André Téchiné

LES TEMOINS de Téchiné



Ma spécialité est de toujours (ou presque) voir les films avec un peu de retard (le temps qu'ils arrivent chez moi...s'ils arrivent! ). Aucun d'entre vous n'a vu ce film à sa sortie? Dommage! Parce qu'il est très réussi.

Dans ce film, Téchiné fait, à travers cinq personnages principaux, le portrait bouleversant de la société en crise face à l’apparition du SIDA.
C’est un film à la fois sombre et lumineux. Jamais larmoyant.


Eté 1984.

-Dans un petit appartement :
Sarah (Emmanuelle Béart), une romancière pour enfant, tente avec peine de trouver l’inspiration à côté du bébé qu’elle vient de mettre au monde.
Son compagnon, Mehdi (Sami Bouajila), lieutenant de police maghrébin,veut bien essayer de comprendre et d’aider. N’empêche…la situation est difficile…

- Dans un hôtel modeste :

Manu (Johann Libéreau) est venu à Paris pour chercher du travail. Il y a rejoint sa sœur (Julie Depardieu) à laquelle il impose gentiment (adorablement !) de partager sa chambre.
Julie suit une formation de chanteuse lyrique.

-Dans un lieu de rencontres gay, Manu fait la connaissance d' Adrien (Michel Blanc), un médecin homosexuel quinquagénaire qui tombe vite amoureux du jeune homme. Pourtant leur relation reste une relation d’amitié.

-Adrien, ami de Sarah et Medhi, invite Manu à un week-end avec eux en bord de mer. A partir de ce moment-là, Medhi et Manu vont vivre ensemble une relation amoureuse secrète. Manu prend ses distances avec Adrien.

- Adrien vient un jour le rejoindre dans le camping où il travaille. Manu lui dit la vérité. Adrien souffre et surtout constate, sur le corps de Manu, des symptômes que lui, médecin, reconnaît.

Tout est bouleversé dans les relations et les destins de ce groupe parce que Manu est victime du SIDA.


Le casting de ce film est impeccable :
- Michel Blanc en homosexuel quinquagénaire fou d’amour platonique est très juste et touchant.
-Sami Bouajila est très convaincant dans son rôle de flic impitoyable, de mari et père désemparé, d’amant homosexuel passionné.
- Emmanuelle Béart est toujours parfaite.
-Julie Depardieu a un rôle pour elle. Tout le monde connaît sa passion pour l’art lyrique. Et son caractère un peu « à côté »…Elle joue très bien cette artiste toute accaparée par sa passion pour le chant.
- Johan Libéreau, quant à lui, irradie de séduction, de naturel et de charme dans la première partie... Mais il est tout aussi parfait dans la deuxième où son rôle est plus sombre, en souffrance contenue.

Dernier film vu avant-hier en DVD...
C'est donc , en fait, un film qui parle ( très bien) des ces premières années où un nouveau fléau ( qui n'a pas du tout disparu, mais dont on parle bien peu maintenant) est apparu.
Téchiné en dit plus ici

Un formidable personnage, jouée par Julie Depardieu, très entière, mais ne jugeant jamais.
Michel Blanc est égal à lui-même, excellent.

Et puis... l'air de Barberine, des Noces de Figaro.
Dont je n'arrive pas à envoyer un extrait...

Marie a écrit:

Un formidable personnage, jouée par Julie Depardieu, très entière, mais ne jugeant jamais.

rien à voir avec le film que je n'ai pas vu. Mais je tenais à dire que j'apprécie de plus en plus cette actrice, par le choix de ses films, variés mais toujours assez justes (quand ils sont bien traités) et par sa manière d'aborder et de jouer ses rôles. Toujours avec beaucoup de justesse, et cette impression évidente qu'elle "ne juge pas" même lorsqu'elle joue des rôles plus difficiles.
Chapeau bas, elle fait du chemin la Julie ! (dommage qu'elle soit la fille de son père, mais on peut pas tout avoir )

Queenie a écrit:

Marie a écrit:

Un formidable personnage, jouée par Julie Depardieu, très entière, mais ne jugeant jamais.

rien à voir avec le film que je n'ai pas vu. Mais je tenais à dire que j'apprécie de plus en plus cette actrice, par le choix de ses films, variés mais toujours assez justes (quand ils sont bien traités) et par sa manière d'aborder et de jouer ses rôles. Toujours avec beaucoup de justesse, et cette impression évidente qu'elle "ne juge pas" même lorsqu'elle joue des rôles plus difficiles.
Chapeau bas, elle fait du chemin la Julie ! (dommage qu'elle soit la fille de son père, mais on peut pas tout avoir )

