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Sujet: Re: Terrence Malick Dim 29 Mai 2011 - 12:03
Imaginons un monde où le ressenti, les goûts, et les avis seraient en tout point uniforme ... quelle tristesse ! L'art officiel imposé par les pays totalitaires n'a jamais pu juguler la résistance à préserver nos différences; différences qui font la richesse de l'espèce humaine ...
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terrence Malick Dim 29 Mai 2011 - 12:18
Queenie a écrit:
Marko a écrit:
[...]
Je n'essaie pas de convaincre Queenie ou les détracteurs du film (il n'y a évidemment pas une seule façon de percevoir un film) mais j'ai envie d'alimenter un peu le débat. C'est aussi l'intérêt d'un forum, non? Certains disent que ce film est un pensum new age prétentieux, pompier et boursoufflé, ennuyeux à périr. J'essaie d'argumenter sur le fait qu'on puisse peut-être le regarder autrement. Personne n'a besoin de détenir la vérité mais l'échange d'idées peut être intéressant. Surtout pour un film aussi hors du commun que The tree of life Que le film clive autant est le signe de sa vitalité et de sa singularité en tout cas.
C'était juste un peu gênant que tu dises un truc du genre : ceux qui n'aiment pas n'ont pas vraiment compris et devraient y retourner.
Tu as raison. Ça peut sembler arrogant comme certaines critiques qui se moquent du film ont pu me paraitre condescendantes aussi. C'est que je trouve injuste qu'on l'accuse de simplisme et de prétention alors que c'est film qui m'apparait profondément sincère, personnel, novateur dans la forme et la narration, riche sur le fond. Oeuvre imposante certes mais un acte de création si fort de la part d'un artiste qui n'a fait que 5 films en 40 ans tellement il cherche un idéal, une forme parfaite. J'ai du respect pour cet engagement total.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terrence Malick Lun 30 Mai 2011 - 0:41
Un article du Point qui suggère tout ce que le film peut avoir d'autobiographique:
Citation :
Lundi 16 mai, vers 21 h 30, il avait fait une apparition éclair dans la salle, à l'issue de la projection de The Tree of Life. Pour l'occasion, Thierry Frémaux, le délégué général, avait arrêté la caméra du festival. Il avait salué ses acteurs, Brad Pitt, Jessica Chastain, puis s'était éclipsé. Ce soir-là, les spectateurs, sidérés, avaient aperçu l'homme invisible, dernier mythe du cinéma, Salinger du septième art, aussi volatil que les oiseaux qu'il part observer sur ses tournages, quitte à les interrompre. De Malick il n'existe que de rares photos banalisées, dont la dernière date d'une dizaine d'années. Ce Texan d'origine libanaise, qui ne ressemble à aucun autre Texan - il habite Austin, ville très culturelle -, fuit comme la peste tout objectif. "Il n'a pas construit cette image pour se faire remarquer, ennuyer les gens, explique Thierry Frémaux. C'est un homme très affable, doux, timide, qui est ailleurs, avec la nature, loin du monde, de sa violence. Le résultat d'une vraie phobie." Le résultat aussi d'un père autoritaire dont il ne supportait pas qu'il prenne des photos de lui, selon Peter Biskind, historien du cinéma américain. Cette disparition traduit aussi le souci de s'effacer derrière une oeuvre placée sous le signe du perfectionnisme. D'où son refus d'accorder la moindre interview, par peur d'être imprécis, mal compris. Seul compte l'art. Le reste n'est que vanité. Son dernier entretien remonte à 1978 pour Les moissons du ciel (Grand Prix du jury).
C'est à cette époque, du reste, que The Tree of Life a pris racine. Malick en écrit une première version, "Q", à Paris, rue Jacob, où il rencontre sa future femme, la Française Michèle Morette, qui avait interdiction de pénétrer dans son bureau, où il dissimulait les livres qu'il lisait sous des couvertures opaques. Après Les moissons du ciel, la Paramount, fascinée, lui a ouvert un crédit illimité. Grave erreur. Malick envoie des équipes aux quatre coins du monde pour filmer des phénomènes naturels censés rendre compte de son sujet : l'origine du monde. Rien que ça ! Un thème qui ne peut que passionner cet ancien philosophe, traducteur de Heidegger, et dont la thèse portait sur le concept de monde chez Kierkegaard, Heidegger, Wittgenstein.
