Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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 Robert Louis Stevenson

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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 1 Déc 2013 - 10:54

animal a écrit:
ça doit pouvoir venir à bout de toute panne de lecture. Cool 
L'envie revient petit à petit, mais les conseils de classe aussi, alors décembre sera maigre !
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyJeu 6 Fév 2014 - 16:07

La magicienne
Titre original: The enchantress. Année probable de composition: 1889.

Nouvelle d'une soixantaine de pages, au sort qui mérite d'être conté:

Composée sur un bateau voguant dans le Pacifique Sud, elle se serait d'abord intitulée Un mariage singulier. Ce texte fait partie des quelques manuscrits dont les biographes avaient connaissance, et qui furent soit égarés du côté des Samoa par la famille Stevenson-Osbourne (Fanny & Lloyd), soit retouchés par des éditeurs peu scrupuleux (mais qui "croyaient bien faire") post-mortem.
Ces derniers furent, du reste, groupés puis publiés au plus près des manuscrits laissés par Stevenson dès 1924.  

Dans le cas de La magicienne, cette nouvelle fait partie des quelques textes vendus par les héritiers Stevenson auprès de collectionneurs. La dernière apparition de celle-ci date d'une vente aux enchères publique, en 1923. Et puis on perd longtemps sa trace, d'autant que Lloyd Osbourne, peut-être engagé contractuellement en tant que vendeur,peut-être espérant faire grimper encore plus l'enchère, peut-être pour une raison toute autre, interdit la publication préalable du manuscrit.  

Osbourne nous livre pourtant le contexte d'écriture:
Lloyd Osbourne, dans Swearingen a écrit:
La magicienne a été écrite à bord d'un voilier quand chacun des passagers devait écrire une histoire et la lire tout haut, à la façon de Boccace, devant tout le monde.

Le manuscrit lui-même, nous apprend le préfacier, est écrit au crayon, "et, au moins pour certains passages, par temps de mer houleuse", le texte n'a été révisé qu'en de rares endroits (ce qui accrédite les dires d'Osbourne, si elle avait été travaillée au préalable et testée en public à voix haute, c'est on ne peut plus plausible).

Elle se trouvait consignée sur vingt-sept pages sur un carnet type "papier réglé", que Fanny conserva après la mort de Stevenson, les vingt-sept pages étant ensuite arrachées du carnet, possiblement lors de la mise en vente aux enchères de 1923.

Au début des années 1980 l'Université de Yale parvint à l'acquérir, la première publication grand public date de 1989 et la traduction française de 1991.

Le récit lui-mêle est assez moderne quant à son thème et même franchement novateur pour l'époque (une inversion, en quelque sorte, des rôles publics et sociaux de la femme et de l'homme, compte tenu de l'époque et du lieu).
Le souffle du conteur Stevenson est bien au rendez-vous. Cette nouvelle se lit d'un trait, en mode "déjà j'ai fini ?".

Enfin, suis-je tenté d'écrire, un peu narquois je l'avoue, Stevenson réussit à portraiturer un caractère féminin, abouti !

Le sujet ? voyons... C'est l'histoire d'un jeune gentleman anglais réduit à débuter dans la dure profession de mendicité, dans les jardins du casino de Royat (Puy-de-Dôme)...

Court opus, à recommander sans retenue, sans réserve, bien au-delà des nombreux Parfumés Stevensoniens  tchintchin  !
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 23 Fév 2014 - 7:39

Les Gais-Lurons.
(NB: se trouve parfois intitulé Les Gais Compagnons.)
Titre original: The Merry Men. Première publication: 1889.

Il s'agit d'une nouvelle, de quarante-cinq pages environ, dont vous pouvez, à ce qu'il semble, trouver le texte intégral ici (je n'ai pas vérifié dans le détail s'il y a bien tout).

Stevenson  est déjà installé dans son coin de paradis des mers du sud quand il compose The Merry Men, qui  se déroule pourtant dans l'Ecosse de sa jeunesse, et devait être le titre-phare d'un recueil de nouvelles projeté (The Merry Men and other tales).

