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| Simone de Beauvoir | |
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Auteur | Message |
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Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Lun 3 Aoû 2009 - 19:00 | |
| - Marie a écrit:
- ara, voici encore une femme très influencée par Simone de Beauvoir dans son trajet, Elisabeth Badinter.
Tu peux l'entendre icidans l'émission de Vincent Josse, Les bibliothèques d'esprit critique. Je vais voir tout de suite!! - Amapola a écrit:
- Aaaaah... Que mon fils ne m'écoute pas... les jeunes filles de 15 ans sont tellement plus euh... je n'arrive pas à trouver le mot. Sérieuses? Évoluées? Mûres? Intelligentes? Bref... vous me comprenez... Si tellement plus quoique ce soit le mot, que les garçons de 15 ans... Soupir. Bon, pas toutes mais en effet...
Je crois qu'en effet (à 15 ans) dans ces domaines là, les garçons ont du retard, je désespère d'ailleurs. ^^ Ba on verra plus tard si ils changent un peu. Par contre comme tu le rajoutes, pas toutes les filles... Oh non pas toutes... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 4 Aoû 2009 - 11:54 | |
| J'ai écouté Élisabeth Badinter! Le passage sur Beauvoir est très court.(Mais le reste est aussi intéressant) Elle la compare à "la compagne de Voltaire, Madame du Châtelet". Pour elle, se sont deux femmes qui lui ont montré un "chemin" , sorte de "modèle d'identification très positif". Des femmes "capables de dire non, non aux convenances, non aux modèles dominants de la vie sociale", capables d'une liberté de penser. Elle souligne l'importance de la capacité à dire non, une force qu'il faut transmettre aux générations quelque soit leur sexe."Aujourd"hui on ne sait plus dire Non." S'en suit un extrait d'archives sonores de l'INA où l'on entend Beauvoir avec sa voix si sèche parler de la maternité de la femme en ces termes: "Je suis tout simplement contre un certain asservissement de la femme à travers la maternité. " L'extrait me semble connu, en tout cas dans mon cas je l'avais déjà entendu. Mais c'est toujours intéressant et je ne m'en lasse pas. |
| | | eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 4 Aoû 2009 - 14:13 | |
| Tiens, dans l'interview de Joyce Carol Oates dans Le Monde, en page 2, ici), on peut lire : - Citation :
- Et Simone de Beauvoir ?
C'est un grand écrivain, mais je trouve sa vie avec Sartre, sa soumission à lui, pathétique et peu en accord avec son féminisme.
Vous semblez sensible aux clichés véhiculés sur Beauvoir par certaines femmes et que démentent toute sa vie, son oeuvre, sa lucidité constante, sa liberté. Est-ce son amour pour Sartre qui dérange tellement ?
Je ne peux pas comprendre leur histoire. Je sens Beauvoir très dépendante de Sartre, victimisée par lui. Mais peut-être n'ai-je pas assez lu pour vraiment juger. | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 4 Aoû 2009 - 15:44 | |
| - Citation :
- Et Simone de Beauvoir ?
C'est un grand écrivain, mais je trouve sa vie avec Sartre, sa soumission à lui, pathétique et peu en accord avec son féminisme.. Je pense qu'effectivement Beauvoir avait besoin d'être dominée intellectuellement. Mais de là à parler de "soumission pathétique" c'est exagéré... De plus, les amours "nécessaires" et celles "contingentes", laissaient une part de liberté à chacun. Liberté choisie et accordée, elle a donc voulu ce mode de relation, cette façon de vivre. Ce n'a pas du être toujours facile, mais je pense que dans ce domaine , il est impossible d'être totalement libre. Que chacun regarde la relation qu'il entretient avec l'Autre et se demande à quel point le fait de l'aimer, l'entrave. Il ne faut pas attaquer Beauvoir sur ce point là. Ce serait assez lâche et c'est une façon de mettre de côté la féministe qu'elle était et toutes ses idées, que sa vie privée ne trahissait en rien. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 11 Aoû 2009 - 14:05 | |
| Je suis entrain de lire Lettres à Sartre en NRF , trouvé d'occase (de 1930 à 1939 seulement, mais je compte trouver avec un peu de chance le deuxième tome en occase également).
À vrai dire je ne m'attendais pas tout à fait à ça. Beauvoir décrit sa vie en détails à Sartre, avec des repaires temporels, presque à la manière d'un journal.
