Jean-Pierre Melville

hahaha, j'aurai du mal à choisir finalement dans ceux que j'ai vu... Léon Morin a en plus Emmanuelle Riva (et sa voix !) ... Deux Hommes dans manhattan je l'ai vu avec une assez mauvaise qualité mais je me souviens de plusieurs surprises dedans et de surprises très réussies.

extrait musical et jazzy

Tiens, animal, j'ai retrouvé ma notation des films de Melville, datant de 2008. Ca vaut ce que ça vaut et ça change évidemment à chaque nouvelle vision.

Le silence de la mer 12
Les enfants terribles 13
Quand tu liras cette lettre 13
Bob le flambeur 15
Deux hommes dans Manhattan 17
Léon Morin prêtre 16
Le doulos 14
L'aîné des Ferchaux 13
Le deuxième souffle 16
Le samouraï 15
L'armée des ombres 17
Le cercle rouge 15
Un flic 11

raaaah pas vu Quand tu liras cette lettre...

tu veux dire que si tu vois Un Flic il risque de remonter par exemple ?

déjà dit sur le fil, mais ça me revient souvent, ce que j'aime beaucoup dans ses adaptations c'est sa manière de garder le texte, de le mélanger au film, l'image ne le remplace pas, ça c'est extra (en plus d'entendre parler/lire les acteurs).

A propos de Melville je viens de travailler sur les cinquante ans d'A bout de souffle et vous propose ce clin d'oeil.
Entretien avec le grand auteur

Le Samourai

L'histoire d'un tueur solitaire, Jeff Costello qui assassine le patron d'une boite jazzy et chicos et se retrouve poursuivi par l'intime conviction d'un comissaire de police et les moyens qui vont avec. Ses aliées sont deux femmes qui partagent un peu de son singulier mystère.



Quasi film de traque à la française, on passe beaucoup de temps à suivre la mécanique de la police, très silencieux pour mieux isoler, distant, presque froid (mais juste pas assez pour qu'on reste fasciné), extrêmement précis.

- -

Personnage emblématique et charismatique du tueur solitaire qui renonce, ou plutôt à déjà choisi de renoncer comme condition de son existence. Et ça passe dans trois fois rien cette cassure qui se traduit dans un serrement du coeur qui ne doit pas transparaitre. Tout le monde cherche, avec acharnement, sauf lui. Les deux femmes sa maîtresse (jouée par Nathalie Delon) et la pianiste de la boite de jazz (Caty Rosier ) sont les plus proches du tour de force d'abandonner sans tout à fait perdre l'instant.



Bonne idée de revoir ce film qui effectivement peut se faire qualifié de chef d'oeuvre, avec le luxe d'un malin petit plaisir à détourner quelques ressorts habituels (très bonne scène d'intimidation de la maîtresse par la police), et l'atmosphère avec le gris, la pluie, une alternance de luxe et de dépouillement et le rythme, rythme propre, au film, au réalisateur...

Magnifique (parlons au moins de savoir et de finesse décontractés).

Nous partageons totalement cet avis.

Bellonzo a écrit:

Nous partageons totalement cet avis.

Nous sommes d'accord.

Melville même dans certains passages ou l'artifice est trop visible ou le bricolage apparent (je pense surtout au Silence de la mer), j'en garde plus que volontiers ce côté travail pour le film/cinéma, la manipulation ou le filtre imposé sont révélés un instant, l'esprit du geste est là. Le beau geste, artisanal au bon sens du terme, est à l'écran. c'est quelque chose qui me réjouit et me rassure, c'est là que je vois un don (au spectateur mais pas seulement).

(d'autres partagent cette qualité !)

j'y reviendrai plus en détail (j'espère) mais je viens de revoir Le silence de la mer dont j'avais vu une version un peu pas terrible et j'avais trouvé le film bien mais pas au top du top du top. avec le tout beau dvd qui vient de sortir c'est une toute autre histoire (et un autre montage je crois ? ça mérite de chercher l'histoire ou les histoires du film...), une redécouverte en somme, aidée sans doute par une (re)découverte de l'auteur du livre. C'est scotchant. Un film précis qui est l'écho du cri d'amour que doit être le livre pour des tas de choses dont la culture, le(s) livre(s). rarement vu autant de livres dans un films et aussi bien filmés, utilisés... et le talent de Melville pour mettre un texte et ses enjeux en valeur...

vrai choc, vrai très beau film qui gagne en intensité. petite claque alors qu'on s'attend "seulement" à revoir un film... pas loin de couper le souffle.

