Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Joyce Carol Oates

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chrisdusud
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyMer 24 Juin 2009 - 16:03

Il y a des livres que l'on a bien aimé mais que l'on oublie rapidement et puis il y a ceux qui rayonne bien et qui laissent une trace dans notre mémoire. La fille tatouée fait partie de cette dernière catégorie.
Cela fonctionne un peu comme un conte de fées moderne : la fille pauvre et le prince riche: le prince n'est pas beau mais est riche et cultivé. La fille, Alma, pauvre, pas forcément jolie, à cause notamment de son tatouage sur le visage mais sensuelle. Elle a des préjugés racistes car il faut bien exhaler l'injustice de sa vie. Elle va donc haïr Joshua car il est juif (c’est en tout cas ce qu’elle croit).
Mais il n’y a pas la notion de bonheur comme dans un conte de fée. Nous sommes dans l’asservissement : Alma travaille pour Joshua et soumise à Dmitri, l’homme qu’elle aime, celui qui la vend et la prête à ses amis.
On attend l’amour et il arrive pour adoucir les fêlures de la vie.

Mon commentaire ne se veut pas péjoratif. J’ai beaucoup aimé ce livre mais je suis étonnée par la quatrième de couverture chez Stock qui le décrit comme le livre le plus controversé de l’auteure…
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Camille19
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyMar 7 Juil 2009 - 14:37

Vos avis unanimement enthousiastes et dispersés un peu partout sur le forum m'ont donné envie de me lancer dans la lecture de Blonde... Mais j'ai déjà lu Les Chutes et je n'avais pas vraiment aimé, ce n'était pas désagréable à lire, mais une fois le livre refermé, j'ai l'impression de n'en avoir vraiment rien retiré, d'avoir lu du "vent"... Peut-être que j'étais trop jeune ? confused

Bref, que pensez vous des Chutes par rapport au reste de l'oeuvre ? Les autres romans de J.C. Oates ont-ils une chance de me plaire ? Lequel me conseilleriez vous ? scratch
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bix229
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyMar 7 Juil 2009 - 14:57

Contrairement à la plupart ici, je ne suis pas un inconditionnel de JC Oates.
Elle écrit beaucoup et à mon avis un peu trop.
J' ai lu d' elle des livres excellents et d' autres qui l' étaient moins.
Au point que je fais une pause avant de la lire de nouveau...


Dernière édition par bix229 le Mar 7 Juil 2009 - 15:35, édité 1 fois
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Epi
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyMar 7 Juil 2009 - 15:32

Je n'en ai pas lu assez pour en parler par rapport aux autres mais j'ai beaucoup aimé Chutes. Et j'ai adoré Reflets en eau trouble, il est tout petit, au moins si tu n'aimes pas, tu ne perdras pas beaucoup de temps.
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Marko
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyMar 7 Juil 2009 - 15:49

bix229 a écrit:
Contrairement à la plupart ici, je ne suis pas un inconditionnel de JC Oates.
Elle écrit beaucoup et à mon avis un peu trop.
J' ai lu d' elle des livres excellents et d' autres qui l' étaient moins.
Au point que je fais une pause avant de la lire de nouveau...

C'est vrai mais comme beaucoup de grands auteurs très prolifiques. On la compare souvent à un Balzac contemporain et je trouve que c'est assez juste. Elle réalise aussi une comédie humaine impressionnante. Il y a des moments forts, quelques creux mais rien n'est indifférent. Sa vraie faiblesse à mon sens ce sont ses intrigues qui sont parfois approximatives ou prévisibles mais elles ne sont que des prétextes.
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Aeriale
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyVen 17 Juil 2009 - 15:10

Viol, Une histoire d'amour-

Joyce Carol Oates - Page 11 41rftb10


Quel titre, qui interpelle d'emblée!
Une histoire d'amour accolé à un viol. L'histoire d'amour de qui? on suppose de la petite Berthie, témoin du viol de sa mère, envers le policier justicier (et peut-être de celui-ci envers Tina) Mais on n'en saura guère plus. Joyce Carol Oates aime bien les ellipses, nous laisser notre vision des faits, le trouble qu'ils peuvent susciter.

