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Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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Messages : 19316 Inscription le : 02/12/2007 Localisation : Paris
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Dim 4 Juil 2010 - 8:51
Il ne va peut être pas les chercher dans la rue, mais en même temps une fois qu'il en tient une, il ne la lâche pas, comme Barny dans le confessionnal, qui veut partir et à qui il propose de prêter des livres. Et puis cette façon dont chacune amène d'autres femmes, rien que des jeunes femmes, cela ne peut être complètement spontané, il doit quelque part avoir une sorte d'incitation. Ce défilé de jeunes femmes dans son appartement m'a vraiment mis mal à l'aise à un moment, et puis cette façon qu'il avait à un moment donné d'arriver à être le "vainqueur", même lorsqu'elles arrivaient en résistance, et là l'image, une présence physique, donne à cela une sorte d'existence qu'il n'y a pas dans le livre. Et cette sorte de soumission à sa vision du monde, et à sa personne, à sa vision du monde (Dieu si on veut) par la soumission à sa personne, à son rayonnement et à la séduction qu'il exerce, m'ont mis aussi mal à l'aise, c'est comme si au fond elles voulaient être dominées.
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Mer 24 Nov 2010 - 22:15
puisque j'ai relu la nouvelle je peux revenir sur le film, Le Silence de la mer :
animal a écrit:
L'adaptation
Faute d'avoir relu fraîchement le livre, en regardant le bonus et en lisant sur internet par exemple l'article de wikipedia ici on découvre les choix qui font une adaptation, principalement la scène finale (mais on a droit quand même aux dernières lignes...) ajoutée, et la relation amoureuse qui se dessine entre la nièce et l'officier, ainsi que tout le jeu de mise à nu morale et de séduction auquel ce dernier se livre, la tension de son regard quand il l'observe, ses efforts à elle pour ne rien laisser paraître. Cela fait partie de l'univers du réalisateur et participe aussi à la dynamique du film qui est du genre rigoureux et vraiment construit pour être un film.
Le film colle de très très près au texte, une majorité de détails se retrouve dans le film. Relire la nouvelle permet de constater que la principale différence est le développement des "scènes vécues de l'allemand" : ses souvenirs de jeunesse ou sa visite de Paris... et à la réflexion (rapide) c'est peut-être ce qui fait que le film conserve l'équilibre du livre, l'équilibre entre les français et l'allemand. Dans la nouvelle tout est perçu au travers du narrateur, l'oncle mais c'est l'allemand qui est présent, son impression et son vécu. L'image donne donc vraiment le sentiment qu'elle poursuit une des idées du livre dont ce rapport d'équilibre est la clé de voute.
C'est un choix très intelligent qui ne transgresse pas le texte et conserve toute la densité de l'atmosphère tout en échappant au blocage auquel pourrait aboutir dans le film le point de vue unique. bien qu'il ne soit pas complètement double en fin de compte mais on sort de la maison et relativement de la narration...
traversay Flâneur mélancolique
Messages : 10160 Inscription le : 03/06/2009 Age : 66 Localisation : Sous l'aile d'un ange
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Mer 24 Nov 2010 - 22:16
J'aime quand le panda nous parle de Melville !
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Mer 24 Nov 2010 - 22:24
c'est presque horriblement pragmatique comme choix, c'est ça qui est frappant. c'est un mélange de logique presque froide qui se traduit dans une forme plus... utile et émotionnelle. c'est précis. et est-ce le temps assez court entre le film et la lecture mais ce genre de constat je suis loin de pouvoir les faire tous les jours. je suis donc comme sous le coup de la surprise !
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Jeu 19 Mai 2011 - 22:55
Dans les confidences de gargouille B. Beck revient entre autres sur l'adaptation de Léon Morin, avec un certain détachement mais plutôt critique, en lui reprochant beaucoup un sur-développement de l'histoire d'amour entre Barny et ce prêtre. Faudrait que je retrouve un petit extrait. J'aime les deux, le film et le livre, possible que le film est influencé ma lecture... possible aussi que pour ajuster sa vision et sa lecture il faille se familiariser plus largement avec B. Beck/Barny. En fait on en deviendrait curieux sur ce film, car le choix d'un point de vue cinématographique est réaliste (c'est efficace) mais quel aurait été l'enjeu si le propos avait été exposé plus largement et dans le mélange avec une manière plus proche de l'écrit ?
