Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 David Cronenberg

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Marko
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptySam 26 Mai 2012 - 19:47

Verdict demain...
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Constance
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptySam 26 Mai 2012 - 20:56

Cronenberg nous donne à réfléchir sur notre monde en décomposition, fondé sur la finance triomphante (ce monde auquel certains ont cru, a-t-il été jamais fiable ? ). Protection illusoire pour le héros névrosé : sa limousine, allégorie de la bulle immobilière qui fit plonger les banques, donc les états et par conséquence les citoyens dans le marasme.
Marasme des certitudes, des vérités, des idées, des rêves, des utopies.
Nous assistons à la déconstruction de notre univers cérébral formaté par des experts. Les dialogues abscons illustrent la défragmentation de notre pensée, confrontée à l'universalité d'un rassurant discours bêta-philosophique.
La succession des plans chaotiques n'est-il pas le reflet de notre société déstabilisée par les aléas des cours boursiers ?
Bref ! J'appartiens au cercle apparemment restreint d'imbéciles qui ont aimé le message porteur d'alerte de ce film.
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colimasson
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptySam 26 Mai 2012 - 21:24

A voir, à voir...

Un film de Cronenberg ne peut pas être foncièrement décevant... ?
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptySam 26 Mai 2012 - 22:09

Constance a écrit:

Bref ! J'appartiens au cercle apparemment restreint d'imbéciles qui ont aimé le message porteur d'alerte de ce film.

Pas si restreint et certainement pas d'imbéciles (quelle idée !). C'est typiquement le genre de films qui divise gravement. Il n'est pas question de remettre en cause le fond, mais bien la forme cinématographique. Ou pas.

Les appréciations des spectateurs sur allociné :
12% *****
4% ****
11% ***
11% **
25% *
37% 0

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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyDim 27 Mai 2012 - 0:12

Les avis ne m'étonnent guère...les adaptations littéraires de Cronenberg ont toujours fortement divisé, et le matériau de départ était un sacré risque.
On verra pour ma part à mon retour de congés.
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Marko
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyMer 30 Mai 2012 - 0:31

J'aime beaucoup Cosmopolis. Je développerai demain...
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Marko
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyMer 30 Mai 2012 - 15:45

Cosmopolis
cronenberg - David Cronenberg - Page 8 Cosmop11

J'ai lu [le scénario de Cronenberg], il était extraordinairement proche du livre. Bien sûr Cronenberg a éliminé quelques scènes qui ne convenaient pas, mais c’est entièrement fidèle à l’esprit du roman. Naturellement, je l’ai lu sans aucune intention de faire des commentaires, c’était devenu un film de Cronenberg. C’est mon roman et c’est son film, cela a toujours été très clair. Et ensuite, en mars, j’ai vu le film terminé, à New York. J’ai été très impressionné. C’est absolument sans compromis. J’ai aimé dès la première minute, dès le générique : commencer avec Jackson Pollock est une idée remarquable, tout comme terminer avec Rothko d’ailleurs. Et la scène finale, avec Robert Pattinson et Paul Giamatti – c’est extraordinaire ! (Don DeLillo)


Je me lance mais ce n'est pas facile de parler d'un film aussi complexe. J'ai été très impressionné par le contenu du texte (reprise quasi intégrale de tous les dialogues du roman de Don DeLillo) qui non seulement ne me semble pas caricatural, ridicule ou inepte mais au contraire d'une grande richesse, d'une densité sidérante avec de multiples niveaux de lecture. J'entrevois grâce à ce film le grand écrivain visionnaire que doit être Don DeLillo. Un texte qu'il faudrait lire et relire tellement il contient d'informations, de métaphores, de second degré avec une portée prophétique, philosophique, et une représentation de la société contemporaine très singulière et puissante dans ses ramifications. D'une telle portée qu'on pourrait en disserter longuement. Mais le résultat donne une sorte de distanciation par un langage proliférant qui peut dérouter et expulser immédiatement du film. Et si on ne pénètre pas cet univers très abstrait l'ennui risque d'être profond.

Très impressionné également par la façon dont Cronenberg s'approprie ce texte, le rend explicite par sa fluidité, accentue la dimension abstraite et futuriste qu'il contient. C'est du pur Cronenberg comme on en voyait à l'époque de Faux Semblant ou du Festin nu avec en plus le faux clacissisme des derniers films. Sorte de théâtralisation déréalisante qui génère des espaces mentaux et organiques d'une intensité rare. Cosmopolis est à pas mal d'égards un prolongement du film précédent (A dangerous method) par le recours à un texte très dense, un dispositif théâtral, une abstraction littéraire, un détournement de l'image au profit du concept. L'ensemble dégageant une tristesse lancinante derrière une façade glaciale et maîtrisée (de ce point de vue je trouve Robert Pattinson génialement dirigé). Fiction du dérèglement, du délitement, qui transforme son personnage principal d'un état de robot insensible à celui d'être humain qui baisse le masque (qui perd, non sans humour, sa symétrie, sa perfection: 4% de masse graisseuse, une coupe de cheveux unilatérale, une prostate asymétrique... rire).

