| Parfum de livres… parfum d’ailleurs Littérature, forum littéraire : passion, imaginaire, partage et liberté. Ce forum livre l’émotion littéraire. Parlez d’écrivains, du plaisir livres, de littérature : romans, poèmes…ou d’arts… |
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| Emmanuelle Pagano | |
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+8églantine shéhérazade coline Marko kenavo Maryvonne Bédoulène Eve Lyne 12 participants | |
Auteur | Message |
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Eve Lyne Sage de la littérature
Messages : 1936 Inscription le : 08/08/2008
| Sujet: Emmanuelle Pagano Ven 29 Mai 2009 - 13:04 | |
| Emmanuelle PAGANO Elle est née à Rodez en 1969. Elle a fait des études en esthétique du cinéma et de l'audiovisuel. Sa thèse inachevée sur le cinéma 'cicatriciel' domine cependant sa création littéraire. Elle est professeur agrégée d'arts plastiques. Bibliographie2002 Pour être chez moi (pseudo Emma Shaak), 2004 Pas devant les gens, 2005 Le tiroir à cheveux, 2007 Les adolescents troglodytes, 2008 Les mains gamines, 2008 Le Guide automatique, nouvelle, 2008 Toucher terre, à propos de Jacques Dupin, 2010 L'Absence d'oiseaux d'eau, 2011 La Décommande, nouvelle, 2012 Un renard à mains nues, recueil de nouvelles, 2013 Le Travail de mourir, nouvelle, photographies de Claude Rouyer, 2013 Nouons-nous, | |
| | | Eve Lyne Sage de la littérature
Messages : 1936 Inscription le : 08/08/2008
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Ven 29 Mai 2009 - 13:12 | |
| LES MAINS GAMINES.Le titre évoque la candeur de l’enfance, des mains vraisemblablement innocentes. Et pourtant, elles sont à l’origine d’un drame. Tous les garçons de CM2, sauf un, ont violé une camarade hippie. Tous se sont rendus coupables de cet acte ignoble qui a duré une année scolaire, tous sauf un. Les personnes qui ont assisté ou été informées et qui auraient pu et dû les dénoncer se sont tues. Trente ans plus tard, cette fillette devenue adulte travaille comme domestique chez l’un d’entre eux. Elle est leur souvenir à tous. L’auteur nous fait découvrir cette histoire dans un roman polyphonique à quatre voix. La première voix est celle de l’épouse du grand propriétaire qui a pour domestique cette ex-fillette violée. Elle nous fait accéder au carnet dans lequel la domestique se confie, parlant surtout et avant tout de cette infibulation qui aurait pu tout empêcher et regrettant de ne pas l’avoir subie. La seconde voix est celle de la mère de l’enfant qui n’a pas voulu participer au viol. Elle nous parle de ce silence trop lourd à porter et de l’oubli impossible. Elle nous dit aussi pourquoi Claude n’a pas voulu participer et comment il a subi les quolibets des autres. La troisième voix est celle de l’institutrice placée en maison de retraite. Elle ne voulait pas intervenir car c’était sa dernière année. C’est elle qui met des mots sur les faits de l’époque. Enfin, la dernière voix est celle d’une fillette de dix ans, nièce de Claude, lequel s’est confié pour la prévenir de tout danger éventuel. A-t-elle rêvé l’infibulation ? Les quatre voix de ce roman sont en souffrance. L’épouse du propriétaire a une bête dans l’oreille qui tarde à en ressortir. La mère de Claude entend un loir dans le grenier qui réveille des souvenirs douloureux. L’institutrice, très âgée, soufre de la surdité des vieux. Quant à la fillette, elle est sur le point d’être pubère. Un thème très dur traité dans un style pudique. Les choses nous sont dévoilées petit à petit et la fin, même si elle est rêvée par une enfant, apparaît comme une réparation. Ce roman court se lit d’une traite, en raison du suspens narratif et du style souvent poétique malgré un thème violent. Il n’y a aucun pathos ni mièvrerie. Toute l’histoire se réfère aux blessures du corps, passées ou actuelles. La construction est soignée. La bête dans l’oreille (otalgie) marque le début de la narration. Elle n’en sortira qu’à la fin du roman.. Ce passage explique le titre. Je le mets en spoiler pour maintenir le suspens du roman.- Spoiler:
Ce n’étaient pas des sexes, ça elle en est sûre, et d’ailleurs, est-ce qu’ils en auraient été capables, à dix ans, de se débrouiller avec, est-ce qu’ils auraient été cap’, elle se souvient de cette locution magique, « être cap’, » Toi, t’es pas cap’.Moi je suis cap’. Est-ce qu’ils n’auraient pas eu honte, avec leur sexe maigrichon. Non, c’étaient des mains.
