Souvenir, souvenirs

Moi, j' y ai beaucoup pensé en lisant Istanbul de Orhan Pamuk !

Soler, Pamuk et voilà le travail de forumer !

Enfant, j' entendais souvent les vieilles personnes parler de concession
à perpétuité...
J' avais vaguement l' idée qu' il s'agissait d' une possession, une propriété...

J' ai réalisé bien plus tard ce dont il était question...
En clair, ils avaient acheté ou souhaitaient acheter un coin de terre au cimetière pour une durée indeterminée.
Et cette pensée semblait les rassurer.
Quand on sait ce qu' il faut de terre à l' homme après sa mort, on voit bien
qu' il s' agit d' une préoccupaion de vivant !

La mémoire est une chose terrible, pensait Jean. Jouissance et souffrance à la fois, une substance qui a sa vie propre, qui se développe et se rétracte, sans qu’on puisse rien faire pour la diriger.

J.M.G. Le Clézio dans Révolutions

Photos de famille

C'est chez moi qu'a échoué la boîte des photos familiales après avoir longtemps séjourné dans l'armoire de mes grands-parents...
Après être passée et s'être remplie encore dans les tiroirs de mes parents...
Maman est morte, trop jeune, et je serai bientôt plus vieille qu'elle n'apparaît sur les photos...
A la mort de Papa, j'ai eu envie de prendre ces souvenirs si doux... si douloureux avec le temps à raviver...
J'ai rassemblé ceux qui m'étaient proches...Il fallait faire des choix parmi les nombreuses images que j'ai triées et redistribuées à chacun en fonction de l'intérêt qu'elles pouvaient présenter.
A partir des miennes,j'ai essayé de retrouver un peu de mon histoire...
Miracle de l'informatique qui agrandit les minuscules photos d'antan, ramenant les souvenirs au bord des mots...
J'ai scruté les visages, cherché les ressemblances...
J'ai fixé les regards et les lèvres pour savoir s'ils disaient le bonheur...
Je crois qu'ils le disaient, en tout cas j'ai voulu le croire...
Parfois le bonheur s'est teinté de nostalgie...
Parfois la nostalgie s'est teintée de bonheur.
Voilà, c'est fait...

coline a écrit:

Photos de famille

C'est chez moi qu'a échoué la boîte des photos familiales après avoir longtemps séjourné dans l'armoire de mes grands-parents...

c'est très beau ce que tu en dis..

dans notre famille, la boîte des photos est arrivée chez ma sœur.. et on s'est réuni un dimanche après-midi chez elle pour les visionner et décider lesquelles on voudrait garder.. partager.. et surtout ma mère était là pour nous dire tous les noms des personnes qu'on ne connaissait pas (plus)..
bonjour la nostalgie

Une chance Coline, quand les souvenirs se transforment en nostalgie et non en douleur ou en regrets...

Je me souviens des automnes de l' enfance à la campagne...

La lumière aquatique, le silence comme suspendu et seulement rompu par des bruits assourdis
et non localisables de voix, comme des appels incertains...

Les arbres jaunissants... Les feuilles ratissées, mises en tas et brulées.
La fumée qui monte doucement, et s' incline selon les variations du vent.

L' odeur de ces feux... et puis les pommes de terre qu' on faisait cuire dans les braises...
Et qu' on mangeait chaudes encore avec du beure

Automne, saison des souvenirs et des adieux...

Je me souviens qu' à Toulouse, une gitane en vetements colorés, m' a poursuivi et s' est finalement emparé de ma main pour y lire les lignes.
Elle allait dit-elle, m' apprendre des choses surprenantes..
J' ai horreur de ce genre de pratique et j' ai fini par me libérer, mais en me lachant, la gitane m' a dit quelques phrases qui m' ont secoué...
Je ne crois ni dans la chiromancie ni dans la voyance, et pourtant, j' ai été vraiment troublé...
Elle avait sans le savoir touché un point sensible et que je croyais bien caché...
Ce jour-là je me suis senti transparent...

Souvenirs, souvenir, que me veux-tu ? L’automne
Faisait voler la grive à travers l’air atone,
Et le soleil dardait un rayon monotone
Sur le bois jaunissant où la bise détone.

Nous étions seul à seul et marchions en rêvant,
Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
Soudain, tournant vers moi son regard émouvant :
« Quel fut ton plus beau jour ? » fit sa voix d’or vivant,

Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.
Un sourire discret lui donna la réplique,
Et je baisai sa main blanche, dévotement.

-Ah ! Les premières fleurs, qu’elles sont parfumées !
Et qu’il bruit avec un murmure charmant
Le premier oui qui sort de lèvres bien-aimées.
Verlaine.
Poèmes saturniens.