Dans ses lettres, on voit à quel point Sartre lui est indispensable, et à quel point elle lui "doit tout". je cite:
"Mon doux petit, je vous embrasse passionnément-je voudrais que vous m'enfermiez dans vos deux petits bras. c'est exactement samedi notre anniversaire: le 14 Octobre - vous m'avez fait une vie si belle, mon amour, je vous dois tout ce que j'ai tout ce que je suis. Oh, ce soir je ne peux pas supporter de ne plus vous avoir,
Votre charmant petit Castor"
Et variations... Je la savais fragile, mais à ce point là:
"Je vous aime, mon doux petit, je voudrais tant parler avec vous - je suis contente chaque foi que je vais voir quelqu'un de nouveau, puis aussitôt déçue car le plaisir que j'en espère c'est celui que vous seul pouvez me donner. Je suis mutilée sans vous, mon amour. Ce n'est pas exactement douloureux, mais c'est triste. Il 'y a que vous au monde qui comptiez pour moi.(...)"
ou encore
"Mon amour, mon cher amour J'ai le coeur tout en bouillie ce soir, je suis perdue de passion pour vous et douloureusement au possible - ça a couvé tout le jour, et ça m'est tombé dessus comme une tornade dans les rues de Douarnenez où je me suis mise à sangloter; (...)"
Il y a des formules tout à fait belles et touchantes:
"Je vous aime - Je ne sais pourquoi j'ai choisi pour vous écrire un moment où je suis déjetée."
"Je supporte mal l'idée de vivre plus longtemps sans vous - je m'ennuie de vous à mourir de consomption."
Je rappelle que Sartre était mobilisé au début de la guerre et que leur séparation durera quelque chose comme 2 ou 3 ans.
À travers ces lettres ont sui donc le quotidien de Beauvoir surtout durant l'année 1939, ses tentatives pour rejoindre Sartre, ses liaisons masculines et féminines, ses voyages, son travail de professeur, son travail d'écriture (à ce moment là elle commence L'invitée)etc... Elle dit tout et apparemment ne cache rien. Il y a des moments où elle me glace.
"Je suis écoeurée de me dépenser pour des gens qui ne m'apportent rien."
"On s'est embrassées, elle a été contente, puis elle m'a demandé avidement combien de fois par semaine je comptais la voir, j'ai dit deux et elle s'est attristée aux larmes; pour finir j'ai promis 1h.1/2 de Kant un matin, une soirée et un morceau de mercredi; en fait j'ai bien le temps, c'est plutôt que ça m'emmerde un peu. Alors elle a été contente et elle est partie toute tendre et gaie. Je la trouve plaisante au possible, et surtout dans la tendresse, mais vous ne sauriez croire à quel point m'ennuient ces tendresses, de Védrine, de Sorokine."
"Sorokine me suivait toujours comme une pauvre chienne(...)"
Il y a de moments, on se demande à quel point sont calculées ses relations avec les gens.. ça tient des liaisons dangereuses...
C'est une autre face de sa personne, mais heureusement il y a plein de moment où elle sait se montrer pleine de caractère, d'indépendance, de vie, d'intérêt, de curiosité, de poésie et d'intelligence! Mais certains passages démontrent fort qu'elle n'est pas un "mythe" tel qu'on a voulu le créer, mais un être humain avec des défauts et des qualités, qui connaient des difficultés dans sa vie de tous les jours comme nous autres. (problèmes d'argent, difficultés relationnelles, mensonges, travail, erreurs, ennuies, maladie etc...) Cela m'a fait bizarre quand elle décrit des lieux où elle a été, et que je connais, tel qu'Annecy, la Cluzat etc... Il y a là une réalité affolante.
On suit ses lectures et le cheminement de sa pensée, sans fioritures, en toute sincérité, puisqu'elle ne pensait pas que ses lettres seraient publier. Même si elle avoue qu'un de ses plus anciens fantasmes l'incitait à imaginer que son existence entière s'enregistrait quelque part sur un magnétophone géant.
Cette nouvelle découverte n'entame en rien, l'admiration que j'ai pour Beauvoir. Elle a des convictions, du caractères et des idées, même si sa vie privée n'est pas impossible à critiquer. J'attends de voir ce que je ferai de la mienne.
En tout cas cela me conforte dans l'idée que ses roman sont très largement autobiograhiques, quoiqu'elle en dise.