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Sam 21 Mai 2011 - 21:57
allons y...
Citation :
Melville disait que les écrivains étaient toujours furieux de l'adaptation de leur livre au cinéma parce que, selon lui, ils ont entre-temps repensé leur livre et souhaitent au fond que l'adaptation rende compte de ce livre repensé et non du livre qu'ils ont écrit. Je ne partage pas ce point de vue, même s'il est vrai qu'un écrivain, après un certain temps, réécrirait son livre autrement : l'écriture correspond à un moment de la vie, et le passé bouge en ce sens qu'on le perçoit différemment. Il me semble pourtant que les écrivains souhaitent voir leurs livres adaptés tels qu'ils ont été écrits. Du moins, c'était mon cas. Or, Melville a faussé la relation entre Morin et Barny, en montrant celle-ci jalouse de telle fille qui va être reçue par Morin. C'est le contraire absolu : Barny agit en chien de chasse, espérant que les filles qu'elle conduit à l'abbé se convertissent. En aucun cas, Brny n'aurait voulu séduire Morin puisqu'il était prêtre. Elle est à l'opposé du personnage de séductrice de Marion. Je me souviens d'ailleurs de la scène où l'actrice qui jouait Marion s'assied sur la table de Morin en remontant sa jupe! Même très insolente et hardie, jamais une femme ne se serait conduite ainsi avec un prêtre à l'époque. Ce genre de présence fausse me choquait. Un autre jésuite, ami de la famille de Melville, aurait voulu, naturellement, qu'il n'y eût pas de baiser dans le rêve de Barny, ce baiser sur la bouche avec Morin qui n'est absolument pas dans le livre. J'étais tout à fait d'accord. J'ai horreur des baisers au cinéma, tellement banal - encore quand c'est entre deux hommes.... J'aurais voulu que la scène soit plus près du livre : Barny a été frappée de voir Morin chez lui, dans la cure, étendre des draps sur le billard, afin de préparer un lit pour un Juif. Dans son rêve les draps réapparaissent, mais cette fois pour coucher avec lui. C'est beaucoup plus fantasmatique. Melville a insisté sur l'amour de Barny pour Sabine Lévy, a privilégié tout ce qui était sexuel et scandaleux finalement, retenant dans les dialogues cette phrase de Barny sans intérêt particulier : "Je me fais l'amour avec un bout de bois", dont l'impact au cinéma est beaucoup plus fort. Ce n'est peut-être pas une phrase comme une autre, je vous l'accorde. Peut-être pire qu'une autre... Dans l'une des coupures de presse que vous m'avez apportées Melville disait à un journaliste : "Je souhaite que ce film ne montre pas l'échec d'un amour coupable mais l'histoire d'un amour plus haut, plus fort." De mon point de vue, les deux sont faux. Pour Morin, il ne s'agissait pas d'amour plus bas ou plus haut mais de l'amour général qu'il avait pour les gens. On disait de lui à l'époque qu'il aimait tout le monde sauf les vieux. Indépendamment de mon bouquin, il me semble qu'un film plus austère, où le prêtre n'aurait pas dévié de son amour général vers un amour particulier aurait été plus beau.
traversay Flâneur mélancolique
Messages : 10160 Inscription le : 03/06/2009 Age : 66 Localisation : Sous l'aile d'un ange
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Sam 13 Aoû 2011 - 11:12
traversay a écrit:
Parution le 29/09 :
GENIAL !!!!!!