Confession
Mais, en 1980, il jette l'éponge, scotché au prologue de son film, des dizaines de pages de poésie, de philosophie. Il n'a pas encore noué le lien avec son histoire familiale, qu'il transpose, trente ans plus tard, dans The Tree of Life. En 1999, Peter Biskind en livrait quelques clés : le frère cadet de Malick, Chris, portait encore les cicatrices d'un accident de voiture où son épouse avait trouvé la mort, et son petit frère, Larry, guitariste émérite, s'était brisé les doigts de dépit, persuadé d'être un raté, avant de se suicider en 1968. Au-delà de sa grâce visuelle, sonore, époustouflante (voir Le Point, n° 2018), The Tree of Life est la confession secrète d'un survivant rongé par la culpabilité, qui s'interroge sur le sens du malheur venu frapper une famille. On aime ce film singulier ou on le quitte. Pour notre part, nous lui prédisions la palme d'or dans le numéro précédent.
"À 50 ans, Terry Malick, qui vénérait sa mère, se disputait encore avec son père d'origine libanaise qui exigeait de lui qu'il porte une cravate pour aller à l'église." Ce détail révélé par Biskind explique aussi ce bouleversant portrait d'un père vulnérable et intransigeant, que Brad Pitt incarne. En 1998, la star, comme DiCaprio, Johnny Depp et tant d'autres, avait mendié un rôle dans La ligne rouge. Frustré d'avoir été écarté, il aura attendu dix ans sa revanche, décidant de produire ce cinéaste ingérable avec qui Sean Penn, las de ne rien comprendre à ce qu'il jouait, s'est disputé sur le tournage de The Tree of Life : au final, son personnage n'apparaît plus que quelques minutes. Il y a quelques mois, en grand secret, Malick réalisait à Paris - au Luxembourg, rue Condé, - une partie de son prochain film : "Il n'y avait pas de script. Je ne sais pas ce qu'il tournait", résume son producteur délégué en France, Michel Ferry. En attendant, le voilà sacré roi de Cannes. Logique. En arabe, Malick signifie "le roi".
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terrence Malick Mar 31 Mai 2011 - 1:32
Je viens de revoir le film et je suis encore plus subjugué. C'est sublime et cette nouvelle vision m'a permis de mieux percevoir certains détails et d'entrer encore plus dans la transe parfaite du film. Je me disais que c'était quand même dommage que Queenie soit partie au moment où le gamin sent la colère monter en lui et se met à rejeter père, mère et frère, ce dieu dont on lui parle surtout... avant de regretter, de douter, de pardonner. Les scènes avec le petite frère sont bouleversantes. Il y a une montée en puissance qui opère comme une catharsis dans l'esprit de cet homme qui se souvient.
Finalement The Tree of Life parle à nouveau d'un paradis perdu. Celui de l'enfance et de l'unité familiale avant que la rivalité oedipienne (la violence humaine primordiale) avec un père en apparence injuste et rival, l'expérience de la mort d'un enfant de voisins, les brûlures accidentelles d'un autre, le sadisme d'un 3e... ne viennent lui faire entrevoir la possibilité du mal. Pourquoi être bon si ce dieu ne l'est pas ou n'existe pas, qu'il laisse faire n'importe quoi? (scène du DDT au même moment). Même le prêtre à l'église dans son sermon évoque un texte qui questionne la possible imposture de dieu.
Ce qui renvoie à cette même question chez la mère en deuil au début du film. Où étais-tu quand mon fils a été tué? Et pour toute réponse, Malick fait se dérouler la majestueuse et implaccable création du monde sur l'air de deuil du Lacrimosa de Zbigniew Preisner. Ce vide sidéral si beau et si indifférent en apparence et qui pourtant est une part de nous-mêmes. Tout n'est que silence face aux tourments des humains livrés à leur libre arbitre qui les pousse à la bonté ou au mal. Aucune réponse susceptible de venir nous rassurer ou nous guider. Ne reste qu'à accepter les lois de ce vaste non sens et faire de l'amour et du respect de la vie elle-même une prière.
