Chaîne de lecture - Commentaires

Chatperlipopette a écrit:

Coucou!
J'ai terminé depuis quelques temps déjà "Catch22" et ce roman foisonnant de menus détails sur le quotidien d'une base aérienne militaire , en pleine guerre, allant du joyeusement rigolard au plus sombre sordide, fut une révélation. Je l'ai dégusté avec joie et l'absurde qui de bout en bout tisse les actions des personnages aux fils de l'Histoire est une vraie jubilation. Du grand art et un caustique de grande volée. Merci Rivela

Chouette si ça ta plu.
Il y a un fil sur Heller ICI comme ça tu peux mettre ton commentaire et ça fera un message de plus

Léon Morin, prêtre.



Le sujet du roman est assez connu, Barny veuve d'un juif, survit tant bien que mal pendant l'Occupation, avec sa petite fille. Et puis elle rentre dans une église par provocation, rencontre ce prêtre, qui la fascinera.

Plein de choses dans ce livre, le personnage de Barny, très libre, caustique, avec les description du monde qui l'entoure, elle ne rate personne, voit les petits travers et les grands défauts. C'est drôle et un peu désespéré. Et on sent une très grande solitude aussi, la difficulté de s'engager dans quelque chose, de laisser de côté l'ironie et le recul, de faire confiance. Elle est du coup "la proie" idéal pour Léon Morin, qui remplit une sorte de vide, un besoin de donner du sens et de s'abandonner. Mais en même temps, c'est voué à l'échec, parce qu'il est prêtre, ce n'est pas une vraie relation, mais quelque chose de "professionnel" pour lui, même si explicitement il ne la pousse pas vers la religion, c'est quand même un peu ça son objectif, alors qu'évidemment elle attend autre chose de cette relation.

Le portrait de femme est vraiment très beau, une certaine façon de rendre l'époque très réussie aussi, grâce à l'écriture, tout sauf académique, vraiment très vivante, très authentique de l'auteur, on a vraiment l'impression que son héroïne parle ainsi. Je suis en revanche un peu restée sur ma faim avec Léon Morin, je ne saisi pas complètement le personnage et ses motivations, il y a son charisme, son intelligence, mais j'ai du mal à le comprendre vraiment, et du coup c'est un peu à sens unique. Mais peut être que j'en demande trop, voire l'impossible, parce que c'est vrai que l'histoire est vraiment raconté du point de vue de Barny, et elle aussi probablement ne comprend pas vraiment Léon.

En tous les cas un excellent moment de lecture, et j'ai envie maintenant de voir le film.

Merci à Rivela de m'avoir proposé ce livre pour la chaîne.

Orientale a écrit:

Aeriale m'a introduite dans un monde ou je me suis sentie emerveillee et tout a fait chez moi. J'adore cette force si humaine qui se degage du narrateur lors de tout le recit!

Orientale, je suis très heureuse de lire ceci, et en même temps j'étais sûre que tu te trouverais vite en pays connu avec Bauchau car comme tu le dis cet homme touche à l'universel, il est dur d'y rester insensible.

Je me souviens avoir eu quelques réticences face à l'histoire assez perverse entre Stephane et Shadow, mais il y avait là aussi une très belle démonstration de ce genre de rapports dominant/dominé et passé une première impression un peu dérangeante, l'image qu'il m'en reste est tout de même très brillante.
Mais la suite est encore plus belle, bouleversante même (prépare les kleenex!)

Sinon je me régale avec l'histoire de Ricardito, le bon garçon trop amoureux dans Tours et détours de la vilaine fille que m'a conseillé Laurence. C'est tout de même fou cette passion pour cette vilaine fille (je dirais plutôt une belle garce ) mais les rapports humains sont parfois si complexes! (voir plus haut aussi)

Arabella a écrit:

Léon Morin, prêtre.
Merci à Rivela de m'avoir proposé ce livre pour la chaîne.

De rien Arabella.
Moi j'ai un peu de retard vu que je ne l'ai pas encore reçu. Bon y a pas le feu non plus

Orientale, je pensais bien que ce livre te plairait et je ne suis pas déçue!
Merci pour ce commentaire, on sent que ce roman t'a marquée...

Comme tu le soulignes c'est surtout cette humilité et cette sensiblité qui retiennent le lecteur. Un livre où la mort cotoie sans cesse la vie, mais constamment traversé par la lumière. Il y a vraiment une grâce particulière qui nous étreint tout le long et qui nous laisse à vif.

