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| Reflexion sur la poésie | |
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Auteur | Message |
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sousmarin Zen littéraire
Messages : 3021 Inscription le : 31/01/2007 Localisation : Sarthe
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Jeu 23 Oct 2008 - 12:28 | |
| Petite remontée pour proposer : "Me prêta ta vision, et c’est alors mon pair," | |
| | | elena Posteur en quête
Messages : 81 Inscription le : 28/07/2008
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Jeu 23 Oct 2008 - 12:54 | |
| - sousmarin a écrit:
- Petite remontée pour proposer :
"Me prêta ta vision, et c’est alors mon pair," hihi c'est comme mettre des moustaches à la Joconde ! où est ma corne de brume que je signale ton intervention à tout le monde POOOÔÔÔÔNNN De plus gare à toi tu es devant des scrupuleux (scrupulus, petit caillou) doncques : vi-si-on en métrique classique compte 3 et pair est une rime masculine impossible à colèreEcoute sousmarin, même si ce n'est pas l'alexandrin égaré disparu de la nef malherbienne que tu trouves, je t'en prie sois gentil continue à sonder fouiller les épaves marines, et ramène autre chose | |
| | | elena Posteur en quête
Messages : 81 Inscription le : 28/07/2008
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Jeu 23 Oct 2008 - 18:38 | |
| - Anne a écrit:
- J'ai pensé qu'il serait enrichissant et utile de poser des questions un peu philosophiques sur tout ce qui touche à la poésie. ça permet, certes de donner notre avis, en argumentant, en s'appuyant sur des auteurs (et en les citant c'est encore mieux) et surtout aussi en confrontant nos points de vues, seul moyen il me semble d'envisager une réponse assez complète et approfondie de la question.
Voici la première question:
Pensez-vous que la poésie soit nécessaire? Dis-donc Anne je me réveille bien tard, je ne réagis que maintenant à la question-mère de tout ce topic ! Tu te rends compte que ta question c'est celle des Orphiques (Orphée poète n°1 chez les mortels comme Apollon chez les dieux)... La théogonie orphique place en effet le couple Temps et Nécessité comme source des apparences de monde. Je ne suis pas (comme une que je connais bien) prof de philo, mais tu as raison d'associer philo et poésie comme on a pu faire d'Orphée un philosophe. Les résonances de la pensée orphique se marient aujourd'hui assez bien avec le discours que la science tient sur le temps. Et des notions philosophiques que je ne maîtrise pas mais que l'on me souffle (type : lien des représentations sensibles) je les comprends suffisamment pour les transposer en poésie. Ananké, déesse orphique de la nécessité qui domine l'apparence... Cela rejoint ta question prise au premier degré : Pensez-vous que la poésie soit nécessaire ? Le monde est-il nécessaire... L'entretien de notre durée de vie éphémère est-il nécessaire... Etc. (Bon assez rêvé, et les essais de restauration du Malherbe alors !? A part sousmarin il n'y a que des couards où se cachent les candidats ?!?) | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Jeu 23 Oct 2008 - 18:54 | |
| - elena a écrit:
- « Aux Ombres de Damon est le titre d’un long poème de Malherbe (*). Dans toutes les éditions de ce texte vous vous apercevrez qu'un vers manque, un vers que les éditeurs ont coutume de remplacer par une ligne de pointillés (il s'agit du deuxième vers de la 13éme strophe) :
« Enfin, après quatre ans, une juste colère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Que le flux de ma peine a trouvé son reflux : Mes sens qu'elle aveuglait ont connu leur offense ; Je les en ai purgés, et leur ai fait défense De me la ramentevoir plus.
[i]« Comment créer le vers manquant ?… Voulez-vous essayer ? (Sachez que quelques connaisseurs – personnes un peu trop conscientes des enjeux et des difficultés de la composition poétique – se sont prudemment récusés (je n'ai pas eu la force de leur en vouloir)... Des amateurs moins scrupuleux en revanche, se sont lancés avec excitation dans l'entreprise.)
« Pas facile, pas facile.
