Robert Musil [Autriche]

darkanny a écrit:

Déjà faut arriver à le tenir dans les menottes, tout un art.
Le format poche avec 1000 pages, c'est vachement pratique.....
Mais il doit exister dans d'autres éditions.

Eglantine a écrit:

C'est celui que j'ai ....mais vu mon grand âge , intense reflexion il va falloir que je m'achète une édition en plus gros caractères si je veux être en conditions optimales !

Oui, je crois que c'est pour cela que je remets toujours à plus tard...J'aurais dû acheter une autre édition...Enfin...c'est une bonne excuse!

Musil... Il va bien falloir finir par s'y mettre... J'ai bien fini par me jeter sur Le livre de l'intranquillité de Pessoa. Mais j'avoue que l'obstacle psychologique y est avec les briques «sans-façons» de Musil. Comment nous motiver...? Une lecture commune sur un autre roman pour nous encourager à poursuivre...?

Je viens de terminer le second tome de l'Homme sans qualités. Cette partie de l'oeuvre provoque un renversement de perspectives avec l'introduction d'Agathe, "soeur jumelle" d'Ulrich, précipitant un basculement essentiel du récit vers l'intime et l'introspection. L'environnement extérieur devient un voile lointain au fur et à mesure que le frère et la soeur tentent une recomposition du monde.
Musil cherche alors à représenter une relation fusionnelle où l'autre est un miroir de soi enrichi, à saisir l'incertitude des émotions pour mieux les transcender par une analyse obstinée. L'inceste comme transgression reste une ombre, une fuite tant l'écriture vise bien davantage qu'une union des corps pour esquisser un idéal mystique.
Les derniers chapitres sont des morceaux, des bribes, redessinent des obsessions.

Trois femmes/Noces

Je partage le commentaire enthousiaste d'animal. Passer du fleuve romanesque que représente L'homme sans qualités au format de la nouvelle provoque à la fois une impression de rupture et de continuité.
Ces deux recueils espacés de plus de dix ans dans leurs publications sont complémentaires tout en offrant des contrastes. Trois femmes laisse une impression de tension, de distance, d'émotion contenue dans le sens où les gestes et actes des protagonistes semblent en partie rester inaccessibles, inéluctables. Le décor médiéval presque intemporel de La Portugaise dessine une ombre aveuglante alors que la fidélité absolue qui lie Homo à Grigia jusqu'à l'effacement bouscule. Tonka, dans sa fluidité tourmentée, fascine puis inquiète en même temps.
Les développements de Noces plongent à l'intérieur des pensées féminines, tentent de briser une barrière entre introspection et projection vers l'autre (thème qui rejoint directement les préoccupations du second volume de L'homme sans qualités). L'enjeu pour Musil est de parvenir à rationaliser des émotions, réconcilier la subjectivité d'un ressenti à l'objectivité d'une présence face au monde. L'accomplissement de l'amour est ainsi révélateur d'un absolu, décryptant des sensations, des instants, creusant la cohérence d'une vie comme fragments d'états d'âme et l'expression d'un vertige éblouissant.

Je termine donc mon cycle Musil avec une immense estime pour l'auteur. L'année littéraire démarre en beauté.

Il est marrant ce fil, avec Arabella qui annonce chaque année une relecture...

Alors, qui s'attaque à L'homme sans qualités par ici?

J'attaque le deuxième volume bientôt, normalement

Ah! Bien, bien! J'ai envie de découvrir Musil, mais je ne sais pas encore si je m'attaque directement à l'Everest, ou si je me fais une petite montagnette pour m'échauffer avant! (Oeuvres pré-posthumes m'intrigue!)

ArturoBandini a écrit:

Ah! Bien, bien! J'ai envie de découvrir Musil, mais je ne sais pas encore si je m'attaque directement à l'Everest, ou si je me fais une petite montagnette pour m'échauffer avant! (Oeuvres pré-posthumes m'intrigue!)

Je te conseille plutôt de commencer par une petite montagnette telle que Les Désarrois de l'élève Törless. Un bon moyen de se mettre dans le bain tout en douceur.

Et si tu essaies sa petite conférence sortie au début de cette année ?

Ah je n'ai rien de tout ça en rayons! Outre les deux cités, j'ai aussi Trois femmes suivi de noces, et proses éparses.

On m'a dit beaucoup de bien de Trois femmes suivi de Noces.

Sinon, je reviens sur ce que j'ai pu dire, L'homme sans qualités est abordable sans avoir rien lu de Musil auparavant, je pense. C'est un peu comme Proust, une forte dimension théorique, mais moi en tout cas ça m'a tellement parlé que j'ai continuer avec plaisir.

ArturoBandini a écrit:

Ah! Bien, bien! J'ai envie de découvrir Musil, mais je ne sais pas encore si je m'attaque directement à l'Everest, ou si je me fais une petite montagnette pour m'échauffer avant! (Oeuvres pré-posthumes m'intrigue!)

Les œuvres pré-posthumes sont  mieux qu' un appéritif, mais ça peut etre une bonne introduction. Ce qu' il écrit là est aussi la matière
de L' homme sans qualité.
Quand aux Désarrois de l' élève Torless, il montre que la nature du nazisme pouvait exister en filigrane dans certains collèges autrichiens
et allemands.

Merci pour vos avis, je verrai alors le moment venu, à quelle sauce Musil me mangera!

Un tout petit mot sur les Oeuvres pré-posthumes:

Premier aperçu de Musil, et je dois dire que c'est du costaud. Littéraire, exigeant, touchant parfois le sublime, ces textes assez courts sont à déguster lentement.
J'ai particulièrement aimé la série des considérations désobligeantes, où il décrit avec force et humour les milieux artistiques.
Je crois que je vais attendre encore pour L'homme sans qualités, j'ai un peu peur de me perdre!