Merci pour l'info !! dès le 29 je file chez mon libraire et je l'achète - Melville est mon réalisateur préféré et il me semble bien qu'il n'existait pas jusqu'à présent ou quasiment pas de bio qui lui était consacré.... une très très bonne nouvelle, un personnage qui fut non seulement un grand réalisateur mais qui a eu une existence assez chargée - d'ailleurs pour faire une sorte de transition entre le personnage et ce forum consacré à la littérature, son pseudonyme de MELVILLE date de son engagement dans la résistance en 42 pour faire hommage à l'un de ses écrivains favoris: Hermann Melville
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Jeu 8 Sep 2011 - 22:43
Requiem pour un homme seul de Xavier Canonne.
A travers l'exemple du film Le Samouraï, film emblématique de Jean-Pierre Melville, l'auteur dégage non sans une déférence quelques constantes de l'univers melvillien. Des lieux, des manières des attitudes. En renforçant le propos par quelques citations du réalisateur ou de Godard (admirateur reconnu du bonhomme). C'est aussi dans les grandes lignes un petit aperçu du travail minutieux qui se trouve derrière les films de cet auteur un peu à part et grand cinéphile. Une approche de la mise en œuvre de cet univers distant et singulier emprunt de grisaille et de solitude déterminée.
Un des bons points du livre est le choix des illustrations : films de melville ou films américains sources d'une inspiration consciencieusement digérée. Le livre est court donc ne creuse pas trop les sujets mais le panorama offert m'a semblé cohérent et juste. Un peu plus de mal sur quelques morceaux de l'épilogue et l'appréciation d'une sorte de continuité. Bien aimé, même si le plus bancal, le petit chapitre consacré à la place de la DS dans le(s) film(s) qui donne un peu de contexte d'époque autour de cette image forte et très présente dans le fond d'images à la française.
Donne une forte envie de revoir ce film, ou les autres... ce qui n'est pas forcément très difficile mais pas mal pour autant. Pas le livre indispensable mais bien.
En rappelant au passage que si j'apprécie le réalisateur je n'ai pas lu auparavant de livre ou biographie lui étant consacré.
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Sam 10 Sep 2011 - 20:42
Bob le flambeur
Le vieux jeune homme mal rasé rentre chez lui après une nuit à jouer, et à perdre... le visage fermé qui s'ouvre quand il rencontre des amis, même commissaire de police. la figure d'ancien truand rangé, derrière, l'ombre de la guerre. Il veille sur le fils d'un de ces anciens complices, un jeune homme ambitieux, séducteur, et surtout un peu jeune pour le 'milieu'.
Arrive une très jeune femme, belle, distante, à l'air un peu jeune elle aussi. Bob la prend un peu sous son aile quand un mac essaye de mettre la main dessus. Le jeune homme succombe immanquablement. elle aussi, plus tard, autrement.
Au milieu Bob, immuable, attentif, joueur. Plus tard le plan d'un casse à Deauville...
Quelque part c'est simple comme contenu, quelque part aussi ce n'est pas son plus grand film au Melville. Toujours est-il qu'il a son charme et se trouve voué à une affection indéfectible. Cette figure nostalgique y est pour quelque chose. Les pièges vulgaires tendus à la jeunesse ne se déjoue pas plus que l'affection du bonhomme pour eux, ou que celle d'Yvonne la tenancière de bar pour Bob. Un film de principes donc. Qui refuse la violence ouverte autant que possible mais dur. Et nostalgique. Non sans une certaine poésie, celle du geste et celle de la voix, celle de Melville, voix off du film ou celle de Bob.
Et si le côté garage de certains passages se ressent il y a des moments incroyables dans le film. Les images qui ne pourraient pas être autrement. Un mouvement, un choix, un décor, et c'est là. La classe désabusé n'est pas tant celle provoquée par l'image que l'image qui fait œuvre de la traduire. Et c'est bien. Et méticuleux (incroyablement quand on y pense).
Excellent personnage aussi du policier.
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Dim 20 Oct 2013 - 9:42
Deux hommes dans Manhattan (1959)
A New-York, un journaliste, Moreau (Jean-Pierre Melville), est mis à la recherche de Fèvre-Berthier délégué français à l'ONU. Dans son enquête il se fait aider par Delmas (Pierre Grasset) un photographe cynique et alcoolique. Ils partent à la recherche de sa possible maitresse et sont suivis dans cette nuit new-yorkaise par une inquiétante voiture noire.
