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Parfum de livres… parfum d’ailleurs
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Messages : 204 Inscription le : 06/11/2009 Age : 74 Localisation : Drôme provençale
Sujet: printemps des poètes 2010, couleur femme Jeu 6 Mai 2010 - 16:04
La citadelle n’avait d’yeux que pour nos abordages et négligeait les grands oiseaux qui la cousaient au ciel
La plage aura toujours le dernier mot Sur le silence elle renouvelle ses châteaux
Tel un vieux mégalithe débusqué dans les ronces éternelles tu fronces les sourcils et te tiens coi .
Qui a jeté le feu aux orties ? Depuis, elles l’ont gardé au chaud pour le rendre en temps inutile
Presque une île, Marie –Ange Sebasti,Préface : Charles Juliet, Colonna édition, 2010, non paginé ( il s'agit d'une réédition, après une première édition du recueil par les éditions La Marge en 1997 )
Dernière édition par Emmanuelle Caminade le Ven 7 Mai 2010 - 10:07, édité 1 fois
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Ven 7 Mai 2010 - 8:57
Je vais dormir
Dents de fleurs, coiffe de rosée, mains d’herbe, toi ma douce nourrice, prépare les draps de terre et l’édredon sarclé de mousse. Je vais dormir, ma nourrice, berce-moi. Pose une lampe à mon chevet; une constellation, celle qui te plaît; elles sont toutes belles : baisse-la un peu. Laisse-moi seule : écoute se rompre les bourgeons ... un pied céleste te berce de tout là-haut et un oiseau esquisse quelques voltes pour que tu puisses oublier ... Merci. Ah, une dernière chose : s’il venait à me téléphoner dis-lui qu’il n’insiste pas et que je suis sortie ...
Alfonsina Storni
La poétesse Alfonsina Storni a écrit ce poème-testament trois jours avant de se suicider le 25 octobre 1938 en se noyant dans la mer à Mar del Plata en Argentine. (Il n'existe pas encore de traduction en français de son oeuvre poétique, mais je suis sur la brèche, et je surveille la chose ... )
Sa biographie :
Spoiler:
Alfonsina Storni Martignoni est une poètesse du postmodernisme argentin née le 29 mai 1892, Sala Capriasca en Suisse - et décédée le 25 octobre 1938, playa de La Perla, Mar del Plata en Argentine.
Elle est fille d'un industriel-brasseur argentin, née à Lugano et arrive avec ses parents à l'âge de quatre ans en Argentine. Alfonsina Storni devient comédienne et auteur A vingt-quatre ans elle publie un premier recueil Ecrits pour ne pas mourir... Souvent définie comme féministe au pays du machisme, elle est à la fois institutrice pour enfants attardés, égérie des bibliothèques populaires du Partido Socialista de Buenos Aires, et journaliste sous le pseudonyme de Tao Lao. Dès 1920 elle côtoie Borges, Pirandello, Marinetti..., rencontre Federico García Lorca... La poésie de la dame brune se voile d'une douce et terrible noirceur, jusqu'à se laisser presque toute envahir par deux images incessantes : la mer et la mort, la mort et la mer, leitmotiv d'une inondation lente et inexorable des flots noirs, de Frente al mar (1919) à Un cementerio que mira al mar (1920), ou encore Alta mar (1934), et jusqu'au rêve prémonitoire Moi au fond de la Mer...C'est ainsi d'ailleurs, atteinte d'un cancer en octobre 1938 qu' Alfonsina Storni s'installe pour la dernière fois dans un hôtel de Mar del Plata. Et se suicide comme dans ses poèmes. Ce tragique suicide inspira la chanson Alfonsina y el mar, de Ariel Ramírez et Félix Luna, qui est interprétée par de nombreux musiciens et chanteurs de langue espagnole dont notamment Mercedes Sosa, Nana Mouskouri et Miguel Bosé. (Wikipedia)
Dans cette chanson très célèbre en Argentine, Félix Luna a repris quelques vers de ce poème pour lui rendre hommage ... voici cette chanson interprétée par Mercedes Sosa :
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Sam 8 Mai 2010 - 10:07
Silence
N'y a-t-il pas au fond de tout L'oeil du cyclone immobile Quand les hommes brisent leur bile D'un mouvement violent et triste N'y a-t-il pas au fond de tout La mort posée douce fragile Des mots d'amour qui sont silence Un vide mûr qui se balance N'y a-t-il pas au fond de nous Ce fond de rien et cette chance D'être présent dans notre absence D'être muet d'être secret Et de planer quand tout avance.