Il attend beaucoup de cette nouvelle, le texte est, à maintes reprises, affiné, épuré de çi mais augmenté de là.
R. L. Stevenson, Lettres du vagabond a écrit:
The Merry Men est bien plus qu'à moitié écrite et j'en pense réellement du bien. C'est une sonate fantastique à propos de la mer et des naufrages; je la place loin au-dessus de toutes mes tentatives de récit; je la trouve singulière; si je dois jamais avoir un succès, je crois que là, je tiens le bon bout.

Evidemment, en 2014, on ne peut pas dire que le pronostic se soit réalisé; Stevenson est passé à la postérité par deux récits qui sont autant de grands mythes, L'île au trésor et L'étrange cas du Dr Jekill et Mr Hyde. Le problème est qu'ils ont éclipsé pour partie ou totalité, le reste de son oeuvre.

Quant à ladite sonate, c'est plutôt un opéra, à vrai dire. Il y a là une sublimation de thèmes récurrents chez Stevenson, et d'abord, comme dit par lui-même, la mer qui n'est pas une amie, mais l'antichambre de l'enfer, l'élément dominant mais malfaisant par excellence, qui échappe à Dieu en quelque sorte, comme c'est habilement mis en exergue dans la nouvelle; les naufrages et les "trésors", donc, rêvés, comme ceux de l'Espiritu Santo, ou fort tangibles, concrets, comme ceux du Christ-Anna).
On y trouve le bien, le mal, la cupidité, la démence. Les pages et descriptions marines sont de facture exceptionnelle, sans doute ce qu'il m'a été donné de lire de plus extraordinaire sur cette thématique (en cela je rejoins tout à fait Stevenson dans l'espoir qu'il portait pour ce qui concerne ces pages).
Le reste du contenu évoque pas moins que du Kafka additionné de Melville, si comparer n'est pas réduire, en fait, c'est tout bonnement du Stevenson de très haut de gamme !
Au reste, selon un connaisseur:
Jorge-Luis Borges, \"entretiens", à propos de The Merry Men a écrit:
C'est la meilleure [nouvelle] qu'il ait jamais écrite, avec Le club du suicide.

L'île d'Aros dépeinte dans cette nouvelle existe vraiment, c'est Earraid sur la côte sud-ouest écossaise. Stevenson y séjourna à plusieurs reprises dans sa jeunesse, en particulier avec son père, qui était constructeur de phares (ingénieur).
Robert Louis Stevenson - Page 4 Top-of-Erraid
Erraid to Iona, par Libby Anderson.

Il n'est sans doute pas innocent que l'oncle Gordon soit dépeint sous les traits d'un cameronien intransigeant (pléonasme, si l'on parle de caméroniens !), ce qui renforce la problématique liée aux gains des naufrages (qui sont l'exact pendant maudit, "envoyé par le Mal", de la biblique manne divine), au tertre trouvé par Charles, à la mer comme création: divine ou infernale ?

Un léger regret ? Que Stevenson n'ait pas donné un peu plus d'épaisseur aux trois personnages secondaires, en premier lieu à Mary Ellen (non, je ne vais pas entonner à nouveau le couplet sur la faiblesse de peinture des personnages féminins dans l'oeuvre de Stevenson  Laughing !), ensuite à Rorie, et enfin à l'"homme sorti de la mer".
En même temps, c'est un regret qui ne l'est pas vraiment, le format nouvelle n'est pas très compatible avec la description fouillée, très tramée, de plus de deux caractères, ce qui n'est déjà pas si mal, somme toute...

En guise de dernier mot, permettez-moi de rejoindre Borges et l'auteur lui-même, il n'en reste pas moins que cette nouvelle cèle le tout meilleur du maître écossais: Si vous ne deviez lire, de votre vie, qu'un ouvrage de Stevenson, choisissez ces quelques pages-là !
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 23 Fév 2014 - 7:54

et dire que je suis déjà en état de manque... tu aurais un tout petit extrait pour finir d'enfoncer le clou ?

edit : j'allais oublier la question de l'édition : je l'ai lue dans l'intégrale chez Phebus (il y a d'autres excellentes nouvelles dans cette intégrale d'ailleurs) et pas encore vérifié le nom du traducteur.
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 23 Fév 2014 - 8:03