Une question qui me taraude depuis un certain temps, sans grand lien avec ce fil, mais à la lecture de ces lettres, j'y repense. Qu'est-ce que ces tirets que l'on trouve des fois en poésies, dans des romans, ou dans des lettres, qui s'intercallent en milieux de phrases sans raisons? Merci d'avance pour la réponse. |
| | | Babelle Zen littéraire
Messages : 5065 Inscription le : 14/02/2007 Localisation : FSB
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 11 Aoû 2009 - 18:15 | |
| Quelqu'un a-t-il lu La Vieillesse de Beauvoir? Il me semble que c'est en poche en 2 volumes (épuisés d'ailleurs je crois). Je voudrais savoir ce que vaut le texte et si c'est psycho ou socio. | |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 11 Aoû 2009 - 21:03 | |
| Puisque tu en parles, je re-poste cet extrait (je n'ai pas lu l'intégralité de La force des choses)...Est-ce une des partiesde La vieillesse?) Il se trouvait au début de ce fil... - coline a écrit:
- La vieillesse :
"De loin on la prend pour une institution : mais ce sont des gens jeunes qui soudain se trouvent être vieux. Un jour, je me suis dit : « J’ai quarante ans ! « Quand je me suis réveillée de cet étonnement, j’en avais cinquante .La stupeur qui me saisit alors ne s’est pas dissipée.
Je n’arrive pas à y croire. Souvent quand je dors je rêve que j’ai en rêve cinquante-quatre ans, que j’ouvre les yeux et que j’en ai trente : « Quel affreux cauchemar j’ai fait ! « se dit la jeune femme faussement réveillée. Parfois aussi, avant que je revienne au monde, une bête géante s’assied sur ma poitrine : « C’est vrai ! C’est le cauchemar d’avoir plus de cinquante ans qui est vrai ! « Comment ce qui n’a ni forme ni substance, le temps, peut-il m’écraser d’un poids si lourd que je cesse de respirer ? Comment ce qui n’existe pas, l’avenir, peut-il si implacablement se calculer ?
Pour m’en convaincre, je n’ai qu’à me planter devant la glace. A quarante ans, un jour, j’ai pensé : « Au fond du miroir la vieillesse guette ; et c’est fatal, elle m’aura. » Elle m’a. Souvent je m’arrête, éberluée, devant cette chose incroyable qui me sert de visage. Je comprends la Castiglione qui avait brisé tous les miroirs. Il me semblait que je me souciais peu de mon apparence. Ainsi les gens qui mangent à leur faim et qui se portent bien oublient leur estomac ; tant que j’ai pu regarder ma figure sans déplaisir, je l’oubliais, elle allait de soi. Rien ne va plus. Je déteste mon image : au-dessus des yeux, la casquette, les poches en-dessous, la face trop pleine, , et cet air de tristesse autour de la bouche que donnent les rides. Peut-être les gens qui me croisent voient-ils simplement une quinquagénaire qui n’est ni bien ni mal ,elle a l’âge qu’elle a. Mais moi je vois mon ancienne tête où une vérole s’est mise dont je ne guérirai pas.
Elle m’infecte aussi le cœur. J’ai perdu ce pouvoir que j’avais de pouvoir séparer les ténèbres de la lumière, me ménageant, au prix de quelques tornades, des ciels radieux. Mes révoltes sont découragées par l’imminence de ma fin et la fatalité des dégradations ; mais aussi mes bonheurs ont pâli . La mort n’est plus dans les lointains une aventure brutale ; elle hante mon sommeil ; éveillée, je sens son ombre entre le monde et moi : elle a déjà commencé. Voilà ce que je ne prévoyais pas : ça commence tôt et ça ronge. Peut-être s’achèvera-t-elle sans beaucoup de douleur, toute chose m’ayant quittée, si bien que cette présence à laquelle je ne voulais pas renoncer, la mienne, ne sera plus présence à rien, ne sera plus rien et se laissera balayer avec indifférence. L’un après l’autre ils sont grignotés, ils craquent, ils vont craquer les liens qui me retenaient à la terre.