Sur ce thème fort du viol collectif, jamais elle ne tombe dans le scabreux. Chacun tour à tour donne sa version et le lecteur est pris à rebours. On assiste bien à la déchéance de cette fille qui peu à peu se renie elle-même, mais les phrases sont brèves et presque sèches. Aucun pathos.

C'est un récit super efficace, terrible et dérangeant qui met à jour les failles d'un système où les droits de la victime sont bafoués au profit d' accusés couverts eux par l'hypocrisie de toute une société bien pensante. "Elle l'a bien cherché, elle était provocante" etc... Ces phrases que chacun a entendu reviennent régulièrement dans le texte, et appuient la démonstration de l'auteure.

Les dés sont pipés d'avance, il y a là un constat effrayant, et une morale qui ne l'est pas moins mais qui soulage. Le héros vengeur guidé par sa soif de justice (mais pas que?) achèvera sa tâche et Bethie gardera son secret enfoui en elle (et épousera un homme plus agé aussi...)
Ca reste en suspens, tout n'est pas dit et le reste est à interpréter.

Une phrase que je note parce qu'elle dépeint assez bien son style
Citation :
Et un matin halluciné, il avait vu son âme se recroqueviller et mourir comme une chenille arpenteuse dans le sable brûlant du désert

Quel talent, très fort bravo
Merci aux Parfumés pour la découverte de cette auteure!
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyVen 17 Juil 2009 - 15:51

aériale a écrit:
Viol, Une histoire d'amour-
Ton commentaire donne envie de le lire là tout de suite Laughing Je le note pour le prochain alors, enfin, après Les Mulvaneys et Blonde qui sont déjà en attente.
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyVen 17 Juil 2009 - 18:31

aériale a écrit:
Viol, Une histoire d'amour-

C'est un récit super efficace, terrible et dérangeant qui met à jour les failles d'un système où les droits de la victime sont bafoués au profit d' accusés couverts eux par l'hypocrisie de toute une société bien pensante. "Elle l'a bien cherché, elle était provocante" etc... Ces phrases que chacun a entendu reviennent régulièrement dans le texte, et appuient la démonstration de l'auteure.


Ton commentaire est convainquant...
Il y a tellement de titres de Joyce Carol Oates qu'il n'est pas évident de trouver les meilleurs...
La fille du fossoyeur m'attend...
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyVen 17 Juil 2009 - 22:13

Oui aériale, il a l'air bien aussi celui-là !! il n'est pas dans ma PAl mais j'ai moi aussi la fille du fossoyeur qui m'attend par contre. Je pense que je vais l'emmener en vacances.
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyDim 19 Juil 2009 - 22:13

