Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Jean-Pierre Martinet

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Constance
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Constance
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MessageSujet: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyDim 20 Mar 2011 - 14:42

Jean-Pierre Martinet Martin12



Citation :
Jean-Pierre Martinet est né à Libourne en 1944. Elève brillant, il consacre d'abord sa vie au cinéma et devient assistant-réalisateur, mais le désenchantement est rapide. En 1978, à 34 ans, il renonce définitivement à son rêve de réaliser un jour son propre film. Il quitte alors son emploi, saisissant l'occasion d'un petit héritage pour acheter un kiosque à journaux à Tours. Cette désillusion coïncide avec la rédaction de Jérôme. Dès 1975, son premier roman, La Somnolence, lui avait attiré la reconnaissance de certains critiques qui ont salué sa virtuosité ; mais Martinet est loin de faire l'unanimité tant ses récits sont d'un pessimisme sans bornes. C'est d'ailleurs cette noirceur que l'on reprochera encore à son second livre, Jérôme. En 1986 paraissent deux romans, L'ombre des forêts et Ceux qui n'en mènent pas large, puis Martinet cesse d'écrire. Comme le héros de Jérôme, il revient vivre, à plus de 40 ans, chez sa mère, à Libourne, et sombre définitivement dans l'alcool qui, depuis longtemps déjà, l'accompagne. Il meurt, hémiplégique, en 1993. Il a seulement 49 ans.(Ed. Leo Scheer)



Citation :

Considéré par Gérard Guégan comme le "successeur de Dostoïevski", l'écrivain et critique noctambule Jean-Pierre Martinet (1944-1993) a laissé une oeuvre parmi les plus noires de la littérature française du XXe siècle. (Alfred Eibel/ Le matricule des anges)




Parti de rien, Martinet a accompli une trajectoire exemplaire : il n'est arrivé nulle part.
(Jean-Pierre Martinet par lui-même)






L'oeuvre de Jean-Pierre Martinet

La Somnolence, 1975, Ed. Jean Jacques Pauvert. Réédition Finitude, 2010, préface de Julia Curiel.
Jérôme, 1978, Le Sagittaire. Réédition Finitude, 2009, préface d'Alfred Eibel et postface de Raphaël Sorin.
Ceux qui n’en mènent pas large, 1986. Le Dilettante
L’Ombre des forêts, 1987, La Table Ronde
Nuits bleues, calmes bières ; suivi de l'Orage, Finitude, 2006.
La grande vie, l'Arbre vengeur, 2006, préface d'Eric Dussert.
Nouvelle inédite in Capharnaüm n°1 Eté , Finitude, 2010.


Dernière édition par Constance le Dim 20 Mar 2011 - 14:51, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyDim 20 Mar 2011 - 14:44

Je l' ai noté, Constance !
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyDim 20 Mar 2011 - 14:49

bix229 a écrit:
Je l' ai noté, Constance !


Euh ... la suite arrive, péniblement, mais elle arrive ... Very Happy
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyDim 20 Mar 2011 - 15:03

Jean-Pierre Martinet 43926311





Jérôme est un roman d'une telle complexité, qu'il n'est guère aisé de le résumer, mais j'ai tenté de me livrer à cette expérience ...


Citation :

A vrai dire, je n'attachais plus la moindre importance aux radotages de monsieur Cloret[...]on vous a sans doute déjà dit que vous portiez un nom de peintre célèbre ? Je lui ai répondu froidement que je ne connaissais qu'un seul Jérôme Bauche, moi, et je l'ai prié de cesser ses insinuation, sinon j'allais appeler Solange [...]" p33-34