Oui, le moment est arrivé de dire : jamais plus ! ! Ce n’est pas moi qui me détache de mes anciens bonheurs, ce sont eux qui se détachent de moi : les chemins de montagne se refusent à mes pieds. Jamais plus je ne m’écroulerai , grisée de fatigue, dans l’odeur du foin ; jamais plus je ne glisserai solitaire sur la neige des matins. Jamais plus un homme. Maintenant, autant que mon corps, mon imagination en a pris son parti. Malgré tout, c’est étrange de n’être plus un corps ; il y a des moments où cette bizarrerie, par son caractère définitif, me glace le sang. Ce qui me navre, bien plus que ces privations, c’est de ne plus rencontrer en moi de désirs neufs ; ils se flétrissent avant de naître dans ce temps raréfié qui est désormais le mien. Jadis les jours glissaient sans hâte, j’allais plus vite qu’eux, mes projets m’emportaient ..Maintenant, les heures trop courtes me mènent à bride. abattue vers ma tombe. J’évite de penser : dans dix ans, dans un an. Les souvenirs s’exténuent, les mythes s’écaillent, les projets avortent dans l’œuf : je suis là et les choses sont là. Si ce silence doit durer, qu’il semble long, mon bref avenir."
Simone de Beauvoir (La force des choses II)
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 11 Aoû 2009 - 21:19 | |
| - coline a écrit:
- Puisque tu en parles, je re-poste cet extrait (je n'ai pas lu l'intégralité de La force des choses)...Est-ce une des partiesde La vieillesse?)
Non, La force des choses est le 3ème tome de ses autobiographies. Tandis que La vieillesse est un essai indépendant et plus tardivement publié, en 70 il me semble, 16 avant sa mort. Elle en parle ici: https://www.youtube.com/watch?v=XHVTKy1cmuc Quant à ta question Babelle, Beauvoir dans cet essai aborde tous les domaines, comme elle les a tous abordés dans Le deuxième Sexe, mais ce concernant la Femme. C'est à dire qu'elle traite la vieillesse sous plusieurs aspects: biologique, social, historique, psychanalytique, etc...pour essayer de cerner la totalité, ou du moins la plus grande partie, du problème, si cela en est un. Est-intéressant? J'aurai tendance à dire oui. Mon avis étant tout à fait subjectif.
Dernière édition par Lara le Mar 11 Aoû 2009 - 21:56, édité 2 fois |
| | | coline Parfum livresque
Messages : 29369 Inscription le : 01/02/2007 Localisation : Moulins- Nord Auvergne
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 11 Aoû 2009 - 21:38 | |
| - Lara a écrit:
- coline a écrit:
- Puisque tu en parles, je re-poste cet extrait (je n'ai pas lu l'intégralité de La force des choses)...Est-ce une des partiesde La vieillesse?)
Non, La force des choses est le 3ème tome de ses autobiographies. Tandis que La vieillesse est un essai indépendant et plus tardivement publié, en 70 il me semble, 16 avant sa mort.
Elle en parle ici: https://www.youtube.com/watch?v=XHVTKy1cmuc Merci Lara...notre "spécialiste Simone de Beauvoir"!... Ce qu'elle dit dans ce texte parle énormément quand on a "passé...je dirais..."un certain âge"... « C’est vrai ! C’est le cauchemar d’avoir plus de cinquante ans qui est vrai ! « Comment ce qui n’a ni forme ni substance, le temps, peut-il m’écraser d’un poids si lourd que je cesse de respirer ? Comment ce qui n’existe pas, l’avenir, peut-il si implacablement se calculer ?
Pour m’en convaincre, je n’ai qu’à me planter devant la glace. A quarante ans, un jour, j’ai pensé : « Au fond du miroir la vieillesse guette ; et c’est fatal, elle m’aura. » Elle m’a. Souvent je m’arrête, éberluée, devant cette chose incroyable qui me sert de visage. Je comprends la Castiglione qui avait brisé tous les miroirs. Il me semblait que je me souciais peu de mon apparence. Ainsi les gens qui mangent à leur faim et qui se portent bien oublient leur estomac ; tant que j’ai pu regarder ma figure sans déplaisir, je l’oubliais, elle allait de soi. Rien ne va plus. Je déteste mon image : au-dessus des yeux, la casquette, les poches en-dessous, la face trop pleine, , et cet air de tristesse autour de la bouche que donnent les rides. Peut-être les gens qui me croisent voient-ils simplement une quinquagénaire qui n’est ni bien ni mal ,elle a l’âge qu’elle a. Mais moi je vois mon ancienne tête où une vérole s’est mise dont je ne guérirai pas."Simone de Beauvoir ( La force des choses II) | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Mar 11 Aoû 2009 - 22:01 | |
| - coline a écrit:
- Ce qu'elle dit dans ce texte parle énormément quand on a "passé...je dirais..."un certain âge"...
