Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Parfum de livres… parfum d’ailleurs
Littérature, forum littéraire : passion, imaginaire, partage et liberté. Ce forum livre l’émotion littéraire. Parlez d’écrivains, du plaisir livres, de littérature : romans, poèmes…ou d’arts…
Sortie le 20 juin du dernier Terence Davies The deep blue see qui est adapté d'une pièce de théâtre de Terence Rattigan dont on a déjà tiré un film par le passé.
Merci d'en avoir parlé, le DVD anglais est déjà sorti il y a un moment et je viens de le voir.. EXTRA
Il utilise un langage ciné que j'aime bien (déjà adoré son adaptation de The House of Mirth), très lent (trop probablement pour quelques uns) mais qui donne place à des idées de se former autour d'images très jolies Un film en couleurs estompées, des acteurs extraordinaires (naturellement il faut mentionner Rachel Weisz qui est époustoufflante, j'adore le commentaire de Terence Davies dans le making of quand il dit qu'elle va rayonner encore à l'âge de 90 ) mais surtout une fin qui fait vraiment le 'coup' d'adorer ce film
Grand coup de coeur.. et je ressors naturellement avec cette chanson qu'il a si bien utlisé bien que je n'ai pas aimé la partie où les gens au pub l'ont chanté, mais à partir du moment que Jo Stafford prend la parole, c'est tout beau
Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
Sujet: Re: Terence Davies Jeu 21 Juin 2012 - 0:10
The Deep Blue Sea
J'étais très impatient de découvrir ce nouveau film de Terence Davies et en sors comblé au-delà de mes attentes. Le rapport du cinéaste au passé, au souvenir, à la mémoire et à la fragilité du vécu me bouleverse, tout comme l'incarnation par sa mise en scène d'une hypersensibilité intériorisée, dont le refoulement et l'éclat forment le coeur de cette adaptation de Terence Rattigan.
The Deep Blue Sea marque par sa cohérence, sa fluidité, et révèle bien des liens avec ses "autobiographies" des années 80. Par le contexte historique évidemment, mais surtout dans la tonalité de la photographie. Voilée et mordorée, elle fascine par ses contrastes alors que la lumière semble toujours brûlante, sur le point d'aveugler les personnages. La musique apporte aussi une richesse indispensable : les deux séquences sur "You Belong To Me" et "Molly Malone" sont mémorables car elles sont l'évocation rare d'une osmose collective, d'un partage face à une solitude, parenthèse d'un moment qui sans elle serait réduit à l'état de vestige immobile. Le mouvement lent du concerto pour violon de Barber apporte par contre la sensation d'une continuité, leitmotiv d'une souffrance que l'on voudrait à la fois transcender et dépasser. Sa répétition crée l'effet d'une pesanteur qui, loin d'une surenchère, offre au film l'esquisse d'un rythme que celui-ci parvient à soutenir...grâce à la fluidité des plans et l'attention portée aux moindres gestes du quotidien.
Rachel Weisz interprète le rôle d'une femme submergée par des émotions auxquelles elle ne veut ni ne peut renoncer. Les traits de son visage portent en eux une flamme qui ne cédera pas aux conforts du regret, ce qui la conduit à une impasse vis à vis de son mari et de son amant. Si Terence Davies saisit une représentation de la condition féminine de l'après Seconde Guerre Mondiale, ainsi que les prémices d'une société qui évolue et bascule, il s'attache surtout à transcender une libération personnelle. L'acceptation de soi précipite la recherche d'une transcendance, d'une grâce forcément fugitive....mais qui peut représenter la source et la respiration d'une vie.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terence Davies Jeu 21 Juin 2012 - 0:12
Je vais y aller d'autant plus impatient!
Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
Sujet: Re: Terence Davies Jeu 21 Juin 2012 - 0:18
Et une nouvelle récente qui me réjouit...l'adaptation de Sunset Song semble désormais en route avec un financement assuré, pour un tournage d'ici début 2013. Sont annoncés dans les rôles principaux Agyness Deyn (mannequin britannique qui n'a pour l'instant connu que des courts rôles au cinéma) et Peter Mullan.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terence Davies Jeu 21 Juin 2012 - 0:21
Avadoro a écrit:
Et une nouvelle récente qui me réjouit...l'adaptation de Sunset Song semble désormais en route avec un financement assuré, pour un tournage d'ici début 2013. Sont annoncés dans les rôles principaux Agyness Deyn (mannequin britannique qui n'a pour l'instant connu que des courts rôles au cinéma) et Peter Mullan.