Qui est ce Jérôme Bauche, ogre mesurant 1 m 90, pesant 150 kilos, ayant passé la quarantaine, vivant seul avec sa mère alcoolique âgée de 77 ans qu'il surnomme affectueusement "mamame" (mais qu'il a poussée dans l'escalier, dans un accès de fureur) , cet homme qui vibre d'un amour obsessionnel pour une adolescente de 15 ans Paulina (qu'il surnomme Polly), qui connaît Faulkner et récite par coeur des passages de "Sanctuaire" à monsieur Cloret, mais qui feint ne pas connaître Jérôme Bosch ? Un attardé mental ? Un inculte ? Ou un simulateur ?
Du point de vue psychanalytique, on pourrait dire qu'il est pathologiquement atteint d'un trouble dissociatif de la personnalité, d'une forme aigüe de paranoïa, car cette Solange n'est autre qu'une voix intérieure, son âme damnée, une justicière invoquée lorsqu'il se sent en difficulté , qui le rappelle à l'ordre, et le pousse tout au long du roman à une désespérée transcendance ascétique.


Citation :


Je répétais doucement : Solange viendra, Solange viendra, et elle vous fera payer très cher les humiliations que vous me forcer à subir depuis que vous êtes là, tout ce que vous insinuez sur Polly, sur mamame, sur moi-même ... oui, monsieur Cloret : sur moi-même." p 34



Citation :

Solange aussi disait parfois qu'il y avait une force étrange en moi, et que, par moments, elle avait peur de moi, exactement comme monsieur Cloret, surtout lorsque je touchais ma tête ou mon bras et que je lui avouais en baissant les yeux que j'éprouvais l'impression étrange d'effleurer la tête ou le bras de quelqu'un d'autre, un inconnu qu'il me semblait pourtant avoir déjà rencontré plusieurs fois, dans ma chambre ou sur les boulevards, et qui se serait tenu à côté de moi sans rien dire, étrange et familier, sans colère, sans tendresse, dans la lumière argentée des nuits d'insomnie. p 57



Mais qualifier Jérôme de malade mental ne ferait que le réduire à un diagnostic clinique, donc à le réifier, réduisant de facto la haute portée existentielle du roman à une simple observation de ce qui pourrait être sa pathologie.



Pour en revenir strictement au roman, qui compte 455 pages écrites en un bloc compact exempt de paragraphes, d'où les sauts de ligne sont quasiment absents, il est indispensable de s'attacher à la lecture des 139 premières pages car les événèments qui s'y déroulent, expliquent le déclenchement de la dérive hallucinée de Jérôme ... dans ces pages, poussé à bout, parce que cet homme représente un monde d'ordre auquel il refuse d'appartenir, Jérôme assassine monsieur Cloret qui tente de le convaincre de travailler à la fabrication de fleurs en crêpon dans un atelier pour handicapés. Peu après, de retour de virée dans ses bistros coutumiers, "mamame" continue à s'enivrer tout en dînant (Jérôme clouera sur le sol les pieds de monsieur Cloret, afin que sa mère le pense attablé avec eux : scène d'un burlesque grinçant)) mais elle meurt d'une crise cardiaque suite à un coma éthylique, non sans avoir une ultime fois humilié son fils ...


Citation :
Les pauvres victimes des coups mal tirés, des comme toi, y en a plein, faut pas te prendre pour un martyr, t'es pas l'exception, t'es la majorité, et alors, monsieur Jérôme Bauche, on a plus le droit de s'amuser ? Le pauvre chéri, il rêvait d'autre chose ! Dans sa tête il avait des images ! Il vivait dans un songe bleu ! Le jour où il s'est rendu compte, il a plus aimé du tout ! ... p 99



Citation :
La vie t'as jamais su ce que c'était. T'as jamais aimé que la mort, et ça, si Dieu existe, il peut pas pardonner. T'es complètement dérangé. A force, oui, t'es devenu le maboul intégral. Je vais te dire, mon pauvre vieux, je te regretterai pas. D'ailleurs, c'est vrai, je t'ai jamais aimé, on est pas de la même race [...] Elle a esquissé un geste de la main vers sa poitrine, et puis sa main est retombée d'un seul coup, inerte. C'est alors que j'ai remarqué qu'elle portait une robe en lainage gris, toute trouée, bien trop grande pour elle; j'ai été pris d'une crise de fou rire. p 139



A partir de ce moment, acceptant le rôle de bienfaiteur qu'il se croit assigné par le destin, Jérôme se laissera porter par ses errances paranoïaques dans le monde de ceux qu'il dit "morts", car monde veule et hypocrite, peuplé de ratés, dénués de rêves.