Âge qu'on passera toutes. Même si à 15 ans tout ça me paraît si loin... et pourtant... Donc un texte qui doit ce lire, il me semble, à différentes périodes, en fonction de l'intérêt qu'on porte au sujet. Et/ou à l'auteur... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Lun 26 Oct 2009 - 11:37 | |
| Mémoires d'une jeune fille dérangée de Bianca Lamblin Je déplace mon poste sur le fil de Beauvoir et le complète. Et bien hier je me suis couchée très tard pour avoir la réponse. Résultat, le mythe se détériore encore un peu plus... Mais cela ne change rien pour moi, Beauvoir parfaite, c'était impossible. Beauvoir, humaine, avec défauts et qualités est plus réaliste. Vue par Bianca, elle prend des allures de monstre d'égoïsme, de femme jalouse, complètement lunatique... L'indépendance sentimentale... elle en était très loin... Quand certains disent que malgré elle, elle a répété avec Sartre le modèle habituel.... Il n'y a pas que de le calomnie là-dedans... Mais je demande à voir si d'autres ont trouvé un équilibre plus enviable. Je cite: "« Sartre se plaisait dans la compagnie des femmes, qu'il trouvait moins comiques que les hommes; il n'entendait pas, à vingt-trois ans, renoncer pour toujours à leur séduisante diversité. Entre nous il s'agit d'un amour nécessaire: il convient que nous connaissions aussi des amours contingentes », écrit Simone de Beauvoir dans la Force de l'âge. Ainsi apparaît-il, par-delà ce jargon philosophique, qu'en cette première phase de leurs rapports, c'est bien Sartre qui, animé d'un besoin irrépressible de conquêtes féminines, avait imposé au Castor ce pacte qui, si l'on y réfléchit, ne diffère du comportement habituel des hommes mariés, bourgeois ou ouvriers, que par un point important: l'engagement de tout raconter à l'autre des « amours contingentes ». Un second point le rendait original, c'est la réciprocité: du moment que le Castor lui laissait toute liberté, qu'importait à Sartre de savoir qu'elle, de son côté, s'abandonnait à des épanchements amoureux? Au contraire, c'était pour lui une sécurité, un gage de sa propre liberté. D'ailleurs, il profita bien plus tôt et plus souvent qu'elle de cette permission. Ce qui m'apparut, dans le temps où je fis leur connaissance, comme un pacte inédit, mais qui avait un fondement de réciprocité et d'égalité, s'est révélé à moi, bien plus tard, comme un « truc» inventé par Sartre pour satisfaire ses besoins de conquête, et que Simone de Beauvoir avait été contrainte d'accepter. Toute la justification philosophique élaborée sur ce thème cachait une espèce de chantage: « C'est à prendre ou à laisser! » Et puis, avec de beaux discours, que ne peut-on obtenir? Sur ce chapitre, Sartre était imbattable. Castor avait peut-être été sa première dupe. " Par contre bizarrement, à travers le livre de Bianca, même si Beauvoir paraît sous les traits d'une femme assez mauvaise, on arrive toujours à l'excuser, car la raison de sa méchanceté est toujours en lien avec Sartre. Elle veut protéger sa relation avec lui, et n'hésite pas à balayer tous ceux qui se métraient sur leur chemin. C'est un autre visage de Beauvoir qui apparaît sous la plume de Bianca. Quelle est la part de vérité, quelle est la part de mensonge? Une parole contre une parole. Les autobiographies de Beauvoir ne présentent pas les choses sous le même angle. Allez savoir où se situe la vérité. A travers Lettres à Sartre, certaines réflexions de Beauvoir nous laissent imaginer qu'elle n'était pas un ange, mais elle n'en reste pas moins d'une intelligente fulgurante, d'une sensibilité dingue et d'une impressionnante conviction! Ces ouvrages sont très intéressants, je préfère ses romans