Robert Musil [Autriche]

Citation :

A peu près tout le monde,- à commencer par Musil lui-meme - a reconnu plus tard qu' il avait décrit en Reiteman et Beineberg "des dictateurs in nucleo" et dans Torless, le philosophe appelé à soutenir le régime nazi sans état d' ame.

mouais, pour un constat de possibilité mais pour une prédiction d'événements, que couic. tout dépend de comment on lit une phrase comme celle-ci.

c'est surtout que l'homme n'a pas attendu la barbarie nazie pour experimenter sa perversite et sa capacite a dominer les individus juges plus "faibles" ou moralement inferieurs (qu'ils soient noirs, juifs, homosexuels, d'une autre classe sociale...) sous couvert d'une justification pseudo-ideologique (religieuse, scientifique, philosophique...). C'est cette potentialite de clivage en chacun de nous entre humanite et barbarie qui interesse Musil. L'homosexualite dans Torless n'est qu'un pretexte a assouvir des pulsions plus ou moins refoulees sous couvert d'un trop plein de "pensee" aux inflences mal comprises ou digerees (comme dans "Les exclus" de Jelinek). Il denonce finalement pratiquement toutes Les formes d'ideologies et la difficulte a adopter une position "morale" saisfaisante. Je me demande meme dans quelle mesure le flux de pensee de Torless n'a pas une fonction hypnotique (theme aborde dans le roman) pour en montrer la sterilite sous l'apparence d'une fausse profondeur. Il en montre en tout cas magnifiquement le desarroi et le manque de reperes face a l'inconsistance du reel.

animal a écrit:

Citation :

A peu près tout le monde,- à commencer par Musil lui-meme - a reconnu plus tard qu' il avait décrit en Reiteman et Beineberg "des dictateurs in nucleo" et dans Torless, le philosophe appelé à soutenir le régime nazi sans état d' ame.

mouais, pour un constat de possibilité mais pour une prédiction d'événements, que couic. tout dépend de comment on lit une phrase comme celle-ci.

Ecoute, tu as vu l' adaptation de Schlondorff, c' est clairement l' interprétation que je viens de donner qu' il a donné dans son film ...
Mais on peut douter de tout et de tout le monde. En tant que lecteur, en tout cas...

Je trouve aussi que réduire Musil à une anticipation et condamnation du nazisme est plus que réducteur, je crois qu'il traque dans l'homme ce qui y a toujours existé et ce qui y existera toujours et qui a permis l'émergence du nazisme en effet mais aussi plein d'autres choses. Et le nazisme liquidé ces tendances existent encore et peuvent produire des tas d'autres choses. Evidemment compte tenu de la proximité de l'oeuvre de Musil et du nazisme c'est la première association qui vient à l'esprit. Mais s'en tenir qu'à ça revient à terriblement appauvrir la pensée de Musil, qui pour moi est bien plus universelle.

Arabella a écrit:

Je trouve aussi que réduire Musil à une anticipation et condamnation du nazisme est plus que réducteur, je crois qu'il traque dans l'homme ce qui y a toujours existé et ce qui y existera toujours et qui a permis l'émergence du nazisme en effet mais aussi plein d'autres choses. Et le nazisme liquidé ces tendances existent encore et peuvent produire des tas d'autres choses. Evidemment compte tenu de la proximité de l'oeuvre de Musil et du nazisme c'est la première association qui vient à l'esprit. Mais s'en tenir qu'à ça revient à terriblement appauvrir la pensée de Musil, qui pour moi est bien plus universelle.

Tiens, c' est moi le réducteur de tete ?
Allons bon ! Tant pis !

En fait , je voulais simplement insister sur un aspect, un arrière fond historique, plus qu' important,
et sur lequel, Marko n' avait rien dit.
Pour le reste je connais assez bien Musil, merci !

J'avais précise que j'apportais quelques impressions complémentaires au commentaire d'Animal qui abordait déjà la question et que j'approuvais.

Les désarrois de l'élève Törless

Un roman fascinant et troublant, dans sa plongée vers les méandres d'une sensibilité en perpétuelle reconstruction. Musil évoque avec puissance la violence du regard d'un adolescent, qui se confronte au monde par une succession de rapports de force. Jusqu'à atteindre un point de non retour, une démesure dans l'expression de visions destructrices et écorchées.
Les désarrois de l'élève Törless cernent une perte de repères, un effondrement qui ne peut être comblé par des certitudes et la maturité d'une réflexion.
J'ai été très sensible à l'évidence des premières pages, qui dessinent une ligne de fracture entre Törless et ses proches (les parents, les camarades...). Et la conclusion, très ouverte, offre au lecteur beaucoup d'ambiguités et de pistes d'analyse. Certains développements m'ont par contre moins convaincu, et les noeuds de l'intrigue entre Törless, Basini, Beineberg, et Reiting apparaissent parfois forcés. L'écriture de Musil parvient à bousculer lorsqu'elle explore les remous d'une pensée, les manifestations douloureuses d'une construction de soi qui, sans barrières, peut provoquer un anéantissement.

