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Messages : 4366 Inscription le : 10/03/2013 Age : 78 Localisation : là haut, vers Aix...
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Mer 28 Jan 2015 - 11:03
Merci pour ton apport à la discussion Marboué, te répondre demande de la reflexion, de plus je vais écouter le lien que tu nous proposes, et réflechir pour savoir si j'ai des réponses, encore merci
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Mer 28 Jan 2015 - 15:13
C' est l' esprit d' utopie qui conduit à la réalité pragmatique. Et sur ce plan-là, je trouve que Rabbhi donne à rever autant qu' il sait aussi se placer sur le plan concret de la pratique. D' ailleurs Rabbi a été invité dans plusieurs pays en tant que conseiller.
Les interviews sont parfois trompeuses en ceci qu' elles réduisent ou schématisent ce qui est écrit et médité. Enfin, il ne faudrait pas penser que Rabbjhi est seul ou qu' il preche dans le désert. Il y a tout un courant de pensées parfois un pu différentes et il est bien qu' elles se mélangent et se complètent.
Parmi ces penseurs, je pense à Edgar Morin, Jean Marie Pelt et à Fabrice Nicolino. Bléssé lors des attentas de Paris, je pense à lui et j' espère qu' il reprendra bientot sa place à Charlie Hebdo. Enfin, j' ai écouté récemment Hulot et -je peux me treomper- mais il semble désormais se consacrer vraiment à l' écologie en toute indépendance, utilisant l' argent qu' il a gagné à Ushaia et son discours est plutot convaiquant...A suivre !
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Mer 28 Jan 2015 - 21:07
Marboué, je te conseille de lire Rabhi plutôt que de terminer sur le ressenti qui découle de l'émission entendue. Dans son livre, il a eu le temps de développer sa pensée. Elle me semble tout à fait cohérente et fonctionnelle. Le format d'une émission radio/télé ne met jamais en valeur les personnes qui ont quelque chose à dire. Les questions sont posées d'une façon qui peut constituer un piège, et Pierre Rabhi devait savoir qu'on ne le laisserait pas déployer tranquillement ses idées sans lui opposer résistance. Se sachant en terrain presque-ennemi, peut-être a-t-il versé sans cette sorte de consensus mou qui ne sait pas trancher entre réalisme et utopie ?
Pour le côté manichéen de l'opposition vieux/moderne, je reconnais que c'est mal choisi. Mais là encore, peut-être était-ce simplement une allusion symbolique et métaphorique plus que la constatation d'une réelle infériorité écologique et esthétique des bâtiments modernes.
Je n'ai jamais connu la sobriété mais je me reconnais lorsque Pierre Rabhi évoque l'importance du lien entre les générations vieilles et jeunes, non perverti par la notion d'usure ou de productivité. Il parle de relations pleines : un enfant pouvait s'émerveiller et se déployer au contact d'une vieille personne qui était devenue et que l'on considérait comme un univers.
Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Jeu 29 Jan 2015 - 0:28
colimasson a écrit:
Je n'y suis pas encore mais comme je n'y connais rien en économie... qu'est-ce qui t'a semblé croquignolet ? excepté peut-être le caractère irréaliste de ses propositions ?
Marboué a écrit:
Est-il décroissant ? Interpelé par un auditeur, il a répondu à côté.
On ne saurait, en tous cas, le qualifier de pro-croissance !
Pierre Rabhi souligne le fait que les économistes, prônant la croissance comme l'alpha et l'oméga de l'activité humaine, et soutenant que celle-ci doive être la plus élevée possible, encouragent à faire tourner une machine perverse, qui anéantit la planète et, en apparence moins directement mais tout aussi certainement, ses habitants (nous, quoi). L'économie est le bras armé théoricien qui permet le pillage sans limite, la création de besoins superflus sans cesse renouvelés, la prédation de tout ce que la Terre peut compter comme ressources (j'ai souri à l'expression l'ère pétrolithique", qu'il emploie, comme on dirait le crétacé ou l'ère quaternaire). Avec la notion de profit servant la finance, c'est-à-dire l'argent servant l'argent (l'économie-casino) et non le bien-être commun de l'humanité.
