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| Nicolas Fargues | |
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+3bertrand-môgendre kenavo Aeriale 7 participants | |
Auteur | Message |
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Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Nicolas Fargues Mer 6 Avr 2011 - 18:10 | |
| Tu verras
Merci pour ce beau commentaire traversay que je craignais plus sévère. Tes seules réserves à te lire semblent relever plutôt de ce risque à paraître ou non crédible, du moins légitime lorsque l'on aborde des thèmes aussi personnels et tabous que la mort d'un enfant. Quels sont les droits d'un écrivain, peut-il s'accaparer d'un sujet si dramatique sans l'avoir vécu lui-même, sans dénaturer cette souffrance qui n'a pas de nom. Eternel problème qui pour moi à sa réponse dans son authenticité, dans cette faculté que possèdent ou non certains auteurs à rentrer dans le psychisme d'un père "orphelin" de son fils.
"Tu verras" a ces qualités là. Un récit non autobiographique mais dont l'origine est dûe à un drame évité de justesse pour l'auteur dont le fils fut renversé par une voiture (accident heureusement sans conséquence) Nicolas Fargues s'en explique dans un interview et parle de ce besoin d'exorciser cette peur qui depuis l'obsède, cette pensée absolumernt impossible à même formuler tant elle est cruelle, mais qui pourtant habite notre subconscient dès lors que l'on devient parent.
Ici donc Nicolas Fargues ne traite pas de la douleur ni du deuil, mais de la relation père/fils, une occasion de revenir sur ce rapport privilégié qui unit ou sépare parfois ceux là, et sur une conception de la vie différente lorsque ce pourquoi vous vivez n'est plus. Ce roman est presque un défi, une remise en question totale et sans condition qui sonne extrêmement juste et foudroie par son honnêteté et sa profonde lucidité. Comme le dit traversay le personnage de Fargues ne s'épargne rien. Un peu lâche et égoïste, sans réel but, il semble être passé à côté de tout et se retrouve rongé par les remords.
J'ai été très émue à cette lecture, tout ce qu'on y lit se ressent plus qu'il ne s'explique, tout y est vrai et juste parfait. Un roman qui fait du mal et du bien, et parfois ce sont les meilleurs. Le sien l'est en tout cas sans conteste pour moi. Respect à monsieur Fargues!
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| | | topocl Abeille bibliophile
Messages : 11706 Inscription le : 12/02/2011
| Sujet: Re: Nicolas Fargues Sam 23 Avr 2011 - 18:47 | |
| Tu verras
Un livre choc. Premier conseil : ne le commencer qu’avec une bonne après-midi ou soirée devant soi pour le lire d’une traite , sans s‘arrêter. (Quitte à le reprendre après par petits bouts pour l’apprécier différemment)
L’histoire d’un type quadragénaire, banale, pas beau, pas spécialement intelligent, avec ses petites faiblesses et ses petites compromissions, qui essaie de s’en sortir honorablement de sa vie (un type comme nous, quoi) ; son enfance écartelée, son mariage échoué, son fils adoré. Ses questions sur la vie, qu’aurait-il pu faire autrement, la responsabilité d’élever un enfant, le rendre heureux ou en faire quelqu’un de bien, de bien tel qu’il le pense ou tel que je le pense moi ? jusqu’ou l’aider ou lui faire confiance, ? Sans l’ abandonner ? Sans trop souffrir soi même ? Comment l’aimer juste et bien ? un questionnement quotidien de chacun de nous parents Et qui prend une acuité folle quand cet enfant de 12 ans meurt, absurdement et plus que ça, la solitude du quotidien devient atroce, chaque détail écorche et étaye en même temps. Se raccrocher aux détails et avancer ? Faut-il vraiment avancer ? Quel sens à tout cela ? L’insupportable mais parfois salvatrice présence des autres.
Un questionnement fort et déchirant, banalement quotidien mais outrageusement unique sur le sens de la vie, de l’amour et de la transmission dans une douleur et un calme terrifiant.
Voici quelques notes lâchées au détour de cette grande lecture, faite d’émotion et de réflexion. Les larmes aux yeux mais jamais larmoyant. Impression difficile à transmettre qui ne peut être ressentie qu’en lisant ce roman courageux, humble et formidablement quotidien dans son exception. Qui ne fait que me conforter dans une idée que j’ai depuis longtemps (mais ne sais pas toujours appliquer) qu’il faut toujours se comporter avec ceux que nous aimons comme si c’était la dernière fois.