Marie Volta
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Dim 9 Mai 2010 - 9:31
Chanson de cirque
Corrida de Muerte
Les hauts barons blasonnés d'or, Les duchesses de similor, Les viveuses toutes hagardes, Les crevés aux faces blafardes, Vont s'égayer. Ah ! oui, vraiment, Jacques Bonhomme est bon enfant. C'est du sang vermeil qu'ils vont voir. Jadis, comme un rouge abattoir, Paris ne fut pour eux qu'un drame Et ce souvenir les affame ; Ils en ont soif. Ah ! oui, vraiment, Jacques Bonhomme est bon enfant. Peut-être qu'ils visent plus haut : Après le cirque, l'échafaud ; La morgue corsera la fête. Aujourd'hui seulement la bête, Et demain l'homme. Ah ! oui, vraiment Jacques Bonhomme est bon enfant. Les repus ont le rouge aux yeux. Et cela fait songer les gueux, Les gueux expirants de misère. Tant mieux ! Aux fainéants la guerre ; Ils ne diront plus si longtemps : Jacques Bonhomme est bon enfant.
Louise Michel
(Jacques Bonhomme était un sobriquet donné aux ouvriers et aux gens du peuple par les classes aisées)
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Lun 10 Mai 2010 - 10:04
Jamais plus Tu ne marcheras dans les chemins de la nature Jamais plus tu ne pourras sentir Invulnérable, réelle et dense - Pour toujours perdu Ce que plus que tout tu as cherché La plénitude de chaque présence. Et ce sera toujours le même rêve, la même absence ...
Sophia Mello Breyner Andresen
(Anthologie de la poésie portugaise contemporaine (1935-2000))
Toile "Chemin boiseux", d'Eugène Mahaux
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Mar 11 Mai 2010 - 10:16
Élégie du matin
Au début, j'avais promis de me taire Mais plus tard, au matin, Je vous ai vus sortir avec des sacs de cendre devant les portes Et la répandre comme on sème le blé ; N'y tenant plus, j'ai crié : Que faites-vous ? Que faites-vous ? C'est pour vous que j'ai neigé toute la nuit sur la ville, C'est pour vous que j'ai blanchi chaque chose toute la nuit - ô si Vous pouviez comprendre comme il est difficile de neiger ! Hier soir, à peine étiez-vous couchés, que j'ai bondi dans l'espace Il y faisait sombre et froid. Il me fallait Voler jusqu'au point unique où Le vide fait tournoyer les soleils et les éteint, Tandis que je devais palpiter encore un instant dans ce coin, Afin de revenir, neigeant parmi vous. Le moindre flocon, je l'ai surveillé, pesé, éprouvé, Pétri, fait briller du regard, Et maintenant, je tombe de sommeil et de fatigue et j'ai la fièvre. Je vous regarde répandre la poussière du feu mort Sur mon blanc travail et, souriant, je vous annonce : Des neiges bien plus grandes viendront après moi Et il neigera sur vous tout le blanc du monde. Essayez dès à présent de comprendre cette loi, Des neiges gigantesques viendront après nous, Et vous n'aurez pas assez de cendre. Et même les tout petits enfants apprendront à neiger. Et le blanc recouvrira vos piètres tentatives à le nier. Et la terre entrera dans le tourbillon des étoiles Comme un astre brûlant de neige.
Ana Blandiana
Illustration piquée sur un site
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Mer 12 Mai 2010 - 8:25
Le son du soi
Je vous parle tout bas Pour que ce soit clair Pour que le son s’ajuste Au timbre de ma voix Je marche dans un temps Qui flambe de lumière Des rancunes crissent Dans le fin fond sonore
Le scintillement de la peur N’est qu’une répétition violente Du même révoltant mystère J’écoute battre votre sang Je vous parle tout bas D’un chagrin ineffable Qui me coupe le souffle D’une colère si profonde Qu’elle submerge ma conscience
Je vous parle à l’oreille Pour que ce soit juste Pour que le son s’accorde Au timbre de ma voix J’avance dans l’or ruisselant Du cœur de l’humanité Je vous parle tout bas Pour que ce soit clair
Je voyage dans un grand vaisseau De résonances Je ne parle qu’à vous Inconnus isolés du silence Je ne parle qu’à vous Dans le cercle des flammes Pour que nos voix s’ajustent Au timbre de ce son Qui est le son du Soi.