- elena a écrit:
- et les essais de restauration du Malherbe alors !? A part sousmarin il n'y a que des couards où se cachent les candidats ?!?)
Je fais un raccourci pour donner plus de visibilité à ta proposition...On espère forcément toujours en développant ce qui nous passionne...mais il faut se rendre à l'évidence...les posts les plus longs sur un forum ne sont pas forcément les plus lus... | |
| | | sousmarin Zen littéraire
Messages : 3021 Inscription le : 31/01/2007 Localisation : Sarthe
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Jeu 23 Oct 2008 - 21:00 | |
| - elena a écrit:
- sousmarin a écrit:
- Petite remontée pour proposer :
"Me prêta ta vision, et c’est alors mon pair," hihi c'est comme mettre des moustaches à la Joconde ! où est ma corne de brume que je signale ton intervention à tout le monde POOOÔÔÔÔNNN
De plus gare à toi tu es devant des scrupuleux (scrupulus, petit caillou) doncques : vi-si-on en métrique classique compte 3 et pair est une rime masculine impossible à colère Ecoute sousmarin, même si ce n'est pas l'alexandrin égaré disparu de la nef malherbienne que tu trouves, je t'en prie sois gentil continue à sonder fouiller les épaves marines, et ramène autre chose Et l’absence de rime entre lois et m’appelais dans la strophe précédente…sans doute due au vieux français… Normalement il me semble me ramentevoir, qu’en classique, vision, en tant que synérèse, peut se décompter en 2 syllabes mais j’avoue que je ne sais si cette liberté s’appliquait à l’époque…sinon on peut mettre Yeux (tes) à la place qui lui, avec ta méthode, compte pour 2… Je t’accorde que ma rime est masculine mais il faut bien laisser aux autres la possibilité de faire mieux… | |
| | | Steven Zen littéraire
Messages : 4499 Inscription le : 26/09/2007 Age : 52 Localisation : Saint-Sever (Landes)
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Jeu 23 Oct 2008 - 21:43 | |
| Petits éléments de réflexion trouvés dans Oreiller d'herbes de Sôseki : - Citation :
Ce qui débarasse de tout ennui ce monde, où il est difficile à vivre, et projette sous vos yeux un monde de grâce, c'est la poésie, c'est la peinture. Ou encore c'est la musique et la sculpture. Pour être exact, il ne s'agit pas de porjeter sur le monde. Il suffit d'y poser son regard directement, c'est là que naît la poésie et c'est là que le chant s'élève. Même si l'idée n'est pas couchée par écrit, le son du cristal résonne dans le coeur. Même si la peinture n'est pas étalée sur la toile, l'éclat des couleurs se reflète dans le regard intérieur. Il suffit de contempler le monde où l'on vit, et de contenir avec pureté et clarté, dans l'appareil photographique de l'esprit, le monde d'ici-bas, futile et chaotique.
C'est pourquoi un poète anonyme qui n'a pas écrit un seul vers, un peintre obscur qui n'a pas peint une seule toile, sont plus heureux qu'un millionaire, qu'un prince, que toutes les célébrités du monde trivial car les premiers savent observer la vie, peuvent s'abstraire de toutes préoccupations, sont en mesure d'entrer dans le monde de la pureté, de construire l'univers unique et de balayer les contraintes de l'égoïsme. Sans naïveté excessive, je trouve que voilà une bien belle définition du poète, de l'artiste en général. | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Jeu 23 Oct 2008 - 23:26 | |
| - Steven a écrit:
- Petits éléments de réflexion trouvés dans Oreiller d'herbes de Sôseki :
- Citation :
- car les premiers savent observer la vie, peuvent s'abstraire de toutes préoccupations, sont en mesure d'entrer dans le monde de la pureté, de construire l'univers unique et de balayer les contraintes de l'égoïsme.