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| | | Bédoulène Abeille bibliophile
Messages : 17270 Inscription le : 06/07/2007 Age : 79 Localisation : Provence
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Ven 29 Mai 2009 - 13:44 | |
| merci Eve de la composition de ce commentaire..
Je ne lis pas le spoiler car je lirai ce livre dont le sujet est engageant. | |
| | | Maryvonne Zen littéraire
Messages : 4259 Inscription le : 03/08/2009 Localisation : oui, merci.
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Mar 18 Aoû 2009 - 22:08 | |
| Je l’ai découverte avec les adolescents troglodytes qu'on m'avait offert : «ça va te plaire ». Et ça a été le cas. Si bien que je me suis offert les mains gamines à sa sortie.
"Les mains gamines" m’a moins plu que les adolescent troglodytes, certainement parcequ’il est moins optimiste. Dans les adolescents troglodytes , le personnage principal dégage, malgré ses humiliations passées, une grande sérénité et maturité tout à fait enviable. Adèle a trouvé son équilibre, et on a plaisir à la laisser partir. Les mains gamines laissent un certains goût amer dans la bouche… (il faudrait que je le relise, mais je l’ai perdu… encore un…). , bien que ce soit un roman fort, axé sur le corps et ses blessures, les non-dits, la culpabilité et sur le rôle libérateur de l'écriture .
Pour revenir aux adolescents troglodytes… que je conseille.
Le vrai lien avec des vraies phrases, un vrai résumé : http://www.pol-editeur.fr/catalogue/fichelivre.asp?Clef=6119
Ce roman plaira particulièrement à ceux qui aiment les paysages montagnards désolés (fans d’Annie Proulx, ruez vous !). Pas de voyeurisme, une fois encore. Le présent d’Adèle est entrecoupé de souvenirs d'enfance qui font découvrir, au fur et à mesure, son histoire. Les relations compliquées avec un petit frère qui n’accepte son l’identité. Et la complicité muette avec les adolescents qu'elle emmène, année après année, à leur établissement scolaire.
De la bombe de balle bébé. | |
| | | Eve Lyne Sage de la littérature
Messages : 1936 Inscription le : 08/08/2008
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Mer 19 Aoû 2009 - 11:58 | |
| - Maryvonne a écrit:
- Je l’ai découverte avec les adolescents troglodytes qu'on m'avait offert : «ça va te plaire ». Et ça a été le cas.
Si bien que je me suis offert les mains gamines à sa sortie... J'ai également découverte cette auteur avec les Adolescents troglodytes. J'ai beaucoup aimé ce roman qui donne un véritable aperçu sur les souffrances d'un être humain qui ne se sent pas bien dans son corps (problème de genre, transsexualité) et la difficulté de prendre la décision qui résoudra ce profond malaise avec les conséquences inévitables sur l'entourage. Les mains gamines est un autre genre, tout aussi difficile à mes yeux. L'humiliation d'une enfant est une plaie à vie. Tout dépend de notre vécu. Certains sujets font écho en nous donc on devient plus sensibles à l'écrit. | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Mer 19 Aoû 2009 - 12:15 | |
| - Citation :
- Douze écrivains reçoivent le prix européen de littérature
Les noms des douze écrivains lauréats du premier prix européen de littérature ont été révélés par le commissaire Figel', la Fédération des libraires européens (EBF), la Fédération des associations européennes d’écrivains (FAEE) et la Fédération des éditeurs européens (FEE).
Les récompenses seront décernées lors d’une cérémonie qui se tiendra le 28 septembre à Bruxelles.
[...]
FRANCE Écrivain récompensé: Mme Emmanuelle Pagano Livre récompensé: Les Adolescents troglodytes (2007) Maison d'édition: Éditions P.O.L, Paris source j'ai eu cette information par son éditeur allemand - ce livre va paraitre dans les prochaines semaines en allemand | |
| | | Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Lun 18 Jan 2010 - 16:30 | |
| Son dernier roman a l'air très intéressant: L'absence d'oiseaux d'eau - Citation :
- Ce roman était à l’origine un échange de lettres avec un autre écrivain. Nous nous l’étions représenté comme une oeuvre de fiction que nous construisions chaque jour, à deux, et dans laquelle nous inventions que nous nous aimions. Nous ne savions pas jusqu’où le pouvoir du roman nous amènerait. Nous ne connaissions pas la fin de l’histoire.
