Peter Stamm [Suisse]

pour ne pas perdre la trace du sublime compte-rendu d'eXPie après une rencontre avec l'auteur, c'est par ici

Sept ans

Bon, désolée Aériale, je ne suis pas tombée complètement « sous le charme »
J ‘ai cependant vu un roman excellemment construit avec un ton réel : un détachement qui parait être parfaitement adapté à ce « héros », Alexander que Epi a généreusement qualifié de « médiocre » ; un beau salaud, oui, ce type terne qui ne mérite pas la femme brillante qu’il a séduite on ne sait pas trop comment , et qui de l’autre main utilise à volonté Iwona, l’amoureuse transie, comme un kleenex, qui ne sert que quand il en a besoin et qu’il écrase au fond d’une poche jusqu’au prochain usage. Point de passion, point de vagues pour cet homme veule qui croit sa simple présence non attentive suffisante au bonheur des femmes qui l’entourent. Je crois que j’ai trop détesté Alexander pour aimer vraiment le livre (et pas la détestation d’un être sardonique ou cruel, qui peut être passionnante, non, un simple minable qui ne sait ni choisir ni saisir le bonheur ). C’est une certain plaisir de voir qu’il s’en tire plutôt mal, il n’ a que ce qu’il mérite finalement, on en a un peu marre qu’il s’apitoie sur son sort alors qu’il n’a qu’à se bouger un peu.

Ceci étant dit une intelligent description d’un couple (ou trio) mal parti au départ, dont on sait bien qu’il ne peut que s’enliser et on découvre avec intérêt comment. Un peu trop cérébral peut-être , il m’a manqué un peu d’affect.

Ouille ouille c'est bien ce que je craignais de ta part Topocl! tu n'y vas pas par le dos de la cuillère, mais c'est bien je vais pouvoir le défendre! (tu sais que j'ai un faible pour les personnages à la Dubois, toujours entre deux, pour moi c'est surtout le signe qu'ils sont avant tout humains) Si tu as le courage tu pourrais relire le fil de la LC, fil qui nous avait fait parler plus que de raison. Disons qu'en gros c'est justement ce qui se cache derrière ce détachement, cette veulerie comme tu dis, qui est passionnante. Alexander n'est pas juste le salaud qu'il semble paraître, ni Iwona la victime transie qu'il manipule à souhait. Les rôles pourraient bien être même inverses! Quant à Sonia, un peu trop figée dans les apparences et qui fissure son image vers la fin, elle n'est pas non plus totalement irresponsable dans leur plantage. Il semble qu'ils aient construit leur couple sur des bases trop fragiles, sur une vision faussée de l'amour.

Ton jugement sur Alexander est donc bien définitif, il y a tout un tas de petits détails laissés en suspens par Stamm pour nous mettre sur la voie, à nous de les interpréter...ou pas. C'est ça que j'aime chez lui, il nous laisse le choix! Si cela t'intéresse, relis les pages vers la fin (il y en a un paquet) on y a fait un résumé qui peut-être peut te faire voir l'histoire sous un autre angle, moins catégorique.
Et reviens nous dire ce que tu en penses...ICI

Je l'ai parcourue, la LC, avant de faire mon post (un peu vite parce que vous avez été bavards, c'est fou). et j'ai vu que la plupart d’entre vous avez eu plus d'indulgence que moi pour Alexander. Mais définitivement je n'aime pas ce type. Je ne veux pas dire que je n'aime pas le livre. Ça ne veut pas dire non pus que je trouve que les deux femmes sont parfaites (qui prétend l'être?). Je déteste ce genre de types qui se disent faibles et qu'il faut les comprendre et qui continuent à n'en faire qu'à leur tête sans penser aux répercussions et qui après viennent se faire plaindre. Je déteste ça dans la vie et je n'ai aucune indulgence pour eux. Donc, dans un livre , c'est pareil et je ne reviendrai pas dessus.
Je sais que je suis butée et que quand l'indulgence me quitte, c'est sans nuance. Je suis comme ça.
Cet inconfort personnel mis à part, le livre est bon et je ne dis pas qu'un autre Peter Stamm ne me satisfera pas plus. La froideur du récit ne me dérange pas forcément, elle laisse bonne place aux émotions propres du lecteur.