Sans naïveté excessive, je trouve que voilà une bien belle définition du poète, de l'artiste en général. Je la partage! Merci Steven | |
| | | mimi Sage de la littérature
Messages : 2032 Inscription le : 19/07/2007 Localisation : Auvergne
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Ven 24 Oct 2008 - 0:46 | |
| Pas évident ! Je tente ! Enfin, après quatre ans, une juste colère Tandis qu'enfin se meure une pauvre chimèreQue le flux de ma peine a trouvé son reflux : Mes sens qu'elle aveuglait ont connu leur offense ; Je les en ai purgés, et leur ai fait défense De me la ramentevoir plus. ou alors pour éviter la répét de "enfin" Soudain s'emporte et meurt une triste chimère Mais il y a encore un problème de liaison, entre les vers. Je cherche !! | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Ven 24 Oct 2008 - 11:42 | |
| - Steven a écrit:
- Petits éléments de réflexion trouvés dans Oreiller d'herbes de Sôseki :
- Citation :
Ce qui débarasse de tout ennui ce monde, où il est difficile à vivre, et projette sous vos yeux un monde de grâce, c'est la poésie, c'est la peinture. Ou encore c'est la musique et la sculpture. Pour être exact, il ne s'agit pas de porjeter sur le monde. Il suffit d'y poser son regard directement, c'est là que naît la poésie et c'est là que le chant s'élève. Même si l'idée n'est pas couchée par écrit, le son du cristal résonne dans le coeur. Même si la peinture n'est pas étalée sur la toile, l'éclat des couleurs se reflète dans le regard intérieur. Il suffit de contempler le monde où l'on vit, et de contenir avec pureté et clarté, dans l'appareil photographique de l'esprit, le monde d'ici-bas, futile et chaotique.
C'est pourquoi un poète anonyme qui n'a pas écrit un seul vers, un peintre obscur qui n'a pas peint une seule toile, sont plus heureux qu'un millionaire, qu'un prince, que toutes les célébrités du monde trivial car les premiers savent observer la vie, peuvent s'abstraire de toutes préoccupations, sont en mesure d'entrer dans le monde de la pureté, de construire l'univers unique et de balayer les contraintes de l'égoïsme. Sans naïveté excessive, je trouve que voilà une bien belle définition du poète, de l'artiste en général. Cela n'a rien de naïf Steven...Elle me convient ausi assez bien cette définition... | |
| | | elena Posteur en quête
Messages : 81 Inscription le : 28/07/2008
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Lun 10 Nov 2008 - 10:00 | |
| - mimi a écrit:
- Pas évident !
Je tente !
Tandis qu'enfin se meure une pauvre chimère Que le flux de ma peine a trouvé son reflux
ou alors pour éviter la répét de "enfin" Soudain s'emporte et meurt une triste chimère Mais il y a encore un problème de liaison, entre les vers. Je cherche !! merci mimi et sousmarin je suis au désespoir voici une communication médiumnique de Malherbe en personne !!! Il a l'air de vouloir lâcher l'affaire (alors si lui ne s'accroche pas c'est sans issue ??!!! mais bon c'est vrai que c'est dur) ! AUX OMBRES DE MOI-MÊME
Telle au printemps la fleur qu'on voudrait voir éclore, Mon oeuvre, j'en conviens, vaudrait qu'on la restaure : Mais c'est effort vers la beauté Qu'Apollon seul pourrait tenter... De mon côté souffrez que je sommeille encore.
Morphée est aujourd'hui le seul dieu que j'adore, Dans un sommeil aveugle aux faux-semblants d'aurore. Les blanches ombres de Damon Sont sans effet sur mon démon... Même leur beau discours ne franchit pas mon store.
Qu'un Parfumé parfois de ses écrits m'honore (Une ou deux fois par mois...) (ou même moins encore !) Le seul souci de m'employer A bien répondre à son courrier Peut réveiller parfois la soif qui me dévore...
