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| Au fil de nos lectures | |
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Auteur | Message |
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Marie Zen littéraire
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Mer 16 Avr 2008 - 3:14 | |
| Paris, jeudi 8 juin 1950
Mon cher vieux,
Je crains que tu n’attaches trop d’importance aux diverses critiques que je te prodigue depuis quelques temps. Il se peut que je me trompe en jugeant l’expression de ta pensée. Cela m’est déjà arrivé. Et cela m’arrivera encore. Je suis parfois étourdi…..Je vais aborder maintenant un sujet qui me tient à cœur : les rapports des mots et des idées. Ne commence pas par me dire que tu es d’accord. Je ne te demande pas ton avis, que je connais ; je te donne le mien. D’abord, chez moi,le mot a une importance capitale. J’ai appris des mots qui ont fini par devenir des idées. Les mots me plaisent par leur son, par ce que tu appellerais « la musique extérieure ». Je ne veux plus savoir les noms de ceux qui m’ont poussé dans cette voie. Parmi les contemporains du surréalisme, il y a Max Jacob en particulier. Jacob a dit à quelque chose près : « Le sens des mots a moins d’importance que le son ( l’euphonie) ». Et ceci est capital. Mais, cependant, il faut tenir compte que l’un des poètes que j’estime le plus se nomme La Fontaine et que, de ce fait, j’entends tout de même tirer de chacun de mes mots le maximum de signification, ou, si tu aimes mieux : d’ironie, de saveur ,et même de morale. Verlaine a exprimé les mêmes concepts dans ce poème que tu prises plus que les autres, me semble-t-il : « De la musique avant toute chose… » …Chez toi, ce sont les pensées, les idées déjà pensées qui créent les mots. Tu es sans doute meilleur penseur que moi ! Je pense en mots ! Et si j’étais seulement sculpteur, je ferais comme le héros du conte de Wilde, je penserais en bronze. Comprends moi : les idées ne m’émeuvent réellement qu’à travers un autre ( comme toi). Dans mon alchimie, c’est l’émerveillement de l’image obtenue qui me rend reconnaissant envers la pensée à l’instant précis où je me sens plus profond, plus réel. Mon langage est l’incantation, comme Villon. Le tien est l’aphorisme, l’axiome ou la prose philosophique. A longueur de journées, en haussant les épaules, je me dis des trucs philosophiques que je ne juge pas nécessaire d’écrire, tandis que toi, à longueur de journées, tu contes de ravissantes choses, non moins philosophiques certes mais libérées de l’ambition terrible du mot « philosophique » a priori, et que tu ne juges pas digne de figurer dans tes cartons. De cette différence de nature vient notre affectueux antagonisme. Bon, tu vas venir. Je m’expliquerai mieux lorsque tu seras en face de moi. L’important, a dit Léautaud, n’est pas de faire des chefs-d’œuvres, c’est de se donner du plaisir. Idée peu grandiose, j’en conviens, peu faite pour un Michel-Ange dont tu sembles connaître les vers traduits en français ( où les as-tu-pris ?)mais pleine de piquant et pas sotte . Je pense comme Léautaud et j’écris au jour le jour, en amateur. Bonafé appréciait beaucoup mon manque de spécialisation et cette fantaisie grave. Je ne suis rien avant la lettre, je n’ai pas de doctrine, d’idée vivant plus longtemps que les roses, et j’aime que tu diffères de moi. Récréation chaque jour, mort chaque nuit, et résurrection obligée par le souffle invisible qui fait que nous nous rencontrons à travers l’espace et le temps…
Je t’embrasse
Georges
Lettres à Toussenot Georges Brassens p179-180 | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Jeu 17 Avr 2008 - 21:31 | |
| - Citation :
- Toute une quincaille de connerie... Mais elle, c'était pas du même... elle gardait tout son répondant, elle tenait toute sa musique... Même dans la débine infecte... pour un rien qu'on la caresse elle se remétait en émoi... C'était comme un truc déglingué, le piano du vrai malheur qu'aurait plus que des notes atroces...