Orientale a écrit:

La lecture du livre de Henry Bauchau "Le boulevard peripherique" etait pour moi une incroyable emotion. J'etais touchee a larmes en suivant ce recit de vieil homme - psychotherapeute et ecrivain - qui ne s'exprime qu'avec douceur et tendresse. Il ecrit avec une grande simplicite, il decrit ce qu'il voit et ressens. Et la sensibilite du recit atteint un paroxysme universel.

Complètement en accord avec toi Orientale et j'en suis très heureuse

Le Sanglier (Henri Bosco)

quatrième de couverture a écrit:

" Tout à coup, à deux ou trois mètres de moi, le fourré s'agita, une branche éclata, un choc brutal déchira le fourré et, du milieu des ronces, jaillit, avec deux formidables crocs d'ivoire, une tête énorme. Je ne vis que cela, la hure. Un peu de bave coulait le long des poils sur les babines noires. Les yeux étaient petits et sanglants. Ils me regardaient. Le souffle rude et chaud m'arrivait sur le visage. Il sentait l'herbe mâchée. Par derrière ce bloc brutal de crins et de chairs ramassées, le fourré broyé laissait voir comme un couloir creusé, au pied de la paroi, dans le roc. Le sanglier ne bougeait plus. J'étais là, et c'est tout ce que je pouvais être. La bête sortit du fourré. Alors je la vis vraiment. J'étais presque couché sur le dos, ma tête n'arrivant qu'à son poitrail. Elle me dominait et ses boutoirs, larges comme la main, se dressaient à un mètre de ma figure. Je serrai les mâchoires. " Réédité pour la première fois depuis sa publication en 1932, l'un des tout premiers romans d'Henri Bosco, troublant récit d'une terrible initiation au cœur du Luberon noir.

Un véritable "tourne page" à l'histoire teintée de mystère, et d'attente(s). Si on a malgré tout l'impression d'une histoire se tenant à un genre quelque peu fantastique, une très légère frustration sur le début qui se transforme, sans disparaitre tout à fait, car il y a comme un double puissant à cette histoire déjà impressionnante aux personnages à la parfaite frontière entre entièreté et nuance, icônes d'un monde et personnages à la fois. Le double est un rapport pas tout à fait ordonné ni rationnel à la terre et au pays, et c'est un superbe jeu du double qui se ramifie profondément dans le héros peintre armé d'une carabine souvenir de temps violents et difficiles. L'équilibre menacé des forces de la région (bien et mal... et doute), est aussi un équilibre entre esprit sain et animal, le sanglier étant l'essence tellurique efficace de la face sauvage. Rien de trop démontré dans ce jeu des équilibres, ce n'est pas nécessaire.

Excellente lecture, entrainante et envoutante dont la grandeur et la complète puissance ne se révèle que derrière ou plutôt en complément de son sujet premier.

La couverture du folio est atrocement moche mais la préface attise la curiosité sur le titre et le reste de l'œuvre sans pourrir la lecture.

merci Marko pour ce titre de la chaine de lecture

Un jour cette douleur te servira


"Le voyage de la vie" de Thomas Cole, La vieillesse

Et tout d'un coup je me suis rendu compte avec une espèce de vertige que je désirais être dans le dernier tableau. Je désirais être dans la barque qui flottait vers les ténèbres. Je désirais occuper la barque de La vieillesse. L'homme à bord de cette barque avait l'air terrifié et je ne comprenais pas à quoi ça rimait: pourquoi, sorti de ces redoutables rapides, se laisser porter par un fleuve qui ne menait qu'aux ténèbres, à la mort? Voilà que je désirais être dans la barque avec le vieillard, avec le danger derrière moi, avec l'ange près de moi, me guidant vers la mort. Je désirais mourir.

Ce roman de Peter Cameron est une lecture plaisir qui se dévore très rapidement (310 pages qui en valent presque moitié) dans un style direct, fuide, simple, presque oral, pas vraiment "littéraire" à l'exception de quelques digressions où finalement il évoque ses influences majeures que sont les romanciers satyriques Denton Welch et Anthony Trollope dont je me suis empressé de commander des ouvrages (il y a un fil de Kenavo sur Denton Welch).