J’évoque ce sonnet aux émotions fines et délicates qui caractérisent les poèmes de Verlaine, car je pense que les souvenirs d’amour restent les plus tendres, les plus beaux, les plus touchants en notre cœur. Bien sur ils ne sont pas les seuls à compter parmi tant d’autres ; mais ils ont quelque chose (dont je ne trouve le nom pour le qualifier) qui leur ait spécial, distinct...

souvenirs très poëtiques Coline et Bix.

Pour le moment je ne vais pas chercher les souvenirs, ceux récents m'imprègnent encore.
Une belle cascade coule en mon coeur, Caline et Féline les deux juments viennent à moi quêter un bout de pain.
Les sapins étendent sur le lac leur ombre sombre et agitée tandis que le soleil s'infiltre dans leurs ramilles et y dépose des tâches douces.

à tantôt

Comme pas mal d' enfants à la campagne, j' ai eu des animaux à moi et
je les ai perdus rapidement.
Un instit qui m' aimait bien et qui habitait dans le meme quartier que moi,
m' avait offert une tortue grecque.
J' observais avec beaucoup d' attention cette étrange bestiole qui se
promenait à l' intérieur de sa demeure.
Et rétractait sa tete de vieillard édenté, chauve et irascible...
Il n' empeche que malgré sa lenteur et ma vigilance, elle s' est évadée
au bout de quelques jours dans un carré de laitues...

Plus tard, j' ai recueilli, je ne sais plus comment, une corneille aux ailes
taillées au ciseau.
A l' époque, les gens avaient des pies ou des corneilles apprivoisées
auxquelles on taillait les ailes pour ne pas qu' elles s' envolent.
Cette corneille-là était sauvage et je craignais que dans son état,
elle soit tuée par un chat.
Je la mis dans clapier vide et j' entrepris de l' apprivoiser. Mais elle restait
sauvage et effrayée.
Elle avait probablement des mauvais souvenirs de mauvais traitement...
et elle mourut elle-aussi comme le poisson rouge.
Je l' apelais Bozo, comme le titre d' une chanson de Félix Leclerc ...

Je me suis rendu compte depuis qu' il ne suffit pas d' aimer les animaux
avec qui on cohabite.
Il faut aussi apprendre à les connaitre, à les soigner, à les respecter.
Se sentir responsable d' eux.
Ce n' est pas très difficile, plus on s' attache à eux, plus on devient curieux.
On s' apperçoit alors qu' eux aussi nous observent avec curiosité.
Mais plus on s' attache à eux, plus on les considère comme des compagnons et plus on les regrette quand ils nous quittent.

Je me souviens que quand j’étais petite, j’enterrais les jouets qui me semblaient vieux, pour pouvoir m’amuser avec les nouveaux. Alors que je pouvais jeter ça à la poubelle, je préférais leur creuser un endroit sous la terre, ensuite je les oubliais à tout jamais. Parfois je mettais une pierre distincte, ou une pièce de bois pour pouvoir me rappeler de l’endroit ; mais après quelques temps je ne me souvenais plus quel était l’objet que j’avais mis, et toutes les pierres, ou les pièces de bois me semblaient pareils.

Aujourd’hui j’ai encore cette manie, de ne pas pouvoir garder pour longtemps un objet. Mais bon ! Je n’enterre plus ; je m’en débarrasse. A chaque fois que je sens que j’ai un peu changé (comme si j’avançais d’une case à l’autre) ; je rassemble les papiers, les cahiers, les blocs notes, et les petits outils anciens et je les jettent. Ils m'apparaissent comme un fardeau qui m’encombre, qui m’empêche d’aller à l’avant ; de changer d’idées…

Tu n' a jamais enterré d' animaux, Moinonplus ?

Moi oui... j' ai meme un petit cimetière recouvert de fleurs et de romarin.
Quelques oiseaux, deux hérissons, une couleuvre...
J' arrose les fleurs et j' ai une pensée légère pour eux...

bix229 a écrit:

Mais plus on s' attache à eux, plus on les considère comme des compagnons et plus on les regrette quand ils nous quittent.

Ouais, c'est bien pour ça que j'en ai été privée jusqu'à ce que je grandisse un peu dans ma tête.
J'étais du genre à ne plus manger pendant une semaine à la mort de chaque animal.

bix229 a écrit:

Tu n' a jamais enterré d' animaux, Moinonplus ?

Moi oui... j' ai meme un petit cimetière recouvert de fleurs et de romarin.
Quelques oiseaux, deux hérissons, une couleuvre...
J' arrose les fleurs et j' ai une pensée légère pour eux...

Et bien je trouve ça très beau ! C’est aussi un peu émouvant…

J’ai enterré ma tortue, mes oiseaux, mon petit chat… et depuis l’âge de seize ans j’avais décidé de ne plus chercher à élever d’animaux. Car malgré tous mes soins je les avais perdus, et j’avais ressenti un grand accablement.
Je ne pourrai plus enterrer un autre animal. Je me sens coupable de leur mort, même si ce n’est pas vraiment le cas…