Mort à crédit, Céline p 212 - Citation :
- On discernait bien les navires, de cet endroit-là, les venues, les rencontres du port... C'était comme un vrai jeu magique... sur l'eau à remuer tous les reflets... tous les hublots qui passent, qui viennent, qui scintillent encore... Le chemin de fer qui brûle, qui tremblote, qui incendie par le travers les arches minuscules... Nora, elle jouait toujours son piano en nous attendant... Elle laissait la fenêtre ouverte... On l'entendait bien de notre cachette... Elle chantait même un petit peu... à mi-voix... Elle s'accompagnait... Elle chantait pas fort du tout... C'était comme un murmure... une petite romance... Je me souviens encore de l'air... J'ai jamais su les paroles... La voix s'élevait tout doucement, elle ondoyait dans la vallée... Elle revenait sur nous... L'atmosphère au-dessus du fleuve. Ca résonne, ça amplifie... C'était comme de l'oiseau sa voix, ça battait des ailes, c'était partout dans la nuit, des petits échos...
Mort à crédit, Céline p 268 | |
| | | Marie Zen littéraire
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Ven 18 Avr 2008 - 21:00 | |
| Pour Bix, l'ami des oiseaux!
C'est alors qu'un moqueur nous survole, va se poser sur la cime d'un chêne en contrebas et commence un récital pour tout le coteau. Il est en total désaccord avec la très avisée grive musicienne, qui interprète deux fois chacune de ses phrases. Lui a la sainte frousse des redites, et il chante si fort et de façon si soutenue et il bondit de temps à autre en l'air avec une si périlleuse gaieté que nous finissons par nous taire pour l'écouter, tout en échangeant force regards et sourires.
Durant un instant, j'ai la vision très nette du tableau que nous composons, paisiblement installés sur la terrasse dans l'après-midi parcouru de chants d'oiseaux, alors que le vent est complètement tombé et le feuillage immobile, avec la brume qui monte, améthyste, lavande et violette, dans les replis des collines, et le soleil qui joue sur les briques comme s'il nous était envoyé de là-haut dans le seul but d'apaiser nos souffrances de mortels. Je lis sur le visage de Marian Catlin qu'elle est habitée de la même perception. C'est ainsi qu'elle ressent tout ce qui fait sa vie: avidement. Une sensibilité aussi écorchée n'est pas loin de constituer une infirmité...
La vie obstinée Wallace Stegner p75-76 | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: au fil de nos lectures Ven 18 Avr 2008 - 21:28 | |
| L' "ami des oiseaux" est sensible à l'oiseau moqueur et à Wallace Stegner qui est un de ses auteurs favorits. Mais l'ami des oiseau est aussi fatigué qu'Animal... | |
| | | Isidore Ducasse Envolée postale
Messages : 166 Inscription le : 17/08/2007 Age : 34
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Sam 19 Avr 2008 - 17:48 | |
| "J'ai trouvé en te rencontrant un sens à mon néant." Violette Leduc L'éternelle triste | |
| | | monilet Sage de la littérature
Messages : 2658 Inscription le : 11/02/2007 Age : 75 Localisation : Essonne- France
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Mar 22 Avr 2008 - 9:38 | |
| (Une soirée se termine)
- Bon, alors à demain. - Bonne nuit, José.
Tandis que Madeleine vide les cendriers pleins de rêves, Gabriel ouvre la fenêtre. L'âme de la soirée s'échappe en volutes et se dissout dans le rectangle de velours noir qu'une bruine très fine vaporise. Madeleine le rejoint...
Pascal Garnier : La théorie du panda | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Ven 25 Avr 2008 - 21:10 | |
| Tu sais, je suis revenu à Lisbonne, dans cette ganterie de la rue des Carmes qui est un jeu de miroirs et de marbre, une incursion viennoise dans une ville atlantique. Chez Luvas, tu avais choisi des gants de cuir rose. Le vendeur y avait versé du talc comme s'il répandait du sable. Tu n'as jamais aimé tes mains. Tu n'auras mis une seule fois les gants effilés, de cuir rose, que je t'avais offerts au Portugal.