Citation :
Sous le ciel de gouache grise. Je devais tenir mon rôle quand même. Après tout, c'était ce qu'on attendait de moi. On m'avait un peu poussé dans les coulisses, bien sûr, pour que j'accepte d'être Jérôme Bauche, mais enfin, maintenant, je devais aller jusqu'au bout. p 145



Ainsi, alors qu'il vivait quasiment cloîtré depuis des années, hors quelques sorties pour s'offrir les charmes de jeunes délurées, payés par "mamame", Jérôme partira alors en quête de sa Paulina (Polly) à travers un Paris devenu faubourg maléfique de Saint-Petersbourg, où rôdent des désespérés de la vie, des "rebuts" de la société : Bérénice, une prostituée amputée d'un sein qui lit "Aurélien" de Louis Aragon; le prof de lettres de Jérôme en classe de première (année où Jérôme a abandonné ses études alors qu'il était un surdoué, selon ce prof), une loque suicidaire réduite à l'état d'épave (qui ne rêve que d'exploser son score au billard électrique, et se donne exactement 43 jours avant de se donner la mort); un homme étrange qui possède et lit "Le livre des morts", deux jeunes filles d'une quinzaine d'années qui vendent leur corps pour quelques billets (l'une par nécessité, l'autre par vice et par goût du mensonge ) dans le passage glauque de Nastenka (référence à l'héroïne de "Les nuits blanches" de Dostoïevski) où l'enchêvetrement des corps nous ramène au tableau de Bosch ...
Parfois avec dégoût, parfois avec délectation, Jérôme évolue dans un sordide monde souterrain que hantent des personnages louches.
Misère, suicide, viols, débauche, mensonge, alcoolisme, dans la puanteur des pissotières ...
Durant deux jours, à travers sa quête hallucinée et avinée dans les bas-fonds de ce Paris fantasmé en St Pétersbourg fantômatique, Jérôme nous donne à voir la noirceur de notre monde dans lequel tout espoir de rédemption serait vain, car nous sommes incapables de changer la nature de l'Homme, que la souffrance ne se partage pas, que nous demeurons inexorablement seuls dans le monde mensonger des adultes ( dans ce roman,la plupart des protagonistes mentent), monde assassin des rêves de l'enfance.



Tout au long des pages, Jérôme pousse la longue plainte féroce d'un homme humilié, mais pétri d'humanisme qui,peut-être, avait décidé de cesser de vivre en marge de la société, après avoir lu "Heinrich von Kleist" en classe de première : devancer la mort, régresser en se comportant en arriéré mental, devenir un mort-vivant pour cette société qu'il abhorre, puisque les autres, les morts, se résignent à vivre en esclaves, et vous contraignent à rentrer dans le rang ... parce que pureté des sentiments, la beauté et la liberté sont si dérisoires.
Mais, en même temps, se rebellant contre Solange, Jérôme s'accroche encore aux lambeaux de rêves de son enfance. Ainsi, alors qu'il aura décidé de supprimer Paulina, il aura malgré tout un bref moment de remords.



Citation :
Visages mornes, fermés, corps brutalement exilés de leurs rêves, et qui ne semblaient plus attendre grand chose de la vie. Femmes sans âge, grisâtres, employés de bureau au complet fripé, adolescents au regard résigné de vieillards, pauvre troupeau fourbu dès le matin, l'échine courbée, prêt à recevoir sa pâture quotidienne d'humiliations.Je me suis brusquement demandé pourquoi je me sentais bourrelé de remords d'avoir envoyé monsieur Cloret dans l'autre monde : après tout il était le complice de cette société d'esclaves, mieux même il la protégeait, il s'en faisait le défenseur zélé, il profitait du malheur des gens pour refiler en souriant sa camelote religieuse, il était un peu comme ces vers gras qui se nourrissent de cadavres, il vivait de la mort, il se gavait de mélancolie. J'avais débarrassé la ville de ce charognard, au fond j'étais presque un bienfaiteur public. Je ne comprenais plus du tout pourquoi, la veille, j'avais été pris de cette frénésie d'humiliation. Je me sentais vivant, maintenant, plus vivant que ces fantômes blafards qui se rendaient au boulot sans même penser à se révolter. ma liberté, c'était ma solitude [...]
Au fond, comme Solange, je n'aimais que l'ombre, la clandestinité, la liberté inhumaine que procure cet état intermédiaire entre la mort et la vie, cet espace vide, indéfini, appelé par certains les limbes, et où je me suis toujours plu à voir le prolongement miraculeux de l'enfance. p 183