Bien sûr, dans le texte intégral (s'il l'est vraiment, voir message précédent), tape dans le début, les pages 97 et suivantes (commençant par "Le Ross, le promontoire de Grisapol, n’est ni haut ni large, mais les hommes l’ont laissé, jusqu’à ce jour, âpre et inculte comme Dieu l’a fait..." jusqu'à "...il n’avait rien à faire désormais qu’à pourrir dans le fouillis des algues enchevêtrées, au bruit de la clameur des merry men" page 100)  sourire .
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 2 Mar 2014 - 7:49

Olalla
Nouvelle, quarante-cinq pages environ, titre original Olalla. On la trouve parfois intitulée "Olalla des montagnes"

Olalla fut publiée pour la Noël 1885, ce qui la situe quelques mois avant la parution de L'étrange cas du Dr Jekill et de Mr Hyde.
Un jeune officier britannique est blessé lors des guerres carlistes (est-ce la première 1833-1840, ou la deuxième 1872-1876, le point a fait débat dans les cercles stevensoniens, il est ardu sinon impossible de trancher, la nouvelle est suffisamment hors du temps, c'est-à-dire intemporelle, pour que l'on évite de s'ingénier à faire parler quelques menus détails au-delà de ce pourquoi ils font signe).

 Ce fonds politique mérite toutefois qu'on s'y arrête, le docteur, celui qui à la fois introduit la nouvelle et est le prescripteur du départ du jeune officier britannique blessé vers la residencia, vieille forteresse en partie ruinée mais située en altitude, possédée et habitée par une ancienne et très noble famille composée de trois membres, la mère, le fils et la fille, antique lignage dégénéré, réduit à la pauvreté et dépeint d'emblée, sans concessions, comme abâtardi, fier et simple au sens de simple d'esprit, le trio nécessiteux subsiste recroquevillé sur lui-même.
 Pour arriver à cette prescription il faut un lien logique, il est alors fait mention d'un prêtre, à peu près le seul intercesseur entre cette famille et le reste du monde ou, disons, de la société des hommes, que le docteur décrit comme un de ses "vieux amis, malgré [leurs] professions opposées".
 On a donc d'un côté les légitimistes carlistes -ou présupposés- le prêtre et la famille descendant des "Grands" d'Espagne, et de l'autre les révolutionnaires -ou présupposés- le docteur et le jeune officier britannique.

Le premier contact de la famille est Felipe, le fils, qui vient chercher l'officier en charrette pour l'amener à la residencia. Héros et lecteur ne tardent pas à se rendre compte que l'individu est dégénéré, sauvage, peu cohérent, attardé avec parfois quelques traits qui rappellent l'extraction nobiliaire. Longtemps (à l'échelle de la nouvelle) on doit se contenter de ce seul membre de la famille, et il s'ensuit une bien curieuse relation, déroutante, entre l'officier et Felipe. Les membres féminins de la famille sont introduit (belle trouvaille de l'auteur) par un tableau d'une ancêtre au mur de la chambre assignée au lieutenant.

Ce portrait le charme jusqu'à l'obsession, il reconnaît certains traits de Felipe.
La nouvelle bascule dans l'étrange lorsque le lieutenant fait connaissance d'un second membre de la famille (la mère); le tout avec l'art consommé de Stevenson pour l'amené du déroulé de la narration et les effets psychologiques situationnels: c'est un vrai petit morceau de maîtrise de l'art du nouvelliste, une fois de plus.

Sans (trop) dévoiler,
ne pas ouvrir si vous comptez lire la nouvelle:
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 2 Mar 2014 - 9:06

toujours pas ressorti les nouvelles pour jeter un oeil à la traduction mais ravi que tu aies été charmé par cette lecture !
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 2 Mar 2014 - 15:11

Je suppose que tu n' a pas  lu tout Stevenson, Sigismond... Il a beaucoup écrit et ses meilleurs livres
ne sont pas forcément les plus connus.

A commencer par Le maitre de Ballantrae, Ceux de Falesa, Les aventures de David Balfour
(Kidnappé et Catriona), La route de Silverado...
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 2 Mar 2014 - 17:32

bix229 a écrit:
Je suppose que tu n' a pas  lu tout Stevenson, Sigismond... Il a beaucoup écrit et ses meilleurs livres
ne sont pas forcément les plus connus.