(Ce post était écrit sous l'égide de la journée mondiale de la gentillesse, évidemment )

topocl a écrit:

Je sais que je suis butée et que quand l'indulgence me quitte, c'est sans nuance. Je suis comme ça.
Cet inconfort personnel mis à part, le livre est bon et je ne dis pas qu'un autre Peter Stamm ne me satisfera pas plus. La froideur du récit ne me dérange pas forcément, elle laisse bonne place aux émotions propres du lecteur.

Mais ce n'est pas un reproche, il faut des butés pour cadrer les faibles aussi dans la vie

Pour les autres je ne saurais lequel te conseiller, ses personnages sont toujours dans ce flou cotonneux, pas vraiment convaincus de leurs actions, souvent indéterminés. Tu risques de ne pas y trouver ton compte. Ceci à part c'est vrai que la froideur (apparente en tout cas) de son écriture n'enferme pas son lecteur dans des sentiments sur mesure et c'est ce qui fait son charme!

Aeriale a écrit:

Mais ce n'est pas un reproche, il faut des butés pour cadrer les faibles aussi dans la vie

C'est moi qui m'en veux de m'emporter comme ça contre un simple personnage de fiction!

Hi hi, mais non, c'est ce que j'aime bien ici, quand les Parf jettent leur impression initiale sur le papier (l'écran du moins)

Et on a tous une personnalité reconnaissable, reste ainsi surtout

Je viens de relire la LC, on avait bien rigolé !! Mais relire nos échanges m'a remis en mémoire ce livre et je suis tout à fait d'accord avec ce que tu en dis Topocl.

Sept ans

Je fais aussi partie des sceptiques même si la lecture fut relativement agréable. L'analyse psychologique des personnages est très soignée mais une distance ressentie m'empêche de partager des états d'âme. La présence de l'architecture en toile de fond est pertinente, tout en provoquant une forme d'indifférence vis à vis des enjeux relationnels alors que ceux-ci, avec leurs hésitations et incertitudes, représentent le coeur du roman.
L'apparente passivité du trio principal introduit pourtant des réflexions autour de choix de vie, subis ou non, sans parvenir à emporter mon adhésion : les allers-retours temporels sont trop insistants et alourdissent les arguments évoqués. Un vague malaise semble justifier chaque décision, chaque rupture, mais ce trouble n'est pour moi pas assez exploité ou incarné.

Quatre ans après son dernier roman Peter Stamm vient de sortir un nouveau livre en allemand Nacht ist der Tag :


Pour ceux qui lisent l'allemand, il y a la possibilité de lire le début du roman ici.

Maline a écrit:

Quatre ans après son dernier roman Peter Stamm vient de sortir un nouveau livre en allemand Nacht ist der Tag :


Pour ceux qui lisent l'allemand, il y a la possibilité de lire le début du roman ici.

 se trouve sur ma tablette...
en espérant qu'on va avoir vite une traduction française pour en parler...

Oui, vite

topocl a écrit:

Sept ans

Bon, désolée Aériale, je ne suis pas tombée complètement « sous le charme »
J ‘ai cependant vu un roman excellemment construit avec un ton réel : un détachement qui parait être parfaitement adapté à ce « héros », Alexander que Epi a généreusement qualifié de « médiocre » ; un beau salaud, oui, ce type terne  qui ne mérite pas la femme brillante qu’il a séduite on ne sait pas trop comment ,  et qui de l’autre main utilise à volonté Iwona, l’amoureuse transie, comme un kleenex, qui ne sert que quand il en a besoin et qu’il écrase au fond d’une poche jusqu’au prochain usage. Point de passion, point de vagues pour cet homme veule qui croit sa simple présence non attentive suffisante au bonheur des femmes qui l’entourent. Je crois que j’ai trop détesté Alexander pour aimer vraiment le livre (et pas la détestation d’un être sardonique ou cruel, qui peut être passionnante, non, un simple minable qui ne sait ni choisir ni saisir le bonheur ). C’est une certain plaisir de voir qu’il s’en tire plutôt mal, il n’ a que ce qu’il mérite finalement, on en a un peu marre qu’il s’apitoie sur son sort alors qu’il n’a qu’à se bouger un peu.