La dernière séquence qui est tout autant mentale que le reste est une vision de ce petit garçon devenu Sean Penn perdu dans ces tours ultra modernes du XXIe siècle. Il rêve cet espace de réconciliation et d'apaisement où présent et passé, vivants et morts se frôlent, se réconfortent, où une mère peut enlacer son enfant mort avant d' accepter de l'offrir à l'espace mystérieux d'où il a émergé. Sean Penn cherche à être en paix avec son histoire et sa culpabilité. Il choisit une forme de foi que chacun peut investir comme il le souhaite. Ce n'est pas un mysticisme de pacotille mais un poème génial sur l'absurde et dérisoire beauté de l'existence.
eXPie a écrit:
C'est vraiment un curieux film : même ceux qui ont aimé plus que moi (mais c'est - je me répète - un film vraiment intéressant) trouvent qu'il y a des scènes pas très convaincantes. Le travail de coupage ou de charcutage de film doit être vraiment intéressant. Qu'est-ce qui est passé à la trappe ? Y avait-il des intrigues secondaires ? On sent confusément qu'il reste des petits bouts, ou des allusions, des creux, de scènes qui ont disparu. C'est très bizarre. Si ça se trouve, il expérimentera un autre montage, qui éclairera différemment le film, qui sait ?
Une seconde lecture permet de se rendre compte que tout est parfaitement à sa place. L'essentiel en tout cas. Je trouve cette construction fabuleuse de fluidité et de force. Il a retranché tout ce qui aurait été surperflu, trop explicatif, linéaire. On peut se projeter dans ce flot très dense d'émotions, de questionnements, qui sont forcément aussi les notres. Ce qu'il arrive à suggérer et sa direction d'acteurs tiennent du miracle. J'en avais des frissons tout le temps. Il a trouvé un moyen merveilleux de raconter une histoire de façon impressionniste. Voilà l'équivalent au cinéma de Virginia Woolf ou de Joyce.
Et pour terminer, pour répondre à ta question à propos de ces personnages "épileptiques" qui apparaitraient rapidement pendant que la mère cache les yeux de l'enfant... en fait on vient de voir juste avant le fils aîné à 1 ou 2 ans regarder avec jalousie son petit frère bébé et jeter de rage un objet. Sa mère s'inquiète de ce geste agressif et lui dit qu'il ne faut pas. L'instant d'après on voit 2 enfants se battrent sous un arbre et la mère cache les yeux du bébé pour ne pas l'exposer à cette nouvelle démonstration de violence comme elle le fera plus tard pour les protéger des emportements du père. Le fils aîné garde en mémoire cette douceur et cet appel à la non violence qui alimenteront ses débats de conscience.
Plus intriguant... Ce plan récurrent d'un grenier long et étroit qui donne sur une lucarne ouverte. On voit le grenier seul, puis avec un enfant qui s'avance vers la fenêtre, puis le même enfant (non identifiable) faisant du vélo pendant qu'une sorte de géant tente de tenir debout sous les poutres. Je n'ai pas compris l'allusion de cette séquence quasi onirique. On voit précédemment des images d'un clown un peu inquiétant qui semble se noyer dans la cage en verre d'un magicien. Autant de réminiscences presque subliminales du passage d'un cirque avec ses forains? Y avait-il intitialement plus de place pour ces segments? J'y vois plutôt l'intégration au processus de la mémoire d'artefacts fantasmés à partir du réel perçu à travers les yeux d'un enfant. L'ensemble du film captant d'autant mieux ces processus de la pensée dans toutes ses dimensions. On a jamais autant été dans l'univers mental d'un homme qui se replonge dans ses souvenirs d' enfance. Idem pour les images de la mère en lévitation ou dans un cercueil de verre. Réalité et imaginaire qui s'entrechoquent.
Dernière édition par Marko le Mer 1 Juin 2011 - 23:29, édité 2 fois
Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
Sujet: Re: Terrence Malick Mar 31 Mai 2011 - 22:53
J'ai aussi perçu ces plans comme des réminiscences, des motifs d'une mémoire enfouie qui se révèle peu à peu...dès lors que des émotions se libèrent et composent cette inoubliable évocation de l'enfance. En tout cas, ton message me donne envie de m'y replonger...sans doute la semaine prochaine.
eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
Sujet: Re: Terrence Malick Mar 31 Mai 2011 - 22:57
Marko a écrit:
Et pour terminer, pour répondre à ta question à propos de ces personnages "épileptiques" qui apparaitraient rapidement pendant que la mère cache les yeux de l'enfant... en fait on vient de voir juste avant le fils aîné à 1 ou 2 ans regarder avec jalousie son petit frère bébé et jeter de rage un objet. Sa mère s'inquiète de ce geste agressif et lui dit qu'il ne faut pas. L'instant d'après on voit 2 enfants se battrent sous un arbre et la mère cache les yeux du bébé pour ne pas l'exposer à cette nouvelle démonstration de violence comme elle le fera plus tard pour les protéger des emportements du père. Le fils aîné garde en mémoire cette douceur et cet appel à la non violence qui alimenteront ses débats de conscience.