qui révèlent des psychologies fouillées et intemporelles, plutôt que ses essais qui ont terriblement vieilli... Je continue à admirer cette femme même si je sais qu'elle n'avait rien d'une héroïne et qu'elle n'était qu'humaine. Quelqu'un a-t-il lu le livre de Lamblin? J'ai souri, à un moment j'ai retrouvé la comparaison que j'avais osée formuler aves Les liaisons dangereuses de Laclos dans la bouche de Lamblin. Beauvoir et Sartre des manipulateurs? Je cite: Je me rends compte à présent que j'ai été victime des impulsions donjuanesques de Sartre et de la protection ambivalente et louche que leur accordait le Castor. J'étais entrée dans un monde de relations complexes qui entraînaient des imbroglios lamentables, des calculs minables, de constants mensonges entre lesquels ils veillaient attentivement à ne pas s'embrouiller. (...). Tel est, en tout cas, le schéma selon lequel on peut comprendre aussi bien l'histoire d'Olga Kosakievicz que la mienne. Leur perversité était soigneusement cachée sous les dehors bonasses de Sartre et les apparences de sérieux et d'austérité du Castor. En fait, ils rejouaient avec vulgarité le modèle littéraire des Liaisons dangereuses. Par contre quelque chose m'a glacé, car elle peut avoir une certaine vérité. A un moment Bianca prétend n'avoir été que de la chaire à littérature comme l'a été Olga et d'autres (voir l'Invitée)... Heureusement je retrouve dans les paroles de Bianca, la Beauvoir que je préfère voir: "Puis Simone me raconta son combat pour vaincre les préjugés de son milieu et obtenir le droit de faire des études supérieures, et enfin sa rencontre avec un groupe de normaliens: Herbaud, Sartre et Nizan. Pour clore ce récit, comme en un final habilement préparé, elle me dit: « Celui qui était le plus laid, le plus sale, mais aussi le plus gentil et suprêmement intelligent, c'était Sartre. » Et je sus immédiatement qu'il était l'amour de sa vie. Elle m'exposa quel genre de relations existaient entre eux: pas de mariage, surtout pas de mariage; pas d'enfants, c'est trop absorbant. Vivre chacun de son côté, avoir des aventures sentimentales et sexuelles : leur seule promesse était de tout se raconter, de ne jamais se mentir. En résumé, une liberté totale dans une transparence parfaite. Programme ambitieux! Ils voulaient avant tout vivre une existence riche de voyages, de rencontres, d'études et d'échanges entre gens intelligents, une vie où l'on pourrait donner sa mesure et peut-être atteindre une renommée capable de transmettre une pensée neuve aux générations futures. " Je vous mets également un résumé pris sur le site de Decitre: - Citation :
- A 17 ans, Bianca Lamblin se prend de passion pour son professeur de philosophie, Simone de Beauvoir.
Amitié amoureuse à laquelle s'ajouta bientôt une liaison avec Jean-Paul Sartre. Puis, à la défaite de 1940, c'est la rupture : Bianca est brutalement abandonnée, exclue du " trio amoureux " auquel elle a cru, au moment même où son origine juive inaugure pour elle une vie de périls, d'angoisse et de deuils. Mais ce n'est qu'un demi-diècle plus tard, en lisant les Lettres à Sartre et le Journal de guerre de Simone de Beauvoir, que Bianca découvrira de quelle trahison, de quel mépris elle a été, dès le début, victime... Un document retentissant, qui ne laissera indifférent ni les admirateurs ne les adversaires du philosophe et du " Castor ". Parfois on est un pion qu'on déplace ou qu'on laisse tomber. Si l'on est juive et que la trahison a lieu en février 1940, on peut garder la blessure sa vie entière. Ceux qui jouent à la poupée s'appellent Sartre et Beauvoir. Celle qui vit un désastre personnel et historique est Bianca Lamblin.