animal a écrit:

j'y reviendrai plus en détail (j'espère) mais je viens de revoir Le silence de la mer dont j'avais vu une version un peu pas terrible et j'avais trouvé le film bien mais pas au top du top du top. avec le tout beau dvd qui vient de sortir c'est une toute autre histoire (et un autre montage je crois ? ça mérite de chercher l'histoire ou les histoires du film...), une redécouverte en somme, aidée sans doute par une (re)découverte de l'auteur du livre. C'est scotchant. Un film précis qui est l'écho du cri d'amour que doit être le livre pour des tas de choses dont la culture, le(s) livre(s). rarement vu autant de livres dans un films et aussi bien filmés, utilisés... et le talent de Melville pour mettre un texte et ses enjeux en valeur...

vrai choc, vrai très beau film qui gagne en intensité. petite claque alors qu'on s'attend "seulement" à revoir un film... pas loin de couper le souffle.

Un deuxième souffle qui mérite un coup de "doulos" ?
Nouveau montage ? Tu m'intrigues !

je n'en mettrai pas ma patte à couper et je n'ai pas sous la main la première version que j'ai vue... et des débuts de recherche sur le web ne me renseignent pas sur le sujet... va falloir aller creuser du côté des US et voir des reviews des peut-être plusieurs éditions vhs/dvd sorties là-bas...

pas trouvé l'info... je tente néanmoins de revenir sur le film, c'est le principal !

pour ça et essayer aussi de parler autour du film, on peut découper en plusieurs sujets...



Le film

France pendant l'occupation, un oncle et sa nièce doivent héberger un officier allemand, romantique, idéaliste, cultivé... il devra affronter le silence de ces deux personnes, avant de trouver pire. Adaptation du célèbre livre de Vercors publié illégalement pendant l'occupation. D'où une sublime séquence d'ouverture qui replace le livre dans son contexte de clandestinité et d'objet chargé de sens... c'est beau, c'est précis, pas un mot et tout est là (accessoirement bref résumé des qualités du réalisateur). Rentrons dans le vif du sujet... plutôt calme, l'essentiel du film se déroule dans une pièce où l'oncle et la nièce passent leurs soirées... rejoins après quelques jours par Verner von Ebrennac, l'allemand qui descend en civil et se met à monologuer entre espoirs et souvenirs sur l'avenir des deux pays, la musique, la littérature... il s'éprend aussi de cette femme silencieuse. Ces monologues alternent avec la lecture de morceau du livre... ça je marche toujours autant si ce n'est de plus en plus, c'est génial cette parfaite réunion d'une image, d'une voix et d'un texte... et de son sens, de son essence. L'intelligence de l'image, des silences, des attitudes faisant écho à une écriture pas bête et observatrice. Et que dire de la mise en valeur de ce que peut ou peuvent représenter des cultures ou des moyens de partage...

Cette version restaurée rend le n&b plus lisible, plus riche... reste à se repaitre des détails, des ombres, des jeux mouvants de lumière de certaines scènes...

Retour dans les silences, un regard sur le silence un soir où l'allemand, sous la neige, les observe par la fenêtre entretenir une discussion animée et apparemment joyeuse... le possible et l'impossible se font sentir et une rencontre à Paris avec ses "amis" achève de bloquer les conditions. Tout se révèle, en non dits, de l'horreur, de l'amour et de ce qui ne peut avoir lieu, un sens de la vie et du destin gâché en quelque sorte... les enjeux du films se mêlent et s'équilibrent et étant complètement entré dans le film, pendu aux paroles et aux visages, c'est terriblement émouvant, lourd...



L'adaptation

Faute d'avoir relu fraîchement le livre, en regardant le bonus et en lisant sur internet par exemple l'article de wikipedia ici on découvre les choix qui font une adaptation, principalement la scène finale (mais on a droit quand même aux dernières lignes...) ajoutée, et la relation amoureuse qui se dessine entre la nièce et l'officier, ainsi que tout le jeu de mise à nu morale et de séduction auquel se dernier se livre, la tension de son regard quand il l'observe, ses efforts à elle pour ne rien laisser paraître. Cela fait partie de l'univers du réalisateur et participe aussi à la dynamique du film qui est du genre rigoureux et vraiment construit pour être un film.



L'histoire du film

Pour résumer - les curieux se jetteront sur l'article précédemment et d'autres sources (dont le bonus), c'est dingue, le réalisateur est une légende, les détails abondent - c'est pas de moyen, pas les droits, bouts de ficelles... et grosse détermination. 27 jours de tournage effectif au moins en partie sur des chutes de pellicules, montage dans une chambre d'hôtel... et une projection test face à Vercors et un panel de résistants choisis par ce dernier, un seul disait non et Melville s'était engagé à brûler le film devant Vercors. Le pire étant que complètement à la marge, voire à contresens du cinéma établi : règles et production le film a été distribué et fait un carton. On apprend aussi qu'avec ce film s'est noué une relation de travail particulière avec son (un des sur le film car il en a épuisé plusieurs) directeur de la photographie Henri Decaë, le seul à avoir accepté et accroché à des méthodes de travail limites et peu conventionnelles pour l'époque.