Sans doute certains économistes -je pense aux "atterrés" comme Frédéric Lordon ou Gael Giraud par exemple pour rester parmi les français, sont plutôt sur la longueur d'onde de Pierre Rabhi que sur celle que l'on trouve, par exemple, exposée dans Dynamic models of oligopoly, par D. Fudenberg & J. Tirole (oui, notre "ultime" Nobel d'économie -je cherche un smiley qui a la nausée).
Marboué a écrit:
La première chose qui m'a gêné dans son propos, c'est son positionnement flou : "- êtes vous utopiste ou réaliste ? - je suis réaliste... - mais utopiste aussi ? Utopiste aussi, on a besoin de l'utopie..." : voilà comment il termine son interview. Utopiste ou réaliste, il faut savoir trancher. Les deux postures ont leur intérêt, mais vouloir concilier les deux me semble pas forcément pertinent (pluie d'avis contraire à venir, je sais).
Marboué a écrit:
Toujours dans le flou.
Je suis content, à l'opposé, que Pierre Rabhi ne se prête pas au petit jeu de la code-barrisation et de la définition de lui-même et de sa pensée en deux adjectifs. Il n'y a pas à trancher quand un journaliste empressé vous somme d'être ceci ou cela, ne conseillons jamais d'y céder !
Marboué a écrit:
Un exemple : il pourfend la modernité dans ce qu'elle sacrifierait la beauté à la fonctionnalité. C'est une critique dans laquelle je me retrouve profondément. Mais pour l'illustrer, il indique que les bâtiments modernes ne sont que fonctionnels, sans âmes, contrairement aux vieux bâtiments. Mouais. Donc pour avoir une âme, il faut forcément qu'un bâtiment soit en pierre / en bois et ait quelques siècles de bouteille. Mais lui qui se réclame de la pensée écologique, il faudrait quand même lui rappeler que les vieux bâtiments ce sont des passoires énergétiques, et qu'en terme de sobriété, on est très loin du compte. Au lieu de tenter une pensée qui dépasse l'opposition fonctionnel / beau (on peut concevoir un bâtiment moderne avec des matériaux modernes, fonctionnel (isolation thermique, système d'énergie collectif efficace, sans espace gaspillé...) et beau tout à la fois), on tombe quand même dans une dérive qui tend à se tourner uniquement vers le passé.
Alors...d'une lecture que je recommande, et déjà ancienne des quatre tomes (épais !) de l'Histoire de la France rurale, corroborée par ce que j'ai pu voir et visiter, ailleurs, en voyage, il ressort que l'habitat traditionnel ancestral est très adapté aux besoins des êtres humains, que celui-ci soit la tente du nomade (ou l'igloo du nomade Inuit) ou la ferme celte, franque ou viking, ou encore la villa romaine (ou tout autre). Si tu as ton cheptel à l'étable, et ton grain et ta fenaison au grenier, tu as une isolation, certes pas le nec plus ultra, mais correcte. Si en revanche tu n'as pas d'activité agricole et que tu habites une ferme traditionnelle, ça ne fonctionne pas. Idem, ton isolation sera correcte dans une maison basse avec le toit couvert d'herbe vive, toit qui saura retenir la neige l'hiver, même si tes murs sont faits en boue séchée, torchis sommaire, tourbe et bois mêlés, comme on peut encore en voir à l'état conservatoire en Scandinavie. Tout en soulignant au passage que l'exigence du 20° (mini ?) en hiver dans les habitations est assez neuve (elle n'a pas un siècle).
Ce que veut dire Pierre Rabhi -tel que je le comprends du moins, on est là pour en discuter !- c'est que bien sûr les techniques "performent" (un mot dont il doit avoir horreur !) davantage aujourd'hui: Mais, si tu fais poser des panneaux solaires (ou des baies vitrées, ou des isolations de murs ou de toiture, etc...) conçus dans un cabinet d'étude en Allemagne, fabriqués en Chine, importés par cargo, et distribués par une filiale d'un groupe coté en bourse à Amsterdam, Paris ou New-York, tu n'as pas fait du tout dans la sobriété, ni non plus dans l'éco-responsabilité, quelles que soient les apparences au final !
En effet, les habitats traditionnels ancestraux sont tous fabriqués à partir des matériaux qui sont sur place, et souvent (on peut même dire en général), gratuits ou peu coûteux (même si la pierre de taille ou le bois à charpente grevait un peu le budget matériaux). De là il ressort que les ruines de ces constructions-là ne sont pas insolites, puisqu'elle retournent à la terre dont les matériaux sont issus, et sont issus, j'insiste, avec une notion de proximité.