Yolande Villemaire
Toile "Le château en Espagne", de Carel Willink
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Jeu 13 Mai 2010 - 8:34
Je te souris. Qu'est-ce qu'un sourire? Une lumière envoyée à une étoile par une étoile. Une odeur qui lie les herbes en prairie bourdonnante. Une douce couleur la couleur verte de mes yeux s'emmêle dans tes doigts. Tu tiens dans ta main le corps tout chuchotant de la prairie. Le contour de l'herbe étroit et âpre raconte mes yeux qui regardent à l'infini. Tu me souris.
Halina Pswiatowska
Toile "La Belle Dame Sans Merci", de John William Waterhouse
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Sam 15 Mai 2010 - 10:07
Être
Aller jusqu’au bout de sa pesanteur Dans le puits de la nuit N’avoir jamais été un enfant ne plus sentir l’arrêt de l’île Sous son pied Se convaincre un bonne fois De son ombre À l’opposé du soleil Chercher la sincérité De l’autre côté de la goutte d’eau Là où l’on ne peut passer le doigt Trouver une étoile Sans distance Au bout de l’index Avoir envie de jouer avec le monde De nouveau
Cécile Cloutier
Toile "Un coin d'appartement", de Claude Monet
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Lun 17 Mai 2010 - 13:52
Merci à la vie.
Merci à la vie qui m'a tant donné. Elle m'a donné deux yeux et quand je les ouvre Je distingue parfaitement le noir du blanc Et là-haut dans le ciel, un fond étoilé Et parmi les multitudes, l'homme que j'aime. Merci à la vie qui m'a tant donné. Elle m'a donné d'entendre, oreilles grandes ouvertes Enregistrer nuit et jour grillons et canaris, Marteaux, turbines, aboiements, orages, Et la voix si tendre de mon bien-aimé. Merci à la vie qui m'a tant donné. Elle m'a donné la voix et des lettres Avec lesquelles je pense les mots, et je dis Mère, ami, frère, lumière qui éclaire Le chemin de l'âme que j'aime. Merci à la vie qui m'a tant donné. Elle m'a donné de marcher de mes pieds fatigués Et j'ai ainsi parcouru villes et marécages, Plages et déserts, montagnes et plaines Jusqu'à ta maison, ta rue, ta cour. Merci à la vie qui m'a tant donné. Elle m'a donné un coeur qui devient débordant Quand je vois le fruit du cerveau humain ; Quand je vois la distance qu'il y a entre le bien et le mal Quand je vois le fond de tes yeux clairs. Merci à la vie qui m'a tant donné. Elle m'a donné le rire, elle m'a donné les pleurs. Ainsi, je distingue le bonheur du désespoir Ces deux éléments qui forment mon chant, Et votre chant qui est le même chant, Et le chant de tous, qui est encore mon chant.
Violeta Parra
Constance Zen littéraire
Messages : 4066 Inscription le : 27/04/2010
Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme Lun 31 Mai 2010 - 17:44
Symphonie en gris
A Rodolphe Salis
Plus d’ardentes lueurs sur le ciel alourdi, Qui semble tristement rêver. Les arbres, sans mouvement, Mettent dans le loin une dentelle grise. - Sur le ciel qui semble tristement rêver, Plus d’ardentes lueurs.
Dans l’air gris flottent les apaisements, Les résignations et les inquiétudes. Du sol consterné monte une rumeur étrange, sur-humaine. Cabalistique langage entendu seulement Des âmes attentives. Les apaisements, les résignations, et les inquiétudes Flottent dans l’air gris.
Les silhouettes vagues ont le geste de la folie.
Les maisons sont assises disgracieusement - Comme de vieilles femmes - Les silhouettes vagues ont le geste de la folie. C’est l’heure cruelle et stupéfiante, Où la chauve-souris déploie ses ailes grises, Et s’en va rôdant comme un malfaiteur.
Les silhouettes vagues ont le geste de la folie.
Près de l’étang endormi Le grillon fredonne d’exquises romances. Et doucement ressuscitent dans l’air gris Les choses enfuies. Près de l’étang endormi Le grillon fredonne d’exquises romances. Sous le ciel qui semble tristement rêver.
(Mirages in Rythmes pittoresques)
Toile "Le lac de Côme", de Corot
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Sujet: Re: Printemps des poètes 2010: couleur femme