Nous étions les Mulvaney




Les années 70 en Amérique, une famille heureuse, unie où l'amour est débordant, où les enfants grandissent heureux au milieu des champs et des animaux. Les Mulvaney, Mickael et Corinne, sont parvenus à la force du poignet à faire partie des familles en vue de Mont-Ephraim, état de New-York. Les enfants sont au lycée où leur popularité est à l'aune de leurs talents sportifs, pour Mike dit "Le Mulet", de leur réussite et de leur beauté pour Marianne. Patrick, lui est respecté et craint pour ses excellentissimes résultats scolaires, son humour mordant, son regard incisif, son intelligence aiguë; il cultive savamment sa différence et sa solitude.
Ce tableau idyllique (la ferme aux volets lavande perdue dans les champs, les prairies et les bois, la place au Club-House, les appels quotidiens des nombreux amis de Marianne) va lentement se disloquer lors d'une soirée de St-Valentin 1976 au cours de laquelle la vie de toute la famille sera brutalement bouleversée à jamais: Marianne a la mauvaise idée de suivre un jeune homme de bonne famille et ce qui lui arrive fera basculer son histoire intime.
C'est la chute d'une famille modèle américaine que relate le benjamin des Mulvaney, Judd, avec ses souvenirs grapillés et construits au fil du temps. Il retrace l'histoire des siens (mais aussi celle d'une société à un moment donné), qui furent humiliés, traînés dans la boue, ruinés, avec humilité et sans haine: il sait que les relations humaines sont tout sauf simples. Sous sa plume, le lecteur suit le calvaire intime de Marianne qui se sent coupable et salie, qui subit l'opprobe et la honte sans pouvoir se défendre ni détester le monde et les autres. Une vie en "patchwork" conduit Marianne jusqu'à une coopérative où elle réapprendra à vivre, en compagnie de son chat Muffin, tandis que son père sombrera lentement dans la déchéance, solitaire jusqu'au pardon final.
Joyce Carol Oates peint un portrait peu reluisant d'une société américaine, puritaine, bien pensante, en racontant l'heur et la décadence d'une famille ancrée dans une petite ville, entourée d'amis et de joyeuses relations...jusqu'au jour où l'acte impardonnable d'un fils de famille salit la réputation d'une jeune fille naïve, au coeur trop tendre, à la bonté trop grande qui ne lui permet pas de dire non. Comme il est facile pour les notables bien pensants de penser que la pauvre Marianne n'a récolté que ce qu'elle a semé, comme il est aisé de disculper un fils parce qu'il est issu d'une vieille famille, réputée et aux importantes relations, comme il est simple de rester aveugle devant un acte de violence intense....la vertu des filles tient tellement à peu de chose, surtout quand ladite fille est issue d'une famille depuis peu acceptée au sein du cercle d'élus! Oates, au gré de ses minuscules touches, pointe les manquements des uns et des autres, souligne l'hypocrisie insoutenable d'une société qui rejette ce qu'elle ne peut accepter: un reflet peu reluisant de son incapacité à appliquer à elle-même ses préceptes humanistes et bien-pensants! La middle-class et ses petitesses s'exposent au fil du roman, au fil de la descente aux enfers de Mickael, le père de famille qui voit s'effondrer ses espoirs et ses rêves, au fil de la reconstruction de Marianne, des errances enrichissantes de Patrick et du point de vue empreint d'humanité et d'humanisme de Judd.
Joyce Carol Oates gratifie le lecteur de magnifiques descriptions de paysages, d'intérieurs campagnards en suivant les pas de l'école américaine du roman naturaliste comme elle parsème, avec justesse, les images, importantes dans son oeuvre romanesque, de la dualité entagoniste du bourreau et de la victime: Marianne victime d'un Zachary (minable et grossier), la famille Mulvaney achevée par l'étroitesse d'esprit d'une classe sociale qui met à son ban ce qui dérange l'ordonnancement parfait qu'elle s'est construit, Mickael senior bourreau mental de sa fille, de sa famille et victime d'une middle-class qui ne pardonne aucun faux-pas, qui n'accepte pas l'originalité, la différence, le saugrenu comme l'excellence et guette la moindre faille pour sonner le glas, l'hallali et reprendre tranquillement le cours insipide du quotidien étriqué.
Oui, j'ai détesté cette société, oui, j'aurai aimé prendre par le "colbac" tous les Zachary du monde et leur géniteurs imbus de leur piètre importance et leur faire rendre gorge pour l'acte infâme perpétré sur une jeune fille. Le pire est de se dire que ce type d'attitude est hélas encore d'actualité dans notre société dite moderne.
Oui, j'ai aimé la douleur de Marianne, sa manière de fuir pour se reconstruire malgré l'abandon moral de ses parents. Oui, j'ai eu envie de claquer ces derniers pour leur manquement et leur égoïsme. Oui, je me suis interrogée sur le choix de Corinne qui décide d'envoyer hors la vue de son père, sa fille Marianne: lâcheté extrême ou extrême courage? Prise entre deux feux, entre deux amours, entre deux passions, Corinne est contrainte à un choix qui ne sauvera pas son couple...mais doit-on lui jeter la pierre pour avoir fait un choix de femme, d'amante et non de mère? Sans doute, a-t-elle voulu sauver ses deux amours, son homme et son enfant, sa fille, une autre elle-même, d'un gâchis encore pire que celui qui sera vécu!
Nous étions les Mulvaney est un roman, un grand roman, écrit avec justesse, sobriété (tout est crédible), efficacité et doté d'une gamme de sensations, d'émotions et de sentiments qui lui donne un souffle romanesque d'une force indéniable. Il faut dire que la scène d'ouverture est d'anthologie: elle happe immédiatement le lecteur pour l'emporter dans un voyage au long cours où il rira, pleurera, se révoltera, aura des envies de meurtres, des élans de tendresse et une envie d'en savoir toujours plus sur ces Mulvaney qu'il quittera un brin nostalgique. Oates, dès les premiers mots ferre son lecteur et ne le lâche plus jusqu'au point final....du grand art!