Spoiler:
Si vous permettez un petit coq-à-l'âne, mais il est illustratif, j'avais beaucoup creusé ces démarches-là, tout ce qui gravite autour du bâti traditionnel ancestral avec les gens qui travaillent sur un chantier proprement dit, à édifier le château de Guédelon . Par exemple: A les voir faire pousser du chanvre, puis le rouir, puis tresser tous les cordages nécessaires au chantier, et ça en fait, ou extraire du mauvais minerai local certainement inexploitable industriellement, et, avec un soufflet, un âtre, une masse, sortir toutes les pièces métalliques nécessaires à la construction, outils compris et c'est vraiment colossal, stupéfiant d'y parvenir, ou encore extraire, tailler la pierre, monter à la traction animale et humaine des masses de pierre parfois si finement encastrées (ou sculptées), retrouver tout ce que peut comporter comme noblesse dans le domaine du travail le savoir-faire du charron, celui du maçon, du charpentier et de bien d'autres corps de métiers, je me dis que l'ingéniosité, lorsqu'on se donne pour contrainte de ne bâtir qu'avec ce qu'on trouve localement, permet de bien belles prouesses.
Pour le reste, plus j'avance dans ce livre, plus un parallèle me saute aux yeux, est-ce que cela vous le fait à vous aussi, avec les essais de Giono, je pense en particulier à Lettre aux paysans sur la pauvreté et la paix, et à Les Vraies Richesses ?
Marboué Espoir postal
Messages : 21 Inscription le : 18/01/2015 Age : 36 Localisation : Lyon
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Jeu 29 Jan 2015 - 1:42
Merci Bix, Colimasson et Sigismond pour vos retours.
Pour ce qui est du déterminisme du format de l'interview, j'avais pris les précautions langagières pour le rappeler : je n'en suis pas dupe. J'irai emprunter le livre à la bibliothèque, pour me faire ma propre idée au-delà de vos éclairages intéressants, mais qui me laissent encore dubitatif.
Sigismond a écrit:
Marboué a écrit:
Un exemple : il pourfend la modernité dans ce qu'elle sacrifierait la beauté à la fonctionnalité. C'est une critique dans laquelle je me retrouve profondément. Mais pour l'illustrer, il indique que les bâtiments modernes ne sont que fonctionnels, sans âmes, contrairement aux vieux bâtiments. Mouais. Donc pour avoir une âme, il faut forcément qu'un bâtiment soit en pierre / en bois et ait quelques siècles de bouteille. Mais lui qui se réclame de la pensée écologique, il faudrait quand même lui rappeler que les vieux bâtiments ce sont des passoires énergétiques, et qu'en terme de sobriété, on est très loin du compte. Au lieu de tenter une pensée qui dépasse l'opposition fonctionnel / beau (on peut concevoir un bâtiment moderne avec des matériaux modernes, fonctionnel (isolation thermique, système d'énergie collectif efficace, sans espace gaspillé...) et beau tout à la fois), on tombe quand même dans une dérive qui tend à se tourner uniquement vers le passé.
Alors...d'une lecture que je recommande, et déjà ancienne des quatre tomes (épais !) de l'Histoire de la France rurale, corroborée par ce que j'ai pu voir et visiter, ailleurs, en voyage, il ressort que l'habitat traditionnel ancestral est très adapté aux besoins des êtres humains, que celui-ci soit la tente du nomade (ou l'igloo du nomade Inuit) ou la ferme celte, franque ou viking, ou encore la villa romaine (ou tout autre). Si tu as ton cheptel à l'étable, et ton grain et ta fenaison au grenier, tu as une isolation, certes pas le nec plus ultra, mais correcte. Si en revanche tu n'as pas d'activité agricole et que tu habites une ferme traditionnelle, ça ne fonctionne pas. Idem, ton isolation sera correcte dans une maison basse avec le toit couvert d'herbe vive, toit qui saura retenir la neige l'hiver, même si tes murs sont faits en boue séchée, torchis sommaire, tourbe et bois mêlés, comme on peut encore en voir à l'état conservatoire en Scandinavie. Tout en soulignant au passage que l'exigence du 20° (mini ?) en hiver dans les habitations est assez neuve (elle n'a pas un siècle).
