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| Russell Banks | |
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Le Bibliomane Zen littéraire
Messages : 3403 Inscription le : 21/02/2007 Age : 58 Localisation : Bretagne
| Sujet: Re: Russell Banks Ven 15 Aoû 2008 - 16:49 | |
| "Pourfendeur de nuages"
À l'aube du XXème siècle, quelque part dans un coin montagneux de Californie, un vieil homme se penche sur son passé. Contacté par l'assistante d'un historien et biographe renommé, le vieillard, après avoir opposé son refus, consent à coucher sur le papier les souvenirs de sa jeunesse. Si le passé de cet homme semble si précieux au point qu'un illustre chercheur s'y intéresse, c'est parce que ce vieil ermite est le dernier survivant des fils de John Brown, le célèbre abolitionniste qui dédia toute son énergie à la lutte contre l'esclavage dans les années précédant la Guerre de Sécession. Owen Brown va alors prendre sa plume pour raconter le destin de la famille Brown, et plus particulièrement – puisque c'est lui qui monopolise l'intérêt de l'historien – de la figure de son père, John Brown, qui mourra pendu en 1859 à Charlestown (Virginie) suite à sa tentative d'insurrection des esclaves et à la prise de l'arsenal de Harper's Ferry. C'est ainsi qu'Owen Brown va nous faire pénétrer au sein de cette famille d'agriculteurs et d'éleveurs dont le père, patriarche et pierre angulaire du groupe, tient à régler la vie de la communauté selon les préceptes édictés par les textes bibliques.
D'une piété qui frise le fanatisme, John Brown incarne pour les membres de sa famille – mais aussi pour nombre d'autres personnes – une sorte de prophète dont les paroles et les idées semblent directement s'inspirer des Écritures. Cela lui vaut parfois d'être pris pour un pasteur, l'homme n'hésitant pas, d'ailleurs, à monter en chaire lors des offices afin de se lancer dans de longs sermons. Owen Brown, ses frères et soeurs, sa belle-mère Mary, vivent sous la coupe autoritaire de cet homme qui tente de calquer sa vie sur celle des patriarches de la Bible. John Brown n'est cependant pas un tyran pour sa femme et ses enfants. Il tente seulement d'accorder les préceptes de sa foi avec les dures réalités de la vie de son époque, en ce milieu du XIXème siècle. Ce nouvel Eden qu'est alors l'Amérique du Nord, avec ses plaines fertiles, ses immensités boisées regorgeant de gibier, ne peuvent que lui inspirer l'idée qu'il existe en ce monde une Terre Promise, un endroit suffisamment vierge encore des péchés de l'espèce humaine, qui puisse permettre à des âmes pures et respectueuses des lois divines, de s'épanouir et de créer en ce monde un nouveau Paradis terrestre.
Mais ce tableau idyllique est obscurci par les pratiques observées dans les États du Sud, pratiques qui tendent à se propager dans les nouveaux territoires de l'Ouest : les pratiques de l'esclavage. John Brown ne se contente pas seulement de protester contre la traite des noirs, il souhaite participer activement à son éradication. Son action visera tout d'abord à s'établir près de la communauté de North Elba, communauté d'esclaves affranchis et d'anciens fugitif, afin de les aider et de les assister dans le travail de la terre.
Mais ce sera aussi dans l'extension et dans l'ouverture de nouvelles pistes pour l' « Underground Railroad » , le train souterrain, dénomination d'un vaste réseau de routes clandestines destiné à faire évacuer les esclaves fugitifs des États du Sud vers le Nord et le Canada. John Brown bénéficie dans sa lutte de nombreux et célèbres soutiens, dont Ralph Waldo Emerson , Henry David Thoreau et Frederick Douglass. En 1850, la promulgation d'une nouvelle loi sur les esclaves fugitifs – loi visant à pourchasser ceux-ci sur l'ensemble du territoire des Etats-Unis et à les punir, ainsi que toute personne convaincue de leur avoir porté aide et assistance – met le feu aux poudres et pousse John Brown à radicaliser son action. Contre les chasseurs de primes et les agents fédéraux devenus les rabatteurs des marchands et propriétaires d'esclaves, Brown va recourir à la violence. Aidé par ses fils et par des proches, il va tout faire pour semer la terreur chez les partisans et les complices du système esclavagiste. Usant toujours d'une terminologie aux accents bibliques, John Brown va accomplir – quitte à faire couler le sang – l'oeuvre du Seigneur.C'est cette lente progression de l'idéalisme vers la violence que va conter Owen Brown en couchant sur le papier ses souvenirs, souvenirs remontant jusqu'à la petite enfance au sein d'une fratrie dont le nombre de membres ne cesse de se modifier en conséquence des multiples naissances mais surtout du tribut prélevé par les maladies infantiles qui conduisent prématurément à la tombe les enfants de la famille Brown. Owen grandit parmi ses frères et soeurs, sous la coupe du « vieux » – c 'est ainsi que le surnomment ses enfants – entre prières, étude, et travaux de la ferme. La vie est dure, les ambitions professionnelles du patriarche – qui s'est lancé dans le tannage des peaux, puis l'élevage de moutons et dans le commerce de la laine – l' ont mené vers une accumulation de dettes qui poussent la famille à vivre chichement et à déménager fréquemment.