Même si à la fin Bianca déclare que Beauvoir et Sartre ne lui ont fait que du mal, je retiens quant à moi ce passage: "Pour finir ces évocations, je veux encore raconter comment, un jour, vers la fin de sa vie, Simone de Beauvoir me posa l'ultime question: « Que penses- tu, en fin de compte, de notre amitié, de toute notre histoire?» Après avoir réfléchi un moment, je lui ai répondu: « Il est vrai que vous m'avez fait beaucoup de mal, que j'ai beaucoup souffert par vous, que mon équilibre mental a failli être détruit, que ma vie entière en a été empoisonnée, mais il est non moins vrai que sans vous je ne serais pas devenue ce que je suis. Vous m'avez donné d'abord la philosophie, et aussi une plus large ouverture sur le monde, ouverture que je n'aurais sans doute pas eue de moi-même. Dès lors, le bien et le mal s'équilibrent. » J'avais parlé spontanément, avec sincérité. Simone de Beauvoir me serra les mains avec effusion, des larmes plein les yeux. Un grand poids de remords était enfin tombé de ses épaules. " |
| | | Cachemire Sage de la littérature
Messages : 1998 Inscription le : 11/02/2008 Localisation : Francfort
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Jeu 29 Oct 2009 - 15:36 | |
| Je viens de finir une longue nouvelle "la femme rompue". Il s'agit de l'histoire d'une mère au foyer dont le mari est médecin. Elle découvre un jour qu'elle est trompée par ce dernier qui a une liaison avec une avocate très indépendante. Dans ce plaidoyer assez pénible pour l'indépendance féminine, Beauvoir s'en donne à ceour joie pour dégoûter toute femme de rester dépendante d'un homme. Une lecture qui, peut-être, était nécessaire dans les années 50 mais qui paraît caricaturale aujourd'hui. Je me suis demandée quelle part de ressenti et d'expérience avait mis Beauvoir dans ce livre, elle qui, trompée par Sartre, a sans doute eu besoin d'écrire sur ce thème pour s'en libérer ??? | |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Jeu 29 Oct 2009 - 17:42 | |
| - Cachemire a écrit:
- Je viens de finir une longue nouvelle "la femme rompue". Il s'agit de l'histoire d'une mère au foyer dont le mari est médecin. Elle découvre un jour qu'elle est trompée par ce dernier qui a une liaison avec une avocate très indépendante. Dans ce plaidoyer assez pénible pour l'indépendance féminine, Beauvoir s'en donne à ceour joie pour dégoûter toute femme de rester dépendante d'un homme. Une lecture qui, peut-être, était nécessaire dans les années 50 mais qui paraît caricaturale aujourd'hui. Je me suis demandée quelle part de ressenti et d'expérience avait mis Beauvoir dans ce livre, elle qui, trompée par Sartre, a sans doute eu besoin d'écrire sur ce thème pour s'en libérer ???
Je l'ai lu il y a trop longtemps pour m'en bien souvenir. Le féminisme de Beauvoir n'est pas toujours en lien avec son histoire personnelle, bien sûre que celle-ci influe, bien sûre que le model "amour contingent, amour nécessaire" n'a pas été une réussite totale, mais il ne faut pas oublié que Beauvoir, indépendamment de Sartre, est aussi une romancière et philosophe à part entière! Le deuxième Sexe n'a pas été écrit par ressentiment à l'égard de Sartre! Il a été écrit à la suite d'une réflexion qui dépassait sa propre expérience! Après la nouvelle dont tu parles a été écrite quand Beauvoir avait 59 ans... Peut-être contient-elle un peu de désillusion et une certaine amertume... Mais aussi très certainement de la réalité! Caricaturale, non je ne le pense pas. Il doit exister des femmes dans ce cas là, même sûrement plus qu'on ne le pense. Et de mon point de vu, la dépendance, qu'on soit de ce siècle ou d'un autre, n'est en aucun cas une bonne chose. Après, je t'accorde, sans trop de difficultés, que les nouvelles de Beauvoir ne sont pas ce qu'elle a fait de mieux. Mais je ne pense pas qu'elle ait écrit motivée par quelques haines ou envie de vengeances, ni en voulant dire : "Moi, je n'ai pas réussi, alors aucune ne réussira, voyez ce qui vous attend toutes." Beauvoir avait des défauts, mais celui là est bien trop bas pour elle. Elle ne prends pas plaisir aux malheurs des autres, même s'il reflète le sien. Et encore la configuration n'est pas la même, mais bien plus complexe! En aucun cas elle n'a été trompée par Sartre, au vu de leur engagement si particulier. Après intérieurement, il en va sûrement tout autrement... Mais elle n'est plus là pour en parler, et ses autobiographies ne sont que ce qu'elle a bien voulu dévoiler. |
| | | Camille19 Main aguerrie
Messages : 484 Inscription le : 24/06/2009 Age : 34
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Lun 18 Oct 2010 - 15:57 | |
| La force de l'âge
Ce livre se divise en deux grandes parties : la première, qui dure jusqu'en 1939 voit une Simone de Beauvoir enfin émancipée de la famille petite bourgeoise dans laquelle elle est née s'épanouir, voyager, nouer des amitiés, renforcer son lien avec Sartre, s'interroger sur la vie et la littérature, et défendre avec force sa liberté, tout cela d'une manière qui reste agréablement insouciante. Dans la deuxième partie, le déclenchement de la Seconde Guerre Mondiale met fin à cette vie de découverte et de libertés et remet nécessairement en question certaines des certitudes de l'écrivaine.