"Nous étions les Mulvaney, vous vous souvenez? Vous croyiez peut-être notre famille plus nombreuse; j'ai souvent rencontré des gens qui pensaient que nous, les Mulvaney, formions quasiment un clan, mais en réalité nosu n'étions que six: mon père Mickael John Mulvaney; ma mère Corinne; mes frères Mike et patrick; ma soeur Marianne et moi...Judd. (...) Hight Point Farm était une propriété bien connue dans la vallée - inscrite plus tard aux Monuments historiques - et "Mulvaney" était un nom bien connu.
Longtemps vous nous avez enviés, puis vous nous avez plaints.
Longtemps vous nous avez admirés, puis vous avez pensé Tant mieux!...il n'ont que ce qu'ils méritent."
(p 11)
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyDim 19 Juil 2009 - 22:25

J'aime beaucoup ton commentaire Chappy, ce livre était en 3e ou 4e dans ma PAL mais je le remonte en 1er sourire J'ai l'impression que c'est du grand Oates, l'extrait que tu as mis me semble tout à fait représentatif de son style. j'ai hâte de le lire.
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyLun 20 Juil 2009 - 9:39

Merci Epi Very Happy
Sousm' avait conseillé ce roman à Biblio: pour lui "Nous étions les Mulvaney" est le meilleur roman d'Oates.
Pour l'instant je n'en ai lu que deux: Les chutes et Nous étions les Mulvaney....deux excellentissimes moments de lecture!
J'espère que tu auras autant de plaisir que moi à suivre cette fabuleuse famille au destin si injuste.
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyLun 20 Juil 2009 - 10:03

J'avais lu les Mulvaneys aussi et j'avais trouvé que c'était un des très bons romans de Oates, je n'ai pas encore lu 'Les Chutes', mais cela viendra. Mon favori reste tout de même Blonde pour le moment.
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Marie
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyVen 24 Juil 2009 - 3:41

Blonde
traduit de l'anglais ( Etats-Unis) par Clude SEban
Editions Stock

En exergue une phrase de Jean Paul Sartre : Le génie n’est pas un don, mais la façon dont on invente dans des circonstances désespérées.

Je ne sais pas si Marilyn Monroe, pseudonyme de Norma Jeane Baker était une actrice géniale. Elle est en tout cas un magnifique personnage de roman sous la plume d’une Joyce Carol Oates, ce qui n’a rien d’étonnant, finalement. Encore une fois, une histoire d’épaisseur de peau..

C’est dans la prime enfance qu’émerge l’acteur né, car c’est dans la prime enfance que l’on perçoit d’abord le monde comme mystérieux. A l’origine de toute interprétation, il y a l’improvisation face au Mystère T. Navarro The Paradox of Acting.

Tout le monde connaît la triste histoire de Marilyn Monroe, et JCO n’est pas la première à s’y intéresser. Mais je crois que sa faculté de se glisser dans la peau même des personnages qu’elle décrit fait que ce roman, basé sur une documentation très fouillée,et même si elle y invente beaucoup de choses, de comportements, de dialogues, etc, est certainement le plus vrai écrit sur cette artiste.