Ce que veut dire Pierre Rabhi -tel que je le comprends du moins, on est là pour en discuter !- c'est que bien sûr les techniques "performent" (un mot dont il doit avoir horreur !) davantage aujourd'hui: Mais, si tu fais poser des panneaux solaires (ou des baies vitrées, ou des isolations de murs ou de toiture, etc...) conçus dans un cabinet d'étude en Allemagne, fabriqués en Chine, importés par cargo, et distribués par une filiale d'un groupe coté en bourse à Amsterdam, Paris ou New-York, tu n'as pas fait du tout dans la sobriété, ni non plus dans l'éco-responsabilité, quelles que soient les apparences au final !
En effet, les habitats traditionnels ancestraux sont tous fabriqués à partir des matériaux qui sont sur place, et souvent (on peut même dire en général), gratuits ou peu coûteux (même si la pierre de taille ou le bois à charpente grevait un peu le budget matériaux). De là il ressort que les ruines de ces constructions-là ne sont pas insolites, puisqu'elle retournent à la terre dont les matériaux sont issus, et sont issus, j'insiste, avec une notion de proximité.
Les habitats traditionnels étaient bâtis dans le contexte d'alors : il y avait de la place, des matériaux (effectivement parfois gratuits) à disposition et il n'y avait pas des milliards d'habitants à héberger (dont un bon nombre n'a pas même trois planches au-dessus de la tête). Je te mets au défi de trouver des matériaux de construction au coin de la rue (on est quelques-uns à habiter en ville aujourd'hui), et de la place pour que chacun bâtisse sa petite maison (la maison basse avec toit végétal c'est bien, mais on risque de vite être à court d'espaces libres). On peut également difficilement concevoir aujourd'hui que chaque foyer ait son cheptel pour se réchauffer. Qu'on le veuille ou non, on ne peut recourir aux mêmes procédés dans notre monde que dans celui qui nous a précédé.
Je ne dis pas que la panneau solaire c'est mieux que la chaume (tu as très bien expliqué l'importance de la filière aval de production), je dis simplement que la résilience et la sobriété d'hier ne pourront pas être celles de demain. Plutôt que de célébrer nos vertus perdues, essayons plutôt de trouver celles de notre siècle, celles qui pourront se répandre dans le monde tel qu'il est aujourd'hui, celles qui pourront vraiment le changer.
A suivre donc de mon côté pour poursuivre la discussion après lecture !
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Ven 30 Jan 2015 - 17:50
Si on réfléchit dans le contexte productif actuel, Rahbi peut sembler utopique en effet. Nous n'obtiendrons pas une uniformisation et une décroissance dans le cadre des échanges dérégularisés et mondiaux.
Les alternatives mises en place et présentées dans la fin du livre permettent de mieux saisir les ambitions concrètes de Rahbi : créer des structures à taille humaine. On ne se situerait plus dans l'immensité du monde, d'un continent ou même d'un pays, mais dans la proximité des relations d'échange et de connaissance. De plus en plus de réseaux de cette nature se développent récemment: AMAP, commerces de proximité, services d'échange local... je crois que dans un premier temps, Rabhi souhaite surtout développer cet aspect-là.
Sigismond Agilité postale
Messages : 875 Inscription le : 25/03/2013
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Sam 31 Jan 2015 - 18:33
Marboué a écrit:
Je te mets au défi de trouver des matériaux de construction au coin de la rue (on est quelques-uns à habiter en ville aujourd'hui), et de la place pour que chacun bâtisse sa petite maison (la maison basse avec toit végétal c'est bien, mais on risque de vite être à court d'espaces libres). On peut également difficilement concevoir aujourd'hui que chaque foyer ait son cheptel pour se réchauffer. Qu'on le veuille ou non, on ne peut recourir aux mêmes procédés dans notre monde que dans celui qui nous a précédé.
Plutôt que de célébrer nos vertus perdues, essayons plutôt de trouver celles de notre siècle, celles qui pourront se répandre dans le monde tel qu'il est aujourd'hui, celles qui pourront vraiment le changer.
A suivre donc de mon côté pour poursuivre la discussion après lecture !
Dans cette vidéo, sortie tout dernièrement, Pierre Rabhi parle (vers 11'50 à peu près) du développement "mégalopolis".