Je dois lire ce livre!
traversay Flâneur mélancolique
Messages : 10160 Inscription le : 03/06/2009 Age : 66 Localisation : Sous l'aile d'un ange
Sujet: Re: Terence Davies Jeu 21 Juin 2012 - 23:51
Avadoro a écrit:
The Deep Blue Sea
J'étais très impatient de découvrir ce nouveau film de Terence Davies et en sors comblé au-delà de mes attentes. Le rapport du cinéaste au passé, au souvenir, à la mémoire et à la fragilité du vécu me bouleverse, tout comme l'incarnation par sa mise en scène d'une hypersensibilité intériorisée, dont le refoulement et l'éclat forment le coeur de cette adaptation de Terence Rattigan.
Je suis moins enthousiaste qu'Avadoro. Je vais essayer d'expliquer pourquoi.
The deep blue Sea plaira aux amateurs du cinéma britannique d'après-guerre, il y en a, par exemple des films de David Lean (qui était plus romantique) ou Robert Hamer (plus social). C'est cette époque que décrit Terence Davies, avec un portrait de femme qui refuse les conventions, en choisissant la passion amoureuse, qui ne sera pas partagée, au lieu du confort d'un foyer classique, auprès d'un mari âgé. Rachel Weisz est exceptionnelle dans ce rôle de petit soldat de l'amour éperdu, aux ailes rognées, mais qui vit avec dignité son indépendance et sa liberté. La mise en scène est somptueuse, les éclairages sont superbes et les travellings glissent comme un cygne blanc sur un lac. Mais justement, cette stylisation permanente a pour effet de brider l'émotion, en empêchant complètement de se brûler les yeux au feu intérieur qui consume son héroïne. Il y a trop d'intelligence et pas assez de coeur dans ce film chamarré qui aurait convenu à un Douglas Sirk ou à un William Wyler. A noter cependant l'acuité des dialogues, incisifs, parfois corrosifs, dans cet étrange triangle : le mari, la femme et l'amant, trois victimes malgré elles. Enfin, il faut admirer la maîtrise de Davies à jouer sur plusieurs strates temporelles, avec des flashbacks fluides et presque imperceptibles.
Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
Sujet: Re: Terence Davies Ven 22 Juin 2012 - 0:57
Ce reproche de froideur a souvent été évoqué, mais je trouve justement que la poésie et la lenteur de la mise en scène renforce une trame expressive....souvent enfouie et refoulée certes, pourtant tout aussi violente qu'une passion brûlante ou étalée au grand jour. Et je pense que la beauté du film vient aussi du fait que chacun des personnages assume ses émotions et choisit d'aller au bout d'un chemin: elle sait que l'amour qu'elle porte à son amant est trop excessif pour qu'il puisse le lui rendre, et lui se refuse à adopter une posture sacrificielle face à une souffrance qu'il ne peut combler. Le mari veut toujours représenter une protection, une présence malgré l'impossibilité d'une compréhension, tout en acceptant le fait qu'elle puisse s'éloigner définitivement. Cette détermination fébrile, perceptible dans chaque parole, me semble particulièrement intense et déchirante.
traversay Flâneur mélancolique
Messages : 10160 Inscription le : 03/06/2009 Age : 66 Localisation : Sous l'aile d'un ange
Sujet: Re: Terence Davies Ven 22 Juin 2012 - 8:41
C'est une question de ressenti, Avadoro. J'ai eu la même sensation avec Amore. Une mise en scène trop léchée bride mes émotions, m'empêche de m'enflammer, peut-être parce que je suis trop sensible à la somptuosité de la réalisation, justement. Ca a pu m'arriver aussi avec certains Wong Kar-wai.
Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
Sujet: Re: Terence Davies Ven 22 Juin 2012 - 8:52
Bien sûr...et pour ce point, j'ai tendance à te suivre sur Amore et WKW. Une impression ne se joue pas à grand chose.
Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
Sujet: Re: Terence Davies Dim 24 Juin 2012 - 18:19
-The deep blue sea-
J'ai été déçue. Film très lent, beaucoup trop esthétisant je dirais, dans lequel une sorte de torpeur m'a rapidement gagnée. Au contraire de vous, la musique m'a semblé trop présente, et même si elle représente une osmose collective comme l'explique Avadoro, je ne l'ai pas ressentie ainsi, plutôt comme un ajout trop "placardé" presque inutile. (Je sens que je vais en énerver plus d'un, désolée...)