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| | | topocl Abeille bibliophile
Messages : 11706 Inscription le : 12/02/2011
| Sujet: Re: Nicolas Fargues Lun 25 Avr 2011 - 20:36 | |
| Tu verras
« Car, me suis-je dit tandis que mes paupières crevaient sous le trop-plein de larmes, afin de parer aux moments les plus insoutenables, la nature a bien fait les choses pour les hommes : le corps est ainsi conçu qu’il trouve des solutions pour nous empêcher de mourir de chagrin, un peu comme on finit par s’évanouir sous la torture. »
« Moi qui, un peu moins de trente ans plus tard, à bientôt quarante ans, constatais qu’être père d’un garçon, c’est non seulement ne pas supporter de reconnaître chez son fils ses propres défauts, mais également reproduire avec lui exactement les mêmes erreurs commises avec vous par votre propre père, et ce malgré toute votre volonté de bien faire et de déjouer les mauvais atavismes. J’ai pensé que j’avais passé un temps fou à vérifier les cahiers de Clément et à lui crier de bien se tenir à table, mais sans être fichu de découvrir qu’il écrivait des poèmes. » | |
| | | traversay Flâneur mélancolique
Messages : 10160 Inscription le : 03/06/2009 Age : 66 Localisation : Sous l'aile d'un ange
| Sujet: Re: Nicolas Fargues Sam 24 Mar 2012 - 0:46 | |
| La ligne de courtoisie - Citation :
- En panne d'inspiration et d'amour, un écrivain quadragénaire tente l'exil. Et échoue
Après l'émotion de son précédent livre, Tu verras, Nicolas Fargues signe un roman aux antipodes, La ligne de courtoisie, portrait désabusé d'un écrivain en cale sèche et d'une époque médiocre à tous points de vue. Dans la lignée de ses confrères édités par P.O.L, Oster, par exemple, Fargues n'a ici pas d'histoire fracassante à raconter, il n'a que l'envie de fustiger la société de consommation qui nous rend moutonniers, futiles et ridicules. On peut penser également à Jean-Paul Dubois quand l'auteur décrit avec une verve lasse l'importance démesurée que prennent les objets du quotidien dans notre propre existence. Pas plus que Dubois, Fargues ne se ménage dans La ligne de courtoisie en créant un narrateur pusillanime, revenu de tout et à la force d'inertie redoutable. S'il écrit sur presque rien, ce qu'on est en droit de lui reprocher comme dans plusieurs de ses ouvrages antérieurs, il le fait dans une langue superbe, dont la beauté parfois précieuse, avec l'usage fréquent de mots rares, finit par contredire, peu ou prou, sa satire triste des moeurs. Ce n'est évidemment pas le meilleur livre de Nicolas Fargues, bien que son style n'ait jamais été aussi brillant. Le genre de paradoxe qui colle bien avec ce roman singulier qui hésite entre suave mélancolie et dépression profonde. | |
| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Nicolas Fargues Sam 24 Mar 2012 - 9:08 | |
| Merci pour tes impressions traversay, je les attendais... - traversay a écrit:
- On peut penser également à Jean-Paul Dubois quand l'auteur décrit avec une verve lasse l'importance démesurée que prennent les objets du quotidien dans notre propre existence. Pas plus que Dubois, Fargues ne se ménage dans La ligne de courtoisie en créant un narrateur pusillanime, revenu de tout et à la force d'inertie redoutable.