A commencer par Le maitre de Ballantrae, Ceux de Falesa, Les aventures de David Balfour
(Kidnappé et Catriona), La route de Silverado...
Pour le Maître de Ballantrae voir ce que j'en dis page précédente - j'ai Catriona, mais il semble un rien dommage de le lire avant Kidnappé. J'avance avec délectation dans Stevenson, quitte à nourrir un peu trop abondamment le fil  honte .
Ceux de Falesa, je vais venir à cette lecture; qu'as-tu pensé de La magicienne, Les Gais-Lurons, Ollala si tu as lu ces nouvelles ? (pas de ce que j'en dis, hein  :apeur: ), quel nouvelliste hors-pair, tout de même !
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyDim 2 Mar 2014 - 17:46

Oui, excellent nouvelliste ! J' ai justement lu un recueil où  Olalla  était la meilleure nouvelle avec Will
du moulin, me semble-t-il.

Sans oublier Voyage dans les Cévennes avec un ane (Un très bel itinéraire à faire à pied).
En fait l' ane était une anesse du nom de Modestine et elle fit tourner Stevenson en bourrique !
Mais quelle belle vue sur la Lozère !


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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyLun 3 Mar 2014 - 7:15

Sigismond a écrit:
quitte à nourrir un peu trop abondamment le fil  honte  

il ne faut certainement pas t'en priver!  Very Happy
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyMar 17 Juin 2014 - 20:46

Bix & Animal vous ont déjà présenté:
Ceux de Falesa
(titre original: Falesa Beach; date d'écriture probable: 1890, peut-être la touche finale fut-elle mise en 1891. 125 pages environ, 5 chapitres.)

(NB: version originale ici.)

bix229 a écrit:
CEUX  DE  FALESA

[...] Ceux de Falesa.
On sait que Stevenson est allé vivre aux Iles Samoa et  son regard sur ces iles est étonnant[/color][/font]
neuf.
Ces iles étaient  déjà ravagées par le colonialisme, l' aculturation et le trafic de copra, et Stevenson jette
un coup d' oeil étonnament empathique sur leur population.

Le narrateur du livre est un traficant de copra et il a tous les préjugés et défauts du métier :
cynique, brutal, cruel.
Il change peu à peu sous l' influence d' une femme, une indigène,  qu' il "épouse" fictivement d' abord,
puis réelement.
Ses sentiments changent, son regard sur les indigènes, leur culture aussi.
Je ne raconterai pas ce roman étonnant qui récele un mélange de subtilité, de mystère et de violence
qui en font un livre vraiment beau et nouveau.

Mais il faut dire un mot sur l' histoire du livre. Stevenson n' a pu voir de son vivant son livre publié.
Le manuscrit provoqua un véritable scandale chez ceux qu' il pensait etre ses amis.

L' histoire du "mariage", mais aussi le fait qu' un blanc vivait maritalement avec une indigène et
s' en trouvait bien.
Et parvenait meme a avoir une opinion sans trop de préjugés sur la société où il vivait. Etc.
Bref, le manuscrit fut sabré, censuré, retouché et publié de façon immonde sans que Stevenson puisse

intervenir.
Michel Le Bris aime beaucoup Stevenson, et s' est livré à un travail d' archives considérable pour
publier un manuscrit complet et digne de ce nom, ce qui n' a pas encore été fait en Angleterre,
du moins en 1994 quand il a  fait éditer le manuscrit.

Ceux de Falesa.  - La Table ronde. Coll. La petite Vermillon

animal a écrit:
Oui, très belle nouvelle, très dépaysante et dans laquelle on retrouve très bien une naïveté et une crédulité chez quasiment tous les personnages, y compris les plus véreux (pas grand monde de vraiment tout blanc d'ailleurs).