Ce que ça donne dans la filmo du réalisateur

A le voir dans une version propre c'est incroyable comme ça colle au reste de la filmo sans avoir l'air d'un bricolage d'essai. C'en est pas loin d'être monstrueux, une identité visuelle, une gravité, une atmosphère subtile (malgré de vrais effets efficaces) un rythme propre et des silences... et des thèmes, un rapport à la vie. L'inspiration américaine présente, maintenant que j'en ai vus quelques uns, oui, un morceau de pensée pour Welles, et d'autres mais à il va nous falloir un Traversay...
Le sentiment d'un film fait pour être "définitif" sans beaucoup de compromis, oui, la rigueur, pour en dire beaucoup entre les évidences, laisser au spectateur le soin de voir le film en aussi grand qu'il l'est.

Les spécialistes parlent aussi d'une grosse influence pour la nouvelle vague...



Un film à voir ou revoir absolument, à tel point que je ne sais plus où je le mets dans mon référentiel cinématographique !

J'ai vu Léon Morin, prêtre et comme Queenie je n'ai pas été complètement transportée, pour d'autres raisons d'ailleurs. C'est difficile à expliquer, malgré la fidélité apparente au livre, avec des morceaux pris directement, je trouve que le film est très différent du livre. La présence de Belmondo, très intense , physique, charnel, puissante, change terriblement cette histoire, enfin peut être que cette dimension était déjà dans le livre mais je ne l'ai pas perçue.

En fait, Dieu ou pas Dieu, ce ne ma paraît presque plus vraiment le sujet. Une histoire de domination, qui m'a finalement mis mal à l'aise. J'ai eu la sensation que toutes ces femmes viennent chercher autre chose que Dieu chez Léon Morin, et que pour lui être prêtre et donc inaccessible, interdit, lui permet du coup de les garder toutes sous sa coupe, d'asseoir une puissance qui serait moindre s'il n'était qu'un homme comme les autres, cédant à la tentation. Au lieu de le trouver admirable, je l'ai trouvé malsain. Mais peut être parce que le discours sur la foi qu'il tenait m'était totalement hermétique.

Je me régale avec ces posts illustrés sur "Le samouraï" et "Le silence de la mer"... J'aimerais parfois me faire des livrets en associant scénario (ou roman dont le film s'inspire) et images du film.

Arabella a écrit:

J'ai vu Léon Morin, prêtre et comme Queenie je n'ai pas été complètement transportée, pour d'autres raisons d'ailleurs. C'est difficile à expliquer, malgré la fidélité apparente au livre, avec des morceaux pris directement, je trouve que le film est très différent du livre. La présence de Belmondo, très intense , physique, charnel, puissante, change terriblement cette histoire, enfin peut être que cette dimension était déjà dans le livre mais je ne l'ai pas perçue.

En fait, Dieu ou pas Dieu, ce ne ma paraît presque plus vraiment le sujet. Une histoire de domination, qui m'a finalement mis mal à l'aise. J'ai eu la sensation que toutes ces femmes viennent chercher autre chose que Dieu chez Léon Morin, et que pour lui être prêtre et donc inaccessible, interdit, lui permet du coup de les garder toutes sous sa coupe, d'asseoir une puissance qui serait moindre s'il n'était qu'un homme comme les autres, cédant à la tentation. Au lieu de le trouver admirable, je l'ai trouvé malsain. Mais peut être parce que le discours sur la foi qu'il tenait m'était totalement hermétique.

ben c'est à la fois fidèle et différent, adapté... difficile de dire si ce prêtre est très différent de l'un à l'autre... il est peut être rendu plus (omni)présent par la structure du film ?

ça a quelque chose d'intéressant ta vision du personnage mais en même temps on a pas l'impression qu'il va chercher les gens, ou les femmes en particulier, il est aussi un peu coincé dans un rôle et l'objet d'attentions... c'est aussi (là c'est plus la question sur son choix, sa foi... qui rejoint les questionnements de Barny) l'obscurité ou plutôt le doute sur l'exercice d'un amour "universel"... un jeu d'apparences est possible et effectivement on ne peut pas vraiment savoir. c'est un peu comme si il avait un certain élan qu'il ne doit pas arrêter ?

faudrait que je le revois de nouveau un jour, à froid...