Avadoro a écrit:

Les désarrois de l'élève Törless

Un roman fascinant et troublant, dans sa plongée vers les méandres d'une sensibilité en perpétuelle reconstruction. Musil évoque avec puissance la violence du regard d'un adolescent, qui se confronte au monde par une succession de rapports de force. Jusqu'à atteindre un point de non retour, une démesure dans l'expression de visions destructrices et écorchées.
Les désarrois de l'élève Törless cernent une perte de repères, un effondrement qui ne peut être comblé par des certitudes et la maturité d'une réflexion.
J'ai été très sensible à l'évidence des premières pages, qui dessinent une ligne de fracture entre Törless et ses proches (les parents, les camarades...). Et la conclusion, très ouverte, offre au lecteur beaucoup d'ambiguités et de pistes d'analyse. Certains développements m'ont par contre moins convaincu, et les noeuds de l'intrigue entre Törless, Basini, Beineberg, et Reiting apparaissent parfois forcés. L'écriture de Musil parvient à bousculer lorsqu'elle explore les remous d'une pensée, les manifestations douloureuses d'une construction de soi qui, sans barrières, peut provoquer un anéantissement.

Et à voir, bien sûr, le film de Schlöndorff :

OEUVRES PRE-POSTHUMES. - Le Seuil

Le titre de ce recueil de textes est de Musil lui-meme. Un titre d' une ironie musilienne ! Musil s' en explique lui-meme : connaissant la médiocrité de la plupart des oeuvres posthumes et de ceux qui les publient, il a jugé que le meilleur moyen était de s' en charger lui-meme avant qu' il ne soit trop tard.

De fait, ces textes sont de qualité et parfois meme magnifiques de par le style. Ceux qui connaitront L' Homme sans qualités ne seront pas déçus. Pour les autres, ce sera une bonne introduction. Le Merle est vraiment un texte à part, très beau et très émouvant. Extrait à suivre...

Merci bix pour ce fragment du MERLE que j´attendais avec impatience, depuis que tu l´avais annoncé.
Je dois découvrir MUSIL ( je le dis tous les ans!) mais vous me faites peur avec les 2.000 pages de " L´homme sans qualités".
De plus, je crois que commencerai par Le MERLE, car bien entendu, bix ce qui m´attire terriblement de MUSIL, ce sont ses multiples images animales, ses comparaisons qui semblent empêcher toute idéalisation de l´humain et la critique de cette société qui essaie par tous les moyens d´anéantir cet animal tapi en nous. Peut-être aussi sa manière de contourner pshychologies et psychanalyses? je dois voir tout cela de près, et dans le texte. Pour l´instant je n´ai que des impressions.
Combien de pages "Les oeuvres pré-posthumes"? 189 d´après Amazon. C´est bien ça?

Un livre qui peut permttre de découvrir l'oeuvre de Musil sous un autre aspect :

Musil, philosophe de jean Pierre Cometti.

L'Homme sans qualités

Je viens de me rendre compte que je n'avais pas posté de commentaire alors que j'ai terminé depuis quelques semaines le premier volume (lecture de la suite prévue prochainement). Il est vrai que la lecture de l'oeuvre reste difficile : l'écriture limpide, dense reste largement accessible mais demande surtout une concentration très intense. J'ai eu souvent besoin de quelques pages pour me replonger dans une atmosphère et la moindre pause provoquait une frustration.
Cela ne m'a cependant pas empêché d'apprécier l'importance d'un roman à la fois passionnant et bouleversant. Passionnant dans sa perception d'un équilibre européen en fin de vie (au bord de la Première guerre mondiale), dont l'Action Parallèle, célébration de l'anniversaire et de la grandeur de l'empereur autrichien devient un chant du cygne à la dimension presque mélancolique. Bouleversant dans son approche des relations entre les êtres, tant les chapitres se constituent autour de duos et duels psychologiques d'une sensibilité flamboyante.
Au milieu de ce tumulte, la figure d'Ulrich est l'homme sans qualités car en position d'observateur, avec une lucidité qui creuse peu à peu une souffrance. Le flot des réflexions cherche à combler un vide et la force des antagonismes libère une angoisse dont l'ampleur ne cesse de croître.

Résolution de 2014: le lire

darkanny a écrit:

Résolution de 2014: le lire

Moi aussi...Mais j'ai honte parce que c'était déjà une de mes résolutions de 2013 (pas tenue!)