Mais de mes vers parfaits croire achever la strophe !... Mes herbes, mes pavots, me font trop philosophe... Quoi qu'ait mon oeuvre de dévots Prêts à reprendre mes travaux, Je suis moi loin d'avoir de ces héros l'étoffe. Si le Maître lui même laisse tomber alors ??!!! non attends elena tu es gentille mais tu as vu le taf ? Je l'ai dit à Louis XIII : Les ouvrages communs vivent quelques années ; Ce que Malherbe écrit dure éternellement.Ok François on a compris tu es du genre modeste. Anne stp tu ne veux pas proposer le jeu à tes classes de français ? | |
| | | elena Posteur en quête
Messages : 81 Inscription le : 28/07/2008
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Lun 10 Nov 2008 - 15:06 | |
| - sousmarin a écrit:
- Un poète dont les écrits resteraient sur son bureau sans être vus par quiconque pourrait être aussi compréhensible, ou aussi talentueux, que possible, cela ne changerait rien au fait qu’il ne serait pas compris car non lu.
Ni vu ni connu Je suis le parfum Vivant et défunt Dans le vent venu Ni vu ni connu Hasard ou génie ? A peine venu La tâche est finie ! Ni lu ni compris ? Aux meilleurs esprits Que d’erreurs promises ! Ni vu ni connu, Le temps d’un sein nu Entre deux chemises ! … c’était Le Sylphe de Paul Valéry, sa lucidité le défendait de trop se prendre au sérieux, ni son art, l’éloignant en tout cas des affectations ostentatoires de la gravité humaine !!! Me viennent en mémoire les premières publications (de jeunesse) du Monsieur Teste du même Valéry… « Le véritable génie reste inconnu », « le vrai génie peut tout donc ne fait rien », « à quoi bon monter sur la scène des humains » etc. je ne cite que pour te faire sourire. Devenu célèbre, glorieux, Valéry rentrait chez lui pour écrire dans ses Cahiers : Poor M. Teste... Sa renommée croissante est née surtout, c’est vrai encore, de sollicitations extérieures. Il était intelligent et pas mal scorpion aussi, trop crûment intelligent par exemple pour voir une injustice dans la non-médiatisation de son art. En tout cas il ne serait pas mort de cultiver les fruits de son île intellectuelle pour lui seul ; il aurait accepté d’entretenir et d’étendre autarciquement ce domaine privé jusqu’à la fin naturelle de ses jours – sans que personne en garde aucun souvenir. D’ailleurs connais-tu une parole plus juste que celle-ci : La postérité c’est des cons comme nous j'adore ! (lettre de V. à A. Gide). J’ajoute moi l’équation célébrité = postérité à court terme … Et je comprends qu’un poète se soucie parfois modérément de l’opinion future ou présente (a fortiori en 2008 où tout le monde écrit peint sculpte compose fait des vers de la danse de la poterie etc.) « On croit toujours faire le chef d’œuvre, il faut toujours recommencer » (Messiaen). Exploration des brumes alentour (digression – promenade - élargissement) L’époque où l’œuvre était attachée à un nom, à un auteur, une école, était encore celle où trois potes rassemblés dans une chambre croyaient mettre la Vérité du Monde en sonata per pianoforte (schubertiades), en sonnets (symbolistes), ou révolutionner la musique pour les siècles à venir (école de Vienne), celle encore où des génies au grand front défiaient l’orage et la tempête, résumant l’Univers à eux seuls ! Grâce à moi le monde va connaître le Secret de son Essence ! (Cela m’a toujours étonnée, la croyance dans (et le cas fait par les hommes de) ces constructions cérébrales déconnectées du sol.) Nous savons nous que notre religion n’est plus la bonne, que notre terre n’est plus le centre de l’univers. Nous n’avons pas à sourire, nous n’avons nul mérite nous le savons surtout par les médias, par la télé, par le web. Mais eux, vivaient sans le savoir dans des microcosmes intellectuels autarciques – en outre dans une Europe vraiment ethnocentrique par exemple. Leurs confrères et leurs œuvres leur renvoyaient l’image rassurante de leurs propres travaux ; tous s’auto-persuadaient de leur importance. Même si le boulanger le boucher le voisin agriculteur n’avaient strictement rien à f..aire de leurs –amulettes-amusettes-jeux de rôles. (De beaux carambolages vinrent quand même des expositions universelles – les confrontations-réactions furent vives ! Berlioz à l’expo universelle de Londres vers 1850 découvrant la musique du théâtre japonais ! Debussy, à celle de 