On peut supposer -j'extrapole volontiers- que les jardins partagés, AMAP dont parle Coli, tout choix délibérés de proximité, sont des éléments plutôt conforme à ce qu'expose Rabhi, mais ne suffiront pas: Le phénomène paraît irréversible et je ne vois pas (peut-être Rabhi ou d'autres le voient ?) comment stopper la machine. Mais après tout on peut peut-être aussi se contenter de l'acquis urbain et revitaliser l'espace rural, autrement que par des maisons-dortoirs pour rurbains engrangeurs de kilomètres, ou comme résidence secondaire, et campagne réserve-d'indiens.
Par exemple, la proportion d'agriculteurs parmi la population exerçant une activité professionnelle en France doit avoir chuté aux alentours de 4% à peu près, j'ai la flemme de vérifier, peut-être encore moins. Et encore est-ce, pour la plupart, une activité fort éloignée de ce que préconise Rabhi, l'agro-écologie. Il y a, en France du moins, je n'en dirais pas autant de Singapour, Hong-Kong ou même les Pays-Bas, encore la place pour s'installer et opter pour les préceptes que préconise Pierre Rabhi, et ce pour des millions de personnes. Après, en matière urbaine, sans entreprendre de raser, du moins peut-on se contenter de l'existant, sans avoir besoin de souscrire à cette économie qui ravagerait, en quelques années dit-on, l'équivalent des terres agricoles d'un département moyen juste pour les "besoins" de son extension urbaine et des infrastructures afférentes.
Un autre exemple -je me doute de ce que Rabhi en penserait s'il le savait, et peut-être le sait-il d'ailleurs j'aime bien chiner, dans une brocante à l'automne dernier je tombais sur un Larousse Agricole en plus de 20 (24, je crois) épais volumes de grande taille, et, par hasard, je parcourais quelques lignes qui disaient que les meilleures terres à blé de France étaient celles de Roissy en France. Ce qui n'a pas empêché, moins de dix ans plus tard, de bâtir là sur des milliers et des milliers d'hectares de la "meilleure terre à blé naturelle de France", le plus gros aéroport du pays, les infrastructures et les cités et autres villes, en rapport.
shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Sam 31 Jan 2015 - 20:00
Merci Sigismond pour tout ce que tu apportes en plus aux propres réflexions de Rabhi.
De mon côté, je ne crois pas que ce soit particulièrement révolutionnaire de parler en 2013 du consumérisme, de ces technologies inventées par des hommes incapables de les maitriser, de l'aliénation par le travail, de l'idée que la modernité qui devait apporter du pain pour tous et plus de liberté n'a été qu'un facteur supplémentaire d'emprisonnement et n'a en rien diminué les inégalités sociales. Ce constat, fait par Rabhi, nous pouvons tous le faire. Nous pouvons tous (selon des modes de raisonnement différents) nous poser la question de la nécessité des objets qui nous entourent et que nous consommons et en conséquence de la manière dont nous désirons réguler, améliorer, aménager notre vie pour la rendre moins énergivore, spéculatrice ou même prédatrice. La sobriété, en tout cas c'est ce que je crois lire sous la plume vindicative de Rabhi, n'est pas régression ou retour à des modes de vie ancestraux mais bien une adaptation de nos désirs à ce que la terre peut nous offrir, à une consommation raisonnée si ce n'est raisonnable, à l'idée que l'on peut combler ses envies en restant responsable. Il ne s'agit donc pas d'un retour en arrière (ce serait en quelque sorte ridicule -d'où sans doute la défiance envers le terme de décroissance-) mais d'une volonté de se servir de nos idées, nos créations, nos cerveaux plein de rêves pour envisager de vivre mieux, dans le respect de l'autre et de la nature. Utopique ? Oui. Mais si chacun à sa propre échelle tente de vivre dans cette optique très simple de respect, j'ai quand même la sensation que tout le monde peut accéder (à plus ou moins grande échelle, en fonction de ses moyens, ses envies, ses propres limites) à vivre mieux, solidaire, attentif et peut-être un peu fier...
Ariane SHOYUSKI Sage de la littérature
Messages : 2372 Inscription le : 17/04/2014
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Sam 31 Jan 2015 - 23:50
Je suis vos échanges depuis le début avec beaucoup d'intérêt. Et tout me fait réfléchir sérieusement. Merci beaucoup pour tous les participants.
Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Dim 1 Fév 2015 - 8:58
merci Shanidar, je comprends et adhère à ce que tu dis et j'aime penser que des utopies deviennent réalité.
quand je lirai le livre je serai nourrie de toutes vos réflexions !
shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Dim 1 Fév 2015 - 10:52
J'ajoute (et c'est souvent la magie des échanges lors des lectures communes) que les interventions de chacun permettent d'apporter des exemples très concrets et très précis sur le sujet proposé, ce qui manque (en tout cas ce qui me manque beaucoup) à la lecture du texte de Rabhi... Je regrette qu'il n'accompagne pas sa démonstration d'un peu plus d'exemples, de chiffres, de mises en chantier de son programme... Quant à sa défense de la pauvreté (qui n'est pas misère), je la trouve pertinente et lénifiante, vision du corps et de l'esprit en paix avec leurs propres désirs, réalisation de soi non pas à travers l'argent mais la recherche du bien-être et d'une quasi autosuffisance, qui passe par l'écoute de soi.
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Dim 1 Fév 2015 - 19:49
Je crois que l'on a tort de vouloir chercher des propositions concrètes dans ce livre de Rabhi. C'est un manifeste court, et pas un programme de mise en chantier. Il s'en prend aux bases mêmes du système à rénover: celui de nos pensées.
Je considère ce livre comme un préalable à la révolution mentale afin que l'homme moderne accepte de redevenir humble.
shanidar Abeille bibliophile
Messages : 10518 Inscription le : 31/03/2010
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Dim 1 Fév 2015 - 21:10
colimasson a écrit:
Je crois que l'on a tort de vouloir chercher des propositions concrètes dans ce livre de Rabhi. C'est un manifeste court, et pas un programme de mise en chantier. Il s'en prend aux bases mêmes du système à rénover: celui de nos pensées.
Je considère ce livre comme un préalable à la révolution mentale afin que l'homme moderne accepte de redevenir humble.
Tu as sans doute raison coli, c'est encore une forme de sobriété que nous offre Rabhi. Je n'ai pas encore fini, j'ai eu parfois l'impression de lire un programme politique pour des élections écrit par un poète, ce qui n'est pas vraiment désagréable et en tout cas ce premier essai me donne envie d'aller regarder un peu plus vers cette littérature alternative (Roegen en particulier).
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Lun 2 Fév 2015 - 21:16
D'ailleurs, j'ai appris au passage qu'il s'était proposé comme candidat pour une présidentielle...
colimasson Abeille bibliophile
Messages : 16258 Inscription le : 28/06/2010 Age : 33 Localisation : Thonon
Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse Dim 8 Fév 2015 - 20:09
J'ai relevé quelques passages qui m'ont rappelé Simone Weil :
Citation :
« L’enfant est bouleversé de voir le forgeron revenir chaque soir, comme tous les autres, souillé. L’idole est comme profanée. L’atelier est devenu une coquille silencieuse derrière sa porte désormais close sur les souvenir au goût désuet d’un temps, immémorial, si brusquement révolu. »
Pierre Rabhi raconte ici ses souvenirs d'enfants lorsqu'il a vu son père forgeron devoir se mettre au rythme de travail imposé des mineurs. Le forgeron fier qu'était son père est alors devenu un esclave -muet, inconsistant, lointain. Le monde du travail avait séparé l'enfant de son père. Le travail avait provoqué l'arrachement du fils à son père. Et cela me rappelle cette proposition de Weil, qui souhaitait que l'enfant puisse redonner du sens au travail de son père en faisant du travail un art de vivre total :
Citation :
« Coopératifs ou non, ces petits ateliers ne seraient pas des casernes. Un ouvrier pourrait parfois montrer à sa femme le lieu où il travaille, sa machine, comme ils ont été si heureux de le faire en juin 1936, à la faveur de l'occupation. Les enfants viendraient après la classe y retrouver leur père et apprendre à travailler, à l'âge où le travail est de bien loin le plus passionnant des jeux. »
Et Pierre Rabhi a aussi écrit :
Citation :
« La modernité a inventé toutes formes d’exils. »
Et :
Citation :
« Je rêve souvent à l’avènement d’un nouveau paysan gouvernant sa petite ferme comme un souverain libre en son petit royaume. »
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Sujet: Re: LC Pierre Rabhi - Vers la sobriété heureuse