Je m'aperçois que je n'ai pas fait de commentaire sur ma lecture de :
Compilation de textes d'écrivains turcs.
Ecrivains de Turquie. Sur les rives du soleil. Je mets ici les notes (un peu éparses) que j'ai prises pendant ma lecture (cela manque de cohérence mais j'avoue ne pas avoir été pleinement convaincue par le choix de l'éditrice -il va falloir que j'écoute le lien proposé par silou pour comprendre un peu mieux tout ça).
D'après son texte introductif, Timour Muhidine explique les choix de publication par la thématique : d'
auteurs, hommes et femmes, qui se mesurent aux deux mythes géographiques et littéraires que sont Istanbul et l'Anatolie.
Etranges choix que ceux proposés par les éditions Galaade, avec des textes parfois difficiles à appréhender, à comprendre, à replacer dans un temps narratif comme si les auteurs prenaient un malin plaisir à replier le temps, présent, passé et futur afin de proposer des histoires où les trois espaces se mêlent et nous mélangent. C'est souvent un peu déboussolée que j'ai refermé certaines nouvelles, parfois conquise, quelque fois juste interloquée.
Dire pour commencer que Sait
Faik (très bien), Mario
Levi et Enis
Batur sortent du lot, d'abord par la poésie lyrique de l'écriture et par le choix de récit autocentré, très personnel et séduisant.
Dire l'étrangeté de
Agaoglu et l'interdépendance des temps, des lieux et des personnages (Paris, Londres et la Turquie se coagulent, tout comme le personnage principale jeune femme traînant un mort : s'agit-il de son frère malade, de son père mort, de cette femme turque croisée à Paris et dont on ne sait s'il s'agit d'une femme légère ou d'une lesbienne, d'une encore vivante ou d'une déjà morte, avec un récit frôlant l'onirisme et se jouant du lecteur, le laissant quelque peu surpris, voire déstabilisé à la fin du récit).
Füruzan raconte le destin d'enfants vivants dans la pauvreté des rues d'Istanbul et propose un récit troublant et fort sur cette misère.
Erbil a une approche plus politico-littéraire, avec l'histoire de deux critiques partis en tournée de conférences dans un pays socialistes et qui s'imaginent avoir le pouvoir de diriger le monde des lettres…
Sabahattin
Ali se présente à travers deux très beaux contes à caractère sociaux (la aussi des enfants miséreux, vivants à la campagne, se débattent avec la faim, le froid, la peur… alors qu'un instituteur lutte pour l'ouverture d'une route).
Hibernation de
Devecioglu est un texte surréaliste (une étrange maison isolée en pleine cité héberge quatre drôles d'individus), n'a pas vraiment réussi à me convaincre malgré une certaine bizarrerie un voyage en bus s'achevant par une messe entre femmes (?). Il m'a sans doute manqué pas mal de clefs (historiques et politiques) pour comprendre la peur totalitaire et l'espèce de régime dictatorial présent comme une ombre dangereuse tout le long du récit.
Le jardin de
Duman est également un texte onirique mais plus poétique que politique, finissant par l'évanouissement sur une bête fantastique du protagoniste légèrement idiot (?).
En revanche j'ai beaucoup aimé la nouvelle de M.
Mungan sur les
Filles de la couture, passant légèrement du passé au présent, du temps du luxe et de la joie au temps d'un mariage qui rapproche des personnes éloignées. Sorte de bilan d'une turquie aux membres éclatées dans toute l'europe et qui cherche malgré tout à rassembler un peu de son histoire passée pour pouvoir continuer à vivre ailleurs.
Ayfer
Tunç philosophe sur l'idée qu'après l'âge de quarante ans il ne s'agit plus de méditer mais d'accepter sa vie (et surtout l'idée que les erreurs passées ne peuvent plus être rattrapées…)
Ilhan avec
Pippa propose un texte d'une grande dureté sur une histoire de filiation douloureuse et impossible et avec Sincérité s'intéresse aux relations entre chien et femme…
Rouge de
Uyurkulak, raconte la relation d'un jeune narrateur avec son grand-père phobique (depuis son retour de la guerre il ne supporte plus la couleur rouge), sorte de dénonciation à la fois drôle et subtile du poids des histoires (familiales, nationales…). J'ai beaucoup aimé.
Enfin,
Günday, dénonce le service militaire obligatoire et la bêtise soldatesque dans un texte crissant et neigeux, qui laisse un goût de suie dans la bouche.
Le thème de l'exil revient dans la plupart des textes proposés, ainsi que celui de la misère sociale et de la fuite à travers le fantastique pour supporter la lourdeur d'un pays ankylosé.