1889, le gamelang balinais… « Oups ! nous n’étions pas tout à nous tout seuls… » Misère !) Je ne dis pas ça pour déprécier l’art occidental référencé par la Grande Histoire ! Mais je me suis aperçue que beaucoup de querelles esthétiques oubliaient leur caractère purement local, et que la querelle tenait surtout à cette inconscience. Retour plus serré sur la visibilité… Il me semble aussi sousmarin que le souci d’un chemin nouveau à frayer, ou à prolonger, le souci et la difficulté d’ inventer prime dans la démarche artistique tout désir de notoriété de gloire de reconnaissance – sans forcément l'abolir bien entendu. Mais à n’envisager que comme un sous-produit, d’apparition plus qu’aléatoire Puis ceci : Compris incompris, voulant se faire comprendre, le temps passé à se promouvoir soi, à se rendre visible comme tu le dis dans ton message, est certainement perdu en grande partie pour la production artistique personnelle - mais d'un autre côté c’est vrai, la mondanité si elle ne l'épuise pas peut stimuler et pousser l'artiste au travail – échanges, ouvertures, discussions et contradictions fécondes... La question du partage de son temps entre la solitude et le commerce humain a toujours été au cœur de la vie des artistes. Par parenthèse d'autres raisons plus simples gouvernent souvent les choix... Ce type d’échange peut fausser les valeurs. La dépendance peut parfois engendrer la soumission, parfois l'orgueil, (ou l’orgueilleuse soumission), fruits l’un comme l’autre d’une impuissance à s’inscrire socialement via les chemins ordinaires. Cette impuissance se traduit dans des comportements qui vont de l’acceptation stoïque (Mallarmé…), de la misanthropie la plus obtuse (Michel-Ange Degas …) au dandysme le plus ostentatoire (commence et allonge toi-même la liste !) … Influence de la vie sur l’artiste, influence sur l’œuvre, et aussi influence en retour de son œuvre même sur l’artiste. Je peux voir autour de moi trois artistes vivants tellement éprouvés par le travail – et qui, dès leur jeunesse, avaient été vivement marqués par l’écho fait à leur travail -, qu’ils semblent de plus en plus absorbés à l’âge mûr ou dans leur vieillesse par ce que l’œuvre leur apprend ; ils accueillent avec une politesse un peu indifférente les commentaires extérieurs sans en nourrir la moindre curiosité. - - Citation :
- Suivant cette même logique, plus un poète est visible plus il obtient, par simple statistique, des lecteurs qui le comprennent et l’apprécient…cette simple déduction implique que le succès dépend beaucoup plus de la visibilité que du talent.
Qui le comprennent et l’apprécient, ou le haïssent, - les jalousies les mépris les réserves les adulations c’est la gloire ! Les piles de livres de la Fnac ? « Vu à la télé » ? Le prix France-Inter Télérama ? Je pense moi au succès que l’artiste éprouve en lui-même. Cette composition impossible, incertaine, anxieuse, qu’il parvient à conduire à bon port à travers tant d’écueils… Pis encore a contrario : « Plus un poète travaille plus il réduit ses chances d’être lu » (Valerius Paulus semper). Valéry tenait que la difficulté et la nature même des problèmes à résoudre dans la composition poétique était tel, que le public des lecteurs courants ne pouvait en avoir aucune idée. La quantité de livres lus entraînant les cerveaux à la lecture de surface volant inconsciemment de mot en mot sur l’objet écrit, quantité s’opposant à la perception profonde de l’objet rare et profondément composé. Notre cerveau est trop fait de la pâte grise des livres » a-t-il dit. L’invention des Prix littéraires était pour lui l’abomination de la désolation ! Cela dit notre temps scientifique renvoie aux vieilles lunes les sempiternelles querelles sur ces questions. Dans les Cahiers Paul Valéry 10 (octobre 2003) mon « mentor » poétique développe l’idée suivante : - Citation :
- L’appréhension poétique véritable ne souffre ni l’impatience du regard ni cette étrange lecture muette au rythme indépendant de toute respiration. Elle demande au contraire le temps, la durée, et la perception résonnante de ce qui n’est plus seulement écrit mais composé. Dans le cadre d’un théâtre d’art, elle demande ce lecteur et cet acteur singulier pour qui, plus encore que la pensée, la pesée du langage jusque dans ses phonèmes est source d’émotion.