Je te remercie, Marko ! Ce passage était allé relativement vite, je n'avais pas bien vu...
eXPie Abeille bibliophile
Messages : 15620 Inscription le : 22/11/2007 Localisation : Paris
Sujet: Re: Terrence Malick Mar 31 Mai 2011 - 23:00
Avadoro a écrit:
J'ai aussi perçu ces plans comme des réminiscences, des motifs d'une mémoire enfouie qui se révèle peu à peu...dès lors que des émotions se libèrent et composent cette inoubliable évocation de l'enfance. En tout cas, ton message me donne envie de m'y replonger...sans doute la semaine prochaine.
C'est peut-être ça, le "grenier long et étroit qui donne sur une lucarne ouverte" dont parle Marko : la mémoire de l'enfance. On sait bien que les souvenirs d'enfance finissent entassés dans des greniers. La sorte de géant, c'est l'enfant devenu adulte, qui cherche à revenir dans les conditions de l'enfance, mais il a grandi. Quelque chose comme ça.
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terrence Malick Mer 1 Juin 2011 - 0:07
Avadoro a écrit:
J'ai aussi perçu ces plans comme des réminiscences, des motifs d'une mémoire enfouie qui se révèle peu à peu...dès lors que des émotions se libèrent et composent cette inoubliable évocation de l'enfance.
eXPie a écrit:
C'est peut-être ça, le "grenier long et étroit qui donne sur une lucarne ouverte" dont parle Marko : la mémoire de l'enfance. On sait bien que les souvenirs d'enfance finissent entassés dans des greniers. La sorte de géant, c'est l'enfant devenu adulte, qui cherche à revenir dans les conditions de l'enfance, mais il a grandi. Quelque chose comme ça.
ça me va bien Expie! De la même façon que la mère en robe de mariée et le fils avant sa naissance sont représentés comme émergeant de profondeurs aquatiques (toujours ce fluide vital ou amniotique qui irrigue tout le film et qui nous baigne nous aussi les spectateurs). Quel kaléidoscope éblouissant! Jean-Marc Lalanne parle de pointillisme et c'est très juste.
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Terrence Malick Mer 1 Juin 2011 - 12:13
Le film est si riche que ne l'ayant vu qu'une seule fois, ma mémoire pourrait me faire défaut ... cependant il me semble que ce grenier apparaît une première fois vide, après que Sean Penn enfant tente de grimper l'escalier qui y mène, alors qu'il se remémore une scène vécue ... généralement, pour l'enfant le grenier symbolise un lieu mystérieux, celui de la découverte expérimentale amenant à la transgression des interdits, des règles, et des tabous ... Quant à la scène onirique avec l'homme, qui me semble être le prêtre assénant ses sermons à l'église, il m'est apparu qu'il symbolisait justement l'autorité rappelant ces interdits ... l'enfant tournant en rond sur son vélo pourrait donc signifier le refus de se voir imposer toute forme de religion, quelle soit celle édictée par son père (lois d'amour imposées par la violence) ou par l'église (lois d'amour imposées par le discours moralisateur et culpabilisant) ...
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terrence Malick Mer 1 Juin 2011 - 14:17
Le géant a bien une tenue de prédicateur dans mon souvenir... Ta version est très cohérente dans le projet du film. Rejet de la loi du père et du dogme religieux qui sont d'ailleurs liés puisque le père s'y réfère. J'aime beaucoup le passage où le fils aîné bascule, transgresse, défie sa mère, s'en prend à son frère. Avec cet effroi de comprendre cette force destructrice qui grandit en lui. La manière dont Malick capte tous ces instants donne un tel sentiment d'entrer par effraction dans l'intimité de cette famille. C'est fabuleux.