Hé hé, Ce n'est pas par hasard que j'aime bien Fargues, il me rappelle c'est vrai Dubois par cette approche désabusée de la vie dans laquelle il ne cherche pas non plus à se donner le beau rôle. Leurs personnages sont le plus souvent lâches mais aussi très lucides. Par contre l'humour de Dubois aide à faire passer cette forme de désespérance, je ne suis pas sûre qu'il y ait cela dans La ligne de courtoisie. Mais je tenterai c'est presque certain! | |
| | | topocl Abeille bibliophile
Messages : 11706 Inscription le : 12/02/2011
| Sujet: Re: Nicolas Fargues Jeu 29 Mar 2012 - 14:59 | |
| La ligne de courtoisie
C'est l'histoire d'un pauvre type qui reste un pauvre type et le raconte avec un humour un peu caustique, hésitant entre la complaisance et la dérision. Le narrateur est un looser : il a été jadis écrivain à succès, il n'a plus rien écrit depuis 3 ans, et son éditeur n’a même plus envie de dîner avec lui. Ses enfants sont une caricature d'ados égocentriques et indifférents ; ses parents sont une caricature de parents médiocres décontenancés par ce grand gars pas vraiment mauvais, mais qu'on ne sait pas comment prendre ; les femmes défilent, bécasses, aussi vite installées que parties. Il ne fait pas grand-chose d'autre dans la vie que les courses et le ménage Il regarde tout ça, avec une petite distance auto-apitoyée, désespérément enfermé dans un isolement qu'un simple mot ou geste, plutôt tourné vers les autres que lui-même, suffirait à apaiser. Plutôt que s'attaquer à ses problèmes, il choisit de fuir en Inde, à Pondichéry, dans une ville inconnue où il ne connaît personne, et le livre nous dira s’il continue à se heurter aux mêmes problèmes de décalage, ou s’il va trouver sa solution. Donc : scénario : zéro. Mais ce n'est sans doute pas cela qui intéressait Nicolas Fargues. Ce dont il a envie, c'est de décrire des attitudes, des comportements. Ses dialogues, ses analyses, ses descriptions révèlent une finesse d'observation et de mise en scène souvent confondantes, mais dont l'accumulation finit par saturer : quelques nuances auraient donné plus de piquant et on regrette un certain manque de tendresse et d'indulgence vis-à-vis de ses personnages, qui aurait sans doute mieux révélé la faille derrière l’ironie. Nicolas Fargues en fait des tonnes là où un quintal aurait suffi. Il utilise un style excessivement travaillé (on a l'impression qu'il a pris un dictionnaire pour chercher des mots compliqués), qui sature souvent les yeux Au final, cela produit plutôt un sketch géant, qui pourra peut-être finir en film cocasse, mais certainement pas de la littérature. Trois heures de lecture plutôt marrante, il ne faut pas chercher beaucoup plus loin, mais c'est déjà ça. , - Citation :
- J'avais beau être âgé de 25 ans de plus que Maud, cela m'intimidait toujours, les meneurs-nés. Ces antidotes naturels au doute qui, en dépit de la réserve qu’ils peuvent vous inspirer avec leur égoïsme et leur brutalité, finissent toujours par l'emporter sur votre délicatesse, s'attirer votre respect et corallienne au bon vouloir, quand ils ne vous transforment pas carrément en servile thuriféraire..
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| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Nicolas Fargues Lun 16 Avr 2012 - 11:08 | |
| -La ligne de courtoisie-
Ouille, quel cynisme! J'aime bien Fargues et sa propension à ne pas se voiler. Dans ses précédents romans l'auteur, dans un style direct et spontané, nous livrait au travers de ses personnages ses propres faiblesses et un évident manque de poigne qui les rendaient d'autant plus attachants. Ici, son narrateur est un écrivain désabusé, incapable de s'attacher aux autres, coincé entre son mal être improductif, et son rejet d'une société à la dérive, concentrée sur le profit et l'immédiateté de ses besoins, dans laquelle il ne trouve plus sa place. Est-ce une raison suffisante pour justifier tant de cynisme et un regard proche du dédain sur ce monde qui ne le reconnait pas?
J'avoue, tant d'acidité m'a génée, on sent une telle aigreur (donnant lieu parfois à des description tordantes certes , mais...) que son héros m'a au bout du compte paru imbuvable. Ses circonvolutions inutiles et placardées à tout bout de champ pour préciser la matière dont sont fait les sacs ou les frigos ménagers me sont largement passées au dessus, et sa syntaxe précieuse et tarabiscotée a fini de me lasser, sans parler du voyage en Inde se terminant en queue de poisson. Qu'a voulu nous dire Fargues? Que dans cette course effrénée l'homme y perd ses repères? Soit mais pourquoi le faire dans un style si acerbe? Un minimum d'indulgence comme le note Topocl aurait été salutaire, et cette fois ci Fargues a cruellement manqué de cette humanité propre à Dubois à qui il est comparé plus haut! Le rire est grinçant, et la dépression guette. Pauvre narrateur victime des autres, j'espère que ce roman n'est pas symptomatique d'une possible perte d'inspiration, je l'ai trouvé bizarre à vrai dire... | |
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| Sujet: Re: Nicolas Fargues | |
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| | | | Nicolas Fargues | |
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