Tourné en partie sur place et en décor naturel on sent une certaine absence de moyen mais ce n'est pas bien grave. Melville n'est pas non plus déjà l'homme des gangsters et flics mutiques en imperméables et chapeaux et ses talents sont autre chose que des images fixes.
Le passage de l'autre côté de l'Atlantique se révèle donc une belle occasion de voir la ville autrement en commençant par ses rues grouillantes à la veille des fêtes de fin d'années, ses immeubles, et une "roofline" à différentes heures de la nuit. Ambiance américaine de la ville en mutation, internationale et tellement différente. Mais, la déambulation décontractée rythmée par les passages jazzy et les rencontres nous ramène vers l'autre ville, celle du petit matin et des entre deux. La périphérie humaine, dans une certaine distance, quand les personnages du film émergent, quand la fiction prend chair. Et quand les espaces deviennent beaucoup plus libres et complexes. Plus marginaux dans l'espace et dans le temps (on en est plus au tout petit matin qu'à la nuit).
Le rythme précis du film, une intrigue qui se développe autour de la morale, de la fiction et de l'image et de cette droiture alternative et fictionnelle qu'on retrouve beaucoup chez Melville, avec l'indépendance. Le délégué est un héros de la résistance, comme le patron de l'AFP à New-York et les besoins d'arrangements de la version officielle ne sont pas en phase avec les aspirations et besoins monétaires du photographe...
La ville donc, les formes de la ville, avec un regard qui dépasse le pittoresque pour se nourrir de la vision américaine (les films, la photographie, ...) et y faire intervenir une différence. Peut-être la retenue, le rythme, ces rencontres de femmes qui restent lointaines, avec un possible, un mystère et qui sont aussi plutôt malmenées.
Film fauché et un peu étrange, en décalage avec ses personnages de journalistes un peu pourris, et les visions de New-York qui rejoignent un vrai amour de la fiction qu'on peut goûter pleinement dans le sourire final de Delmas.
Ce n'est pas l'incontournable du réalisateur mais cette deuxième vision (avec une qualité supérieure à la première du point de vue du support malgré l'absence de restauration pour le DVD) fut un vrai plaisir et encore un peu une surprise.
Un peu de jazz (enregistrement d'un morceau et occasion de profiter de pas mal des petites choses qui font qu'on peut apprécier énormément le réalisateur) ? clic
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Dim 18 Jan 2015 - 9:44
Le doulos (1962)
Sur un indispensable fond jazzy (de Paul Misraki, par exemple) et en ne fréquentant qu'occasionnellement les rues illuminées de Paris, la préférence se partageant entre les intérieurs luxueux ou traditionnels et les non-endroits d'une périphérie indistincte, grise, pas encore détruite et pas encore recontrsuitre. Surtout deux hommes Maurice (Reggiani) et Silien (Belmondo).
Le premier sort de prison, le second, son ami, à la mauvaise réputation d'indic (doulos=chapeau=indic nous explique la melvlillienne intro du film). Quand le coup de Maurice les choses se compliquent...
Et le film déjà obscur, et noir, joue du suspens des mauvaises réputations et des faux-semblants, pour ne pas dire des apparences. On délaisse un peu de la lassitude désespérée de Reggiani pour la mélancolie de Belmondo... qui n'est pas forcément un tendre, pas plus que son ami d'ailleurs. Quoique les deux rêvent d'un monde meilleur, à leur manière, avec la compagnie impossible de la discrète femme fatale ?
Les flics et les truands ça a l'air fatiguant mais suivre se film posé mais haletant est un vrai bonheur, tout y est au poil, une science du détail et l'art de ne pas trop en faire, l'art des petites choses choisies dans le décor (un masque par ci, un tableau entrevu par là), des acteurs excellents (ajouter aux deux déjà cités Michel Piccoli, Philippe March, Jean Desailly).