Extrait :

Citation :

Je sortis sur la véranda juste avant le lever du soleil. Ma maison était la dernière en  direction de l'est : un promontoire de falaises boisiées me cachait l'aurore. A l'ouest, une rivière rapide et froide courait à la mer, au-delà s'étendait la place du village, parsemée de  cocotiers, d'arbres à pain et de maisons. Les volets de certaines d'entre elles étaient ouverts, les autres fermés. Les moustiquaires étaient encore en place. On apercevait derrière elles les ombres de ceux qui venaient de se réveiller, assis à l'intérieur, et dehors, un peu partout, d'autres se tenaient immobiles en silence, drapés dans leurs vêtements de nuit multicolores comme les bédouins dans les illustrations de la Bible. Un calme mortel et solennel présidait à la scène ; il faisait presque froid et sur le lagon la lumière de l'aube posait des lueurs de feu.
Mais quelque chose de bien plus proche m'inquiétait. Des dizaines de jeunes hommes et d'enfants, installés en demi-cercle, surveillaient ma maison. La rivière divisait leur bande, répartie sur les deux rives. L'un d'eux se tenait sur un rocher qui en occupait le centre et tous demeuraient silencieux, assis par terre, enveloppés dans leurs couvertures, et me fixaient moi et la maison, à la manière des chiens d'arrêt. N'était-ce pas étrange ? Après m'être baigné, je revins, ils n'avaient pas bougé. Leur troupe s'était au contraire grossie de deux ou trois individus.
C'était de plus en plus étrange. Qu'est-ce qui pouvait bien les amener à rester en contemplation devant ma maison ? Perplexe, je rentrai chez moi.
Mais la pensée de ces observateurs me trottait dans la tête et je ressortis bientôt. Le soleil avait monté, mais le promontoire boisé le cachait encore ; un quart d'heure environ s'était écoulé. La foule avait beaucoup grossi. Sur la rive opposée de la rivière, une trentaine peut-être d'adultes étaient alignés et deux fois autant d'enfants, les uns debout, les autres accroupis, tous regardant ma maison. J'avais vu une fois une maison ainsi entourée dans un village des mers du Sud, mais un négociant y rouait sa femme de coups et celle-ci hurlait. Rien de semblable dans mon cas, le fourneau était allumé et sa fumée montait le plus paisiblement du monde - rien d'insolite dans ce tableau. Bien sûr, un étranger s'était installé là la veille, mais ils avaient tous pu le voir ce jour là et se rassurer sur son compte. Quelle mouche les piquait maintenant ? Je m'appuyai à la balustrade de la véranda et les observai en retour. Impossible de deviner ce qu'ils avaient en tête. De temps en temps, je voyais des enfants bavarder, mais ils parlaient si bas que le murmure de leurs voix ne me parvenait même pas. Les autres étaient comme des statues, ils me fixaient, muets et moroses, de leurs yeux brillants et il me vint en tête que les choses n'auraient pas été différentes si je m'étais trouvé au gibet et que tous ces braves gens fussent venus me voir pendre.

 En ce temps-là, Stevenson était le deuxième écrivain le plus lu au monde, après Kipling; donc le second auteur de fictions de la planète tout simplement, à une époque où les auteurs ne maniaient pas encore la caméra, et où la reconnaissance littéraire faisait de l'écrivain un summiter, où il était tout, une gloire: lit-on encore autant qu'alors, à proportion, aujourd'hui ? Bref, il était au faîte de sa notoriété.  

 Ses romans étaient publiés d'abord par des périodiques du type journaux, magazines, puis intégralement ensuite en librairie. Stevenson était une poule aux oeufs d'or. Lui vient l'envie de larguer les amarres, de partir, son choix, en compagnie de Fanny et de Lloyd Osbourne, se porte sur le Pacifique. 500 $ de location par mois (une somme alors, on peut ajouter au moins deux "0" pour se faire une idée du montant aujourd'hui), pour le bateau, plutôt adapté et confortable, quasi-luxueux.
 De plus un contrat pharamineux le lie à deux journaux américains, pour l'exclusivité de lettres qu'il adressera lors de son périple, et ce contrat doit couvrir les frais. On peut donc voguer en toute insouciance...

 Ce qui n'était pas prévu, c'est que les contrats seront d'abord revu à une baisse sévère par les deux journaux, puis les publications arrêtées purement et simplement. Ce qui n'était pas prévu non plus, c'est que les représentants de Stevenson, restés en Angleterre, l'un Colvin, chargé de la partie, disons de direction artistique des oeuvres qu'il fait parvenir, comme les autres, plutôt chargés de l'édition proprement dite et de la gestion de ses droits d'auteur (Mc Clure et Cassel) ne partagent pas les nouveaux projets littéraires de Stevenson, et attendent leur nouveau Dr Jekill et leur nouvelle Île au trésor, sans comprendre la nouvelle évolution de l'auteur, surtout cet auteur-là, qui "cartonnait" tant dans son ancienne manière.... De plus, une longue nouvelle, lorsqu'on attend un roman, ça ne convient pas trop au mode de publication en feuilletons pré-découpables pour sortie avec parcimonie et périodicité en revue...

