Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Nivaria Tejera [Cuba]

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topocl
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MessageSujet: Re: Nivaria Tejera [Cuba]   tejera - Nivaria Tejera [Cuba] - Page 2 EmptyMer 24 Déc 2014 - 14:56

Le ravin

Citation :
J'avais imaginé la guerre comme nous l'explique l'Histoire sainte ou encore ce grand livre des Croisades que tante nous lisait quelquefois. Une guerre toute différente, où de grandes armées s'entrechoquaient avec des lances et des armes difficiles à manier et où les braves triomphaient des lâches. J'aurais trouvé stupide de penser que la guerre pût pénétrer ainsi dans les maisons et jusque dans le ventre pour leur ôter l'habitude de manger tous les jours.

Le ravin c'est celui où l'on enterre les fusillés. C'est celui qui hante l’imaginaire de  cette enfant, qui voit la guerre de ses yeux à elle,  à travers les mots des adultes qu'elle peut capter, ceux qui tâchent de la protéger comme ceux qui l'inquiètent, à travers surtout la vie qui change, devient dure et impitoyable, sous l' intrusion de la violence. C'est un puzzle de détails captés qui lui donnent une intuition à défaut d'une connaissance, qui la laissent seule avec ses angoisses, les genoux du grand-père ne suffisant pas à la délivrer de cette solitude affamée et glacée.

Un regard bien différent des adultes, donc, un assemblage de petites touches, qui souvent font sens, mais parfois sèment une confusion, exprimé dans une langue fluctuante, parfois d'une poésie fantasque et (trop) réfléchie qui a su me désarçonner, parfois plus factuelle et sèche, plus accessible aussi.

Expérience mitigée donc que cette lecture, qui offre un regard nouveau et décalé d'une guerre où fusils et bombes ne sont pas l'agression première.
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Bédoulène
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MessageSujet: Re: Nivaria Tejera [Cuba]   tejera - Nivaria Tejera [Cuba] - Page 2 EmptyVen 26 Déc 2014 - 11:04

Le ravin

C’est la guerre ! Les Franquistes investissent la ville de La  Laguna aux îles Canaries. Qu’est-ce pour cette fillette d’une dizaine d’années ? le bruit, les soldats qui violent sa maison, qui ennuient son chien, qui bousculent le Grand-père, cet admirable vieil homme, l’émoi de sa mère et de sa tante, et pour elle l’incompréhension dans la peur ; mais surtout la disparition de son Père !
Ce sera la nouvelle de l’incarcération de Santorio(le père journaliste Républicain), puis son internement dans un camp, lieux où la fillette lui rendra visite avec la famille, et la présence du « ravin » qui la hante,  là où l’on jette les corps des prisonniers, des Républicains « des rouges ».
Pour la fillette c’est un bouleversement du quotidien, abandon de la maison pour se réfugier dans celle du grand-père, les tickets d’alimentation pour survivre et les vilenies des autres enfants devant le dénuement visible qui la marque. Plus rien n’est comme avant, la fillette a grandi en quelques mois de plusieurs années .
Sa mère, accablée par la perte de tout, l’absence prolongée de Santorio et la  mort du petit frère, Chicho, n’assume et n’assure plus rien,  elle charge  la fillette de  trop de poids, ce qui est terrible pour un enfant.
Après la prison, le camp de concentration, un télégramme laconique annonce un exil de quarante ans sur l’île de Fer pour Santorio. C’est la fin, il ne pourra revenir, mais la fillette  se réfugie à nouveau auprès de son grand-père, avec lui elle peut laisser ses pensées, ses sentiments s’envoler.

Tout d’abord j’ai été surprise par le ton de l’écriture, cette enfant qui parlait soit avec des mots d’adulte ou au contraire avec une niaiserie pas de son âge. Je n’avais certainement pas la bonne manière d’appréhender cet étrange style. (ce n’était pas aussi le bon moment pour moi, trop occupée et donc moins sensible).

Ensuite j’ai été emportée, cette fillette qui portait trop de poids sur ses épaules m’a bouleversée. J’ai compris que ses « élucubrations » étaient pour elle une révolte et une aide à supporter le malheur.

Je l’ai accompagnée, j’ai compris aussi que les passages ambigus sur ses rapports et pensées avec son père révélaient une proche puberté et  l’éveil de sa sexualité.  

Je m’en veux un peu de n’avoir pas trouvé rapidement la porte pour entrer dans  ce récit surprenant.

et pour moi l' admirable figure du grand-père.

Ce sera une lecture qui laissera son empreinte.

Merci à Kenavo qui par son enthousiasme nous a incités à découvrir cette auteure.