Il est sorti de ma vie brutalement, abandonnant ce texte en cours d’écriture. En partant, il a repris ses lettres. Il y a donc des vides, des ellipses dans ce roman, dans lesquels il faut imaginer ces lettres, qu’il publiera peut-être un jour, une autre fois, ailleurs, séparément.
Résumé : comment une femme transforme un homme en rivière, comment cette rivière l’accueille dans son lit, et, dans le même temps, s’échappe.
Quatrième de couverture : Tu m’as répondu j’étais ta rivière ? mais pour qu’il y ait une rivière, il faut qu’il y ait un lit, comme un récipient pour tenir l’eau. Tu étais mon lit. | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Lun 18 Jan 2010 - 16:41 | |
| - Marko a écrit:
- Son dernier roman a l'air très intéressant:
oui.. je lis partout que du bon.. encore un à noter | |
| | | Maryvonne Zen littéraire
Messages : 4259 Inscription le : 03/08/2009 Localisation : oui, merci.
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Lun 18 Jan 2010 - 23:04 | |
| C'est vrai ou c'est de la fiction ?
Elle abandonne les histoires d'enfance torturée ? | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Sam 17 Aoû 2013 - 12:39 | |
| Les adolescents troglodytes
Encore une découverte grâce à la chaîne de lecture de l’été ! Merci Shanidar de m’avoir proposé ce livre.
Moins qu’un enthousiasme fou pour cette histoire (que j’ai toutefois trouvée fort intéressante et originale), je me suis découvert un intérêt certain pour l’auteure, Emmanuelle Pagano. J’étais passée jusque-là à côté, je vais approfondir ma connaissance de son œuvre car on est bien là en littérature, ce qui s’avère pour moi essentiel dans mes désirs de lectrice.
Adèle conduit tous les jours le bus qui mène des enfants et adolescents d’un plateau montagnard à leur école, leur collège : « Un petit fourgon, portes coulissantes, quatre roues motrices, neuf places. ». Elles les observe et se remémore, à travers leurs comportements ou leurs discussions, ce qui fut son enfance à elle, dans ces mêmes montagnes, puis son adolescence perturbée, cette époque où elle était encore le grand frère d’Axel, aujourd’hui fâché avec elle par souffrance, dont le métier est de renforcer en funambule les parois rocheuses. « Je me pensais au féminin, en faisant les accords, depuis un bout de temps déjà. Mais comme j'étais bien la seule, je me sentais à la fois solitaire et désaccordée. » Car Adèle a été un garçon dans la « ferme du fond » aujourd’hui noyée sous les eaux d’une retenue de barrage. Un garçon qui se rêvait «fendue de douleur» comme la Petite Sirène.
Ayant subi toutes les étapes qui l’ont menée envers et contre tout à son identité d’aujourd’hui, son identité de femme, elle est revenue, dans l'anonymat (ou presque, mais du moins le croit-elle), vivre dans la région rude qui lui est chère. « Je me suis remplie du paysage, à nouveau. Je contiens mon pays, il me comble, il me suffit. »
Un lien fort, qui ne se dit pas mais se vit, s’est tissé peu à peu entre les enfants et leur conductrice. « Ils sont mon bruit, ma vie, mon mensonge ». Car chaque jour, deux fois par jour, avec une grande régularité, dans la routine et la diversité, le temps qu’elle vit avec « ses grands » et « ses petits » est riche de discussions, de silences, d’histoires, d’imaginaire, d’émotions, et parfois de dangers. La montagne n’est pas sans risques entre les loups et les individus qui peuvent surgir étrangement comme des fantômes au bord de la route, entre les intempéries et les chutes de pierres.
Comme l’autocar qu’elle conduit, l’histoire d’Adèle traverse le quotidien et l’extraordinaire, entre le lever du jour et la nuit tombée, les saisons, la souffrance et la paix, le calme et la violence des paysages, dans un langage qui lui-même emprunte au registre familier comme au plus poétique.
Emmanuelle Pagano parle des humains avec empathie et générosité, avec chair également. Elle parle de la nature aussi, avec tout autant de justesse, de beauté et de force.