Née d’une mère folle,qui a tenté de la supprimer, et d’un père inconnu qu’elle recherchera toute sa vie ( ah les très cruelles lettres écrites soit disant par son père, mais en fait par Cass Chaplin..), élevée dans un orphelinat, bombe sexuelle à 15 ans , mariée d’autorité à 16 et considérée apte au viol conjugal, elle ne va finalement jamais cesser de tenir un rôle. Celui que l’on voudra bien lui donner. Le plus souvent, celui d’une pute ( les derniers épisodes décrivant ses rapports avec les frères Kennedy sont terrifiants de violence.)Celle que les hommes veulent qu’elle soit. Tous ou presque. Pas Brando, qui lui offre les Pensées de Pascal. Ni Miller, la conscience morale du roman, qui apparaît trop tard dans sa vie .
Alors que c’était une enfant rongée par sa culpabilité, son complexe d'infériorité, en perpétuelle quête d'amour .Retournant constamment vers sa mère en espérant échanger de l’amour contre les preuves de succès qu’elle dépose à ses pieds. Pour exprimer les songes et les désillusions de celle qu' Hollywood traita comme un pur objet sexuel , celle qui fut condamnée « à chercher dans les yeux des autres la confirmation de sa propre existence », celle qui, dit Oates, « fut complice de sa propre exploitation, qui ne s'extirpa jamais de la machine à broyer, qui accepta son calvaire », la romancière donne libre cours à son style habituel, lyrique,exalté, avec des moments de colère et même de rage, et ponctué de quelques phrases en italique de réflexion, qui permettent de respirer un peu. Et dieu sait si on a besoin de respirer tout au long de ces 975 pages! C’est un livre très étouffant, dont on sort un peu sonné , et ce n’est pas étonnant d'apprendre JCO dire que l’écriture de ce roman l’avait littéralement tuée.. .
Mais elle dit aussi:
«La vie de Marilyn a été plus noire encore que ce que j'ai raconté dans mon livre. Mais Norma Jean a réussi à sa manière. Quand Hollywood la prenait pour une grue, elle a prouvé contre tous son immense talent d'actrice. Elle a travaillé, elle s'est battue pour s'élever, se cultiver, aimer. J'espère qu'elle aurait été touchée que quelqu'un cherche à la comprendre, à dire qui elle était réellement.»
La lectrice que je suis a été très touchée également.

Quelques extraits:

Citation :
La voix de Gladys exprimait le respect et l’enthousiasme habituels, mais il y avait au dessous une rage calme, implacable. «  Là..la plus célèbre de toutes: FALCON’S LAIR. La maison de feu Rudolph Valentino. Lui n’était absolument pas doué pour le cinéma. Il n’était pas doué pour la vie. Mais il était photogénique, et il est mort au bon moment. Rappelle-toi, Norma Jeane… meurs au bon moment.
Gladys est la mère de Norma Jeane. Peu de temps après, elle va essayer de la mettre de force dans un bain brûlant..

Citation :
Norma Jeane était dans les bras d’Elsie.. Elsie pensait qu’elle ne s’était jamais sentie aussi mal de sa vie d’adulte.. Si elle avait pu ,elle aurait fichu Warren dehors à coups de pied dans le cul et gardé Norma Jeane..mais bien sûr c’était impossible. «  C’est un monde d’hommes et pour survivre une femme doit trahir ses pareilles. .. Arrête, Norma Jeane. Pleurer ne sert jamas à rien. Sinon, il y a longtemps que ça irait mieux pour tout le monde.
Norma Jeane a 15 ans. Elle a été placée pr l’orphelinat chez ce couple qu’elle aime, oui, mais le mari commence à s’intéresser à elle de trop près..

Citation :
Etre l’objet du désir masculin, c’est savoir «  J’existe! »L’expression du regard. Le durcissement du sexe. Bien que bonneà rien, vous êtes désirée.
Bien que votre mère n’ait pas voulu de vous, vous êtes désirée.
Bien que votre père n’ait pas voulu de vous, vous êtes désirée.
«  La vérité fondamentale de ma vie, que cela ait été la vérité ou une parodie de vérité: quand un homme vous désire, vous êtes en sécurité. »

Citation :
Il vaut mieux ne pas contrarier I.E. Shinn, le réalisateur le sait. Il réfléchit à cela, et rumine, habitué à un silence respectueux, quand la fille dit soudain de cette voix voilée de bébé: «  Oh! Je peux faire mieux que ça, laissez-moi recommencer. S’il vous plaît! »..
  Si je l’ai laissée recommencer? Bien sûr. Elle était fascinante à regarder. Comme un malade mental, peut être. Elle ne jouait pas. Aucune technique. Elle se mettait en sommeil et apparaissait alors avec cette autre personnalité qui était et n’était pas elle.Des gens comme ça, on comprend pourquoi ce métier les attire. Parce que l’acteur, dans son rôle, sait toujours qui il est. Toute perte est réparée.

Et...
Citation :
C’est juste que quelque fois, j’ai l’impression…que je n’ai pas de peau. Qu’une couche manque. Tout peut faire mal. Comme un coup de soleil
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MessageSujet: Re: Joyce Carol Oates   Joyce Carol Oates - Page 11 EmptyLun 3 Aoû 2009 - 23:50

Interview de Joyce Carol Oates par Josyane Savigeau dans Le Monde, à lire ici.
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