De l'Ohio à la Pennsylvanie, du Massachusssets à l'état de New-York, la famille Brown trouvera enfin où s'installer dans la chaîne des Adirondacks, près du mont Tahawus (« Le pourfendeur de nuages » selon l'appellation des indiens iroquois) dans ce que John Brown appellera « Les plaines d'Abraham , non loin de la communauté noire de North Elba, communauté créée par le philanthrope Gerritt Smith. C'est là que la famille Brown va s'installer durablement et c'est à partir de là aussi que l'action de John Brown va prendre de l'ampleur, glissant insensiblement du militantisme abolitionniste pacifique à une radicalisation qui le conduira, lui et ses cinq fils, vers la lutte armée.
C'est donc le portrait de ce personnage hors du commun que nous dresse Russell Banks au travers des mémoires apocryphes d'Owen Brown. L'auteur nous avertit d'ailleurs, en préambule de son roman, que son ouvrage ne peut être considéré comme un roman historique mais plutôt comme une oeuvre de fiction. En effet, Russell Banks s'est réservé le droit de prendre quelques libertés avec les faits historiques propres à la personne, à l'action et à l'entourage de John Brown. S'il nous offre un portrait haut en couleurs de ce personnage hors du commun et peu connu en Europe, c'est surtout le portrait d'un père décrit par son fils qu'il nous livre ici. C'est en effet par le regard d'Owen que nous découvrons la personnalité de John Brown, et l'on finit par se demander, une fois le livre refermé, qui de ces deux personnages est vraiment au centre de ce roman ? Est-ce le père, célèbre activiste entré dans l'Histoire ? Ou est-ce plutôt le fils, Owen, qui, bien que fasciné par l'image de ce père tout-puissant, au point de le suivre (et parfois de l'inspirer) dans sa folie meurtrière, ne cesse de s'opposer intérieurement à cette autorité paternelle qui pèse d'un si grand poids sur sa progéniture ? « Pourfendeur de nuages » n'est donc ni un roman historique, ni une oeuvre de pure fiction. Ce roman se situe à la frontière de ces deux genres, empruntant tantôt à l'un, tantôt à l'autre. Même si de nombreux personnages cités dans ce roman, ont réellement existé, Russell Banks s'est donné toute la latitude propre au génie du romancier pour imaginer, dramatiser, extrapoler ou embellir cet épisode de l'histoire des Etats-unis d'Amérique. Il en ressort un roman flamboyant, une épopée lumineuse et dramatique traversée du souffle des grands espaces américains mais surtout par la figure exceptionnelle et monumentale de John Brown, figure qui ne manquera pas de nous rappeler que mince est la frontière qui sépare l'idéalisme du fanatisme. | |
| | | sousmarin Zen littéraire
Messages : 3021 Inscription le : 31/01/2007 Localisation : Sarthe
| Sujet: Re: Russell Banks Dim 17 Aoû 2008 - 11:43 | |
| - Le Bibliomane a écrit:
- "Pourfendeur de nuages"
...mince est la frontière qui sépare l'idéalisme du fanatisme. Le centre du livre est là. Où commence le fanatisme, où s’arrête l’idéalisme et jusqu’où peut-on aller pour le servir…bien sûr, le roman n’y répond pas, il se contente de soulever la question dans l’esprit du lecteur…jusqu’où peut-on aller pour faire cesser une injustice qui nous semble criante et intolérable ? Une question d’actualité. Cette épopée livresque est extraordinaire par la qualité des personnages, qui évitent tous les pièges du manichéisme, et nous donne une image épique de l’Amérique d’alors, terre de violence et de passions. A lire absolument. | |
| | | Jade Envolée postale
Messages : 105 Inscription le : 10/06/2008 Age : 51 Localisation : Var
| Sujet: Re: Russell Banks Sam 23 Aoû 2008 - 15:15 | |
| American Darling
Un livre très dense sur le destin d'une femme issu de la bourgeoisie américaine qui s'engage dans les mouvements contestataires des années 60 et qui, recherchée par la CIA, part clandestinement au libéria où elle se marrie et a des enfants. Hannah Musgrave se retrouve au Libéria, blanche parmi les africains, étrangère à ce pays, sans aucune maitrise de son destin, subissant les évènements politiques sanglants de l'afrique qui l'oblige à fuir ce pays, son pays.