Queenie, je suis contente que tu écrives cela parce que je suis aussi très admirative de ce que fait Julie Depardieu...J'aime son décalage et sa sensibilité, sa façon bien à elle d'avoir toujours l'air de douter et de s'émerveiller...Elle n'est en rien justement une "fille à papa"...Elle est craquante et très fine dans son jeu. Vive Julie! :)

très beau film, effectivement, Ma saison préférée...Je le reverrais volontiers.
Mais je crois que mon film préféré de Téchiné reste J'embrasse pas avec un Philippe Noiret excellent, et Emmanuelle Béart, extrêmement touchante dans le rôle d'une prostituée.
Je me souviens avoir beaucoup aimé aussi Hôtel des Amériques. Patrick Dewaere..
Et qu'as tu pensé des deux derniers Les temps qui changent et Les témoins?

Il y avait un début de fil sur Les Témoins
ici

Je ne trouve toujours pas en ligne l'air de Barberine que chante Julie Depardieu ( tout petit extrait ici)

J'ai noté Les égarés, je ne l'ai pas vu, merci!

Citation :

Neanmoins j attends toujours avec impatience ses nouveaux films ; hors des modes il creuse son sillon celui de la sincerité.

Ce sera La fille du RER inspiré de l'histoire, en 2004 de Marie Leblanc qui avait prétendu avoir été l'objet, dans le RER D, d'une agression antisémite.

Pour le récit de l'affaire elle-même, le réalisateur a eu accès aux expertises. Mais pour donner une vie privée au personnage de son film, interprété par Émilie Dequenne ( Rosetta ), il a eu recours à la fiction. "Selon Pirandello, une mythomane est une artiste ratée, mais son mensonge reflète la vérité de ceux qui l'entourent", cite Téchiné, pour qui ce mensonge intime fut surtout un formidable révélateur de la société française. Le Point

Marie a écrit:

Il y avait un début de fil sur Les Témoins

J'ai fusionné les fils, et tenterais d'introduire le Téchiné dans le premier post dès que j'aurais un peu de temps.

tommy a écrit:

Les autres aussi peuvent répondre ....
Merci

Oui ici Tommy!
J'avais beaucoup aimé la BO



Pour le reste, je vous admire de pouvoir vous remémorer ainsi tous ces films de Téchiné qui est aussi pour moi, un de mes cinéastes préférés.
Mais je serais incapable de vous en parler plus en détails.

Ce que je peux dire c'est que Barocco sorti en 79 je crois, et que je n'ai plus revu m'avait fait une forte impression. Adjani et Depardieu dans le même film, c'était de grands moments.J'avais adoré mais incapable de me souvenir de la trâme de l'histoire...

Marie a écrit:

Ma saison préférée...Je le reverrais volontiers.
Mais je crois que mon film préféré de Téchiné reste J'embrasse pas avec un Philippe Noiret excellent, et Emmanuelle Béart, extrêmement touchante dans le rôle d'une prostituée.
Je me souviens avoir beaucoup aimé aussi Hôtel des Amériques. Patrick Dewaere

Beaucoup aimé aussi ces trois là, avec un souvenir plus précis pour J'embrasse pas.
Béart me fatigue aussi parfois mais dans ce film Téchiné avait réussi à la rendre particuièrement fragile et émouvante.

En, fait il faudrait que je me les revisionne tous! vous m'avez trop redonné envie, merci

aériale a écrit:

En, fait il faudrait que je me les revisionne tous!

Moi aussi...Sinon je suis incapable d'en parler...

Les temps qui changent

Avec Catherine Deneuve, Gérard Depardieu, Gilbert Melki, Lubna Azabal, Malik Zidi…



Antoine (Gérard Depardieu) est envoyé à Tanger pour superviser un chantier. Il y retrouve Cécile (Catherine Deneuve) qu’il n’a jamais oubliée... Trente ans auparavant, ils se sont aimés puis quittés. Elle s’est mariée avec un médecin marocain (Gilbert Melki). Ils ont un fils adulte (Malik Zidi), homosexuel vivant avec une jeune femme perturbée (Lubna Azabal ).
Le jeune couple arrive de France au même moment qu’Antoine.

Tous les personnages de ce film en sont à un moment fragile de leur existence. Quel rôle va jouer Antoine ? Il est toujours resté amoureux de Cécile et n’a qu’une idée : la reconquérir !

Gérard Depardieu en amoureux transi a quelque chose d’un peu naïf et balourd. Catherine Deneuve qui joue les fortes semble parfois sur le point de vaciller. Tous deux nous touchent.