Le ton est initialement très drôle, enlevé, gentiment caustique et on se régale à découvrir le regard aiguisé de ce jeune homme rapidement jugé "inadapté" par ceux qui l'approchent. Il s'étonne des travers des uns et des autres avec un mélange d'intelligence exacerbée et de naïveté presque enfantine ou même proche de l'autisme puisqu'une des pistes du roman nous emporte vers la possibilité non seulement d'une période dépressive chez cet adolescent mais d'une éventuelle entrée progressive dans la schizophrénie (mélange de discordance, de bizarrerie et de difficultés relationnelles majeures avec des attaques de panique et un repli quasi autistique qui va au-delà de l'anxiété sociale). J'ai d'ailleurs souvent pensé au roman Le bizarre incident du chien dans la nuit de Mark Haddon qui décrit le parcours d'un enfant autiste de son point de vue. Mais le style de Cameron est nettement plus élaboré. Peu importe de toutes façons de savoir s'il est "malade" ou non. Ce qui intéresse Peter Cameron c'est justement cette frontière, à l'adolescence, entre le normal et le pathologique, entre l'hyperlucidité sur l'absurdité des échanges sociaux et le handicap psychique authentique. C'est en tout cas un jeune homme qui a peur de l'avenir, de ce qu'on attend de lui, des autres et de lui-même, qui se cherche affectivement, découvrant presque malgré lui à travers le regard de ses parents sa possible homosexualité. Les passages sur ce thème sont d'ailleurs très drôles lorsqu'il est assailli de questions par ses parents.

Chaque personnage est très bien "croqué" et prend sa place même si à l'arrivée on a un peu le sentiment de n'avoir eu qu'une sorte de canevas et des ébauches de personnalités et de situations qui auraient peut-être pu être davantage développées. John, le galeriste passionné d'art ,qui cherche l'âme soeur avec un soupçon d'élitisme, est juste esquissé. Les échanges avec la psy sont intéressants et m'ont fait penser au film de Gus van Sant "Will Hunting" où Robin Williams avait fort à faire pour amadouer un Matt Damon surdoué. Mais elle reste un peu en plan. La soeur aussi alors que les parents ont leurs morceaux de bravoure.

Reste la merveilleuse grand-mère qui sera l'ange du tableau de Thomas Cole et qui non seulement ne le conduira pas vers la mort mais lui transmettra une certaine lumière par son ouverture d'esprit et son bon sens non revendiqué. Grand-mère dont il conservera soigneusement tous les souvenirs puisque comme il le souligne vers la fin: Je crois que je craignais, si je lui en parlais, si je verbalisais le souvenir, qu'il s'évanouisse, ou se décompose comme un objet fragile et ancien risque de se réduire en poussière si on l'exhume.

Je reviendrai à cet écrivain ainsi qu'à Welch et Troloppe. Merci Arabella pour ce choix.

Tours et détours de la vilaine fille.

J'ai été prise par ce récit plein de rebondissements et qui nous embarque à la suite de Lily et de sa victime (consentante) qu'est le narrateur. Une histoire rocambolesque mais superbement décrite qui fait que l'on adhère complètement malgré les invraisemblances et le caractère totalement imbuvable de cette vilaine fille à cette saga sentimentale. J'ai adoré me balader avec eux entre les quartiers chics de Lima et les cafés de Paris, retrouver nos amoureux terribles à Londres ou à Madrid, et j'ai marché à chaque fois avec autant de plaisir.

Comme la plupart des lecteurs j'ai fini par m'attacher à la mala nina bien que durant longtemps je me sois demandée comment un homme doué de raison pouvait endurer avec autant de constance tant de bassesses et d'injustices. Mais les histoires d'amour sont compréhensibles uniquement par ceux qui les vivent et on peut croire à tout si l'intrigue est bien menée. C'est indéniablement ce qu'a réussi Vargas Llosa dont l'écriture alerte et brillante ensorcèle le lecteur lambda sans rémission aucune.

Merci à Laurence grâce à qui j'ai pu enfin découvrir cet auteur, j'ai passé avec ce roman un excellent moment!

L'autre comme moir (Jose Saramago)

Sacrée découverte! Saramago est un auteur déroutant. La première chose qui frappe, c'est son style pas banal (un peu froid, je ne sais pas si le mot est bon). Il faut quand même faire un petit effort pour renter dans le roman. Mais une fois dedans, c'est du pur bonheur. Saramago a un ton distancié, ironique. Il n'y pas d'empathie avec ses personnages. ON a l'impression qu'il se moque gentiment d'eux. Mais de lui aussi. Il intervient sans arrêt dans la narration, expliquant pourquoi il raconte ceci, pourquoi il saute certains faits, etc, accentuant ainsi la distance entre le lecteur et son personnage central.

