des Nénètses, avec leurs rennes :
Autre photo "froide" :
Baobabs sur une île en forme de champignon, à Madagascar :
Et encore les pingouins qui font plouf (photo du net) ou l'éléphant qui charge la voiture dans laquelle se trouve le photographe
Chaque photo est accompagnée de cinq lignes de commentaire. Ça n'est pas trop, c'est ce qu'il faut.
Ne pas oublier, en redescendant (l'expo commence au deuxième étage, se poursuit au premier, puis il ne faut pas oublier un autre endroit, sur le chemin de la sortie, mais c'est indiqué et les habitués savent qu'il faut remonter une volée de marches pour visiter une autre salle), de ne pas partir tout de suite... il faut aller au sous-sol, car l'expo s'y poursuit.
C'est vraiment, vraiment à voir (tellement plus que l'expo Frida Kahlo, à mon avis). Et on ressort heureux d'avoir vu tant de belles choses.
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Dans le domaine familial de Bulcão qu'il possède près d'Aimorès au Brésil, avec sa femme Lélia Deluiz Wanick Salgado, il a rendu à la nature et reboisé près de 700 ha de terres épuisées par des années d'exploitation. Ils ont pour cela créé en avril 1998 l'ONG « Instituto Terra », qui a trouvé des financements pour élever et planter près de 4 millions d'arbres. L'institut propose également des programmes de sensibilisation et d'éducation à l'environnement.
Source: Wikipédia
leur siteen anglais
on peut retrouver un peu de cette histoire dans ce livre:
Le sorcier vert, Texte: Valentine Goby, Illustrations: Muriel Kerba
Chamaco Zen littéraire
Messages : 4366 Inscription le : 10/03/2013 Age : 78 Localisation : là haut, vers Aix...
Mars 2016, Le magazine "Reporters sans frontières" sort sa 51 ème édition avec comme thème : Sebastiao Salgado "100 Photos pour la Liberté de la Presse", Salgado le dernier grand photographe selon RSF, je ne suis pas qualifié pour dire s'il est le dernier, mais grand photographe il l'est assurément, un maître du noir et blanc et de l'argentique.