Béatrix Beck [Suisse]

A propos du style.

Citation :

- Tes transitions Noemi ! râle Mlle Minnier. Il n'y en a pas. Tu accumules les coq-à-l'âne.
- C'est mal les coq-à-l'âne ?
- Biensûr que oui, voyons, il n'y a pas de lien dans ton texte.
- C'est dur de tenir un cahier comme ça, vous savez. Je n'ai pas beaucoup de temps. J'ai sommeil le soir. Et puis pourquoi il y aurait des liens ?
- C'est fouillis, ce que tu écris.
- La vie c'ets fouillis.
- La vie n'est pas une excuse.

BB in the "décharge"

Une mort irrégulière

quatrième de couverture a écrit:

Barny, jeune intellectuelle, a épousé Chaïm, apatride, juif et militant communiste. Elle en a une petite fille, France. Nous sommes en 1940. Chaïm est mobilisé dans l'armée française. Barny et sa fille vivent très pauvrement dans les Alpes. Chaïm vient en permission. Il se sent menacé, car il a découvert qu'il figure sur une " liste noire ". Il retourne à l'armée, et, bientôt, Barny apprend sa mort. Crime ou accident ? Barny saura-t-elle jamais la vérité ? Tout est dit en quelques mots, comme une confidence faite les dents serrées, et cela suffit pour que nous fassions nôtres les joies et les malheurs de Barny.

c'est donc le très court "épisode" qui précède Léon Morin et qui suit Barny. très court et encore plus passant du coq à l'âne, quelque peu dérangé, une impossibilité de s'arrêter, arranger, savoir...des idées mais pas de montage avec. Les observations et traits de caractères de Barny sont bien là mais on touche encore et peut-être de façon plus sèche un des réels pourquoi de cette écriture l'épouvante qui y vit aussi très présente. D'autant que c'est aussi le tableau d'une vie pas simple dans cette période troublée... (entre les gens sympas et l'administration... ).

Pas de faux semblants dans la présentation des sentiments entre les écritures possibles du passé (et ça ne se limite pas à la mort de Vim et à ses circonstances), l'insoluble est là et la vie avec... plus traumatisant qu'il n'y parait (ça peut se dire ?), on peut se retrouver à envisager ce qu'il peut se tramer, se ressentir, s'effondrer derrière le barrage des mots. ça a du sens avec l'accumulation de doutes plombants et de... c'est assez bouleversant, et ce n'est pas possible d'accumuler les autres lectures, de mélanger...

Je m’y colle enfin. Impression en vrac, vous avec déjà chroniqués certains livres, mieux que moi, et il fait tellement chaud, j’ai le cerveau tellement liquide, que je ne me sens pas de relever le défi. Mes Beck sont partis, je ne peux même pas les feuilleter pour m’inspirer.

Léon Morin, Prêtre :
Une l’histoire d’un « Je t’aime moi non plus», entre Barny et Dieu, par le biais de son serviteur, sexy malgré lui.. Une sorte de remake de « l’enfant prodigue », le dénouement moralisateur en moins. Des dialogues à apprendre par cœur.

La décharge :
Les points forts résident dans l’alternance des styles et des points de vue, qui nous rappelle qu’on est toujours le con de quelqu’un d’autre (de son instit’, de son fiancé...) mais que cela n’empêche pas les sentiments (masochisme, quand tu nous tiens) . En filigrane, un roman sur l’ambition, et l’ascension sociale (sisi).

Noli : La selection Tétu de la semaine.
Où les attirances passagères mais passionnées de Barny pour les femmes, évoquées de ci de là (et justifiées par Léon Morin, Prêtre, comme la conséquence de la mobilisation des hommes) , deviennent le sujet principal. Un coup de foudre interprété trop tard, une relation a sens unique, basée sur la manipulation (comment résister au plaisir narcissique de se savoir aimé, tout en sachant qu’il ne se passera rien…), sur les histoires d’amours tuées dans l’œuf, qui n’engendrent que de la frustration.
La jalousie puis l’état dépressif y sont très bien dépeints.

(à venir : l'enfant chat, josée dite nancy).

L'enfant chat : Le BB que je vais m'empresser de faire lire à ma mémé.

J'ai lu L'enfant chat moi aussi. Un petit délice, c'est drôle et charmant, grâce en grande partie à l'écriture de Béatrix Beck, fluide et imagée. Soizic a une sacrée personnalité, plus affirmée que celle de sa maîtresse, même si elle reste un chat avec des envies de chat (croquer les oiseaux). Un joli moment de lecture.

Encore un petit délice de la dame , je vais utiliser une maxime pour lui faire honneur car elle en use et en abuse dans ses livres , surtout celles du terroir ou de nos grands-parents si on a la chance que ceux-ci vivaient à la campagne (quelle phrase mal tournée mon Dieu):
Si Béatrix Beck n'existait pas , il faudrait l'inventer

Donc on a ici une famille de la bonne bourgeoisie , les Godron-Mèchevin (rien que ce nom .....) , entre meubles Henri II , chambre renaissance où le père Hubert assène à sa fille Dorothée (appelée également Do ou Dottie) et à son épouse Elyane , entre 2 tartines de pain complet à la confiture d'oranges amères:
"Les valeurs valent mieux que la valeur"

D'emblée le ton est donné , mais attention ce qui aurait pu être "cliché" va vite faire place à une historiette loufoque , semi-fantastique , drôlatique comme souvent chez BB.