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Terrence Malick Mer 1 Juin 2011 - 14:37
Chaque scène a été longuement pensée, mais elle se rattache toujours au projet conducteur du film : rejeter tous les dogmes, dissocier la religion de la foi qui se vit dans l'intime, et s'ouvrir humblement à la beauté de l'univers ... quant à cette scène que tu décris, elle se rattache également au parcours initiatique de Jack, qui l'amène à prendre conscience des forces brutes qui l'habitent, et à s'élever au dessus de l'animalité, rémanescence de notre cerveau reptilien évoqué dans la scène des animaux préhistoriques ... Un scène me revient en mémoire ... te rappelles-tu cette image empreinte de sérénité du jeune frère, jouant de la guitare sur le seuil de la porte ?
Avadoro Zen littéraire
Messages : 3501 Inscription le : 03/01/2011 Age : 39 Localisation : Cergy
Sujet: Re: Terrence Malick Mer 1 Juin 2011 - 22:29
Constance a écrit:
Un scène me revient en mémoire ... te rappelles-tu cette image empreinte de sérénité du jeune frère, jouant de la guitare sur le seuil de la porte ?
Une image fugitive mais bouleversante, reliée dans mon souvenir à la très belle utilisation des Barricades mystérieuses de Couperin. Cette évocation est d'autant plus forte qu'elle semble se rattacher directement à la biographie de Malick (et son frère décédé Larry).
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terrence Malick Mer 1 Juin 2011 - 22:51
Avadoro a écrit:
Constance a écrit:
Un scène me revient en mémoire ... te rappelles-tu cette image empreinte de sérénité du jeune frère, jouant de la guitare sur le seuil de la porte ?
Une image fugitive mais bouleversante, reliée dans mon souvenir à la très belle utilisation des Barricades mystérieuses de Couperin. Cette évocation est d'autant plus forte qu'elle semble se rattacher directement à la biographie de Malick (et son frère décédé Larry).
Une des quelques très belles scènes de lien affectueux père/fils. Un second fils musicien dont la sensibilité le rapproche davantage de la mère mais qui touche le père par cette communication possible à travers la musique. Le même fils qui l'affrontera en lui demandant de se taire à table...
D'une manière générale je suis stupéfait de la manière dont il montre ces instants de complicité, d'attachement, de douleur partagée (les 2 frères, l'aîné et le plus jeune, pleurant dans les herbes à l'annonce du licenciement du père, la scène à travers la fenêtre...). C'est d'une justesse telle qu'on oublierait presque que c'est du cinéma. Chacun de ces plans est à pleurer. Existe-t-il plus beau film sur la famille?
Marko Faune frénéclectique
Messages : 17930 Inscription le : 23/08/2008 Age : 56 Localisation : Lille
Sujet: Re: Terrence Malick Jeu 2 Juin 2011 - 23:29
Je préfère de loin lire ici les avis de nos amis parfumés mais je voulais tirer mon chapeau à cet internaute de 20 ans qui a écrit une critique qui va droit à l'essentiel et qui me touche. Son pseudo est Anthony Saudrais...
Citation :
Le dernier film de Terrence Malick constitue la meilleure surprise cinématographique du début du siècle. On pourra certes lui reprocher, et par présomption, l'impossibilité de raconter ce qui n'est pas racontable de l'Homme. Mais n'est-ce pas une preuve d'humanité que d'essayer de comprendre ce que nous ne pouvons pas ? Le film est notre limite, et son abstraction la nôtre. L'erreur serait de prendre le long-métrage comme étant un message catholique, ce qui serait maladroit, car il embrasse plus que la religion : il est la recherche d'une harmonie cosmique et mystique entre l'Homme et l'infini qui l'entoure. C'est l'union des contraires, de l'Homme fini et de l'infini, confrontation directe entre l'essence et la matière. Tenter de raconter le Monde, tel que la prétend le réalisateur, n'est pas se confronter à Dieu ou à une chose qui nous dépasse, c'est arriver à prendre conscience que nous sommes dépassés. C'est une humilité à l'échelle humaine, et pas nécessairement religieuse, car modérée et universelle. A l'heure d'aujourd'hui, dans un univers qui tend à l'artifice et au paraître, au pouvoir et à l'argent, The Tree of Life est l'espoir d'un monde qui n'a jamais existé et qui n'existera jamais, mais dont le dernier souffle est de nous faire comprendre qu'il existe la vie. Ainsi, interpréter ce chef d'oeuvre est une gageure autant que ne l'est son sujet, son traitement et sa finalité. Méditer, de nos jours, semble inutile ; philosopher aussi. Terrence Malick pulvérise les contraintes de notre temps ; et nous le suivons avec espoir et désespoir, entre raison et imagination, dans cette quête du Temps Perdu. Une espérance pour l'être humain, un miracle pour l'Art.
