LC Giono - Le grand troupeau

shanidar a écrit:

Je suis sidérée par la crudité de certaines scènes au réalisme éprouvant (pas de gnognotte chez Giono, un rat est un rat), heureusement atténuée par le lyrisme tout personnel de l'auteur à propos du rapport entre les hommes et la nature.

Exactement !!!!
Mais rien de choquant pourtant car l'homme appartient à la terre et fait corps avec la nature ........
A plus tard , faut que j' y aille !

pas beaucoup de pourriture dans la première partie ?

c'est un peu bizarre. très noir et en même temps les chapitres sont courts et la durée contrariée (on passe bien de l'automne au printemps entre la première et la deuxième partie ?). j'ai du mal à comprendre certaines phrases/tournures mais ça ne m'empêche pas de trouver de la puissance à l'écriture, mais contrariée par la brièveté des séquences.

La pourriture, je n'avais pas trop remarqué, mais maintenant que Shanidar en a parlé, ça saute aux yeux partout.

animal a écrit:

j'ai du mal à comprendre certaines phrases/tournures

Bon , on est deux, ça rassure.

animal a écrit:

mais contrariée par la brièveté des séquences.

C'est à prendre comme un puzzle, non?

apparemment (de ce que je comprends à l'édition de la Pléiade) le texte de Giono était beaucoup plus touffu (3 manuscrits en tout) et il a allègrement coupé dans l'ensemble pour en faire Le grand troupeau. Perso, je trouve que ce côté haché est assez stimulant, qu'il laisse en attente et surtout donne au lecteur pas mal de latitude pour se raconter sa propre petite histoire entre les blancs, alors même que bien souvent j'ai eu l'impression que le principal de l'action se situe justement dans ces blancs.
J'aime bien aussi le fait de devoir relire certains passages difficilement accessibles à la première lecture, j'ai l'impression d'être une vache qui remâche son herbe pour en faire du bon lait. C'est bien aussi la littérature quand elle n'est pas présentée sur un plateau mais qu'il faut se battre un peu et c'est d'autant plus agréable ici que le texte de Giono a une belle et grande et forte saveur.

En tout cas, je trouve cette lecture très dure, violente, compliquée à digérée (d'où la nécessité des trois estomacs et de la mastication   ), sans doute l'une des plus coup de poings depuis longtemps.

shanidar a écrit:

En tout cas, je trouve cette lecture très dure, violente, compliquée à digérée (d'où la nécessité des trois estomacs et de la mastication   ), sans doute l'une des plus coup de poings depuis longtemps.

je peux le reprendre à mon compte? (d'autant plus dur à digérer que moi, je n'ai qu'un estomac, je crois  ). je viens de lire la description du champ des morts. C'est bien mieux quels habituelles histoires de rats dans les tranchées. On sent roder le silence.

Pour des raisons familiales je ne peux lire assez en ce moment et prendre du temps pour écrire sur le forum. Je ne peux donc pas participer comme je voulais...Mais je vous lis!

Eh bien, j'espère que ce n'est pas trop grave et que tu pourras te rattraper après!

je viens de débuter ma LC

waouh l'écriture de Giono, une fois de plus et tout particulièrement ici me prend les tripes et le coeur.

le passage du troupeau, quel moment, j'avais l'impression d'être sur le bord de la route, j'ai souffert pour les bêtes et les bergers.

Quelle descriptions, notamment le bélier blessé qui se meurt, terrible, les descriptions aussi des corps dans les tranchées, tous les détails sur le travail des rats, des vers, des corbeaux tous ces auxiliaires de la mort ..............................

et par contre à l'arrière, le printemps qui s'offre, l'attente des familles qui continuent le quotidien tout en pensant à ceux qui sont dans la guerre.

J'aime quand Giono donnent aux choses des gestes d'humains

"Un grand hêtre tout fumant, s'avança hors de la brume. Un ruisseau frappait là-bas, dans les herbes, avec un maillet d'eau."
"Le feu s'arrêta de danser ; il cherchait sur la terre avec ses grosses mains bleues."

Le grand troupeau ce sont aussi les hommes "Dessous les casques, on voyait luire les yeux des hommes jusqu'au fond de la troupe. Ca semblait des pierres luisantes comme quand on découvre la lanterne devant toute l'assemblée des moutons."

Est-ce que vous pensez comme moi que la le terme de viande fait référence à la chair des hommes ?

"C'étaient ces fleuves d'hommes, de chars, de canons, de camions, de charrettes qui clapotaient là-bas dans le creux des coteaux : les grands chargements de viande, la nourriture de la terre."



je continue.

oui je crois Bédou. Et Giono arrive à mettre du mouvement dans toutes les choses qui devraient être inertes (pas sans vie mais sans mouvement), la terre, le bois et la femme esseulée, cette Julia qui devrait attendre son homme et dont le corps exulte, vit, réclame, avance, gagne et dont le sang s'agite ! Comme c'est beau et terrible ces descriptions de la vie, du vent, du sang qui bouillonnent comme dans une marmite et s'échappent encore et encore !

Quel dommage Cachemire que tu ne puisses pas nous rejoindre ! J'espère que les complications trouveront vite une fin heureuse !

Oui, c'est "viande" car il trouve que les humains impliqués dans la guerre sont manipulés ainsi , comme des quartiers de viande.
Aucune fierté, aucune gloriole, aucune haine revancharde de l'Allemand chez ceux de l'arrière. Une espèce de chappe de plomb contre laquelle on ne peut rien qui leur tombe sur les épaules et une révolte sourde.

rien que l'écriture suffit encore à mon plaisir de lecture.

Mais là il y a des histoires dans l'Histoire.

topocl a écrit:

Oui, c'est "viande" car il trouve que les humains impliqués dans la guerre sont manipulés ainsi , comme des quartiers de viande.
Aucune fierté, aucune gloriole, aucune haine revancharde de l'Allemand chez ceux de l'arrière. Une espèce de chappe de plomb contre laquelle on ne peut rien qui leur tombe sur les épaules et une révolte sourde.

j'ai noté tout de même la cousine qui raconte que dans son village "Schumaker" celui qui faisait de jolis souliers, a été accroché à son portail !

je suppose donc parce qu'il est Allemand, même s'il vivait en France depuis plusieurs années !

Ah Oui, tu as raison. Mais dans l'ensemble de la beauté face à cette toute-laideur, une espèce de sérénité du "on continue" face à la violence, l'arrachement de cette guerre

j'avais relevé aussi l'épisode du cordonnier... et là je commence les pages du front. yerk.

et que d'humidité et de boue (avec ce qu'il y a dedans...).

avons nous perdu Sigismond ??