Pour nombre d’entre nous ce réel basculement de la perception n’est pas toujours facile - ni même toujours possible. Sans doute l’habitude de la prose, l’abondance quantitative de la littérature qu’elle produit et le type de lecture qu’elle engendre n’en favorisent-ils guère l’opération. (Ajoutons qu’aussi vagues que répandues, les notions de « musique des mots » ou de « musique de l’idée » attachées à l’écriture du roman et du poème en prose ne peuvent qu’entretenir la confusion.) Mais la physiologie mentale apporte d’autres lumières sur la nature profonde de la compréhension - ou de l’incompréhension - poétique. En attribuant à des régions cérébrales distinctes, d’un côté l’intellection linéaire et la résorption signifiante du langage, et de l’autre son appréhension comme spatiale (incluant le rythme et la résonance), cette science fait dépendre de la perméabilité ou de l’étanchéité des frontières entre ces zones l’orientation du sens esthétique individuel… | |
| | | elena Posteur en quête
Messages : 81 Inscription le : 28/07/2008
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Lun 10 Nov 2008 - 15:35 | |
| - sousmarin a écrit:
- Beaucoup d’artistes visent donc cette visibilité et l’art qu’ils produisent est donc empreint de cet objectif.
La provocation est un des moyens pour être visible mais il est loin d’être le seul… sousmarin la poésie est relativement peu médiatisée, le dire est un truisme. Il y a les grands noms conservés par l’Histoire : David, Homère (je ne connais pas les Extrême-Orientaux d’il y a 25 siècles…) ! En revanche si tu ouvres « l’année poétique 1982 des poètes de la Basse-Indre » tu trouveras à peu près 18.541 noms, le même annuaire 2008 en portera le chiffre à 21.764 minimum. (D’accord je rigole mais quand même. Je ne sais s’il existe en Chine des Printemps des poètes ou des Marchés de la poésie ! Multiplie par la surface de la Chine celle de la Basse-Indre) Provocation dis-tu… Pour eau à ton submersible voici trois citations d’un même fameux provocateur : « O Salvador, tu le sais maintenant, si tu joues au génie, tu le deviens ! » « En arrivant en France j’ai regardé l’état des choses et je lui ai donné un coup de pied dans la jambe droite. » « Le clown, ce n’est pas moi, mais cette société monstrueusement cynique qui joue au jeu du sérieux pour mieux cacher sa folie. » Brumell Barbey Baudelaire que firent-ils à côté de Dali ! Et Dali à côté de Michael Jackson… (Je ne vois pas que l’on soit allé plus loin que Jackson dans l’hypnose poétique des foules…) Mille articles sont parus lors de la mort de Dali - je ne sais pas les auteurs mais j’ai ces extraits d'archives : Parmi les choses qui généralement échappent aux artistes Dali en avait compris plusieurs. Le talent (ou le génie) est une baraque foraine. Pour attirer les clients il faut avoir la langue bien pendue, bonimenter. Faire des pitreries et des cabrioles sur une estrade. Les esthètes, les avant-gardistes, l’intelligentsia occidentale faisant la loi il y a deux façons de se concilier ces personnes dont dépendent les réputations. La première est d’être aussi grave qu’elles, aussi imbu de sa dignité. Elles reconnaissent aussitôt un membre de la tribu et savent le lui montrer. Certains tempéraments refusent cette règle… Ils n’ont d’issue que la provocation, c’est-à-dire les extravagances et l’imprévu autant en pensée qu’en paroles, la sincérité brutale, le goût de la facétie, l’iconiclastie à l’égard de tout ce qui est intouchable ou, simplement, à la mode… | |
| | | elena Posteur en quête
Messages : 81 Inscription le : 28/07/2008
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Lun 10 Nov 2008 - 15:42 | |