Et puis il y a l'histoire. Un homme d'une banalité affligeante découvre qu'il a un double parfait. Et cette idée lui est insupportable. Comme peut-il exister s'il n'est pas unique? Comment peut-il être lui s'il y en a un autre, semblable? A partir de là, sa vie qui jusque là était plutôt morne prend un tout autre sens. Là encore Sramago fait preuve d'originalité. Il nous raconte une "drôle" d'histoire dont je n'en dirai pas plus pour vos laisser le plaisir de la découverte.
J'ai du mal à parler de ce roman. Pas parce qu'il m'a touché mais parce que c'est un OLNI (Objet littéraire non identifie). Ca ne ressemble à rien de ce que j'ai lu jusqu'à présent. C'est surprenant et c'est bon.

Bon, je m'arrête là parce que je suis en train de pondre un des plus mauvais commentaires de tout le forum. En résumé, lisez-ce roman. Et maintenant, je rajouterai un dernier deux derniers mots : Merci Queenie.

Ehé !
C'est clair que c'est surprenant ce livre de Saramago.
Faut vraiment que j'en tente d'autres...

Chouettement contente si ça t'a plu (à vrai dire, j'avais pas vraiment de doute là-dessus)

Queenie a écrit:

Ehé !
C'est clair que c'est surprenant ce livre de Saramago.
Faut vraiment que j'en tente d'autres...

Chouettement contente si ça t'a plu (à vrai dire, j'avais pas vraiment de doute là-dessus)

Oui, il va falloir que j'en tente d'autres. Il a vraiment un truc ce type.

Le cauchemar d’Alexandra Marinina est un des romans dont la lecture m’a été suggérée par Orientale.

Alexandra Marinina est une auteur russe contemporaine qui écrit des romans policiers. Elle a été lieutenant-colonel dans la police judiciaire : elle connaît très bien le milieu et les méthodes de travail qu’elle décrit dans ces histoires.

Ce roman-ci est paru en 1996, donc juste quelques années après la chute du régime soviétique.
A cette époque, les anciens gradés de l’armée et du KGB sont à la tête d’organisations mafieuses qu’ils ont créées et qui contrôlent tous les rouages de la vie russe.
La Russie est en pleine crise économique : les salaires suffisent à peine à survivre, les listes d’attente pour les appartements d’Etat sont interminables…du coup, il est bien difficile aux fonctionnaires russes de résister à la corruption.

C’est sur cette toile de fond que le personnage principal de cette histoire, Anastatia Kamenskaia, 33 ans, enquêtrice principale à la brigade criminelle de Moscou, va conduire son enquête sur l’assassinat d’une hôtesse d’accueil atteinte de psychose aïgue.

La situation difficile des russes est bien décrite, l’intrigue bien construite…mais je n’ai pas vraiment accroché avec le personnage d’Anastatia et ce ne fut pour moi qu’une lecture sympathique, sans plus…. et qui ne m’a pas donné envie de découvrir les autres romans policiers d’Alexandra Marinina.

Désolée Orientale…. (je me sens un peu coupable…. )

Orientale a écrit:

Aie, aie, aie - je suis fort desolee, Charlie!

Te fais pas de bile Orientale, c'est pas grave du tout, j'ai quand même découvert un auteur que je ne connaissais
Et j'ai effectivement choisi cette proposition car le livre existait en poche
Vraiment, t'inquiète pas

Oui, cela est inévitable une petite déception de temps en temps, on ne peut pas tomber juste à chaque fois, c'est le risque.

J'espère que Charlie ne sera pas découragé par cette expérience.

Orientale a écrit:

Moi, Arabella, je suis fort attristee - d'abord pour Charlie et puis-pour moi-meme J'ai fait une enorme gaffe et j'espere en etre pardonee.

Orientale, il ne faut pas t'en faire autant, c'est le jeu tu sais, on peut tomber sur un livre qu'on n'apprécie pas trop et ce n'est pas si grave, l'intérêt, c'est la découverte et le partage, aller vers des auteurs qu'on n'aurait pas essayé autrement. Et tu n'as pas fait de gaffe, c'est un exercice difficile et il y a forcément une part de risque. Rassure toi et arrête de culpabiliser comme ça