Les personnages communiquent entre eux comme s'ils exprimaient non pas leurs émotions mais la théorisation de leurs émotions filtrées au travers du langage formaté, des concepts et de la sur-information, d'une manière de vivre qui s'est instillée en eux dans un univers légèrement futuriste défini comme dominé par le cybercapitalisme et l'hyper-technologie. Dans Crash le corps humain et l'esprit mutaient en quelque sorte en incorporant le mécanique (les voitures, les architectures industrielles, les appareillages chirurgicaux...) et Cosmopolis pourrait être le stade suivant de l'évolution où l'informatique et le high tech modèleraient les corps et les esprits jusqu'à un niveau de perfection et d'aseptisation effaçant en surface et en apparence toute trace d'humanité. Dans Crash les personnages cherchaient une nouvelle forme de jouissance, de communion, de spiritualité. Dans Cosmopolis ils sont devenus des sortes de machines/robots qui luttent contre l'intrusion d'un inconscient de plus en plus enfoui. Il y a volontairement délimitation d'une frontière symbolique entre le dedans et le dehors. Espace confiné, silencieux (la bande son est extra-terrestre) et robotisé de la voiture qui subit les assauts d'un monde extérieur de plus en plus fou et désorganisé qui tente d'ouvrir une brèche pour tout faire exploser. La musique du film très discrète est également un prolongement de celle de Crash avec des sonorités plus électroniques et enveloppantes.

Il y a donc à la fois un plan narratif qui évoque la déliquescence d'un monde saturé de capitalisme, d'information, de consommation, de rapports humains artificiels et fonctionnels, et un plan plus psychanalytique et philosophique qui fait de cette traversée mortifère une parabole du naufrage de la société. Mais ce serait trop réducteur de le résumer à cela. J'ai aussi perçu autre chose qu'une critique du monde moderne. Il y a une forme de souffrance chez ce garçon qui perd pied, dont l'entreprise est en train de faire faillite, l'épouse frigide est de plus en plus détachée et inaccessible, les maîtresses vieillissantes ou tarifées, les autres des ennemis potentiels, sa propre jeunesse en train de lui échapper. Et en même temps qu'il perd de sa substance il se met à laisser ses émotions ressurgir comme un enfant qui se rend chez son coiffeur après avoir pleuré dans les bras d'un noir obèse, puis il expie tous les maux de la société qui l'ont formaté pour accepter son sort de victime sacrificielle. C'est désenchanté et bouleversant. La scène finale est fantastique dans cette confrontation entre le mal capitaliste qu'il représente (schématiquement) et le laissé pour compte de la société qui cherche à se venger. A éliminer ce qu'il croit être la personnification d'un système qui l'a brisé. Ce qu'ils se disent et ce qui se passe entre eux est hallucinant.

Le film est encadré de façon géniale (comme souvent dans les films de Cronenberg) par 2 génériques qui reprennent des compositions de Pollock puis de Rothko. Ces repères étant autant de signes qui donnent quelques clés de lecture et synthétisent tout le propos. Deux formes d'expressionnisme abstrait tendues entre représentation du chaos et quête d'une transcendance.

Et j'ai conscience en disant tout ça de ne faire qu'effleurer un film et une oeuvre littéraire dont la portée est certainement bien plus grande encore. Je lirai le roman et d'autres oeuvres de Don DeLillo et il faudra plusieurs visions de ce film pour mieux l'apprécier dans ses multiples dimensions. Le choc de deux grands artistes de notre époque (peut-être encore trop novateurs pour qu'on puisse les suivre complètement?).

cronenberg - David Cronenberg - Page 8 Polloc10 cronenberg - David Cronenberg - Page 8 Rothko10
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyMer 30 Mai 2012 - 20:58

Si avec tout cela tu ne fais qu'effleurer le film, je m'attends vraiment à du très bon...
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyMer 30 Mai 2012 - 21:34

colimasson a écrit:
Si avec tout cela tu ne fais qu'effleurer le film, je m'attends vraiment à du très bon...
Attention parce que tout le monde autour de moi s'est ennuyé à mourir dentsblanches
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyMer 30 Mai 2012 - 21:39

Marko, c'est tout ce que tu peux "sortir" d'un film qui me sidère; le décorticage minutieux, et l'attention que cela demande pour le regarder.