| - sousmarin a écrit:
Concernant la langue, je ne fais que dire qu’elle est une technique humaine de communication ; l’écrivain ne l’invente pas, il se repose sur elle. comment "se repose", je ne comprends pas bien sousmarin explique-moi lance une bouée je coule
Dernière édition par elena le Lun 10 Nov 2008 - 15:50, édité 1 fois | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Lun 10 Nov 2008 - 15:45 | |
| oulalala pas simple tout ça (surtout en sortant difficilement de la sieste ). je ne suis pas sûr de suivre, je prends cette phrase pour pointer ce "ce" que je ne suis pas sûr de suivre, et qui serait "réservé" (forçont le trait) à la poésie : elle demande ce lecteur et cet acteur singulier pour qui, plus encore que la pensée, la pesée du langage jusque dans ses phonèmes est source d’émotion.pas sûr de suivre, ça veut dire que ça ne correspond pas à mes impressions/souvenirs de lecteur (qui n'y connait que couic en poésie). Il y a des "tartines" d'une précision incroyable. "musique des mots" oui, entre autres, mais pas moins qu'en poésie je pense, j'ai l'impression. | |
| | | elena Posteur en quête
Messages : 81 Inscription le : 28/07/2008
| Sujet: Re: Reflexion sur la poésie Lun 10 Nov 2008 - 16:08 | |
| - animal a écrit:
- oulalala pas simple tout ça (surtout en sortant difficilement de la sieste ).
je ne suis pas sûr de suivre, je prends cette phrase pour pointer ce "ce" que je ne suis pas sûr de suivre, et qui serait "réservé" (forçont le trait) à la poésie : elle demande ce lecteur et cet acteur singulier pour qui, plus encore que la pensée, la pesée du langage jusque dans ses phonèmes est source d’émotion. pas sûr de suivre, ça veut dire que ça ne correspond pas à mes impressions/souvenirs de lecteur (qui n'y connait que couic en poésie). Il y a des "tartines" d'une précision incroyable. "musique des mots" oui, entre autres, mais pas moins qu'en poésie je pense, j'ai l'impression. eh bien oui merci de ta réponse-observation si juste. j'ai un exemple ou une illustration qui tient en quatre mots : En découvrant à la radio une interprétation nouvelle, par une chanteuse, d'une mélodie déjà connue dans l'interprétation d'une première chanteuse, la dame qui écoutait a dit : "un peu moins inquièt"... Elle voulait dire que, selon elle, la seconde chanteuse donnait de la même oeuvre une interprétation moins tendue, plus relax..., que celle dont elle avait l'habitude. Et toi... Qu'as-tu remarqué entendu toi animal ? Le garçon qui écoutait assis en face de la dame-auditrice a bondi : " Un peu moins inquièt ! UN - peu - mOINs - IN - qui - èt ! Magnifique ! Cet hémistiche ; ces nasales... Superbe ! J'en ferai quelque chose..." Tu vois, il a non moins que pensé, pesé les phonèmes de ces quatre mots. C'est ça la différence de type d'appréhension dont parle mon poète... Le bruit des mots n'en est pas dévoré par le sens. La pesée par la pensée... Et il existe des gens imperméables à la valeur purement sonore de la langue, et des gens totalement poreux... Et mieux encore : tous les degrés toutes les échelles de sensibilité coexistent. Les neurosciences et les possibilités d'investigation de l'imagerie cérébrale rendent désuètes les querelles de goûts et de couleurs... On voit les trajets neuronaux, la "plasticité synaptique", et les styles et degrés de perception sont objectivement si différents entre les êtres qu'il est aussi idiot de s'engu...irlander sur les valeurs esthétiques que de s'en prendre à quelqu'un parce qu'il mesure 1m77 ! ps. entre les poètes aussi les différences de sensibilité phonique, phonétique, sont extrêmes | |
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