Après moult péripéties, sabrages, retouches, ré-écritures, Falesa Beach fut publié, accolé à The bottle Imp, au grand dam de Stevenson, qui l'apprend en recevant le livre via une visite extérieure, peste contre la ponctuation, les saccages et autres mutilations de son texte. Plus longue nouvelle que roman, le livre ne trouve d'ailleurs pas son public. Stevenson, en fait projetait de l'inclure à un vaste tableau littéraire sur les mers du sud auquel il aspirait fortement, en chantier parfois (par parties) avancé à son trépas. Ladite longue nouvelle reste donc en marge de son oeuvre. L'intérêt de se la procurer dans l'édition 1994 "La petite vermillon - La table ronde" que cite Bix est que le déroulement de toutes ces péripéties est consigné par le menu par Michel Le Brix en introduction, où l'on voit que l'on peut être au firmament de la célébrité littéraire et ne pas pouvoir être publié librement. Deux autres textes courts (lettres, en somme) concluent l'ouvrage.

 Du bon travail d'éditeur, surtout quand l'on sait, comme l'a dit Bix, le travail de fourmi qu'a dû représenter le fait de reconstituer les découpages, gommer les ré-écritures, restituer la ponctuation d'origine, à base des manuscrits et cahiers Samoans de Stevenson conservés en bibliothèque ou par des collectionneurs, mais sur lesquels de grandes bibliothèques universitaires ont fini par mettre la main, somme toute très récemment, et cette compilation-là des originaux et documents de travail de Stevenson n'est sans doute pas finie, peut-être même peut-on encore croire en 2014 que quelques bonnes surprises pourraient encore voir le grand jour !

 Qu'en dire, sinon ? Assurément du grand bon Stevenson, dans son registre nouvelliste je lui préfère quand même d'autres titres, comme Les Gais-Lurons, que je mets en tête de toutes les nouvelles qu'il a écrites et que j'ai lues jusqu'à présent, ou même, par exemple Ollala...
 Je trouve son écriture très proche de celle du "Creux de la vague", ce qui n'est pas un défaut ou quelque chose de terne loin de là, est-ce la patte, ou simplement l'oreille confidente, proche, de Lloyd Osbourne ?  

 Stevenson a pris la liberté de faire narrer ce texte au "je" par son héros, un certain John Wiltshire, un beachcomber, c'est-à-dire une laisse-de-mer mais anthropique, donc plus une épave ou un détritus qu'un varech rejeté à la côte.  Ceci dans une langue que Stevenson a dû adapter, et qui s'avère très opportune, très plaisante; et encore, Stevenson s'est sans doute retenu, la vraie "langue" du héros est la bêche-de-mer, baragouin mâtiné d'anglais cockney et d'argot marin, additionné d'anglais des îles et de langages locaux, mais comment eût-on reçu le livre à Londres s'il était allé au bout de la démarche ?

 Reste le style Stevenson, sans doute plus ramassé, plus concis que jamais. S'il n'était pas possible de satisfaire Londres en pondant un énième avatar du bon-blanc-qui-vient-civiliser-le-sauvage, c'eût été contre nature, contre aussi tout ce que Stevenson voyait, il eût sans doute été possible de délayer, de rallonger - permettant de satisfaire aux exigences des calibreurs de la parution.

 Je crois qu'on a le recul pur jauger aujourd'hui combien l'entreprise était novatrice, tant du point de vue de l'éclairage des faits que des caractères; l'exotico-réalisme de Stevenson, on peut concevoir combien tout cela était hors de compréhension pour ses agents et directeurs artistiques, pour le public d'alors aussi.

