Wes Anderson

Moonrise Kingdom



Ce film est agaçant parce qu'à la fois brillant et parfois génial mais aussi le plus souvent insupportable par son soucis d'hypercontrôle (cette symétrie et ces travellings kubrickiens systématiques) et son artifice de maison de poupée ou de playmobils qui tend vers une stylisation de l'image jusqu'à l'écoeurement. Une volonté de décalage vaguement surréaliste, poétisant ou cartoonesque qui peut vite lasser et maintenir à distance. Il n'y a pas de véritable respiration et ces personnages n'existent pas. Ce sont des pantins fonctionnels et illustratifs...

Mais c'est malgré tout dans cette recherche illustrative qu'il se passe quelque chose d'intéressant. Car le film ouvre sur des plans qui montrent clairement une maison de poupée qui s'anime. Des enfants qui écoutent le très éducatif (et formidable) "The Young Person's Guide to the Orchestra" de Britten comme ils écouteront des extraits de son opéra L'arche de Noé (Noye's fludde). De fait l'histoire qui se développe ensuite est une sorte de relecture enfantine et libre de ces différentes citations de Britten. Comme si ces enfants s'appropriaient ce qu'ils écoutent en donnant vie à ces personnages et cette musique. Moonrise Kingdom est finalement lui-même un opéra pour enfants qui cherche la dimension de la fable et du mythe. Dans l'arche de Noé de Britten il est d'ailleurs question de déluge et d'éclairs dans la tempête... Tout le film cite les différents extraits musicaux dans sa narration et dans son architecture même. La musique ponctuelle de Desplat étant par ailleurs une variation ou un pastiche de certains autres morceaux. Il y aura également des citations du carnaval des animaux de Saint-Saëns.

Donc à l'arrivée le film m'a passionné par sa recherche et son habileté à revisiter l'oeuvre de Britten, son inventivité et sa démesure dans une ascension franchement prenante dans le dernier quart d'heure. Je suis moins touché par les moments plus élégiaques ou amoureux sur l'île malgré quelques jolies métaphores (l'hameçon dans l'oreille comme équivalent du dépuçelage par exemple) et je suis surtout exaspéré et même souvent ennuyé par l'artifice de l'ensemble qui devient parfois indigeste. Je me suis de temps en temps assoupi.

Ce type est probablement génial mais enfermé dans un univers qui ne respire pas et qui ne me touche pas beaucoup.



Un extrait du génial Young person's guide to the orchestra qu'on entend vers la fin:

Pour info et pour voir tout ce que Moonrise Kingdom doit à Noye's fludde de Britten:

Grand Budapest Hotel : l'hommage de Wes Anderson à Stefan Zweig

Citation :

« Les Européens sont étonnés que nous ne connaissions pas plus cet écrivain. Le Grand Budapest Hotel n'est pas tiré d'une de ses histoires, mais il y a une certaine atmosphère, un univers et mon intention était de proposer notre propre version d'une histoire de Zweig »

source et suite




et cette B.O. donne furieusement envie de le voir  

Je l'attends avec impatience !   

Idem qu'Arabella ! Normalement, je vais le voir dès demain après-midi.   

The Grand Budapest Hotel

Un beau film, avec du rythme, des scènes épiques (même aux jeux olympiques de Sotchi, on a pas vu mieux)
Et toujours cette image léchée et ces étiquettes vintage un peu partout.
Et puis une histoire, une vraie cette fois ci, même si elle est un peu rocambolesque, c'est plus intéressant que ce que j'ai vu de lui jusqu'à présent.

Et les lieux sont splendides, très Europe orientale belle époque, de la neige, des pics, des téléphériques ou funiculaires suspendus dans le vide à vous glacer de terreur, mais tout le monde les prend avec une placidité surprenante.

Un super moment pour les mirettes.

darkanny a écrit:

Un super moment pour les mirettes.

tu me donnes encore plus envie de le voir!!

darkanny a écrit:

The Grand Budapest Hotel

Un beau film, avec du rythme, des scènes épiques (même aux jeux olympiques de Sotchi, on a pas vu mieux)
Et toujours cette image léchée et ces étiquettes vintage un peu partout.
Et puis une histoire, une vraie cette fois ci, même si elle est un peu rocambolesque, c'est plus intéressant que ce que j'ai vu de lui jusqu'à présent.

Et les lieux sont splendides, très Europe orientale belle époque, de la neige, des pics, des téléphériques ou funiculaires suspendus dans le vide à vous glacer de terreur, mais tout le monde les prend avec une placidité surprenante.

Un super moment pour les mirettes.

Je ne peux que "plussoyer" ce commentaire !

Auparavant, je n'avais vu que Moonrise Kingdom de ce réalisateur. Film plutôt sympathique, mignon même sous certains aspects mais qui me laissait comme un goût d'inachevé. Je ressentais comme une rupture dans le rythme, en plein milieu du film, donnant ensuite l'impression que le scénario tournait en rond.

Or, avec The Grand Budapest hotel, pas du tout ! Tout est bon dedans, le rythme qui est au top du début jusqu'à la fin sans aucun relâchement, l'esthétique (les décors, les costumes, les paysages...vraiment tout est beau, chose qui m'avait déjà frappée dans son précédent film), l'ambiance de l'Europe centrale de la première moitié du XXe siècle est très bien retranscrite, et l'humour est bien dosé.

Bref, je le conseille vraiment.   

Comme Darkanny.
Un rayon de soleil sans prise de tête.
Plein de stars qui se prêtent au jeu.