Ceci étant dit une intelligent description d’un couple (ou trio) mal parti au départ, dont on sait bien qu’il ne peut que s’enliser et on découvre avec intérêt comment. Un peu trop cérébral peut-être , il m’a manqué un peu d’affect.

Aeriale a écrit:

Disons qu'en gros c'est justement ce qui se cache derrière ce détachement, cette veulerie comme tu dis, qui est passionnante. Alexander n'est pas juste le salaud qu'il semble paraître, ni Iwona la victime transie qu'il manipule à souhait. Les rôles pourraient bien être même inverses! Quant à Sonia, un peu trop figée dans les apparences et qui fissure son image vers la fin, elle n'est pas non plus totalement irresponsable dans leur plantage. Il semble qu'ils aient construit leur couple sur des bases trop fragiles, sur une vision faussée de l'amour.

Sept ans



Je viens de survoler ce fil ainsi que celui de la LC dont ce livre a fait l'objet : j'y ai vu des débats passionnés !
Contrairement à la majorité d'entre vous Peter Stamm ne m'a pas séduite par ce roman :
Si Topocl émet un avis mitigé , soulignant la personnalité peu reluisante d 'Alexander , je n'ai pas ressenti ce rejet : bien au contraire .....Si je suis arrivée au bout de ma lecture , c'est certainement grâce à ce personnage pathétique englué dans cette médiocrité qu'il met dans les actes de sa vie ! Incapable de se réaliser , détaché et dans une perpétuelle attente de quelque "démarrage" dans la vie , on a l'impression qu'il vit dans un engourdissement affectif chronique et une immaturité constante . Un éternel adolescent introverti , incapable de s'affirmer er de faire des choix avec implication , se réfugiant dans l'inconsistance et le flou émotionnel ....
Très intéressante aussi Iwona : et contrairement à l'image qu'elle donne je ne pense pas qu'elle subisse sa vie ......une forme de perversité beaucoup plus subtile que celle d'Alexander se dégage de ce personnage ...Une certaine jouissance dans ce rôle de victime , n'induit-elle pas aussi le comportement d'Alexander à son égard ? Il est des situations où "victimes et bourreaux " se choisissent ....
Quant à Sonia , complètement inhibée et se réalisant dans sa vie professionnelle pour ne pas affronter "la vraie vie" , c'est le personnage qui m'a paru le moins convaincant : Peter Stamm ne s'y attarde pas assez et finalement des bribes par çi par là ne suffisent pas pour se l'approprier !
En résumé , je n'ai pas adhéré à ce livre pour des raisons différentes de celles de Topocl .
Je rejoins complètement Aériale sur l'analyse qu'elle fait de ces personnages en demi-teinte , avec cette immense complexité psychologique qui varie selon les situations , le prisme social et tout ce qui constitue l'environnement spatio-temporel .....Aucune vérité ne peut définir l'être humain , Peter Stamm le souligne fort bien .

Alors pourquoi autant de réserves ?
La forme du roman : une écriture que j'aurais trouvée plus appropriée à la nouvelle ....Dans la longueur ce détachement devient pesant ...En outre cette narration basée sur ces aller-retours  accentue cet effet de lourdeur.
Là où Alice Munro excelle dans son talent de nouvelliste ,maîtrisée à l'extrême dans une épure et une élégance magistrale , Peter STAMM  s'enfonce par le choix qu'il a fait de la forme romanesque , son style n'étant pas adapté .

églantine a écrit:

La forme du roman : une écriture que j'aurais trouvé plus appropriée à la nouvelle ....Dans la longueur ce détachement devient pesant ...

Tu as raison, Peter Stamm est bien meilleur en nouvelliste qu'en romancier, tu devrais tester un des ses recueils pour voir la différence. Par ex: Comme un cuivre qui résonne, ou Au-delà du lac, tous deux très bien .