Pascal Quignard

La leçon de musique :

Je lisais précédemment Stasiuk, il est donc difficile pour le livre qui suit une telle lecture de demeurer à un même niveau de qualité.
Et ce livre de Quignard est ma plus grosse déception depuis que je connais cet auteur.
Beaucoup de mots pour peu d'idées, des notes amoncelées ca et là sur la musique et notamment sur la viole par le biais d'un portrait de Marais.
Le conte asiatique qui conclut ce livre n'est pas beaucoup plus passionnant, j'avais hâte que cela se finisse alors que le livre est court.
Quignard est capable de fulgurances néanmoins comme celle-ci :

Quignard a écrit:

La nature produit du vivant insignifiant. L'art produit des êtres morts signifiants.

Mais le plaisir est de courte durée. Lecture un peu creuse, dommage.

dommage Hanta !

moi j'avais aimé Tous les matins du monde, mais pas emballée par Villa Amalia

Tous les matins du monde

C’est un très bon livre… mais j’en avais entendu tellement de bien que mes quelques réserves font pour moi de cette lecture une déception. J’ai eu plusieurs fois le sentiment que j'allais basculer dans une émotion forte : lorsque Sainte Colombe offre sa main à l’ombre de son épouse pour l’aider à descendre du carrosse, main qu’elle refuse, qu’elle monte sur sa petite barque… la fin aussi, passée tout près… mais c’est justement ce qui m’a frustrée, j’étais sur le point de basculer et je suis restée sur le bord, à osciller.
D’une certaine manière, je comprends en quoi cela sert le propos : ce basculement, il est réservé à la musique ; tout ce que Sainte Colombe peut exprimer de plus fort est dans la musique. Il n’empêche que c’est de l’analyse a posteriori, et ça ne change rien au fait que c’est une chose que je recherche pendant ma lecture. Je suis beaucoup plus séduite par Duras veine Moderato Cantabile (je sais que c’est très différent, mais pour une raison ou pour une autre j’ai pensé à Moderato en lisant Tous les matins), qui elle aussi tourne autour du sentiment ineffable mais me le transmet intensément, comme s’il y avait un effet de vase communiquant entre son protagoniste et moi.

L’écriture est formidable. J’ai adoré ce style lumineux, avec quelques ‘interférences’ : des ruptures de constructions sémantiques, grammaticales ou logiques qui poussent le lecteur à s’arrêter, s’interroger sur une phrase. C’est hyper maîtrisé… juste dommage que ce beau matériau ne conduise pas l’énergie émotionnelle autant que je l’aurais espéré. Je me demande pourquoi, du coup, la magie n’a pas opéré sur moi, qu’est-ce qui dans cette écriture pourtant superbe a fait effet d’isolant. Je relis des passages… ce sont les dialogues, peut-être, et puis j’ai l’impression qu’il y a un potentiel de musicalité de la langue qui n'est pas tout à fait actualisé… mais franchement, je doute.

Je retenterai sûrement Quignard, peut-être Terrasse à Rome (pas lu les 39 pages de discussion, mais ce titre semblait revenir souvent !), pour retrouver cette très belle écriture. Mais pas tout de suite.
En attendant, je vais pas bouder mon plaisir, j’ai aimé quand même !

Sorcière a écrit:

(pas lu les 39 pages de discussion, mais ce titre semblait revenir souvent !)

les fils d'auteurs avec 5 pages et plus ont un index dans le premier message du fil où on peut voir les livres commentés par les parfumés, le chiffre de la page fait le lien

Sorcière a écrit:

(je sais que c’est très différent, mais pour une raison ou pour une autre j’ai pensé à Moderato en lisant Tous les matins)

Peut-être parce que c'est une indication rythmique ?

Je n'ai pas lu le bouquin, mais il faudra que je revoie le film d'Alain Corneau, qui m'a fortement impressionné.

Peut-être que tu trouveras l'émotion recherchée dans un autre de ses livres Sorcière! Je te le souhaite.