Je reconnais que le jeu de Rachel Weisz est lumineux, sa beauté torturée parvient facilement à émouvoir, et j'ai aimé son acharnement de petite combattante prête à tout bousiller pour étreindre cette passion qui la dépasse. Hélas, très vite la pesanteur s'est installée et mon regard s'est détaché du contexte. Peut-être que je n'étais pas dans les bonnes conditions (des gens parlaient à côté de moi, et la chaleur était suffocante) mais mes impressions rejoignent ici celles de traversay. Pas ou peu d'émotions autres que visuelles (superbes plans aux couleurs tamisées, collant à l'impression de flou du passé, c'est vrai) j'ai fini par ne ressentir que de la distance, sans croire à leur romance, l'ensemble m'a semblé trop convenu. Dommage, je n'étais surement pas le bon public pour ce film que j'attendais pourtant avec pas mal d' impatience
Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
Sujet: Re: Terence Davies Dim 24 Juin 2012 - 19:10
C'est vrai que le choix d'entamer le film par l'intégralité du Barber est notamment très risqué, mais cela permet précisément de faire vivre les personnages et de présenter leurs espoirs, leurs souffrances sans même avoir besoin des paroles. Et les interventions musicales creusent ainsi les failles de chacun, avec une discrétion et une délicatesse indispensables. Pour le reste, je reconnais que Davies est un cinéaste qui provoque des impressions très contrastées...j'y suis dans doute particulièrement attaché parce qu'il me renvoie à ma propre difficulté à gérer et à s'affranchir des émotions.
J'ai aussi beaucoup apprécié cet interview dans Télérama, très intense et à fleur de peau.
Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
Sujet: Re: Terence Davies Lun 25 Juin 2012 - 8:55
Disons qu'il faut certaines conditions pour bien rentrer dans ce film très intimiste, il faut pouvoir se laisser porter, chose qui m'était difficile sur le coup. J'ai lu l'article, Terence Davies s'y révèle très sincère c'est vrai, il explique d'où lui vient cette retenue, l' impossibilité que l'angleterre connaissait à cette époque de montrer ses émotions. La musique etait un moyen et ça l'a profondément marqué. Une confession très touchante en tout cas, merci pour le lien Avadoro..
Citation :
Mes films sont le fruit d'une mémoire qui repose sur les émotions. Quand on est, comme moi, le plus jeune de dix enfants, on ne peut pas tout saisir du monde autour de soi, on capture des moments intenses, d'euphorie ou d'affliction, dont on garde l'empreinte indélébile.
Ca m'a donné envie de me procurer The Distant voices tout ça...
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Terence Davies Lun 25 Juin 2012 - 10:00
allez je viens de voir que Queenie hésite d'aller le voir, je remets une couche désolée pour ceux qui n'ont pas autant aimé, mais je me retrouve avec Avadoro, j'ai vraiment adoré ce film et c'est en effet peut-être une situation de pouvoir s'y "voir"/"sentir" dans une situation/un personnage du film.. mais en tout cas c'est un film tout beau et tout bon (et rien que pour Rachel Weisz, faut y aller!)
traversay Flâneur mélancolique
Messages : 10160 Inscription le : 03/06/2009 Age : 66 Localisation : Sous l'aile d'un ange
Sujet: Re: Terence Davies Lun 25 Juin 2012 - 10:12
kenavo a écrit:
allez je viens de voir que Queenie hésite d'aller le voir, je remets une couche désolée pour ceux qui n'ont pas autant aimé, mais je me retrouve avec Avadoro, j'ai vraiment adoré ce film et c'est en effet peut-être une situation de pouvoir s'y "voir"/"sentir" dans une situation/un personnage du film.. mais en tout cas c'est un film tout beau et tout bon (et rien que pour Rachel Weisz, faut y aller!)
Pour Rachel, oui. kena, tu connais Brève rencontre de David Lean ? Ce film là, tout simple me touche au plus profond de mon être. Parce qu'il parle de la vie que l'on a, tranquille et heureuse, et des élans du coeur, dangereux et sublimes, qui peuvent bouleverser et tout remettre en question. Il reste les souvenirs imaginaires d'une autre vie, jamais vécue. Si ça t'intéresse, il y a des films de Robert Hamer, de la même époque, l'après-guerre en Angleterre, qui sont très beaux et émouvants aussi. Il faut que je retrouve les titres. Je ne sais plus si j'avais initié un fil Robert Hamer. Et, bien sûr, il y a certains films de Michael Powell, dans les années trente, sublimes aussi comme Je sais où je vais (il est pour toi, celui-ci, kena).
kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
Sujet: Re: Terence Davies Lun 25 Juin 2012 - 10:18
tu avais donné les noms de David Lean (dont je connais en effet Brève rencontre, classique des classique pour ce sujet au cinéma, je pense ) et Robert Hamer dans ton commentaire pour le film et j'avais regardé un peu ce qui en était pour ces réalisateurs et quels films pourraient me plaire pour se faire une idée
Il y a probablement l'effet du 'vécu' d'un aspect de The deep blue sea qui me le fait plus attirant