A mon sens c'est très difficile, contrairement avec le livre dont t peux relire des passages autant de fois que tu le désires. bravo
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyMer 30 Mai 2012 - 22:56

Mais j'ai été aussi parfois écrasé par la densité des dialogues qui m'ont donné régulièrement l'impression d'être largué et d'avoir besoin de revoir le film ou surtout de lire le roman en prenant mon temps. C'est peut-être la limite du film que de vouloir trop restituer le matériau littéraire même si cette logorrhée est indispensable au projet. On sent tout ce qu'il y a à méditer mais on n'a pas le temps de s'y arrêter. Le fait d'avoir le film en tête me permettra de mieux rentrer dans le roman à présent. C'est en tout cas une oeuvre inépuisable et Cronenberg un artiste qu'il ne faut pas juger trop rapidement car son univers est infiniment passionnant et enrichissant. Je suis loin d'en avoir fait le tour. C'est bien que certaines oeuvres résistent un peu et nous poussent à approfondir. Et si on flotte dans tout ça ce n'est pas très grave parce que l'essentiel se ressent par la force de ses images qui reflètent la gravité et le dérisoire (le grotesque même) de l'inconscient, des rêves, des fantasmes. C'est de ça que parle ce film avant tout je pense. Et c'est finalement très émouvant.
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyJeu 31 Mai 2012 - 19:21

Marko a écrit:
colimasson a écrit:
Si avec tout cela tu ne fais qu'effleurer le film, je m'attends vraiment à du très bon...
Attention parce que tout le monde autour de moi s'est ennuyé à mourir dentsblanches

C'est très frustrant d'être le seul à éprouver un vif enthousiasme pour un vif, tandis que pendant ce temps-là, les autres ont seulement hâte que le film soit terminé !

Je connais une amie qui va être déçue en allant voir ce film... Parce qu'il y a Robert Pattinson a l'affiche, elle espère voir un film du même type que Twilight...
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyVen 1 Juin 2012 - 15:26

Interview de Cronenberg:

Le film tient le spectateur à distance. Était-ce une volonté?

Cosmopolis n'est pas un film qui se livre d'emblée. Mais tout a un sens. Et si vous voyez le film une deuxième fois, vous en comprendrez davantage. C'est comme la vie: on ne peut pas en absorber le sens immédiatement. J'aime qu'un film soit aussi complexe que la vie. C'est plus réaliste ainsi. Je n'aime pas les films prédigérés et consommables facilement. 

Pourtant, dans votre précédent film, A Dangerous Method, vous aviez rendu la psychanalyse assez facile d'accès. Là, vous rendez la finance obscure. Pourquoi?

La finance est obscure, même pour les gens qui la pratiquent au quotidien ! L'homme a inventé l'argent et l'économie et ne peut pas les contrôler. S'il le pouvait, nous n'aurions jamais de crise ou de récession. On est comme Frankenstein, on a perdu la maîtrise de notre monstre. Mais pour ceux qui jouent le jeu de Wall Street tous les jours, je ne pense pas que Cosmopolis sera compliqué à comprendre. Ce qui est incroyable, c'est que DeLillo a écrit ce roman en 2003, et qu'il se révèle incroyablement prophétique. Nous avons tourné les scènes d'émeutes anticapitalistes au moment où avaient lieu les manifestations "Occupy Wall Street". 

Cosmopolis se termine sur une scène de dialogues de vingt minutes. C'est très osé comme parti pris cinématographique...

Ce sont vingt-deux minutes en fait ! C'est aussi comme ça que le livre se termine, alors je n'ai pas hésité longtemps. Pour moi, l'essence du cinéma, c'est une personne en train de parler ! Je refuse pour autant l'appellation de théâtre filmé. Ce qui en fait du cinéma, c'est l'utilisation des outils de la caméra. Il n'y a pas de gros plan, de travelling ou de montage au théâtre. 
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyVen 1 Juin 2012 - 15:28

J'irai le voir prochainement. Je n'ai aucune idée si je vais adhérer ou non mais bon, c'est Cronenberg tout de même... difficile de ne pas se laisser tenter jypeurien
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 EmptyVen 1 Juin 2012 - 15:33

sentinelle a écrit:
J'irai le voir prochainement. Je n'ai aucune idée si je vais adhérer ou non mais bon, c'est Cronenberg tout de même... difficile de ne pas se laisser tenter jypeurien
Il faut être très disponible rire
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MessageSujet: Re: David Cronenberg   cronenberg - David Cronenberg - Page 8 Empty

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