Barbara Pym

Secret, très secret

Ce sont trois nouvelles situées en Angleterre, dans l’Oxfordshire dans les années 40, avant et pendant la deuxième guerre.

La première est formidablement abracadabrante, une sorte d’histoire d’espionnage naïve (oserais-je dire simplette ? ) où les coïncidences sont tout simplement fantastiques, on n’y croit pas une seule seconde bien sûr, mais c’est chou quand même. Dans les deux autres nouvelles, on se retrouve en fait exactement comme dans la première, mêmes décors, mêmes personnages dont on a juste changé les noms et pratiquement les mêmes situations, c’est juste un peu moins foufou parce que les méchants espions ont été éliminés. On imagine très bien le cottage fleuri et le service à thé en porcelaine, c’est mimi et on a même la presque vieille fille qui finit par trouver son prince donc tout va bien. C’est désuet à souhait, on se croirait un peu dans les téléfilms avec Miss Marple mais c’est joliment écrit et on passe un moment agréable, entre délicatesse et douce ironie. Pour une lecture reposante et rapide, c’est parfait.

Sinon, je crois bien que James Bond a grave copié sur Miss Swann

Une corne d'abondance

Une découverte très agréable de Barbara Pym. Le facteur le plus surprenant est d'abord une impression d'intemporalité, tant la recherche existentielle d'une jeune femme et le poids des convenances sociales semble s'incarner dans un espace figé où seuls comptent des bouleversements intimes.
J'ai aussi été séduit par l'apparente légèreté du contexte : le parcours de Wilmet Forsyth est pourtant loin d'être linéaire alors que ses émotions bousculent un mariage fade et rangé, mais Pym s'empare de cette frustration maladroite avec une certaine tendresse. Avec en transition des intrigues paroissiales frôlant parfois l'insignifiance mais pleines d'humour, elle compose un récit oscillant entre amertume et fantaisie. Les traits de caractère sont perçus avec finesse, discrétion pour creuser les nuances de chaque personnage.

Tiens, elle me dit bien cette Barbara Pym! Cela me changera d´horizon!

pia a écrit:

Tiens, elle me dit bien cette Barbara Pym! Cela me changera d´horizon!

C'est l'un de mes auteurs favoris.   

Cela peut sembler anodin, des petits événements, des thés et l'ambiance anglaise, mais en même temps toute la cruauté du monde. L'univers entier dans une goutte d'eau. L'extraordinaire intelligence de dire l'essentiel à partir de presque rien.

J'ai réussi à acheter tous ses livres, beaucoup d'occasion, parce que malheureusement pas mal ne sont plus édités.  

Arabella a écrit:

Cela peut sembler anodin, des petits événements, des thés et l'ambiance anglaise, mais en même temps toute la cruauté du monde. L'univers entier dans une goutte d'eau. L'extraordinaire intelligence de dire l'essentiel à partir de presque rien.

Bien dit! Ton commentaire, Avadoro, et la réflexion tout à fait justifiée d'Arabella me donne l'envie de la relire.

Tu devrais aimer Pia!

Oui c'est bien dit Arabella. ça a l'air tout à fait comme je l'espérais. Tranquillisant malgré la cruauté. Quand on le vit de l'extérieur bien sûr. J'ai bien envie de la lire!

Grrrrrrr encore un auteur que je veux lire depuis des années :  "ô temps supsends ton vol" Ou donne -moi plusieurs cerveaux !!!  

églantine a écrit:

Grrrrrrr encore un auteur que je veux lire depuis des années :  "ô temps supsends ton vol" Ou donne -moi plusieurs cerveaux !!!  

  

Moi j'en veux un pour lire et un pour relire. J'avais beaucoup aimé B.Pim à une époque.

églantine a écrit:

Grrrrrrr encore un auteur que je veux lire depuis des années :  "ô temps supsends ton vol" Ou donne -moi plusieurs cerveaux !!!  

Même sentiment bien sûr ! Je crois que je n'ai lu qu'un seul livre d'elle et il y a bien longtemps.

C'est vrai qu'il faut prendre le temps de rentrer dans cet univers, de saisir au-delà des apparences et des anecdotes une description minutieuse d'émotions contrastées. Et la récompense est au bout de l'effort.

Moi aussi il faudrait que je m'y remette, je crois n'en avoir lu qu'un, son premier.

J'ai donc démarré un peu en avance "La douce colombe est morte" que j'aurai rapidement lu. Ce qui me permettra de me joindre à la lecture commune avec plaisir. C'est effectivement très agréable et fin derrière la légèreté et l'humour. Désolé pour les comparaisons mais elle me fait beaucoup penser à Colette en version british aussi bien dans les thématiques que dans le ton même si Colette est plus sensuelle peut-être.

On y reviendra mais j'ai bien aimé la réplique (mentale) de Léonora lorsque le jeune homme entrant dans son appartement lui dit qu'elle va bien dans son décor victorien: "Et vous, vous appartenez à une période plus ancienne", rêvait-elle, "Peut-être le dix-huitième siècle? On voit très bien un portrait de vous appuyé à un pilier en ruine". Tout est dit et annonciateur de pas mal de choses...

A suivre pendant la lecture commune.