Olivier Frébourg Souviens-toi de Lisbonne | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Sam 26 Avr 2008 - 22:07 | |
| - Citation :
- C'était un soir de juillet, à cette heure après chien et loup où la sueur s'évapore sur la peau et où toute la poussière du jour achève de retomber comme les cendres d'un incendie perdu; un assez vaste ciel s'étendait au-dessus du jardin, qui n'était qu'un petit enclos d'arbres grillés et d'herbe malade, mais qui faisait tout de même éprouver au coeur des collines de pierre de Paris le même genre de plaisir qu'une prairie.
Dans les appartements de la rue Claude-Bernard, que Laforgue et ses amis épiaient parfois pendant des heures comme s'ils avaient abrité des secrets importants, les gens commençaient à se préparer à la nuit; on voyait vaguement passer devant une lampe une épaule ou un bras nu : des femmes se déshabillaient, mais elles étaient trop loin pour qu'on pût distinguer si elles étaient belles; elles ne l'étaient pas. C'était plutôt des dames entre deux âges qui enlevaient des corsets, des ceintures et des gaines comme des pièces d'armures; les plus jeunes habitantes de ces maisons, celles dont les chansons jaillissaient parfois du fond d'une cuisine, couchaient sous les combles : on ne les voyait pas. Des airs de musique, des discours, des leçons, des réclames sortaient de la gueule des hauts parleurs dans un rabâchage confus; de temps en temps, un autobus grinçait à l'arrêt de la rue des Feuillantines; il y avait pourtant des moments où une espèce de grand silence marin déferlait paresseusement sur les récifs de la ville. La conspiration, Paul Nizan p11 (la première quoi) | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: au fil de nos lectures Dim 27 Avr 2008 - 18:51 | |
| "Je l'entendais murmurer tout en caressant les feuilles. Aucun doute, il était en train de parler à la plante. ce qu'il disait était inaudible, et puis les arbres, ma foi, n'ont pas d'oreilles. Celui-là n'entendait pas plus que moi. Comme pour corriger ma façon de penser, il a affirmé sur un ton parfaitement serein, que les arbres étaient pourvus de sens. "Approche la main, touche ces feuilles" a-t'il ajouté. J'étais perplexe, mais puisqu'il passait le plus clair de son temps avec les plantes, il devait savoir de quoi il parlait, je lui ai obéi. Mes doigts sur la feuille, n'ont rien senti d'autre que la fraicheur nocturne... "Comment faire, lui ai-je demandé". "Il faut que cela vienne du fond de ton coeur... La surface de la plante perçoit grace à ta main ce qu'il y a dans ton coeur." Lee Seung-U. - La vie révée des plantes.
Dernière édition par bix229 le Dim 27 Avr 2008 - 19:46, édité 2 fois | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| | | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Dim 27 Avr 2008 - 21:42 | |
| - coline a écrit:
- Dès que j'ai lu la première ligne j'ai reconnu le livre...