C’est un film aux belles images, grave et mélancolique, sur le thème de l’amour et de ses variations…Saurait-il résister au temps qui passe ?...

Je trouve que Téchiné est toujours aussi doué pour rendre compte d'une époque, la nôtre, par une foule de petits détails dans la description de ses personnages et du milieu social dans lequel ils évoluent, en particulier, je l'ai noté à chaque film l'habillement et les décors.
Là, il est parti du fait divers qui avait frappé tout le monde, cette jeune femme qui avait prétendu être victime d'une agression antisémite dans le RER, et surtout l'emballement médiatique que cela avait déclenché, du fait même du caractère antisémite bien calculé, et il lui a inventé une histoire. Il n'explique rien, il constate, il observe, il remarque . Et c'est très bien fait.

Marie a écrit:

J'ai noté Les égarés, je ne l'ai pas vu, merci!

Normalement, je l'ai, je te le prêterai.

J'avais beaucoup aimé ce film, vu au cinéma, pas à Tahiti
Pourtant je ne suis pas fan d'Emmanuelle Béart mais dans ce rôle de mère de famille, je l'avais trouvée juste et touchante.

Marie a écrit:

Je trouve que Téchiné est toujours aussi doué pour rendre compte d'une époque, la nôtre, par une foule de petits détails dans la description de ses personnages et du milieu social dans lequel ils évoluent, en particulier, je l'ai noté à chaque film l'habillement et les décors.
Là, il est parti du fait divers qui avait frappé tout le monde, cette jeune femme qui avait prétendu être victime d'une agression antisémite dans le RER, et surtout l'emballement médiatique que cela avait déclenché, du fait même du caractère antisémite bien calculé, et il lui a inventé une histoire. Il n'explique rien, il constate, il observe, il remarque . Et c'est très bien fait.

Content que le film t'ait plu. Il n'a globalement pas été très bien reçu par des spectateurs qui s'attendaient à une reconstitution précise du fait divers. J'aime presque tous les Téchiné et celui-ci aussi, qui en dit long sur une époque confuse. La notre.

Impardonnables

Citation :

Francis arrive à Venise pour écrire son prochain roman. Il cherche à louer un endroit pour travailler. Il rencontre Judith, un agent immobilier. Elle insiste pour qu’il visite une maison isolée dans l’Ile de Sant Erasmo. Francis lui propose comme on se jette a l’eau : "Si on habite ici tous les deux … je signe tout de suite…". Ils se lancent alors dans une vie de couple.

Téchiné adaptant Djian ? Pas évident sur le papier (c'est une commande), bien que quelques thèmes leurs soient communs, l'entrecroisement des destins, notamment. Impardonnables, le livre, avait un ton automnal, dans un Pays basque fouetté par les vents, avec une introspection de plus en plus douloureuse pour l'écrivain qui en était la figure principale. Un roman sur la trahison et la solitude des êtres, d'un pessimisme intégral, accompagné de cette ironie typiquement "djianesque". D'emblée, le film trahit le bouquin en plaçant l'action à Venise. C'est d'ailleurs l'un des points forts de ce Téchiné, une façon de filmer la ville, et surtout sa lagune, hors des clichés touristiques, comme un personnage à part entière. Là où ne suit plus le cinéaste, c'est dans sa structure narrative, éclatée entre plusieurs intrigues, aucune d'entre elles ne prenant le dessus. Cela donne un climat flottant, à peine sordide, qui semble ne mener nulle part. Il y a des lacunes dans la lagune. A un moment où à un autre, il aurait fallu resserrer les boulons, arrêter de baguenauder d'une histoire à une autre. Non que Djian n'ait pas cette habitude, mais cela passe mieux dans une oeuvre romanesque et fait partie de sa "cuisine". Il a des qualités, pourtant, ce film : un montage trépidant, une interprétation hors pair, avec un Dussolier royal, une Bouquet impériale et des seconds rôles italiens al dente (seule Mélanie Thierry paraît complètement à côté de plaque). Impardonnables a le charme des films ratés avec style. A l'image de sa fin, brutale, et à contre-courant de la tonalité générale. Comme Djian est capable de le faire, avec cet art du plaquage de lecteur, qui est l'une de ses spécificités.

Sorti en DVD

Citation :

Il y a des lacunes dans la lagune

De grosses, grosses lacunes, oui...Mais qu'est-ce qui lui a pris à Téchiné??
A part ça, d'accord, plutôt sympa, cette façon de découvrir Venise.