Idem.  J'avais peur au début d'être trop à distance de cette nouvelle maison de poupée de Wes Anderson et pourtant j'ai bien aimé jouer avec lui et ses mouvements de caméra symétriques. La musique d'Alexandre Desplat, qui crée plein de variations autour d'un même thème,  est extra! Elle crée une dynamique et une cohésion qui touchent au perfectionnisme le plus obsessionnel avec jubilation. Humour constant, décors parfaits (un peu "Shining"), côté cartoonesque moins speed ou déréalisé que d'habitude. C'est un spectacle étonnant.

P.S. Je n'arrive pas à me souvenir de quel thème de musique classique s'inspire Desplat ici... On dirait du Saint Saëns mais je ne suis pas sûr. Wes Anderson aime bien dans ses films faire plein de citations visuelles et musicales tout en créant un univers totalement personnel et reconnaissable entre mille. Il y a du génie chez ce type c'est évident.

Re-P.S.  Il me faut ces religieuses roses de chez Mendls !!  

The Grand Budapest Hotel

J'ai aimé la permanence d'une sensation de tristesse contenue, reflet d'une méditation sur un temps révolu. Wes Anderson saisit cette ambiance tout en multipliant les rebondissements, les répétitions et conserve l'équilibre fragile d'un univers replié sur lui-même. Cet hôtel isolé devient une forme de montagne magique, incarnant une illusion, une ivresse qui ne peut pourtant échapper aux tourments historiques.
Les détours d'une intrigue à tiroirs, l'ampleur d'une galerie de personnages impressionnent sans lasser, même si la mise en scène frôle parfois l'excès dans sa générosité et son enthousiasme. Les dérapages sont pourtant toujours contrôlés et The Grand Budapest Hotel fascine par sa légèreté et le plaisir d'un jeu sans cesse renouvelé, jusqu'à l'impasse d'une rupture.
Comme Marko, les variations virevoltantes de Desplat m'ont emporté et participent à la réinvention d'une "Mitteleuropa" telle une magnifique illusion.

Il y a un peu la même démarche musicale, presque opératique, chorégraphiée, chez Paul Thomas Anderson (surtout dans Punch Drunk Love). On sent que chez Wes Anderson cette adéquation entre musique et image est vital, l'enjeu essentiel.

Bon.
Je vais faire mon deuil de ce réalisateur.


The Grand Hotel Budapest.
-

J'ai dormi une bonne demie heure.
Ensuite j'ai regardé la suite des évènements avec au début, parfois un rire, et au fur à mesure, quelques sourires (de plus en plus tenus).


Je ne sais pas vraiment pourquoi la sauce ne prend pas entre les films de Wes Anderson. Je vois toute la qualité de ses films : énergiques, pétillants, drôles, humains, foufous, avec du suspens... une chouette ribambelle de d'acteurs qui, vraisemblablement, s'amusent... mais rien n'y fait. Je m'ennuie.

Quelque chose d'uniforme sur la longueur, une sorte de ronron de rebondissements et d'images. Ça se veut tout plein de péripéties mais le rythme me semble toujours planplan. Ça se veut être un univers particulier et foutraque, pour au final me sembler assez uniforme dans les structures, et trop calibré pour être assez fou.

Film trop maîtrisé, pour moi. Trop glacé. Trop rigide.
Chais pas.

J'ai vraiment aimé ! Les deux précédents films que j'avais vu de lui m'avaient également plu. "La vie aquatique", par son côté loufoque et drôle qui côtoie également langueur et mélancolie - on me l'a d'ailleurs offert. "Fantastic Mr. Fox", film d'animation vraiment original. Mais je ne savais pas qu'ils étaient de lui. Et finalement, dans "Grand Budapest Hotel", on y retrouve sa "patte".

Toujours ce côté loufoque et drôle, mais on y trouve en plus un coté burlesque qui n'existe plus dans les films actuels, avec des effets très visuels et ,je pense, un hommage à d'autres réalisateurs, notamment Lubitsch.
Pas vraiment d'histoire, ou si mince, mais on s'en moque, chaque personnage est soit travaillé en profondeur, soit caricaturé à l'extrême (le personnage de Defoe, excellent   ). On y ressort comme dans un rêve-cauchemar. C'est quand même également l'évolution du pangermanisme des années trente, mais dans un paradis perdu.

J'aurais bien sûr pu laisser le commentaire d'Avodaro, qui y dit tout.

Avadoro a écrit:

J'ai aimé la permanence d'une sensation de tristesse contenue, reflet d'une méditation sur un temps révolu. Wes Anderson saisit cette ambiance tout en multipliant les rebondissements, les répétitions et conserve l'équilibre fragile d'un univers replié sur lui-même. Cet hôtel isolé devient une forme de montagne magique, incarnant une illusion, une ivresse qui ne peut pourtant échapper aux tourments historiques.
Les détours d'une intrigue à tiroirs, l'ampleur d'une galerie de personnages impressionnent sans lasser, même si la mise en scène frôle parfois l'excès dans sa générosité et son enthousiasme. Les dérapages sont pourtant toujours contrôlés et The Grand Budapest Hotel fascine par sa légèreté et le plaisir d'un jeu sans cesse renouvelé, jusqu'à l'impasse d'une rupture.
Comme Marko, les variations virevoltantes de Desplat m'ont emporté et participent à la réinvention d'une "Mitteleuropa" telle une magnifique illusion.

Et bien sûr, l'inspiration à Zweig, qu'il indique explicitement dans le film. Pour moi, ce n'était que par rapport à la narration dans la narration et l'évocation de la montée du nazisme. Mais un collègue a trouvé un rapport bien plus ténu dans le dialogue de la scène où ils se font arrêter pour la deuxième fois dans le train. Mais je ne me rappelle plus ce que c'est...

(Queenie, comment tu fais les ç cédille en minuscule ?)

Exini a écrit:

(Queenie, comment tu fais les ç cédille en minuscule ?)

(en majuscule tu veux dire, je suppose : maintiens alt et compose 0199)