Moi j'ai au moins autant aimé ce livre que toi.. mais là.. non.. bien qu'il faut dire - après que j'ai vu l'auteur cela m'a donné un bon souvenir | |
| | | Marie Zen littéraire
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Dim 27 Avr 2008 - 23:38 | |
| Les jarres, le Catalan et sa petite fille … Madoura comptait des potiers renommés, c’était donc normal qu’on s’adressât à eux, quand on voulait s’essayer à la céramique, mais Picasso était parait-il furibard, apprenant que mon père voulait y travailler. Vallauris était son fief. Matisse, c’était Nice, Cimiez exactement, avant qu’il n’empiète sur la ville de Vence avec sa chapelle, une toute autre histoire. Léger, c’était Biot où allait plus tard s’ouvrir son musée, un gros bloc de béton, une sorte de rectangle couché sur le flanc, une grosse boîte à chaussures allongée sur la tranche. Cocteau avait lui sa chapelle sur le port de Villefranche, une toute petite chapelle finement décorée et que les habitants trouvaient très jolie, c’est rarement le cas des chapelles d’artists. Picasso était partout, d’Antibes à Vallauris en passant par Cannes, mais papa n’a sûrement pas choisi Madoura pour faire la nique à l’autre, les deux hommes s’estimaient et mon père, quelques jours après ma naissance, lui avait envoyé une photo de moi. Françoise Gillot écrit dans sa biographie qu’il l'avait épinglée au mur de son studio, si je n’ai aucun Picasso à mes murs, j’aurais été au moins au mur de Picasso. Les deux hommes s’estimaient mais une sorte de jeu s’était peu à peu installé entre eux ce qui donnait des phrases un peu comme ceci : « Aimez vous Picasso ? demanda un jour une jeune journaliste à Papa. - Si Picasso m’aime, moi je l’aime aussi », répondit mon père. Une petite fille passait et repassait sans cesse devant l’atelier où « on » travaillait, peut être était-ce Paloma, qui sait, mais papa m’a demandé d’en faire autant chez lui : « Dis-moi ce qu’il fabrique », ou « Quelle terre emploie-t-il ». La petite fille et moi étions des espions à la solde de deux des plus grands créateurs de ce siècle, deux caractères si forts ne pouvaient que s’affronter et ça faisait de bien belles étincelles. Cette « rivalité » avait dû commencer avant la Première Guerre, au temps d’Apollinaire, peut être de Blaise Cendrars, qui naviguaient de la Ruche au Bateau-Lavoir, rive gauche contre rive droite, le clivage a toujours existé, tout comme ces jalousies d’amitié qu’on rencontre plus souvent à l’école, mais les artistes aiment garder un pied dans l’enfance…
Quelques pas dans les pas d'un ange David Mc Neil p 40-41 | |
| | | animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
| Sujet: Re: Au fil de nos lectures Mar 29 Avr 2008 - 22:27 | |
| - Citation :
- Le printemps allait arriver. On venait de traverser des mois sévères, mais les glaces fondaient, l'hiver mourait dans les averses; on avait envie de se lever tôt, les jours allongeaient comme ces plantes qu'on voit grandir, se déplier en tremblant sur l'écran des cinémas. Rue de la Paix, les midinettes sortaient en bandes et traversaient la place Vendôme et la rue de Rivoli en se donnant le bras. De temps en temps, il faisait beau, comme si des journées d'été, d'automne ou du dernier printemps qui, étouffées par la pluie, par un orage, n'avaient pas fait leur apparition des mois plus tôt, versaient leur chaleur sur des mains encore engourdies, des lèvres encore gercées. Il y avait encore des gelées blanches sur les pelouses du Luxembourg, mais entre deux giboulées, on retrouvait le ciel.
La conspiration, Paul Nizan p 65-66 | |
| | | soliman Envolée postale
Messages : 124 Inscription le : 17/02/2008 Age : 56
| Sujet: I have a dream Mar 29 Avr 2008 - 22:40 | |
| "Mes jeunes ne travailleront jamais, les hommes qui travaillent ne peuvent rêver; et la sagesse nous vient des rêves"
Smohalia membre de la tribu des Nez Percés (Etat de washington-1850).
Pieds nus sur la terre sacrée.
Textes rassemblés par TC McLulan DENOEL | |
| | | bix229 Parfum livresque
Messages : 24639 Inscription le : 24/11/2007 Localisation : Lauragais (France)
| Sujet: au fil de nos lectures Mar 29 Avr 2008 - 22:56 | |
| Pieds nus sur la terre sacrée... Superbe livre pour les paroles d'indiens -d'Amérique du Nord- et pour les photos de Curtis. Indispensable pour ceux qui aiment les paroles authentiques et les photos les photos géniales... | |
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