«L’automne de littérature, il ne dure pas. La flamboyance, les orangés lyriques des fayards, les ors brillants des saules, les verts acides mangés de soleil sur les bouleaux les rouges massifs étalés écarlates des érablières, ou à l’inverse, les rouges en pointillés et piquants des érables isolés dans les jaunes des autres arbres, juste le temps de la décrire le temps pour le vent de retourner au sol quelques feuilles et 2 ou 3 trajets avec mes gosses c’est fini.»
« Si pourtant le plateau me vient souvent autour de moi si beau, c'est juste parce que j'y vis. C'est bête, mais magnifique est l'endroit où on vit, ça dépend de comment on se lève, de comment on regarde au dehors, ça dépend de si on regarde. »
"Que la pluie soit froide dans le cou, ça ne nous enlève pas l'envie de pleurer, mais ça nous rend la dépression presque belle."
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| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Sam 17 Aoû 2013 - 12:46 | |
| - Marko a écrit:
- Son dernier roman a l'air très intéressant:
L'absence d'oiseaux d'eau
- Kenavo a écrit:
- oui.. je lis partout que du bon.. encore un à noter
Après ma lecture des Adolescents troglodytes (voir commentaire ci-dessus), j'ai enchaîné assez vite avec la lecture de cet autre roman d'Emmanuelle Pagano. C'est "du lourd"! (commentaire à suivre sans tarder je pense)
Dernière édition par coline le Sam 17 Aoû 2013 - 22:08, édité 2 fois | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Sam 17 Aoû 2013 - 18:48 | |
| - coline a écrit:
- Marko a écrit:
- Son dernier roman a l'air très intéressant:
L'absence d'oiseaux d'eau
- Kenavo a écrit:
- oui.. je lis partout que du bon.. encore un à noter
- Maryvonne a écrit:
- C'est vrai ou c'est de la fiction ?
Après ma lecture des Adolescents troglodytes (voir commentaire ci-dessus), j'ai enchaîné assez vite avec la lecture de cet autre roman d'Emmanuelle Pagano. C'est "du lourd"! (commentaire à suivre sans tarder je pense)
Ben voilà...c'est fait! L’absence d’oiseaux d’eau Ils sont écrivains tous les deux, un homme (on ne saura pas lequel, on saura juste qu’il a publié un roman « dont le personnage est un archipel ») et (peut-être?) l'auteure (il m'a semblé que le contenu de ce livre pouvait être autobiographique). Le contenu ? Des lettres qu’a envoyé la femme à l’homme. Ils se connaissent peu au début mais ils ont décidé d’un projet littéraire commun : «Ce roman était à l’origine un échange de lettres avec un autre écrivain. Nous nous l’étions représenté comme une œuvre de fiction que nous construisions chaque jour, à deux, et dans laquelle nous inventions que nous nous aimions.»Puissance des mots qui peuvent enflammer à distance les corps et les cœurs ! Ils sont pris très vite à leur jeu. Elle d’abord, avec ses trois enfants et son mari avec lequel elle ne fait plus l’amour. "Tu sais, ce que je ressens pour toi n'est pas venu comme ça d'un coup, même s'il y a eu un moment de bascule dans les lettres, c'est venu petit à petit, très vite, mais petit à petit, ça n'a jamais cessé de progresser, comme les enfants grandissent, millimètre par millimètre, on ne s'en rend pas compte, et puis soudain, les enfants sont plus grands que soi. Maintenant, mon amour pour toi est comme ça, il me dépasse. Rien à voir avec les grandes pluies qui emportent la rivière en quelques minutes. Je me suis noyée tellement peu à peu que je ne m'en suis pas aperçue. Mais lorsque j'ai ouvert la bouche, elle s'est remplie d'eau." L’homme devient pour elle « celui à qui j’écris, et celui que j’écris » « Parfois je me demande comment arriver à maintenir cet espace, ce jeu, entre les lettres et nous. Il y a du jeu, cela ne s’ajuste pas parfaitement ». Comme les mots sont son domaine (et elle est douée pour écrire !) l’auteure connaît leur pouvoir. Elle va en user avec détermination, avec amour sincère aussi, entraînant l’homme, plus timoré au départ, dans une passion commune. Très charnelle. « Je ne veux pas savoir si ces lettres sont fictives ou réelles, mens-moi si tu veux, si tu peux. Moi je peux. (…) J’écris quelque chose et ça arrive, ça devient. J’écris notre histoire, elle grandit. Mais elle ne deviendra pas comme je l’écris, comme