Citation :
J’aurais bien aimé vivre. Je suis absolument certain que ça m’aurait plus, contrairement à ce que Solange a essayé de me faire croire pendant des années. Oh oui alors. Les vivants sont si lumineux. Même les plus minables rayonnent étrangement.




Mais la quête d'absolu de Jérôme le mènera jusqu'au bout de la folie, et Paulina mourra un soir de neige, puis elle sera physiquement dévorée par l'ogre Jérôme ...


Citation :

"Comme des vapeurs glacées tombent en flocons de neige du haut de l'air, lorsque la Corne de la Chèvre céleste touche le soleil, ainsi je vis l'Ether se remplir et floconner de clartés triomphantes, qui étaient restées jusqu'alors avec nous; mon regard suivait leur mouvement, et le suivit jusqu'au milieu, où le trop de distance les déroba à ma vue. Et Béatrice, qui vit que je n'étais plus occupé à regarder en haut, me dit : Baisse les yeux, et vois l'espace que tu viens de parcourir". Dante, encore, n'est-ce pas ? Oui, Dante. Le Paradis. Chant vingt-sept." p 332





Dernière page : Absence du mot "Fin". Mais Martinet avait ébauché trois courts chapitres constituant une autre fin, qui ne sont imprimés qu'à titre documentaire.


Après réflexion, les errances criminelles de Jérôme, enfant-adulte qui se vit en bienfaiteur de l'humanité débarrassant le monde des charognards, allant jusqu'à supprimer Paulina dans l'un de ses délires paranoïaques ont-ils réellement eu lieu, ou ne sont-ce que les cauchemars labyrinthiques d'un Jérôme embrumé d'alcool, accoudé au zinc d'un bistro ?

Une simple de lecture de surface nous dit que Jérôme Bauche est haïssable jusqu'à son élimination mentale ou physique, cependant cette représentation archétypale de l'Homme absolu, l'Homme nouveau espéré par les surréalistes, nous renvoie à notre condition humaine, faite de renoncement, de veulerie, parfois de fourberie mellifluente sous couvert de compassion "Compassion, Jérôme, si grande compassion",leit-motiv des thuriféraires de la médiocrité sociétale, antienne quasiment musicale, tel un air lancinant de jazz ... finalement, je me suis totalement sentie en empathie avec ce monstrueux ogre de tendresse, qui bouscule, renverse, écrase l'idée morbide du bonheur préfabriqué.




ps : bien que jamais Jean-Pierre Martinet ne se soit jamais laissé aller à l'obscénité grâce au choix de ses mots, j'ai évité de recopier certains passages, car pour les âmes sensibles ou pudibondes, voire les deux en même temps, mieux vaut éviter la lecture de "Jérôme"... sinon, à mon sens, Jean-Pierre Martinet appartient au cercle des grands, des très grands : Artaud, Boulgakov, Dostoïevski, et Celine.
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyLun 9 Jan 2012 - 13:15

Le plus grand tort de Martinet, c'est de ne pas avoir été américain : son Jérôme serait devenu un roman culte à l'échelle internationale. (Les Inrockuptibles)


Qui lit Jérôme a la révélation de la littérature, celle des horizons céliniens. (Le Figaro)


Ce roman grince fort, à la fois méchant comme une teigne et sentimental à pleurer. Il faut plonger dans le texte qui ressemble aux tableaux d'un Jérôme Bosch ou d'un Goya. (Lire)