J'avais déjà été complètement happée par Les mémoires d'une jeune fille rangée et ce second tome autobiographique ne m'a pas déçue : le propos est passionnant et pas une seule fois on ne ressent la moindre longueur. Tout comme dans le premier tome, je me suis à certains moments fortement identifiée avec le personnage. Son regard rétrospectif sur elle même, qui tente sans relâche d'expliquer pourquoi l'auteure est devenue ce qu'elle est devenue, est lucide, intelligent et sans concession. Tout ce travail autobiographique nous donne l'impression de connaître le personnage depuis les grands traits de personnalité jusque dans le moindre détail. Dans la première partie, Simone, enfin émancipée de son milieu, se donne avec une passion féroce à la vie et au bonheur : elle arpente des régions entières à pied, voulant découvrir dans le moindre détail tous les pays, tous les paysages, tous les détails, toutes les impressions et toutes les sensations. Ses discussions avec Sartre démontrent aussi une volonté de tout connaître de l'âme humaine, depuis son ensemble grâce à leurs discussions philosophiques, jusqu'aux moindres petits détails de chaque personnalité : ils peuvent débattre pendant des heures de chaque personne de leur entourage. Cette appétit fougueux pour la vie, cette volonté de tout avoir vu, vécu et connu, ce refus de faire des concessions aux exigences de la vie comme aux exigences d'autrui, emmène le lecteur avec lui sans difficulté, et on se passionne pour cette vie de découverte.
Dans la deuxième partie, on observe comment Simone de Beauvoir, qui a toujours refusé que la réalité ne se plie pas à ses désirs, n'aura d'autre choix que de comprendre que parfois on ne peut que plier devant le poids de la réalité, et qu'autrui et ses volontés existent tout autant qu'elle même. Tout ce cheminement retracé, cette évolution des traits de caractère est décrit de façon brillante, on sent l'intelligence de l'écrivaine à chaque ligne du roman.
Parallèlement à cette réflexion sur sa propre évolution, Simone de Beauvoir nous offre le plaisir de nous plonger dans une époque, celle de l'avant-guerre, où elle nous décrit tout le milieu artistique, littéraire, théâtral. Dans la deuxième partie, le témoignage de la guerre nous donne l'impression de vivre l'horreur de l'intérieur et nous fait ressentir le caractère intolérable de tout ce qui s'est passé.
Mais surtout, au delà de ce témoignage historique passionnant, on assiste à la naissance en tant qu'auteurs de Sartre et de Beauvoir, on comprend le pourquoi du comment de la genèse de leurs oeuvres de jeunesse, ce qui donne d'ailleurs envie de s'y plonger. La façon dont Simone de Beauvoir met en relation sa personnalité et ses opinions de l'époque ont pour suite logique l'explication de la façon dont sont nés ses premiers romans, notamment L'invitée, livre qu'on suit depuis les premières idées jusqu'à sa publication finale, ce qui aura pour effet de faire entrer l'écrivaine dans les cercles littéraires de son époque, où elle côtoie Camus, Queneau, Merleau-Ponty, Cocteau et autres hommes de lettres.
Je ne peux que vous recommander chaudement la lecture de ce deuxième tome, dont on ne voit pas se tourner les 700 pages tant Simone de Beauvoir sait nous emmener avec elle, par la lucidité de ses réflexion, la justesse de son ton, et surtout pas l'extraordinaire force de vie, l'appétit violent pour le bonheur qui ne cesse de se dégager tout au long de son écrit et fait la plus grande force de ce livre. | |
| | | Gwen90 Espoir postal
Messages : 21 Inscription le : 24/09/2013 Age : 34 Localisation : Paris
| Sujet: Re: Simone de Beauvoir Jeu 26 Sep 2013 - 20:33 | |
| Je vais apporter ma maigre contribution à ce sujet où il y a tant à dire.
Je suis en pleine lecture de son deuxième volet de son autobiographie à savoir La force de l'âge. Je le trouve passionnant. Ce que je déplore le plus, c'est mon manque de culture. Les références, le cheminement de ses pensées, ses débats, etc, sont issues d'une femme très intelligente et cultivée bien que modeste. C'est ce qui fait tout le charme de ce personnage au caractère bien dessiné et au parcours époustoufflant. Pr encore mieux comprendre son autobiographie, je serai ravie d'en discuter avec qqun qui l'a lu et qui pourrait me donner certains éclaircissement ou où l'on pourrait aussi partager notre point de vue sur sa conception de l'existence.
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| Sujet: Re: Simone de Beauvoir | |
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