je la veux, parce que tu l’écris aussi». « Le livre et la vie se mélangent, sans couture, sans séparation. » « J’écris, je t’écris, avec cette envie de toi qui ne me quitte pas, plus forte qu’avant parce qu’elle se nourrit de la tienne, elle est dilatée, distendue, elle fait le tour de moi, puis elle me ceinture, et quand tu m’écris ton envie de moi, j’ai l’impression que mon désir me serre d’un cran supplémentaire. » « Pourquoi j'écris ? Parce qu'écrire m'est indispensable pour vivre, le bonheur comme le malheur. En ce moment précis, depuis trois mois, j'écris parce que tu me manques, j'écris pour te séduire, pour te garder, pour que tu sois et restes amoureux de moi. Je ne veux pas que tu me quittes. Alors j'écris. Je sais que mes mots ont un pouvoir sur toi, je l'utilise, peut-être même que j'en abuse. » Comme cette passion dévorante souffre de la distance, de l’absence, du manque, elle entraîne fatalement pour eux un nouveau choix de vie. Une rupture pour elle de sa vie familiale fragile. Mais la passion ne sait durer. Celle-ci, particulièrement dévorante, ravageuse, encore moins que beaucoup d’autres. L’homme va rapidement s’en aller. Je ne suis pas en train de dévoiler la fin du livre, elle est donnée d'emblée par l’auteure . « Il est sorti de ma vie brusquement, abandonnant ce texte en cours d’écriture. En partant, il a repris ses lettres. Il y a donc des vides, des ellipses dans ce roman, dans lesquels il faut imaginer ces lettres, qu’il publiera peut-être un jour, une autre fois, ailleurs, séparément ». « Je ne savais pas combien pèse une main qu’un homme lâche soudain» La femme reste avec sa peine vrillée au corps et ses propres lettres qu’elle choisit de publier sans pudeur, sans censure. « Le papier cousu des lettres est plus résistant que la peau, que la chair, que les muscles, ce qu’on construit ensemble est fait de mots, le texte, le tissu en est inaltérable puisque les phrases publiées seront indélébiles ». Ses lettres disent l’amour-sentiment d’une façon puissante, éblouissante, sublime. C’est ce que j’ai adoré. Elles disent aussi le désir et l’amour charnel sans détours, de manière détaillée et crue mais sans obscénité. « Aucune fausse pudeur. J’aime notre histoire ». Personnellement, penser qu’il ne s’agissait pas d’une fiction m’a placée en position gênée de lecteur voyeur. Les lettres de l’homme manquent à ce « roman » pour qu’il soit véritablement échange épistolaire… mais au fond, au lecteur, elles ne manquent pas du tout. Et ce titre merveilleusement énigmatique qui m’a fait choisir ce roman plutôt qu’un autre d’Emmanuelle Pagano pour poursuivre l’exploration de son oeuvre ! « L’absence d’oiseaux d’eau, leur silence, m’a aidée à comprendre. Tu n’est pas là, tu n’as jamais été là, et si je me promène, même avec mon petit garçon, le paysage n’est pas, il est faux. Un lac, deux lacs même, une étendue d’eau sans bruits d’oiseaux, sans canards, sans clac-clac-clac, sans frottements d’ailes, sans ébrouements de plumes, ça n’existe pas. C’est juste une carte postale, juste un décor de livre. » Ce roman (qui n'a pas la construction habituelle d'un roman) ne plaira pas à tous. Il pourra même choquer. Mais je l'ai trouvé très très beau. Plus puissant que Les adolescents troglodytes.
Dernière édition par coline le Sam 17 Aoû 2013 - 22:29, édité 3 fois | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Sam 17 Aoû 2013 - 19:34 | |
| 1er avril 2013 - Fin août 2014 Emmanuelle Pagano est à la Villa Médicis! | |
| | | shéhérazade Agilité postale
Messages : 926 Inscription le : 01/11/2009 Age : 41
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Sam 17 Aoû 2013 - 21:42 | |
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| | | églantine Zen littéraire
Messages : 6498 Inscription le : 15/01/2013 Age : 59 Localisation : Peu importe
| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano Sam 17 Aoû 2013 - 21:47 | |
| - shéhérazade a écrit:
- Ce livre, je le veux !
Moi aussi !!!! | |
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| Sujet: Re: Emmanuelle Pagano | |
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| | | | Emmanuelle Pagano | |
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