J'ajoute ceci:
 Que Stevenson ait défendu son oeuvre dans sa forme originelle choisie m'a fait, en tous cas, la recevoir avec grand respect. Le seul personnage féminin y est certes faiblard en termes de peinture littéraire (comme d'habitude chez Stevenson) mais tous les autres portraits sont brossés efficacement. L'histoire, quoique sans surcroît de suspense excessif (a-t'il assez donné par le passé dans cette veine-là ?), est très digeste, le déroulé amené avec maîtrise (Stevenson, quoi....), quelques bonnes pleines pages vibrantes, presque chatoyantes de poésie retenue pour certains paragraphes et en dépit du langage narratif volontairement élu par l'auteur, et un final, disons à peu près à la hauteur, et qu'on ne dévoilera bien sûr pas...
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shanidar
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyMar 17 Juin 2014 - 22:05

Palpitant !

Après deux essais plutôt décevant il me reste à découvrir le talent de nouvelliste de l'auteur... et pourquoi pas ?? En tout cas, Sigismond, ce que tu en dis donne envie d'y revenir sereinement...
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Chamaco
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyMar 17 Juin 2014 - 22:32

bix229 a écrit:
Oui, excellent nouvelliste ! J' ai justement lu un recueil où  Olalla  était la meilleure nouvelle avec Will
du moulin, me semble-t-il.

Sans oublier Voyage dans les Cévennes avec un ane (Un très bel itinéraire à faire à pied).
En fait l' ane était une anesse du nom de Modestine et elle fit tourner Stevenson en bourrique !
Mais quelle belle vue sur la Lozère !


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Voici un passage de cet ouvrage :
citation :
"Dans une petite localité, nommée Le Monastier, sise en une agréable vallée de la montagne, à quinze milles du Puy, j'ai passé environ un mois de journées délicieuses. Le Monastier est fameux par la fabrication des dentelles, par l'ivrognerie, par la liberté des propos et les dissensions politiques sans égales.

Il y a dans cette bourgade des tenants des quatre partis qui divisent la France : légitimistes, orléanistes, impérialistes et républicains. Et tous se haïssent, détestent, dénigrent et calomnient réciproquement. Sauf, quand il s'agit de traiter ou une affaire ou de se donner les uns aux autres des démentis dans les disputes de cabaret, on y ignore jusqu'à la politesse de la parole. C'est une vraie Pologne montagnarde. Au milieu de cette Babylone, je me suis vu comme un point de ralliement. Chacun avait à cœur d'être aimable et utile pour un étranger. Cela n'était pas dû simplement à l'hospitalité naturelle des montagnards, ni même à l'étonnement qu'on y avait de voir vivre de son plein gré au Monastier un homme qui aurait pu tout aussi bien habiter en n'importe quel autre endroit du vaste monde ; cela tenait pour une grande part, à mon projet d'excursionner vers le Sud, à travers les Cévennes. "

Quand j'etais gamin j'ai dévoré "l'île au tresor"..Excellent souvenir
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MessageSujet: Re: Robert Louis Stevenson   Robert Louis Stevenson - Page 4 EmptyMar 17 Juin 2014 - 22:51

Sigismond a écrit:
J'ajoute ceci:
Que Stevenson ait défendu son oeuvre dans sa forme originelle choisie m'a fait, en tous cas, la recevoir avec grand respect. Le seul personnage féminin y est certes faiblard en termes de peinture littéraire (comme d'habitude chez Stevenson) mais tous les autres portraits sont brossés efficacement. L'histoire, quoique sans surcroît de suspense excessif (a-t'il assez donné par le passé dans cette veine-là ?), est très digeste, le déroulé amené avec maîtrise (Stevenson, quoi....), quelques bonnes pleines pages vibrantes, presque chatoyantes de poésie retenue pour certains paragraphes et en dépit du langage narratif volontairement élu par l'auteur, et un final, disons à peu près à la hauteur, et qu'on ne dévoilera bien sûr pas...
Au fil de de la lecture de l'intégrale des nouvelles (je pense que dans l'édition Phébus Libretto on s'en sort bien pour Ceux de Falesa ?) on sent bien un cheminement de l'auteur, et une volonté, c'est un métier mais il y a quelque chose qu'il est difficile de ne pas exprimer.

Pour les personnages féminins, peut-être sont ils moins détaillés mais par leurs influences parfois fortes je ne les trouve pas si faibles, moins faibles que dans d'autres lectures en tout cas.

En tout cas je suis très heureux de savoir que j'ai encore plein plein de Stevenson à lire et à relire.
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