Encore meilleure que dans le souvenir cette histoire de choses manquées, la finesse de l'embrouille du scénario ne m'était pas autant restée. Indispensable film.
Même les bandes-annonce à l'ancienne ça ne se remplace pas :
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Un boxeur qui rate l'ouverture de sa carrière, un vieux banquier qui ne peut plus retarder sa sortie motivée par le poids d'un passé qui le rattrape. Ferchaux le banquier (Charles Vanel impeccable) engage comme "secrétaire" Maudet le boxeur (Belmondo), le temps de se mettre au vert aux Etats-Unis et de vider quelques comptes laissés garnis pour l'occasion.
Et l'occasion pour le spectateur de voir se dérouler un road movie tendu entre New-York et la Louisianne. Et qui dit changement de décor dit changement dans les rapports de force. On le sent bien venir ça, cet affrontement qui ne dit pas toujours son nom entre le vieil homme de pouvoir sans scrupule privé de son assise et le jeune bafoué, par lui-même ? qui trouve un terrain pour exercer la force et la détermination de sa jeunesse. En soi c'est assez simple et plutôt impressionnant servi par ce duo en or.
Ça devient plus intéressant et beaucoup plus trouble quand allant de paire avec l'ambiance Sud (assez bien attrapée par Melville entre la ville entrevue et le nulle part) on ajoute comme ingrédient le mauvais chantage affectif, très factice exercé par le vieux, se voulant malade et paternel... Surtout, pire encore si on croit se rendre compte que le vieux a depuis longtemps dépassé le stade où il pourrait envisager d'effacer l'ardoise et que pour notre boxeur qui n'aurait de cesse de se trahir pour de l'orgueil ou un peu d'argent l'enjeu serait d'avoir le pouvoir, du pouvoir, un semblant de pouvoir sans pour autant sombrer du côté du "riche sans foi ni loi". Vision caricatural jouée en équilibre au fil du film qui ne s'inscrit ainsi que mieux dans de très concrètes nécessités : Paris en contraste des quartiers, New-York et la fin d'une visite qui ne laisse pas de doute après les suites luxueuses ou les "quartiers résidentiels" du Sud.
Le film est très tendu dès le début, comme toujours avec des intérieurs millimétrés, les touches qui plantent le décor (comme les téléphones en sous-sol des bars parisiens), ou encore pour l'indispensable mélancolie et douleur plus profonde, presque muette pourtant, l'amie du début ou la danseuse française de la Nouvelle-Orléans.
Mélange très noir, très dur, joué et lu au cordeau (ah les parallèles contradictoires entre les dialogues et la narration en voix off !)... juste un rien rapide peut-être tant les enchaînements sont nombreux pendant cette heure et ces quarante minutes haletantes. L'impression que le film est rentré au chausse-pieds et des dehors très légèrement disparates dus au changement de continent ?
Toujours est-il que c'est dense et que c'est du très solide !
Il faut que je lise le livre de Simenon un jour pour voir ce que ça donne à l'état sauvage ces bien vilains rapports de force et d'argent...
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Sam 15 Aoû 2015 - 13:31
Oh punaise, et sur grand écran on peut le revoir pas longtemps après Le Doulos, ça passe tout seul et on profite encore plus de ce sens précis du décor, de l'éclairage, du rythme et le jeu très trompeur des faux semblants n'en est que meilleur.
On voit et entend encore mieux les détails, les petites touches d'orientalisme. L'air de rien le rapport à la ville, à la banlieue, aux barrières. La détermination tranquille, feutrée, de Silien... et finalement des vrais personnage de noir : pas vraiment gentils quand on y regarde bien, pas sans taches, surtout pour ceux qui ne les connaissent pas, mais tendance à ne pas laisser tomber et à rester égaux envers eux-mêmes.
GrandGousierGuerin Sage de la littérature
Messages : 2669 Inscription le : 02/03/2013
Sujet: Re: Jean-Pierre Melville Sam 15 Aoû 2015 - 17:44