Un très beau livre sur la difficulté de prendre en main son destin. Ce livre m'a fait pensé au livre de Barbara Kingsolver "Les yeux dans les arbres". | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Russell Banks Sam 23 Aoû 2008 - 15:45 | |
| J'ai beaucoup aimé American Darling, à conseiller |
| | | lyana79 Envolée postale
Messages : 208 Inscription le : 04/04/2008 Age : 44 Localisation : Suisse
| Sujet: Re: Russell Banks Sam 23 Aoû 2008 - 18:20 | |
| Je lirai bientôt "de beaux lendemains" de cet auteur. | |
| | | Marie Zen littéraire
Messages : 9564 Inscription le : 26/02/2007 Localisation : Moorea
| Sujet: Re: Russell Banks Mer 1 Oct 2008 - 1:59 | |
| Sentinelle a très bien parlé de cet excellent roman de Russell Banks, American darling, , il suffit de revenir en arrière sur le fil, et elle conclut en disant: - Citation :
- American Darling est un magnifique portrait de femme qui veut se poser en tant qu'actrice dans une vie où finalement tellement d'événements historiques, culturels, politiques et sociaux vous broient et vous entraînent tel un fétu de paille pris dans la tornade.
Oui, elle essaie, la pauvre Hannah, mais elle a toujours un train de retard dans sa propre vie, et elle rate tout.. Une petite Américaine gâtée? Oui, et paumée.. qui ne fait jamais rien à fond .Mais honnête et attachante. C'est vrai, un beau personnage féminin. Et puis, il y a dans ce livre toute l'histoire du Liberia , du rôle des Etats-Unis qui ,comme d'habitude, manipulent et laissent le chaos .. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Russell Banks Mer 1 Oct 2008 - 19:01 | |
| Je me répète mais ce roman a été un vrai coup de coeur pour moi |
| | | Sophie Sage de la littérature
Messages : 2230 Inscription le : 17/07/2007 Age : 48 Localisation : Tahiti
| Sujet: Re: Russell Banks Mer 1 Oct 2008 - 22:09 | |
| - sentinelle a écrit:
- Je me répète mais ce roman a été un vrai coup de coeur pour moi
Pour moi aussi, à tel point que j'hésite à relire d'autres romans de Banks. | |
| | | Sophie Sage de la littérature
Messages : 2230 Inscription le : 17/07/2007 Age : 48 Localisation : Tahiti
| Sujet: Re: Russell Banks Lun 20 Oct 2008 - 8:20 | |
| Ca y est j'ai lu mon 2ème Russel Banks: LA RESERVE
Effectivement, la couverture est magnifique mais ça ne suffit pas. Pour faire court, j'ai passé un bon moment de lecture mais à mon avis, on est bien loin d'American Darling, roman qui m'avait enchantée et même passionnée par sa richesse, l'aspect historique et politique.
Dans La Réserve, on est plus dans un roman "à l'eau de rose", avec des tournures de phrases un peu mièvres et grandiloquentes à mon goût. Le travail de recherche est moindre, le déroulement assez confus et un peu long.
J'ai aimé, en revanche, que les Adirondacks soient des personnages à part entière, l'aspect culturel (Jordan Groves est peintre, il connaît des romanciers célèbres).
Un roman agréable donc, je ne dis pas le contraire mais, qui, à mon sens, n'arrive pas à la cheville d'American Darling. | |
| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Lun 20 Oct 2008 - 11:04 | |
| - Sophie a écrit:
- Un roman agréable donc, je ne dis pas le contraire mais, qui, à mon sens, n'arrive pas à la cheville d'American Darling.