Extraits :

« Quand j’étais plus petite il n’y avait pas de défilé patriotiques. La Patrie existait, mais elle était silencieuse et il n’était pas nécessaire de crier les noms des héros ; chacun connaissait son devoir et veillait sur elle. Mais ensuite il y a eu la guerre qui a fait surgir des soldats, et quand ils ont invoqué la Patrie ils se sont rendu compte qu’elle était cachée et ils ne l’ont pas trouvée, ce qui les a obligés à faire des « Mouvements » comme on fait exploser des mines. « Et le bruit des mines est terrible maintenant ; il les rend fous et  ils marchent à l’aveuglette ; d’un seul coup ils ont plongé la Patrie dans les ténèbres et nous sommes tous fichus, tous fichus », dit grand-père. Et il ajoute entre ses dents, d’une voix rauque et ferme : « Bandits, Bandits ! »
Grand-père devrait être général. »

« Un tintement dur, qui par moments faiblissait, sonnait les adieux d’un mort : puis la corde reprenait sa tranquillité. « Il n’y a plus de place où déposer tout ce fumier », disait le sonneur. Et il ajoutait : « le comble, c’est qu’il faut encore envoyer au-dessus de cette pourriture toute une harmonie céleste pour qu’elle dorme bien et ne nous tracasse pas la nuit. » Puis, tandis qu ’il continuait de tirer la corde à la manière d’un trapéziste, il conseillait à son ami de le laisser, parce qu’il en était à son troisième mort et qu’il y en avait encore huit en tout. « A croire qu’il y en a qui meurent plusieurs fois, les salauds !» ajoutait-il. »

« Je voudrais dormir mais je sais que c’est impossible. Depuis que Papa n’est plus là, maman m’oblige à coucher dans le grand lit où je les entendais autrefois, elle et papa. Avec moi dedans le lit ne s’agitera plus comme avant, ce qui provoquait ma rage, quand je vivais dans la pièce voisine. Parfois, lorsque maman dort, elle me couvre de sa jambe, ce qui me semble étrange. Elle voudrait, bien sur, que je sois papa. Ce que je voudrais qu’elle soit, moi aussi. »

« Mais quand il s’arrête devant moi et refuse de me laisser passer, j’ai beau avoir l’air de ne rien remarquer, je vois bien le mouvement de ses mains ; j’en ai la nausée et je voudrais pouvoir lui cracher au visage. Lorsque j’arrive à la maison, je tâte le bas de mon corps pour savoir ce qu’il a pu sentir. Un courant soudain me traverse, toute, mais comme je dois guetter en même temps par la fente de la porte pour voir si personne ne vient je me raidis de peur et le courant cesse. Cette sensation est plus intense encore quand je reviens de voir papa. Je pense qu’il nous a abandonnés pour toujours. »


Dernière édition par Bédoulène le Sam 27 Déc 2014 - 8:48, édité 2 fois
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kenavo
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MessageSujet: Re: Nivaria Tejera [Cuba]   tejera - Nivaria Tejera [Cuba] - Page 2 EmptyVen 26 Déc 2014 - 19:18

Bédoulène a écrit:
Merci à Kenavo qui par son enthousiasme nous a incités à découvrir cette auteure.
tout le plaisir était pour moi, aussi bien de suivre vos avis sur le fil de la LC que vos commentaires sur ce fil Very Happy
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shanidar
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MessageSujet: Re: Nivaria Tejera [Cuba]   tejera - Nivaria Tejera [Cuba] - Page 2 EmptyDim 28 Déc 2014 - 10:58

Le Ravin

La guerre, l'enfance, le ravin où l'on meurt, les images pour transposer la peur, l'angoisse, la disparition du père, l'attente intense des retrouvailles, l'impression que l'enfant, cette petite fille pleine de vie et de malheur, est en train de grandir d'un seul coup, avec tous les traumatismes que la guerre civile, le rationnement, la soudaine pauvreté révèlent.

Un texte dans lequel je suis immédiatement entrée (même si en général je n'aime pas beaucoup les récits d'enfants), un texte qui ne raconte pas la guerre mais oblige à transcender chaque image pour (comme le dit très justement Bédoulène) qu'elle puisse être exprimée et dépassée. Il faudra se détacher du père, écouter longuement le silence affreux du grand-père et s'attacher aux animaux pour que le travail de deuil et de passage à un âge plus mûr se fassent chez cette enfant éperdument vivante.

J'ai beaucoup aimé ce récit, très fort, très rythmé, avec des moments de poésie totale balayés par d'autres d'un pragmatisme ou d'une naïveté exaspérante mais toujours justifiée. Le passage d'un régime de lecture à un autre se fait avec la vitesse d'une balle tirée dans le but d'atteindre sa cible, le texte ne cache rien des horreurs (morts, tortures, faims) que fait naitre la guerre (et celle-ci est d'autant plus laide qu'elle est fratricide).

Si je croise les autres livres de cette auteure je n'hésiterais pas une seconde ! (et merci à kenavo !).
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Bédoulène
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MessageSujet: Re: Nivaria Tejera [Cuba]   tejera - Nivaria Tejera [Cuba] - Page 2 EmptyDim 28 Déc 2014 - 16:18

C'était finalement une lecture intéressante, que nous l'ayons plus ou moins apprécié, elle n'a été indifférente à aucune des lectrices de cette LC. sourire

merci à vous,Shanidar, Topocl et Eglantine qui m'avez accompagnée.
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MessageSujet: Re: Nivaria Tejera [Cuba]   tejera - Nivaria Tejera [Cuba] - Page 2 Empty

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