Crampton Hodnet





Donc j'y vais de mon commentaire sur Crampton Hodnet (que personne ne lit en LC je crois).

C'est l'histoire d'une petite communauté qui vit à Oxford-nord, dans les années 1930, avec son lot de personnages bien typés, totalement ancrés dans une société victorienne, toute corsetée par un ensemble de rituels partagés entre invitation au thé du dimanche, kermesses, offices religieux, visite au jardin botanique...

Nous suivons en particulier l'univers d'une miss Doggett, septuagénaire  dont je cite:

La principale occupation dans l'existence consistait à se mêler des affaires des autres et à écraser de sa forte personnalité ceux qui étaient plus faibles qu'elle.

Nous sommes dans les premières pages et déjà la patte de Barbara Pym est bien présente avec des mots simples en bien choisis, elle donne le ton gentiment féroce de ce qui va suivre.

Cette Miss est flanquée d'une dame de compagnie (que j'assimilerai vite à Barbara Pym ou du moins un portait très approchant) Miss Morrow, 35 ans, à la mine fatiguée, maigre, vêtements ternes, rien pour réhausser un tantinet sa personne ou tout du moins donner un peu de piment à son existence, coincée entre cette Miss Dogget, autoritaire, snob, qui ne manque jamais de lui faire sentir son infériorité.

Mais Miss Morrow s'accommode de tout et survivra sans mal à une demande en mariage complètement ratée d'un jeune vicaire que miss Doggett hébergera son son toit quelques mois.

Alors que se passe-t-il dans ce livre ?

Eh bien tout et rien en fait.
Des petites choses, des banalités, des rituels contrariés par quelques amours ou plutôt ébauches d'amours que la réalité et les bonnes moeurs de cette société policée auront tôt fait de remettre en place comme si rien ne s'était passé.

On a l'impression que l'on pourrait périr d'ennui dans ces thés du dimanche ou dans ces kermesses désuettes, mais BP en fait une description à la fois ironique, détaillée et charmante et on se plait à suivre tous ces personnages avec intérêt, encore plus vif quand ceux-ci s'émoustillent pour un regard, un frôlement, une déclaration ou un semblant de déclaration.

Et le tout est agrémenté par des dialogues délicieux qui donnent un curieux aperçu de la vie un peu ennuyeuse des personnages .

ça donne lors d'un thé du dimanche:

- Vous ne pouvez pas nous quitter déjà ! s'exclama Miss Doggett. Je vous ai à peine parlé.
- Je suis confus, mais je dois partir répondit Mr Wyatt. Nous avons chapelle à six heures.

Ou alors:

- J'ai oublié d'apporter les betteraves dit Anthéa en quittant précipitamment la pièce
- Ah, que serait le souper du dimanche sans betteraves! s'exclama gaiement Miss Morrow

Encore:

- Il n'y a pas de malades à Oxford-Nord. On y est soit mort, soit vivant. Parfois il est difficile de faire la différence, c'est tout, expliqua Miss Morrow


Voilà pourquoi les livres de BP sont de petits bijoux, elle arrive à nous faire sourire d'un bout à l'autre de ce semblant de scénario, sorte de cluedo sentimental, où chacun s'épie, se mêle de ce qui ne le regarde pas car après tout il n'y a rien d'autre à faire, à part regarder par la fenêtre.

Et même si des intrigues se nouent et des plans amoureux naissent, on sait très bien que tout rentrera dans l'ordre, qu'on ne quittera pas Oxford-Nord et encore moins la Miss dont on est dame de compagnie, tout est sauf et les rituels peuvent reprendre avec les mêmes invités, à quelque nuances près.

Et après ces quelques contrariétés dans la vie de quelques personnages, on peut sereinement dire avec eux, je cite:

Mieux vaut oublier et sourire
Que pleurer et se souvenir

Merci pour ton chouette commentaire Darkanny! Il me semble retrouver complètement l'univers de mon premier Pym, Quatuor d'automne: Une petite communauté qui s'ennuie un peu, coincés entre les thés du dimanche et les cancans qui s'y collent. Et ce ton "gentiment féroce" qui fait ressortir, de la banalité apparente, les épisodes croustillants de cette vie trop bien rythmée.

Cela parait anodin, mais c'est décrit très finement! Je commence demain le mien, Un brin de verdure, et j'ai hâte :-)

Aeriale a écrit:

Merci pour ton chouette commentaire Darkanny! Il me semble retrouver complètement l'univers de mon premier Pym, Quatuor d'automne: Une petite communauté qui s'ennuie un peu, coincés entre les thés du dimanche et les cancans qui s'y collent. Et ce ton "gentiment féroce" qui fait ressortir, de la banalité apparente, les épisodes croustillants de cette vie trop bien rythmée.

Cela parait anodin, mais c'est décrit très finement! Je commence demain le mien, Un brin de verdure, et j'ai hâte :-)

Je viens de vérifier : j'ai bien les deux dans ma PAL : Quatuor d'automne et
Crampton Hodnet, récemment achetés : comme je voulais vérifier de façon efficace que cette auteure était bien aussi nulle que ce qui m'avait été dit j'en ai acheté ....4 d'un coup .Chouette alors : j'adore sa nullité !