animal Tête de Peluche
Messages : 31548 Inscription le : 12/05/2007 Age : 43 Localisation : Tours
Sujet: Re: Terrence Malick Sam 4 Juin 2011 - 19:26
zou....
question générique : Versailles ?
hum, je ne suis pas fan de Malick mais je dois reconnaitre que "c'est beau", les images, les moments, mouvements sont beaux. et quand ça risquerait d'être lourd voire que ça ressemble à des images inutiles il y a une musique sublime ! et le film se tient, c'est indéniable aussi et avec une grande fluidité malgré une construction très légèrement tarabiscotée. C'est impressionnant de maitrise formelle et dans ceux que j'ai vu (faudrait ptet revoir la ligne rouge un jour) c'est sans doute celui que je trouve le plus marquant et "mieux fait", le plus efficace. (ça doit pouvoir justifier une palme en plus du léger décalage et des quand même gros acteurs qui ont aussi mis des sous dedans ?).
Sean Penn s'en sort pas mal j'ai trouvé pour le peu qu'on le voit. Nettement mieux que Brad Pitt qui a un peu l'air d'être en phase de sous marlonisation...
C'est très beau et ça marche plutôt bien alors qu'on enchaine quand même, et avec l'air et la certitude de ne pas en rater un, une galaxie de clichés. Clichés de la création du big bang au caillou dans le chixtulub... ensuite c'est l'american way of life et le all american boy brad pitt avec la totale : bretelles, bi moteurs, lunettes... ou les intérieurs à faire baver Michael Mann de chez Sean Penn. C'est presque flippant et ça passe avec un naturel un peu inquiétant il faut le reconnaitre. Ces clichés peuvent si on se tire les cheveux qui reste esquisser un début de pensée sur les images qui constitueraient la mémoire et leur rapport éventuellement distant avec la réalité... mais on se ramasse aussi d'autres clichés bien appuyés (Malick il est très fluide mais il appuie assez lourdement) sur le bonhomme "méchant" et plus que l'amour de la mère, le regard du gamin sur la femme-mère. C'est tout doux mais très partial et très construit, bizarre. Je lui reconnais avec bonheur la simplicité du "message d'amour", casse gueule, pas unique non plus loin s'en faut. Par contre la vision très personnelle mystico-pensée pèse lourdement sur le spectateur. Ambiance américaine garantie. ça peut-être à nuancer... mais paradoxalement après le film je n'ai pas de massive envie d'y réfléchir, il est beau, un peu agaçant par moments mais l'envie d'y réfléchir ? je reste sceptique aussi quant à une possible sur-interprétation de ce genre de film. Après tout il est d'abord d'une évidence massive et l'image énigmatique en série ça ne fait pas tout (un grenier ou un clown ça ne fait pas le monde).
L'impression d'une pensée appliquée à des images. Une pensée qui ramasse de belles choses mais aussi des trucs qui me dépassent ou me semblent ... je ne sais pas. Le côté biographique est touchant, évidemment, mais n'est ce pas aussi gênant d'en ressentir une vision aussi synthétique, ou simplifiée ? C'est un peu binaire comme tambouille, visuellement aussi remarquez. Et le questionnement n'est ni neuf ni fini dans le cinéma ou ailleurs. C'est beau, ça passe... en tant que film il fait partie de ceux qui éclipsent bien leurs défauts je dirai. Il y a comme une intellectualisation déraisonnée du banal avec ce film (ou ce réalisateur).
Je pense qu'on est loin de Boonmee qui propose une atmosphère autrement plus concrète et moins simple.
Le speech du début avec l'opposition nature et grâce (c'est le plus gros des deux sujets du film celui là je crois avoir compris)... c'est un peu rustique aussi, bien que ça puisse être intéressant.
le nombre de pages de ce fil consacrées à ce film me trouble.