L'admirable Jérôme est tout entier porté par une langue torrentielle qui balaie le lecteur. (Livres-Hebdo)


C'est un monstre. Un tordu. Un fou. Un parano. Ou bien tout le contraire, un innocent, un poète, un sentimental, un visionnaire. Son nom : Jean-Pierre Martinet. (Télérama)


Jérôme est un maître livre qui vous marque à jamais. (Libération)




En ce moment, je termine mon long voyage dans l'univers de Martinet par la lecture de "La somnolence", mais je suis déjà triste à l'idée de le quitter, alors je relis en même temps "L'Ombre des forêts".
A mon sens, Céline, Artaud et Martinet ont révolutionné la littérature française en la libérant du carcan du classicisme.
Ce salutaire dépoussiérage aurait dû permettre la naissance de nouveaux écrivains illuminant la langue française mais, aujourd'hui, je n'en vois hélas aucun d'eux transgresser les règles stylistiques avec un tel génie.



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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyLun 9 Jan 2012 - 13:41

merci Constance ; si tu le raconte si bien c'est certainement qu'il le mérite.

tu as bien fait de remonter le fil, je vais noter cet écrivain.
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyLun 9 Jan 2012 - 16:43

J'ai déjà noté Jérôme.
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyLun 9 Jan 2012 - 21:36

Constance, je te fais confiance !
Ce livre a l'air de mériter que l'on s'y attarde. Je le note aussi !
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyMar 10 Jan 2012 - 18:49

Si je suis parvenue à convaincre ne serait-ce que trois parfumés, mon but aura été atteint. sourire



Voici l'extrait d'un article paru dans '"Libération" :


Citation :
Martinet est un météorite.
D’où vient-il ? Mystère. Son univers est peuplé d’êtres sans ombre (car il n’y a plus de soleil), d’épaves rampant dans des cauchemars sans fin ; somnambules difformes, épuisés, au bout du rouleau, qui errent dans des villes imaginaires (même si elles évoquent des cités connues, Paris et Saint-Pétersbourg pour Jérôme). Ces errances symbolistes, post-huysmansiennes si l’on peut dire, rappellent aussi les premiers travaux situationnistes sur la psychogéographie et la «Théorie de la dérive» de Debord. Entre autres. Martinet ne relève d’aucune école ni courant. Partant du Woyzeck de Büchner il côtoie parfois Boulgakov.
Mais on ne saurait le réduire à une influence majeure. Il faudrait pour lui rendre justice parler cinéma : "L’Ombre des forêts" se présente comme un superbe long-métrage dont chaque séquence apporte un point de vue de plus en plus aigu et qui finit par une double chute parfaitement suggérée. Jérôme alterne gros plans et travellings, multiplie les hors-champ et se tourne caméra à l’épaule. Il faudrait aussi parler de jazz : des silences de Thelonious Monk, des sons déchirants de Charlie Parker sortant de l’asile. Il faudrait souligner l’humour de Martinet, celui grinçant du dérisoire, celui fantastique des chocs improbables.
L’auteur décrivait sa vie en une phrase impitoyable : «Parti de rien, Martinet a accompli une trajectoire exemplaire : il n’est arrivé nulle part.» Sans doute, mais ce météorite a laissé dans le ciel littéraire français une trace bien noire du côté du crépuscule.
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyMar 10 Jan 2012 - 21:47

But atteint alors Constance, tu peux être fière de toi.
Et merci pour cet article. Je retiens la citation de Martinet :

«Parti de rien, Martinet a accompli une trajectoire exemplaire : il n’est arrivé nulle part.»

bonjour
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyDim 5 Fév 2012 - 20:09

"La grande vie" , une nouvelle comptant 57 pages, paraîtra aux US sous le titre "The high life", et sera disponible à partir du 31 mai 2012.
Méconnu, voire méprisé par le public français, "Jean-Pierre Martinet" pourrait connaître la gloire posthume grâce aux lecteurs d'outre-atlantique. cheers



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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyLun 6 Fév 2012 - 17:37