Pas encore lu American Darling, mais je suis d'accord avec toi pour La Réserve Sophie J'ai moins été prise par l'atmosphère et il y a des longueurs, oui! Ce qui est sûr c'est qu'il n'arrive pas à la chevilled' Affliction par exemple ou même des Beaux lendemains. Par contre il faut que je le lise cet American Darling | |
| | | Sophie Sage de la littérature
Messages : 2230 Inscription le : 17/07/2007 Age : 48 Localisation : Tahiti
| Sujet: Re: Russell Banks Lun 20 Oct 2008 - 11:21 | |
| - aériale a écrit:
-
Par contre il faut que je le lise cet American Darling Ah oui, ah oui, ah oui!!! Moi j'ai De beaux lendemains et un autre, mais lequel? | |
| | | Aeriale Léoparde domestiquée
Messages : 18120 Inscription le : 01/02/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Lun 20 Oct 2008 - 12:29 | |
| - Sophie a écrit:
- Ah oui, ah oui, ah oui!!!
Ton enthousiasme fait plaisir à voir J'ai lu aussi Sous le règne de Bone. A mille lieux de l'univers doré de La réserve.Mais je pense qu'il décrit particulièrement bien ce monde plus dur (qui était le sien je crois?) comme on le disait plus haut...
Dernière édition par aeriale le Ven 17 Juin 2011 - 9:15, édité 1 fois | |
| | | kenavo Zen Littéraire
Messages : 63288 Inscription le : 08/11/2007
| Sujet: Re: Russell Banks Lun 20 Oct 2008 - 14:35 | |
| Je vous trouve quand même un peu sévère avec La Réserve. Je peux comprendre qu'il s'en sort mal en comparaison avec d'autres livres de lui, qu'on peut penser qu’il n'a pas fait autant de recherches (bien que pas tout les auteurs peuvent mettre autant sur la peinture, la guerre, l'aviation, la vie des années 30-40 aux lacs, .... sans au moins se renseigner un peu ),... mais en tout je vois ce roman plutôt dans la ligne des romans de la côte ouest des Etats-Unis – genre John Updike – qui s’intéresse plus pour cette vie de couple, la vie de la société autour de ces lacs… Je n’y vois pas l’eau de rose mais un aperçu sur l’état d’âme des divers protagonistes de cette histoire. Peut être il s'est seulement fait un plaisir en l'écrivant - et dans mon cas – cette joie c’est ressenti et j’en ai eu un vrai plaisir à lire ce livre. | |
| | | domreader Zen littéraire
Messages : 3409 Inscription le : 19/06/2007 Localisation : Ile de France
| Sujet: Re: Russell Banks Mar 13 Jan 2009 - 20:15 | |
| Je viens de sortir encore une fois émerveillée de la lecture d'un roman de Russell Banks - American Darling - on ne m'ôtera pas de l'idée que cet homme là est un grand la littérature américaine contemporaine, ses livres sont fouillés autant pour ce qui est du contexte, que de la complexité toujours humaine de ses personnages ou encore de la construction à la fois subtile et équilibrée de ses livres.
Cet auteur a jusqu'ici toujours été un régal pour moi (un bémol toutefois pour le Pourfendeur de Nuages que j'avais trouvé trop long) - Je compte bien lire tous les livres de Banks. Y-aurait-il de l'étoffe de Nobel dans Russell Banks ? | |
| | | lyana79 Envolée postale
Messages : 208 Inscription le : 04/04/2008 Age : 44 Localisation : Suisse
| Sujet: Re: Russell Banks Dim 13 Déc 2009 - 16:04 | |
| L'ange sur le toit: 4è de couverture: L'espèce humaine est curieuse en ce sens qu'elle sait haïr tout en aimant, quitter et protéger, materner et diriger. Voici quatre accidents du quotidien qui forgent l'être humain avec le grain de folie nécessaire à transcender un simple tête-à-tête en un instant inoubliable. Comme toutes les bonnes histoires, celles de Russell Banks sont des rencontres, des découvertes, comme des prières exaucées : une fille et son père, un couple d'éleveurs, une serveuse frappée par la foudre, un amour interdit qui surgit du passé... Mon avis: J'ai eu beaucoup de plaisir à lire ces nouvelles qui donnent un aperçu de la complexité et de l'ambivalence des sentiments humains. A découvrir ! | |
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