Il se trouve que la famille (et dieu sait que le mot prend ici toute son importance , on a des principes , des valeurs , des relations ....) est "visitée" par une créature aérienne androgyne parée d'une grâce sans pareil (d'ailleurs elle s'appelle Grâce) qui apparaît et disparaît au gré de ses envies .
Autant dire qu'elle va affoler, enchanter, déstabiliser tout ce petit monde et provoquer des situations oscillant entre le tragique et le comique.

C'est un thème assez courant , je me rappelle le film "Théorème " de Pasolini où une créature débarquait au sein d'une famille , bousculant les êtres , femme , mari et enfant .

Donc une sorte de conte , toujours avec cette part de "terre à terre" illustrée par les formules (de Flavienne la domestique), le vocabulaire si pétillant et les réparties pleines d'esprit.

Je continue mon bonhomme de chemin , BB n'a pas fini avec moi .

Maryvonne a écrit:

Noli : La selection Tétu de la semaine.
Où les attirances passagères mais passionnées de Barny pour les femmes, évoquées de ci de là (et justifiées par Léon Morin, Prêtre, comme la conséquence de la mobilisation des hommes) , deviennent le sujet principal. Un coup de foudre interprété trop tard, une relation a sens unique, basée sur la manipulation (comment résister au plaisir narcissique de se savoir aimé, tout en sachant qu’il ne se passera rien…), sur les histoires d’amours tuées dans l’œuf, qui n’engendrent que de la frustration.
La jalousie puis l’état dépressif y sont très bien dépeints.

Oui , BB évoque dans tous ces livres des figures féminines dont l'héroïne s'amourache plus ou moins , et elle n'a pas peur , car à chaque fois ou presque , c'est amer , voire cruel ce qui lui arrive et là encore plus .
Mais ne l'a-t-elle pas cherché ici avec cette passion non assouvie pour Noli ?
Certes Noli ne l'aime pas comme elle le souhaiterait mais qu'en est-il de ses vrais désirs à elle ?

Je voyais aussi que Camille ne m'aimait pas , moi qui lui avait apparemment tant plu l'été précédent.Mais ça n'avait guère d'importance .Peut-être même le fait que mes sentiments auraient été payés(quel mot !)de retour, m'eût-il gênée , encombrée.

Et pourtant elle va passer par tous les affres : jalousie , rancoeur , amertume , et finalement dépression.

Mais que serait devenu cet amour s'il n'était pas resté à l'état latent ?

Franchement on peut avoir des doutes , tout est confus dans l'esprit de l'héroïne , sauf sa vénération pour un être inaccessible.

darkanny j'aime beaucoup la couverture, c'est une reproduction de tableau ?

Celle de "Grâce" ?

oui bien sûr , mais là mon livre est dans un carton (because déménagement) , fermé , scotché , croûlant sous d'autres , je ne peux même pas te dire de quel tableau il s'agit , désolée !

Pour faire plaisir à Darkiki :

Citation :

Dans les couloirs , les étudiants discutaient de Bach, de Beck, de la balkanisation et de guerre bacteriologique.
p13 in "la passerelle" de Lorrie Moore

(ok, on n'a pas le prenom)

La phrase d'avant, c'est ma copine Sylvia Path qu'elle cite.

Héhé , on est en terrain connu
et elle va encore citer Sylvia Path , plus loin

Léon Morin, prêtre

Découverte de Béatrix Beck avec ce livre et bon, je n’ai pas été aussi emballée que vous autres même si j’ai bien aimé. Mais en ce moment, tout me paraît un peu fade, donc ça vient probablement de moi, je ne dois pas être dans le bon état d’esprit

Mais le sujet m’a plu, les questionnements de Barny dans lesquels je me suis souvent retrouvée et son approche très terre à terre de la religion, de la vie en général m’a fait sourire. Avec en face, ce prêtre hors du commun que rien n’ébranle, qui réussit sans en avoir l’air à mener Barny l’agnostique à la conversion, un prêtre charmeur, taquin, parfois sévère, qui ne juge pas et se contente de guider très intelligemment, un personnage vraiment savoureux.

J’ai aimé la fantaisie de son style, les dialogues vifs, à l’humour grave, son écriture un peu brusque, un ton familier et direct mais empreint d’une certaine poésie, et une véritable tendresse pour ces gens, un peu perdus au milieu de ce fatras de la guerre et de l’occupation. Un récit très vivant, qui me semble être une bonne photographie de ce que pouvait être la vie à cette époque, les relations avec l’église, je me suis sentie en terrain connu, c’était encore un peu comme ça lorsque j’étais enfant (dans les années 60…).

Je ne pense pas devenir une fan absolue de Béatrix Beck et enchaîner ses livres mais je me plongerais bien quand même dans L’enfant chat qui m’intrigue un peu.

Une photo à la eXPie, Barny a vu la mer :

J'ai hâte de voir la suite :
- Barny aux cabinets
- A poil Barny
- Barny et la bouillabaisse

Ne me tente pas !