A partir du jeudi 9 février 2012, dans le cadre de "Une chaise, une voix, un texte", Denis Lavant fera une lecture de "La grande vie", au théâtre du Rond-Point. (le spectacle sera enregistré, et diffusé cet été sur France Inter)

Théâtre du Rond-Point
2 Bis avenue Franklin-D.-Roosevelt
75008 PARIS






Jean-Pierre Martinet Arton210



Quatrième de couverture :


Citation :
Je pensais souvent à ce cinéaste japonais, Ozu, qui avait fait graver ces simples mots sur sa tombe : "Néant". Moi aussi je me promenais avec une telle épitaphe, mais de mon vivant. »

Adolphe Marlaud habite un appartement avec vue sur le cimetière qui domine la rue Froidevaux, une de ces rues où « on meurt lentement, à petit feu, à petits pas, de chagrin et d’ennui. » N’ayant réussi à n’être ni fantôme, ni homme invisible, en exil, cet étrange voyageur d’hiver s’est fixé une ligne de conduite : « vivre le moins possible pour souffrir le moins possible. » C’est sans compter sur Madame C., sa concierge, qui guette amoureusement son passage du haut de ses deux mètres pour le contraindre à des actes qu’une quatrième de couverture doit taire.

Jean-Pierre Martinet, l’auteur de cette longue nouvelle parue en 1979 dans Subjectif, est mort en 1993 : il a marqué les lecteurs, trop rares, qui ont croisé son œuvre. En attendant de redécouvrir ses textes les plus denses, cette Grande vie signalera aux intrépides son talent halluciné et les noirs excès de son humour désespéré.



Extraits :


Citation :
A cette époque, j'habitais rue Froidevaux, en face du cimetière Montparnasse, au cinquième étage d'un immeuble qui menaçait ruine.
De là, j'avais une vue imprenable sur les tombes. Depuis plus de quinze ans, la rue Froidevaux était ma prison. J'étais un détenu modèle. Si je gémissais souvent sur ma condition, je ne me révoltais jamais. Je ne cherchais pas à m'évader. A vrai dire, je ne désirais pas grand chose. Ma règle de conduite était simple : vivre le moins possible pour souffrir le moins possible. (p.22)


Citation :

C’est vers la fin du mois d’août que le drame a éclaté. Je parle de drame, mais ce n’est pas le mot qui convient. Il n’y a pas de drame, chez nous, messieurs, ni de tragédie, il n’y a que du burlesque et de l’obscénité. On n’est pas heureux, mais on se marre bien. Jaune, bien sûr, mais enfin. Et puis avouons-le, le malheur fait rire. Ce sont les hypocrites qui prétendent le contraire (d’ailleurs, ils gloussent en secret en contemplant le désordre du monde, nos grands humanistes).(p.47-48)



Citation :

Je pensais souvent à ce cinéaste japonais, Ozu, qui avait fait graver ces simples mots sur sa tombe : "Néant".
Moi aussi je me promenais avec une telle épitaphe, mais de mon vivant.
Je tombais dans le vide du temps, et rien, ni personne, ne pourrait me retenir. (p.53)
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyLun 6 Fév 2012 - 23:06

Eh bien, ces extraits sont alléchants !
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyMar 7 Fév 2012 - 20:54

colimasson a écrit:
Eh bien, ces extraits sont alléchants !


Jean-Pierre Martinet n'a eu de cesse que de se faire le porte-parole des exclus de la vie, des êtres en souffrance, ces invisibles niés par la société que nous croisons chaque jour, et auxquels, peut-être, nous appartenons sans oser nous l'avouer.
Martinet pose la question de la folie, de la marginalité portée jusqu’au-boutisme par le rêve en dehors des normes sociales, et de l'inévitable chute dans le néant social des mal-nés, des rêveurs et des poètes.
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MessageSujet: Re: Jean-Pierre Martinet   Jean-Pierre Martinet EmptyDim 10 Mar 2013 - 12:14

Au fil des commentaires et citations de Constance, une envie de plus en plus pressante : je dois me rendre immédiatement au cabinet ...
de mes curiosités !
Et hop dans ma LAL !
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